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Les Enjeux de l'autonomie des Collectivites Territoriales au regard de la Constitution de 29 Mars 1987

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par Evel FANFAN
Faculte de Droit et des Sciences Economiques des Gonaives, HAITI - Licence 2004
  

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1.- ENCHEVETREMENT DE COMPETENCES.

Bon nombre de ministres, ayant des directions au niveau local, exercent des compétences ne correspondant pas logiquement à leur vocation, et fonctionnent en dehors de tout contrôle de proximité. A titre d'exemple, à la commune d'Aquin en 1996, le Maire principal protestait contre une opération d'adoquinage de cette ville qui a été décidée à son insu par le Ministère des travaux publics. En conséquence, on a assisté à un conflit de compétences et à un doublement fonctionnel entre les ministères eux-mêmes au niveau de l'administration centrale et entre ceux-ci et les collectivités locales.

Les représentants locaux réclament sans cesse de plus larges compétences en matière d'urbanisme, d'éducation, de services sociaux, d'état civil, de service d'incendie, de protection civile, pour lesquelles ils souhaiteraient que les autorités de proximité soient pleinement responsables devant le citoyen. Malheureusement, les compétences sont jusqu'aujourd'hui exercées par le pouvoir central trop loin de la population. Donc, la question de partager les compétences entre l'Etat et les collectivités locales est loin d'être matérialisée.

Aujourd'hui, comment peut- on parler de transfert de compétences aux collectivités de proximité quand l'administration centrale est destructrice, comparable à un véritable Çiva qui en marchant ne maîtrise pas les mouvements de ses pattes ? En Haïti, on retrouve au sein d'un ministère  un cabinet ministériel qui fonctionne sans spécialisation dans le domaine des collectivités territoriales se substituant aux directions techniques et à leurs services et ces dernières se trouvant en un état de ravalement sans pouvoir de conception, de consultation et d'avis comme une sorte de boîtes aux lettres, servant à expédier les courriers, les circulaires et les notifications.

Malgré le profil tracé par la constitution de 1987 relativement à certains postes et aux fonctionnaires de carrière, dans la pratique c'est l'inverse qui en est de mise. La condition sine qua non pour accéder à un poste est non seulement fonction du régime en place mais surtout de la militance. Alors, aisément on peut comprendre pourquoi les intérêts propres des Collectivités locales sont loin d'être pris réellement en compte.

On se demande, aujourd'hui, à Port-au-prince, du service métropolitain contre les résidus solides, SMCRS, des Travaux Public Transport et communications, TPTC, du CNE (Centre National d'Equipement) et de la Mairie, qui a la responsabilité du ramassage des ordures ? il en est de même pour l'éducation, la constitution incombe cette charge à l'Etat conjointement aux collectivités territoriales, cependant, en réalité qui est responsable de l'éducation aujourd'hui en Haïti ? Le MENJS ? La secrétairerie d'Etat à l'alphabétisation ? L'Etat ? Les collectivités territoriales ? Ou l'Etat conjointement avec les collectivités territoriales ? à un moment où le pays s'est engagé sur la voie de la privatisation considérée par plus d'un comme le cercueil de la politique économique des pays en voie de développement.

2. - LE PATRONAGE POLITIQUE.

La réalité Haïtienne présente l'État comme un patron qui détient le monopole d'influence sur les institutions du pays au lieu d'être un arbitre de la Res Publica. C'est pourquoi, on constate que les Collectivités Territoriales Haïtiennes s'enlisent dans un marasme économique chronique. Dans un État où c'est l'improvisation qui prime sur la planification autant dire que les décisions sont beaucoup plus politiques, démagogiques que techniques.

Malheureusement pour Haïti, par manque de vision collective, nos décideurs politiques ont laissé aller à la dérive les collectivités locales. Les dirigeants se sont lancés de façon prématurée dans de grandes aventures, comme la Privatisation, la Modernisation sans mettre en place les éléments nécessaires pouvant atténuer les conséquences néfastes à cette institution si importante.

