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La garantie des droits fondamentaux au Cameroun

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par Zbigniew Paul DIME LI NLEP
Université Abomey-Calavi, Bénin - DEA en Droit international des Droits de l'Homme 2004
  

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PARAGRAPHE 2.- LA PROTECTION DES MINORITES ET DES POPULATIONS AUTOCHTONES

La loi constitutionnelle de 1996 dispose expressément en son préambule : « l'Etat assure la protection des minorités et préserve les droits des populations autochtones conformément à la loi ». Se trouve ainsi érigé par cette disposition constitutionnelle, le principe constitutionnel de la protection des minorités et de la préservation des droits des populations autochtones. Innovation particulièrement controversée à en croire M. OLINGA184(*), la consécration et la réception par l' « opinion publique » de la protection des minorités et des droits des populations autochtones sont loin d'être la chronique d'un long fleuve tranquille, précise-t-il185(*).

C'est qu'en effet, se pose en droit camerounais le problème du contenu des notions de « minorité » et de « population autochtone ». Que recouvrent-elles et comment identifier les citoyens intégrés en leur sein ? Face au silence du texte constitutionnel et à l'absence d'une loi relative à l'une ou l'autre notion, le flou est maintenu. Il convient donc afin d'apporter un éclairage quant au contenu des deux notions, d'analyser au préalable les notions de « minorité » et de « population autochtone » (A), afin de déterminer l'étendue de la protection qui leur est accordée (B).

A.- Les notions de « minorité » et d' « autochtone »

La diversité de la société camerounaise dans sa composition a déjà été mise en exergue et le texte constitutionnel de 1996 a pris le chemin d'un droit constitutionnel adapté aux réalités socio-politiques et anthropologiques camerounaises au moins sur un point précis : la protection des minorités et des populations autochtones186(*). Mais cela ne va pas sans soulever des interrogations relatives au contenu des notions de « minorité » (1) et d' « autochtone » (2). Les définitions des deux notions permettront de mieux les cerner.

1.- La notion de « minorité »

Elle n'est pas spécifique au droit public camerounais. Pleinement évoquée au plan international187(*) et même protégée par un mécanisme188(*), la question des minorités est largement abordée par les constitutions de certains Etats.

Le Doyen Claude-Albert COLLIARD définit la minorité comme « un groupe différent de la majorité nationale par la race, la langue, la religion »189(*). Cette définition semble toutefois insuffisante pour cerner la notion de « minorité » car, de l'avis de M. NNANGA, elle « ne représente que le pendant d'un phénomène dont tous les contours ne sont pas encore connus »190(*). En effet, le Doyen COLLIARD ne semble tenir compte que de trois éléments pour définir une minorité au sein d'un Etat : la race, la langue et la religion.

Le constituant camerounais n'a donné dans le texte de 1996 aucun élément d'identification des minorités présentes au sein de la société camerounaise, mais on sait juste que celles-ci seront objectivées au fur et à mesure de l'adoption de mesures spécifiques de protection191(*). Le législateur a, ce faisant, un rôle majeur à jouer dans la détermination des groupes au sein de la société qu'il faudra ranger sous le vocable de « minorité ».

Une tentative préalable d'identification de ces groupes « minoritaires » dans la société camerounaise est esquissée par le Pr NLEP lorsqu'il détermine les acteurs du système de l'administration camerounaise192(*). Cette tentative de classification ne retient cependant que les minorités dites ethniques au Cameroun. L'esquisse tentée par M. NNANGA semble plus large, car elle englobe plusieurs éléments permettant de reconnaître une minorité.

La minorité peut, pour cet auteur, être avant tout démographique. « Dans ce cas, énonce t-il, les statistiques issues du recensement général de la population nationale permettent lorsqu'elles sont objectives de montrer que telle tribu, telle race, telle catégorie sociale présente un effectif faible par rapport à d'autres tribus, d'autres races ou d'autres catégories dans le même Etat »193(*). Cet aspect démographique, dans les faits, se doit d'être cumulé à l'aspect linguistique. Or, le Cameroun est un Etat dans lequel cohabitent plus de six grands ensembles linguistiques parlant plus de quatre cent dialectes 194(*) et il en découle qu'il est improbable de parier sur une quelconque pureté originelle de ces langues et dialectes. M. NNANGA prévient alors qu' « on risque sous le prisme linguistique et démographique assister à un émiettement à l'infini du principe de minorité »195(*).

La minorité peut être économique. Elle « provient du résultat obtenu au terme de la comparaison effectuée, entre tel ensemble linguistique ou racial national, entre telle catégorie sociale omniprésents dans tous les milieux d'affaires, les commerces, les industries du pays et d'autres ensembles et catégories nationaux faiblement présentés dans les mêmes milieux », écrit M. NNANGA. Il précise son idée en postulant que si ce type de « minorité » est plus ou moins difficile à déceler dans une société, sa consécration juridique ne va pas sans poser des problèmes de logique, de cohérence et d'efficacité196(*).

