WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Comment le management peut-il s'adapter au télétravail ?

( Télécharger le fichier original )
par Marie Desbonnet
ESC Clermont - Master Management 2014
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

PARTIE 1. LE TELETRAVAIL, DE SA

MISE EN PLACE A SON

MANAGEMENT

La littérature a analysé le télétravail, de la mise en place à la manière de manager et d'évaluer des télétravailleurs. Si beaucoup de salariés interrogés souhaiteraient télétravailler et que ceux qui le pratiquent déjà y voient majoritairement un impact positif, on remarque que les principales barrières à ce mode de travail sont culturelles et managériales.

En France, un frein culturel incite les dirigeants à croire qu'un salarié qui n'est pas physiquement présent dans l'entreprise ne s'y investit pas autant. En effet, les principes du travail à distance étant basés sur la flexibilité et la confiance, comment faire confiance à ses collaborateurs en télétravail quand les discussions informelles font partie intégrante de la journée de travail en France et quand on sait que les managers vous évaluent plus en fonction du nombre d'heures passées dans l'entreprise qu'en fonction de vos résultats réels ?

1.1 MISE EN PLACE DU TELETRAVAIL, DES ETAPES A RESPECTER

La mise en place du télétravail ne peut s'effectuer que si les conditions matérielles et humaines le permettent. A priori, ne peuvent être éligibles au télétravail que les salariés dont l'activité en télétravail ne gêne pas le fonctionnement de leur équipe de rattachement et ne nécessite pas un soutien managérial rapproché.

En effet, pour pouvoir effectuer son activité à distance, il faut exercer une fonction avec un rendement concret, mesurable et savoir travailler de manière proactive. Selon Philippe Planterose, auteur du livre « Télétravail, travailler en vivant mieux » (2014), l'activité du futur télétravailleur doit pouvoir s'effectuer grâce à des outils informatiques et téléphoniques. Le télétravail requiert donc un bon usage des outils de bureautique, internet, et logiciels spécifiques au métier mais également l'expérience du métier.

1.1.1 La sélection

Que l'on souhaite recruter un salarié en télétravail ou signer un accord de télétravail avec un salarié déjà présent dans l'entreprise, la sélection est très importante. Le futur télétravailleur doit faire preuve d'une grande autonomie, être organisé, et avoir de très bonnes capacités de

12

communication. L'autonomie du salarié est la condition la plus importante à prendre en compte dans le recrutement. Dans une étude de l'Anact « le télétravail en question » (2002), Denis Berard remarque que souvent, l'autonomie résulte de deux facteurs : la qualification du salarié (expérience du métier, diplômes élevés...) et sa personnalité (il doit posséder les caractéristiques personnelles évoquées plus haut).

1.1.2 La formation

Une fois la sélection effectuée, comme le font remarquer Taskin et Tremblay (2010), une grande importance doit être donnée à la formation qui est un très bon instrument de socialisation dans une organisation. Elle doit avoir lieu au départ et tout au long de l'activité et va notamment viser à éviter l'isolement du salarié. On peut aussi mettre en place des team-building dont l'objectif est de renforcer la cohésion d'équipe à travers des activités de jeux, de formations expérientielles, d'activités sportives, culturelles, artistiques ou créatives.

De plus, Planterose (2014) montre que même si ils ne pratiquent pas eux-mêmes le télétravail, il est important de former les managers : les former à connaitre le télétravail, à savoir manager des futurs télétravailleurs et surtout, à savoir manager sur objectif et en mode projet : les systèmes de référence utilisés dans le management présentiel, nous le verrons dans la deuxième sous-partie, doivent laisser place au management par résultat ou sur objectif en mode projet.

Selon lui, il faut également former les salariés à savoir travailler à distance : une formation visant à donner aux futurs télétravailleurs et à ceux qui le sont déjà les préconisations afin de ne pas commettre d'erreur. En effet, la mise en place de cette nouvelle organisation doit être gérée comme celle des autres changements.