Bref, le local représente aujourd'hui le noeud du Global. Nous constatons cependant avec inquiétude que cette doctrine n'est pas encore cernée en Haïti. Notons que l'État qui devrait assurer conjointement avec les citoyens, la promotion et la destinée des Collectivités locales, a offert toujours l'exemple d'initiatives mal agencées et maladroites. Selon les mots du Dr Louis Cornelus. THOMAS : « On ne peut trouver nulle part d'études statistiques et comptables fiables et valables, ni de résultats d'enquêtes cohérents qui peuvent servir de critères pouvant orienter les parlementaires à produire des lois appropriées aux desiderata et aux attentes de la nation Haïtienne ». Il est connu de tous que près de 74 communes des 142 reconnues actuellement sont dépouillées de toutes infrastructures de base par exemple : téléphone, eau potable, électricité etc.

Fait étonnant mais courant! Quand il est question d'élever une division territoriale au rang de commune, ou de département, on constate qu'il y a toujours une sorte d'urgence et de précipitation pour voter une loi. Le parlement qui devrait être l'organe de contrôle des décisions de l'exécutif devient la plupart du temps un véritable corps de  « j'approuve »  Il est de droit de se demander aujourd'hui si nos constituants agissent en profane ou en chef d'OP? A titre d'exemple, la Section communale de Tabarre et celle de Cité Soleil sont élevées au rang de communes sans procéder préalablement à un redécoupage territorial au point où les Citoyens de ces deux nouvelles communes réclament sans cesse leur commune respective. La loi y afférente a seulement stipulé, que ces deux sections communales sont élevées au rang de communes et a précisé qu'une autre loi fixera leur délimitation. Cette loi élaborée, non par des spécialistes, mais par des amateurs, a produit deja des conséquences très fâcheuses :

Premièrement le principe de la hiérarchie des normes si cher au regard du droit constitutionnel n'est pas respecté. En effet, ce principe admet que la loi issue du parlement fixe les grandes lignes et que le règlement ou décret en précise les détails. En stipulant que la délimitation des communes de Tabarre et de Cite Soleil sera faite par une autre loi, le législateur a rendu la tache beaucoup plus difficile quant á l'application de cette loi. En conséquence, ces deux communes se trouvent dans un véritable blocage juridique relative à la délimitation territoriale. Deux ans après le renversement du Président d'Aristide, ces prétendues communes ne sont pas encore délimitées, ce qui engendre subséquemment, un conflit incessant entre les Maires titulaires concernés au sujet du champ d'action des deux mairies. Pourquoi ne sont-elles pas encore délimitées ? Parce que la vacance parlementaire sous la présidence de Boniface ALEXANDRE rend impossible l'édiction de la loi de délimitation sus-parlée, étant donnée que la première loi avait indiqué expressément que cette délimitation se fera par une deuxième loi.

Pourtant, si la première loi avait indiqué que la délimitation se fera par voie réglementaire (décret), la tache aurait été plus facile pour l'exécutif de prendre un décret pour délimiter ces deux communes. D'après le principe de la hiérarchie des normes juridiques au regard du droit constitutionnel, le rôle du décret appelé règlement est de préciser les détails sur une loi qui à son tour fixe les grandes lignes. Aujourd'hui, l'Exécutif Boniface Latortue aurait seulement à sortir un décret pour fixer la délimitation des communes de Tabarre et de Cite soleil.

Deuxièmement la mise en place d'une nouvelle collectivité territoriale devient un processus difficile et interminable à l'exemple des deux communes sus énumérées dont le processus juridique reste encore inachevé. Ajouter à cela la question de conflits d'intérêts.

Troisièmement, nous tenons à signaler que les fortes oppositions trouvées par le régime d'Aristide de la part des populations avoisinantes qui refusaient de devenir des sections communales de Cite Soleil, arguée, vous savez de toutes mauvaises réputations. Ces oppositions des gouvernés de ces deux communes sont une preuve claire et évidente que les gouvernants n'ont pas consulté les différentes organisations et associations impliquées aux affaires qui les concernent, et cela par un manque de souci de consolider les collectivités locales, de renforcer la décentralisation par la pratique d'une démocratie de proximité.