La minorité peut être politique. Dans ce cas, telle frange de la population peut revendiquer de n'avoir jamais tenu les rênes du pouvoir ou remettre en cause le fait d'être sous-représentée dans les organes du pouvoir étatique par rapport à la sur-représentation des autres groupes sociaux. Mais, au risque d'entretenir dans l'Etat la volonté d'une seule composante sociale d'accaparer le pouvoir, par une conception et une gestion néo-patrimoniales de celui-ci, ce type de « minorité » appelle une vigilance étroite et des mécanismes de prévention et de protection durables197(*).

La minorité peut être intellectuelle. Dans ce cas de figure, selon les dires de M. NNANGA, « certaines populations peuvent à juste titre récuser le fait que presque toutes les institutions scolaires et académiques soient tenues et occupées pour l'essentiel par des individus ressortissants d'une même région ou d'une même famille »198(*). La majorité intellectuelle est associée au pouvoir décisionnel dans l'Etat et c'est en objection à ce cas de figure que la catégorie minoritaire (sous-intellectualisée) demande à être associée au processus décisionnel.

La minorité peut être sociale. Ici, « certaines couches sociales peuvent, dans un Etat, estimer que leurs intérêts ne sont pas suffisamment défendus parce que ceux qui ont été investis de ladite charge par l'Administration appartiennent plutôt à une classe qui ne ressent pas les mêmes difficultés »199(*). Ce sont généralement les classes démunies au sein de la société, à l'exemple des chômeurs, des retraités, des malades, des personnes pratiquant de petits métiers occasionnels.

La minorité peut être culturelle ou confessionnelle. Dans cette hypothèse, « les adeptes de telle religion, de telle secte, de telle obédience confessionnelle ou philosophique, les chefs traditionnels et les détenteurs des pouvoirs ancestraux, les guérisseurs et autres herboristes peuvent mettre en évidence leur marginalisation sociale ou l'ostracisme pratiqué contre eux par les individus relevant des catégories culturelles et confessionnelles majoritaires ou dominantes », écrit M. NNANGA200(*).

La minorité peut être linguistique. Dans une telle hypothèse, il existe au sein de la société des groupes qui, du fait de leur langue, estiment être sous le coup de la domination d'un groupe ou de groupes majoritaires. C'est le cas au Cameroun avec l'opposition traditionnelle entre « anglophones » et « francophones ». Les premiers constituent vis-à-vis des seconds un groupe minoritaire par le nombre des individus et estiment être laissés en marge de la direction de l'Etat et de ce fait d'être écrasés, parce qu'ils sont une minorité.

Il n'est pas facile de déterminer la « minorité » au sein d'un Etat et face au silence du constituant camerounais qui n'a pas clairement déterminé les groupes susceptibles d'être rangés sous le vocable, il est nécessaire d'explorer toutes les tentatives de définition élaborées. Cette absence de définition qui n'est pas au demeurant une négation juridique de l'existence de minorités dans l'Etat se doit d'être résorbée, et c'est la démarche qui peut aussi être employée pour l'éclaircissement de la notion d' « autochtone ».

* 184 A. D. OLINGA, ``L'aménagement des droits...'', ibid., p. 123.

* 185 A. D. OLINGA, ``La protection des minorités et des populations autochtones en droit public camerounais'', RADIC, Tome 10, n° 2, juin 1998, p. 272.

* 186 Ibid., p. 272.

* 187 Voir entre autres textes juridiques internationaux, la Déclaration Universelle des droits des peuples d'Alger du 4 juil. 1976, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques en ses articles 27 et 41 alinéa 1er.

* 188 En l'occurrence la Sous-commission de la lutte contre les mesures discriminatoires et la protection des minorités du Conseil économique et social des Nations-Unies.

* 189 C. A. COLLIARD, Institutions et relations internationales, 8e éd. Paris, Précis Dalloz, 1985, p. 98.

* 190 S. H. NNANGA, ``La protection des minorités, principe constitutionnel de perfectionnement du principe d'égalité ou consécration de la dictature des minorités'', Revue de la Commission ADHP, Tome 7, n° 2, p. 173.

* 191 A. D. OLINGA, ``La protection des minorités...'', ibid., p. 272.

* 192 R. G. NLEP, op. cit., pp. 213 et sq.

* 193 S. H. NNANGA, ibid., p. 174.

* 194 Ibid., p. 174.

* 195 Ibid., p. 174.

* 196 Ibid., p. 174.

* 197 Ibid., p. 176.

* 198 Ibid., p. 176.

* 199 Ibid., p. 177.

* 200 Ibid., p. 177.

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