1.1.3 Les différentes phases de la mise en place du télétravail

Même si le télétravail ne peut être mis en place de la même façon dans toutes les entreprises, M. Walrave (comment introduire le télétravail, 2010) s'appuyant sur une étude de 14 organisations (publiques et privées) qui ont participé à une formation et testé la mise en place du télétravail en Belgique, relève plusieurs phases communes à toutes les organisations :

La première phase est la phase de réflexion et concertation, où l'on va constituer une équipe de projet, discuter des avantages et des inconvénients, étudier les quatre facteurs clés de succès du télétravail. Ces facteurs clés de succès, selon Walrave, sont :

13

- Les caractéristiques des fonctions ou des postes de travail.

- Les caractéristiques personnelles des télétravailleurs.

- Les caractéristiques des organisations.

- Les caractéristiques des familles des télétravailleurs : le soutien familial est lié positivement à la satisfaction de l'employé en ce qui concerne son expérience de travail à domicile3. D'autres études ont montré que les télétravailleurs à domicile étaient souvent interrompus par les membres de leur famille4.

La seconde phase est la phase de définition des objectifs : il est question de clarifier les objectifs du projet pilote, de nominer un responsable de l'équipe de projet, d'établir une charte ou une politique sur le télétravail : droits, devoirs et modalités d'accessibilité du télétravailleur pendant certaines heures, et de définir les rôles et responsabilités des services concernés.

La troisième phase consiste à préparer le projet pilote : une enquête ou sondage sera mené auprès des télétravailleurs et communiqué auprès du personnel.

La quatrième phase est une phase de lancement du projet pilote : il faudra offrir une assistance en ligne ou téléphonique aux télétravailleurs et à leurs superviseurs et mener des initiatives visant à prévenir l'isolement social des télétravailleurs.

Et enfin, dans la cinquième phase, il s'agit d'évaluer le projet : pendant cette période, l'entreprise va recueillir les points positifs et négatifs de la mise en place du télétravail et apporter les corrections éventuelles.

De manière générale, le télétravail apparaît, pour la plupart des télétravailleurs, comme étant

une source d'améliorations dans les domaines suivants :

- Vie personnelle

- Gestion du temps

- Stress

- Productivité

3 Haines et al., 2002

4 Igbaria et Guimaraes, 1999

14

De la même manière, les facteurs sur lesquels le télétravail à des effets négatifs sur les

conditions de travail sont :

- L'augmentation de leur temps de travail

- Augmentation des coûts personnels liés à l'activité

- Augmentation de la charge de travail

Les différentes phases citées précédemment doivent, selon Walrave (2010), être le point de départ de la mise en place du télétravail dans toute entreprise.

Planterose (2014) aussi parle de phase expérimentale. La quasi-totalité des projets portant sur le télétravail au sein des organisations doit être déployée graduellement. Cette phase expérimentale vise à appréhender les différentes facettes du télétravail et de son management. Dans un premier temps, il est nécessaire de commencer par un ou deux jours de télétravail pour éviter un isolement trop important du télétravailleur et, pour le management, pouvoir comparer la productivité sur les jours en télétravail et les jours en entreprise. De plus, cette phase d'expérimentation ne doit pas concerner tous les salariés pour éviter de trop compliquer l'organisation du projet.

De plus, notons que selon une étude de l'Obergo (2012), afin de maintenir le lien social et pour que les effets positifs se fassent ressentir, il est nécessaire que le télétravail soit réalisé à temps partiel et ne pas dépasser trois jours par semaine. En effet, selon cette étude, l'idéal pour un bon équilibre entre vie professionnelle et vie familiale se situe entre deux et trois jours par semaine hors du bureau. De nombreux employeurs se félicitent des résultats de la mise en place du télétravail constatant que leurs collaborateurs sont moins stressés, travaillent au moins autant (souvent plus) qu'au bureau et que le taux d'absentéisme a baissé. Comme le montre le tableau ci-dessous, après trois jours de télétravail par semaine, le pourcentage de télétravailleurs estimant que le travail à distance n'a aucun effet négatif sur leurs relations avec leurs collègues et managers et sur leur qualité de vie, baisse :