Les hommes politiques de nos jours malheureusement ne tiennent pas compte de l'intérêt général de la nation mais plutôt de leur intérêt mesquin et de clan, ce qui a engendré une sorte de militance qui résulte des effets dérivatifs inquiétants par exemple : le fanatisme, l'admiration excessive, la passion aveugle et le culte de la personnalité.

Aujourd'hui, en plein 2Iième siècle, l'État Haïtien demeure encore une sorte d'échiquier sur lequel chacun pousse son pion. La mauvaise politique a inversé l'ordre supérieur des valeurs. Pire encore, les soi-disant technocrates au sein des cabinets Ministériels en majorité de nationalité étrangère se contentent de détails médiocres pour donner l'air de s'occuper de tout avec l'esprit de céder purement et simplement à une facilité qui leur procure une illusion d'activité. Ils sont comme le disait voltaire  Des Hommes et des femmes pleins de zèle mais pétris d'erreurs,  ne maîtrisant ni la réalité sociologique ni l"exigence du moment  et par conséquent, on constate une administration centrale incapable de s'adapter à la novation prônée par la charte du 29 mars 1987.

Pour certains, la faculté de nos décideurs politiques de comprendre, de saisir et de maîtriser la réalité évolutive du développement semble fonctionner à l'envers. Si bien que toute difficulté pour poser et résoudre un problème est interprétée comme un conflit politique et du coup risque de le devenir.

Il est important de comprendre que la crise, que connaît le pays et qui affecte les collectivités locales Haïtiennes, est d'abord d'ordre moral, c'est-à-dire qu'elle est issue des moeurs et des pratiques politiques en Haïti. Les notions de valeur, d'honnêteté et de justice ont fait place à l'immoralité, la corruption et surtout la cupidité.

3.- UN CONTRÔLE ADMINISTRATIF POLITISE

Il est prévu à l'article 200 de la constitution que la charge du contrôle administratif et juridictionnel incombe à la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSC/CA). Cette dernière détient un véritable pouvoir constitutionnel pour contrôler les recettes et les dépenses de l'État, vérifier la comptabilité des entreprises étatiques et des collectivités Territoriales. Outre la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif, il y a les Assemblées qui exercent un contrôle sur les conseils (conseil des Sections Communales, conseil Municipal et conseil Départemental / articles 73 et 83). Étant de même pallier, ce contrôle est appelé horizontal ou de séparation des pouvoirs sur le plan local. En général, ce genre de contrôle appelé « Tutelle » en droit administratif est établi pour sauvegarder l'intérêt général de la Nation. En Haïti, c'est une sorte de main mise qui a toujours été exercée sur l'ensemble de l'administration locale, si on oserait même parler de l'administration locale.

En effet, l'inexistence d'un plan national pour les Collectivités Territoriales, l'absence d'enquêtes d'experts, d'études fiables et techniques, témoignent des ambiguïtés de la politique conduite par une administration centrale sclérosée qui a du mal à prendre distance de la culture de la politique centralisatrice. En outre les mécanismes de contrôle utilisés sont désuets et ne tiennent pas compte ni de la réalité de l'administration locale ni de son importance. La réalité actuelle est triste en matière de contrôle administratif et financier, où tout est dominé par et pour la politique. Donc, c'est l'interférence sur toute la ligne qui engendre un désordre généralisé. Combien d'élus locaux sont capables de prendre des décisions sans préalablement solliciter le feu vert de leur chef qui détient le monopole financier à la République de Port-au-Prince. Le train ordinaire des affaires locales est mené irrationnellement soit par une administration centrale qui devient de plus en plus politisée, soit par ses représentants locaux, plus particulièrement les délégués qui en principe n'ont qu'un rôle de coordination des services déconcentrés de l'État et des Assemblées municipales.

A la base de cette situation lamentable règne l'irresponsabilité des autorités de l'administration centrale qui gèrent sous couvert du bénéfice de l'urgence au lieu d'élaborer des plans directeurs aptes à implanter un ordre nouveau à la Collectivité locale.