15

Tableau n°1 : Evolution des effets négatifs du télétravail selon le nombre de jours

% de télétravailleurs estimant que le télétravail n'a aucun effet négatif direct sur leurs
relations avec leurs collègues (1), leurs managers (2) et leur qualité de vie (3), en fonction
du nombre de jours affectés au travail à distance

 

(1)

(2)

(3)

5 jours

66

71

76

4 jours

76

78

92

3 jours

85

87

93

2 jours

86

88

96

1 jour

86

86

89

Source : Yves Lasfargue et Sylvie Fauconnier, enquête Obergo 2011/20125

Selon l'analyse de Denis Berard (2002), il est également important d'impliquer les employés qui ont des collègues télétravailleurs dans ce processus afin qu'ils comprennent bien ce que cela signifie et ne croient pas, par exemple, que leurs collègues sont tranquillement chez eux à regarder la télé ou au contraire qu'ils peuvent être joignables à toute heure. Ce sujet revient effectivement souvent lorsqu'on discute du télétravail avec une personne qui ne le pratique pas. En effet, la plupart des télétravailleurs ont déjà entendu des remarques du type : « Ah, tu es en télétravail, tu peux regarder la télé toute la journée ! » ou « Mais toi ce n'est pas pareil tu es en télétravail, moi je me lève demain ! ». Pour éviter ce regard péjoratif de la part des collègues qui ne pratiquent pas le télétravail, l'entreprise doit leur communiquer les définitions, enjeux et règles de ce mode d'organisation. Il en va de même pour la famille du salarié. Comme nous l'avons vu plus haut, les caractéristiques des familles des salariés à distance sont un des facteurs clés de succès de la mise en place du télétravail. Cependant, c'est au salarié qui travaille à distance de communiquer au sein de son foyer et de faire comprendre à ses proches qu'il ne doit pas être dérangé lorsqu'il travaille.

1.1.4 La protection des données

D'un point de vue technique, Planterose (2014) nous fait remarquer qu'il est nécessaire d'avoir un système d'information opérationnel, protégé contre la cybercriminalité.

L'employeur doit valider toute la partie concernant la sécurité et la continuité du fonctionnement hors des locaux de l'entreprise. Il doit également équiper les télétravailleurs

5 Lasfargue, Fauconnier, Les conditions de réussite du télétravail, Résultats de l'enquête OBERGO 2011/2012 sur les impacts du télétravail réel et les évolutions des conditions de vie des salarié(e)s, 9 mars 2012

16

en leur fournissant les outils nécessaires pour effectuer leurs missions. De ce fait, à minima, l'employeur est tenu de fournir l'ordinateur portable, le téléphone et les abonnements correspondants, ainsi qu'un bureau et une chaise ergonomique. De plus, un service d'assistance technique doit être mis en place. Il peut être interne à l'entreprise ou assuré par un fournisseur extérieur.

Le télétravail ne sera pas un vecteur de compétitivité s'il met en danger les données de l'entreprise. Selon une étude du cabinet Vanson Bourne, les dirigeants de PME sont en effet 60% à estimer que le télétravail peut nuire à leur sécurité informatique. Il est donc essentiel de s'équiper d'outils sécurisés avant d'autoriser ses collaborateurs à travailler de chez eux. Les plateformes cloud permettent de développer le travail collaboratif à distance, en donnant accès aux documents aux personnes autorisées, dans l'entreprise comme à l'extérieur de ses murs.

1.1.5 La notion de confiance

D'un point de vue humain, on notera aussi l'importance majeure de la notion de confiance. En effet, les études menées au sein des entreprises montrent que le télétravail se met en place plus facilement dans les services où les managers font confiance à leurs subordonnés et où les relations entre les collaborateurs ont une place importante. Si les managers n'ont pas confiance en leurs collaborateurs et qu'ils se posent sans cesse la question de savoir s'ils sont réellement en train de travailler, le télétravail a toutes les chances d'échouer dans l'entreprise.

Mais alors, comment manager ses collaborateurs quand ceux-là ne sont pas présents dans les locaux de l'entreprise et travaillent en toute autonomie ? Le télétravail ne remet-il pas en cause des formes de pouvoir sur l'organisation de la coopération, le contrôle et la surveillance?

1.2 LE MANAGER D'EQUIPE EN TELETRAVAIL : DU GESTIONNAIRE AU COACH

Après avoir sélectionné et formé les collaborateurs éligibles au télétravail, il va falloir que le manager d'une équipe en télétravail sache adapter sa posture à ce nouveau mode de travail.

En effet, le télétravail remet en question les pratiques de gestion traditionnelles. Dans ce mode d'organisation, ne pas être présent dans les locaux de l'entreprise n'est pas associé à l'absence ou au fait de ne pas travailler.

17

1.2.1 Dépasser la peur de perdre le contrôle

Dans la plupart des études menées sur le télétravail, on constate que la majorité des freins à la mise en place du télétravail vient du « middle management » et l'une des plus grandes questions de ces managers est : Comment contrôler les travailleurs à distance ? La peur de « perdre le contrôle » est souvent évoquée par ces derniers.

Il semblerait que le désir de contrôler les salariés soit à l'origine de certains rapatriements de télétravailleurs à l'entreprise. Le travail à distance perturbe le contrôle et la gestion. Ainsi, dans un e-mail du 22 février 2013, Marissa Mayer, la PDG du groupe Yahoo !, a demandé aux employés travaillant chez eux de revenir dans les locaux du siège dès le mois de juin. Raison invoquée : « Beaucoup de ces personnes n'étaient pas productives », « Ils étaient nombreux à se cacher. Ils étaient tous des employés - à distance - et pourtant personne ne savait qu'ils travaillaient encore chez Yahoo. »6. Le fait de dire que ces télétravailleurs se « cachaient » montre que le management à certainement « perdu le contrôle » de ces salariés et n'a pas su comment les gérer.

De plus, la question soulevée par cette décision est : le groupe s'est-il adapté à ce nouveau mode de travail ou s'est-il contenté de garder un management traditionnel ?

1.2.2 Coordonner plutôt que contrôler

Le dirigeant manage des employés qu'il ne voit quasiment jamais physiquement, son influence doit donc s'exercer via la technologie (système de messagerie instantanée, téléphone, vidéo conférence...). De ce fait, son style doit être adapté, il ne peut pas être le même qu'en face à face. Il doit coordonner plutôt que contrôler. Selon Taskin et Tremblay (2010), les managers doivent établir des pratiques de gestion spécifiques en matière de socialisation et doivent passer d'un rôle de gestionnaire à un rôle de coach. Passer d'un management de contrôle à un management de l'engagement car le contrôle visuel et le contrôle du temps de travail est problématique. En effet, à moins de mettre en place un système de surveillance par webcam, on peut difficilement savoir si l'employé est à son poste de travail. Et, même avec ce système, difficile de savoir s'il est réellement en train de

6 Le management très exigeant d'une équipe en télétravail, Propos recueillis par Sébastien Pierrot, Capital.fr avec management, le 07/06/2013

18

travailler. Il faut donc amener le télétravailleur à se sentir engagé dans ce qu'il fait, qu'il sache qu'il est soutenu et accompagné et que son travail compte. Si le travailleur à distance sait que ses supérieurs comptent sur lui et lui font confiance, il aura envie de montrer qu'ils ont raison de lui accorder cette confiance.

1.2.3 Gérer les distances psychologiques

Selon Eric Brunelle (e-leadership, l'art de gérer les distances psychologiques, 2009), gérer les distances psychologiques est l'enjeu le plus important. La distance psychologique se définit comme « le degré d'inégalité qui existe (psychologiquement) entre deux individus, dans la mesure où une certaine dimension est impliquée »7. Ainsi, d'une faible distance psychologique, résulte un plus grand engagement de la part du télétravailleur. Une satisfaction accrue, une communication facilitée, un sentiment de confiance, permettent la création d'une culture d'entreprise. Tout cela donnant une performance plus élevée. Pour le dirigeant, cette faible distance psychologique permet de faciliter le choix des moyens de communication, la résolution des conflits, le contrôle et la coordination. En réduisant les distances psychologiques, le salarié en télétravail se sent plus proche de son management et le tient donc informé de l'avancé de son travail, des éventuels problèmes rencontrés, etc...

1.2.4 Entre autonomie et contrôle

Selon Planterose (2014), la peur de ne plus avoir ses collaborateurs « sous la main » est une raison du retard du télétravail en France. En effet, la mise à distance du salarié vient perturber la répartition des rôles hiérarchiques et subordonnés. Pour le manager, garder le contrôle et laisser une grande autonomie à ses collaborateurs est compliqué.

Les télétravailleurs de leur côté, comme l'a démontré Deffayet en 2002, se sentent autonomes et libres de gérer leur emploi du temps. De ce fait, ils n'apprécient pas l'intrusion du gestionnaire dans leur travail, qu'ils perçoivent comme un manque de confiance. Là encore, le manager doit passer d'un rôle de superviseur à un rôle de coach. Il est important de montrer qu'il n'est pas là pour « fliquer » ses collaborateurs mais bien pour les manager, pour les accompagner dans la réussite de leurs objectifs ou leurs projets. Taskin et Tremblay (2010) proposent même une formation au coaching pour les managers de télétravailleurs. Le manager « coach du changement » doit abandonner la logique du commandement pour permettre le développement de l'autonomie dans le respect des compétences de chacun. Le rôle de

7 Mudler, Power and satisfaction in task oriented groups, Acta Psychol, 1959, p 197

19

contrôle s'établit désormais en utilisant des logiciels de gestion de projet ou de reporting et non pas par le manager lui-même.

Planterose (2014) va plus loin, pour lui, pas besoin de surveiller et contrôler ses collaborateurs mais plutôt les manager par une maitrise globale. Le management doit être coopératif ou collaboratif. En effet, aujourd'hui, le management repose surtout sur des principes de conformité et d'obéissance. Le manager dit ce qu'il doit être fait et le subordonné le fait. Or, ce mode de management peut devenir un frein à la bonne mise en oeuvre du télétravail. Le management coopératif part du principe que les salariés ont des capacités, l'envie de travailler, le sens des responsabilités et le souhait d'être associés aux projets de l'entreprise, donc on peut leur faire confiance.

Dans « le télétravail en question » une des entreprises analysées est une PME dans laquelle il n'y avait pas de liberté dans la procédure de traitement des tâches, un temps d'intervention minuté, des plages horaires strictes et pas de retour à l'entreprise (télétravail à 100%). La mise en place du télétravail fut un échec car il en a résulté un grand sentiment d'isolement de la part des télétravailleurs. Ils ont ressenti un manque de reconnaissance et d'identité professionnelle, deux éléments très important en télétravail. Cet exemple montre qu'en laissant à la fois peu d'autonomie et en ayant peu de contacts avec les télétravailleurs, la réussite du télétravail est mise en péril.

1.2.5 Le besoin de communication et de reconnaissance du salarié en télétravail

On constate donc l'importance d'un contact régulier et d'un retour ponctuel (si possible) sur le lieu de travail pour le maintien du lien social et du même coup, une forme de contrôle.

De plus, il devient nécessaire de formaliser la communication qui, dans les locaux, pouvait être informelle. La conversation devant la machine à café et les félicitations suite à une réussite en passant devant le bureau n'existent plus, il faut donc organiser des moments pour échanger et s'y tenir.

D'ailleurs, Lee-Kelly et Al (2004) ont montré que les travailleurs virtuels ont besoin davantage de reconnaissance et de communication que les salariés présents physiquement en entreprise. La multiplication des feedbacks atténue le sentiment d'isolement du télétravailleur et maintient sa motivation. Le salarié en télétravail ne doit voir la mise à distance géographique de son lieu de travail comme une mise à distance humaine. Il est important qu'il se considère toujours comme faisant partie de l'entreprise, le supérieur doit donc faire

20

beaucoup de rétroactions et elles doivent être plus précises que dans une forme de travail en présentiel.

Il faut savoir contrer la distance physique due au télétravail grâce à la technologie, d'une part, qui va permettre la multiplication des échanges entre collègues et entre managers et subordonnés. D'autre part, le manager doit veiller à la fois à promouvoir l'esprit d'équipe et à se préoccuper des attentes individuelles pour que l'employé ne se sente pas isolé, mis à l'écart.

1.2.6 Faire confiance à ses collaborateurs

Le dirigeant comme le manager doit comprendre les enjeux de ce mode de travail. Il doit avoir confiance en ses collaborateurs, savoir accepter l'incertitude, se montrer flexible et savoir s'adapter aux changements pour manager.

La confiance est primordiale, si le télétravailleur pense que son manager ne lui fait pas confiance, il peut se sentir obligé de montrer qu'il travaille et être plus réactif de peur qu'on pense qu'il ne travaille pas. Par exemple, le salarié qui sent que son manager ne lui fait pas confiance peut être amené à envoyer plus de mails que nécessaire ou répondre au téléphone alors qu'il est occupé pour montrer ou même prouver qu'il travaille, ce qui peut avoir un effet contre-productif.

Le manque de confiance des managers envers les collaborateurs est le principal obstacle à la réussite du télétravail : la confiance dans les rapports sociaux est peu répandue et demande du temps. En effet, pour la plupart des gens, il est difficile de faire confiance sans avoir eu par le passé des preuves que cette confiance peut être accordée. Cependant, si l'entreprise recrute des salariés qui seront directement en télétravail (par exemple si l'entreprise ne possède pas de locaux et que tous les salariés sont à 100% en télétravail comme c'est le cas dans mon entreprise ; ou si des salariés sont recrutés pour occuper directement un poste en télétravail sans période dans les locaux), les managers ont tout intérêt à partir sur une base de confiance avec leurs subordonnés. Cette confiance accordée va donner au travailleur à distance l'envie de ne pas décevoir son supérieur hiérarchique.

Finalement, mêlant confiance, autonomie et reconnaissance, il semblerait que la forme de « contrôle » la plus adaptée au management de télétravailleurs soit le contrôle de la

21

performance et des résultats8 et non le contrôle des salariés eux-mêmes et de leur temps de présence.

1.3 EVALUATION DE LA PERFORMANCE EN TELETRAVAIL

Comme nous l'avons vu précédemment, la réussite du télétravail dans une organisation est fortement liée à une confiance réciproque entre les collaborateurs et sur l'autonomie laissée aux travailleurs à distance pour exécuter leur travail. La réussite du télétravail repose non seulement sur l'usage des technologies de l'information, mais aussi sur les dimensions managériales.

1.3.1 Pratiquer un management sur objectifs et en mode projet

Dans les faits, le télétravail requiert un management sur objectifs et en mode projet permettant de piloter le processus en action. Les objectifs doivent être SMART (Specific, Measurable, Achievable, Realistic, Time-bound), autrement dit, ils doivent être :

- Spécifiques à un collaborateur et ne pas dépendre d'éléments dont il n'a pas la maîtrise. - Mesurables, les indicateurs chiffrés devant être incontestables et reconnus comme tels par le collaborateur.

- Atteignables.

- Réalistes et réalisables.

- Temporellement définis, avec une date de fin et des points intermédiaires.

Selon Michel Walrave (2010), le contrôle visuel doit laisser place à une gestion basée sur l'évaluation des objectifs ou des résultats. Pourtant, beaucoup d'organisations font l'erreur de garder les mêmes pratiques et continuent de considérer que l'efficacité d'un salarié se prouve par le nombre d'heures passées à son poste de travail.

Selon Denis Berard dans une étude de l'Anact (2002), « Une situation de télétravail réussie implique au minimum, sur le plan du management, le choix des procédures d'évaluation du personnel basées sur des profils de postes structurés en missions (ou projets). »

Le savoir-faire du manager d'une équipe en télétravail consiste à mener son équipe et chaque collaborateur en tenant compte des limites rencontrées afin de trouver des solutions pour atteindre les objectifs fixés. En pratiquant un management par objectifs ou par projets, le

8 Bailey et Kurland (2002), Daniels et al. (2001), Illegems et Verbeke (2004)

22

manager donne au télétravailleur l'autonomie dont il a besoin pour effectuer son travail à distance. Il lui montre également qu'il lui fait confiance pour mener à bien sa mission en n'intervenant pas dans toutes les phases de la réalisation de celle-ci. Mais pour que sa mission soit menée à bien en toute autonomie, le salarié doit évidemment savoir comment atteindre ses objectifs.

1.3.2 Mettre en place des processus

Afin que les salariés en télétravail soient le plus autonomes possible, il faut définir et mettre en place des processus permettant de réaliser les objectifs et de piloter le processus lui-même. La mise en place de processus fournit un cadre pour une meilleure affectation des responsabilités et une meilleure compréhension des missions et des rôles. Chaque processus doit se caractériser par des objectifs clairs et des tâches précises. Il implique la mesure de l'efficacité individuelle et globale dans une optique de recherche permanente d'amélioration et de performance. La mise en place de processus est d'autant plus importante en télétravail que le salarié se trouve physiquement seul et doit pouvoir trouver rapidement des réponses à ses questions, la circulation des informations entre les personnes est plus lente en télétravail.

Pour Planterose (2014), le management qui consiste à « diriger une équipe de subordonnés en les commandant et en les contrôlant et les surveillant « de visu » n'a plus lieu d'être avec l'apparition des TIC ». C'est surtout vrai pour ceux qui utilisent l'informatique comme principal outil de travail. Ce type de management, ne correspond plus « ni à la performance, ni aux objectifs à atteindre, ni aux comportements, ni à l'autonomie, ni aux compétences des collaborateurs. »9. Il n'est plus besoin de les surveiller et de les contrôler en permanence, mais de manager par une maîtrise du processus global. Le rôle du manager est de veiller à l'amélioration des compétences et des processus pour atteindre le meilleur résultat possible.

Il est donc important d'avoir une procédure d'appréciation du travail à distance adéquate et pertinente.

1.3.3 Savoir déléguer

Etant donné que le manager ne contrôle pas en présentiel ses collaborateurs, leur laisse une plus grande autonomie et est censé leur accorder sa confiance, on peut parler de situation de délégation. Selon l'étude de l'Anact « le télétravail en question » (2002), deux types de délégation conviennent au télétravail. Il y a la délégation par mission réservée aux salariés

9 Planterose, Télétravail, travailler en vivant mieux, p 114

23

qualifiés. Elle propose comme objectif des activités professionnelles complexes avec un aboutissement long et une liberté de jugement et une grande marge de manoeuvre. Il y a également la délégation par tâches. L'activité est plus fragmentée et plus prescrite mais la mesure de l'efficacité et plus compliquée ou du moins limitée.

Le salarié en télétravail, comme nous l'avons dit précédemment, a besoin d'autonomie et de confiance. Or, si son manager ne le laisse pas gérer ses missions, le télétravail peut être un échec. Le manager qui a des difficultés à déléguer des tâches aura du mal à manager une équipe en télétravail qui est en demande d'autonomie.

24

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Le don sans la technique n'est qu'une maladie"