Le Ministère de l'intérieur auquel les prérogatives constitutionnelles sont accordées pour la bonne marche des collectivités locales, si bien appelé « Ministère de l'intérieur et des collectivités territoriales », ne participe presque pas à la conception des actions entreprises au niveau local. Dans ce cas, on se demande quel pourrait être le sort de la direction des C.T au sein du Ministère de l'intérieur, sinon une simple boite aux lettres, une courroie de transmission de courriers, de circulaires, de mémorandums, de convocations et de distributions de chèques aux élus locaux.

En réalité, les causes sont là et bien évidentes; car, la majorité des responsables embauchés au niveau central, chargés de promouvoir un changement local réel, n'ont ni la compétence ni le savoir-faire mais, être seulement des partisans zélés d'un parti au pouvoir suffit. Quel dommage! S'il faut encore considérer le ton de Louis Cornélus THOMAS relativement à la situation critique des collectivités locales face à la tutelle, lorsqu'il dit : « La politique locale est plus qu'illusoire », toute initiative part des bureaux de Port-au-prince, les autorités locales ne font que subir les envolées décisionnelles des agents de tutelle aussi inexpérimentés qu'ignorants. En effet du sommet à la base, ces derniers se trouvent dans l'impossibilité de déterminer des critères susceptibles de leur permettre d"une typologie locale bien caractérisée. Les points de vue retenus découlent d'ordinaire de l'influence partisane, de rapport de force, de poids de mesures ou d'une certaine accointance ». (1)

Ainsi la question de décentralisation en Haïti est très problématique, par rapport au constat qui se révèle très hypothétique. Il y a de quoi s'inquiéter pour Haïti où règne l'improvisation et l'incertitude. La misère devient une sorte de tragédie quotidienne. En gros, l'analphabétisme, la pénurie de l'eau, la surpopulation, la dégradation de l'environnement, l'accroissement de maladies infectieuses, l'anti-croissance, bref la mauvaise gouvernance est toujours des défis majeurs à relever.

1.- Thomas Louis Cornelus : op cit P 33

SECTION II.-

DES CONSTATATOINS AUX CONSEQUENCES

Haïti connaît depuis quelques temps, des moments les plus sombres de son histoire. Depuis 1804, date de son indépendance, la politique laisser-faire, laisser-aller pratiquée par nos dirigeants, arrivés des fois au pouvoir par intrigue, fait d'elle aujourd'hui, le pays le plus pauvre de l'hémisphère, souffrant de l'absence généralisée de la bonne gouvernance, de cadres adéquats, d'une gestion disciplinée et d'une planification économique et sociale véritablement rationnelle capable de propulser le changement si longtemps attendu. A l'intérieur comme à l'extérieur, le pays est avili : les scandales financiers, (à la DGI; 125 millions de gourdes disparus, l'affaire de Riz au Parlement) le trafic de drogue, l'inflation galopante, le chômage chronique, les échecs scolaires, l'environnement, la montée des maladies infectieuses, en gros, la corruption généralisée.

Voilà, l'atmosphère dans laquelle évolue la première République Nègre libre du monde et les collectivités territoriales, créées et appelées par la constitution de 1987 à réorienter le champ politique, social et économique Haïtien, n'ont pas fait bonne recette. Les questions fondamentales n'ont guère été abordées. L'éducation, l'insécurité environnementale, la justice, le chômage, la sécurité, l'analphabétisme etc. Aujourd'hui plus que jamais, l'inquiétude et l'incertitude sont dans les yeux de plus d'un.

Les causes de cette dérive sont à rechercher dans nos moeurs politiques et dans notre culture de leadership autoritaire et égoïste. Nos hommes et femmes qui se sont succédé au pouvoir s'érigeaient et s'érigent encore comme des gens au-dessus de la loi. L'expérience nous montre que la démocratie dans une constitution ne suffit pas. Il nous faut aujourd'hui, un Etat qui se soumet lui-même à la loi, en contribuant lui-même en action et en parole. Il doit travailler à l'organisation et à l'implantation d'un ordre politique et social nouveau en Haïti. C'est triste et honteux, une Haïti réputée "la perle des Antilles" et essentiellement agricole est aujourd'hui devenue ce qu'elle est maintenant. Quelque part, quelque chose ne va pas!

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery