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La sécurité juridique en droit administratif sénégalais

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par Abdou Ka
Université Gaston berger de saint Louis - DEA droit public 2015
  

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PREMIERE Partie

L'ABSENCE D'UNE RECEPTION FORMELLE DE LA SECURITE JURIDIQUE

Aucune norme de droit positif ne reconnaît un principe de sécurité juridique. La sécurité juridique ne figure pas dans le corpus juridique.Elle est formellement clandestine en droit sénégalais. Toutefois, cette absence de reconnaissance formelle de la sécurité juridique ne signifie nullement que celle-ci soit dépourvue d'intérêt dans le contexte sénégalais. La sécurité juridique irrigue de plein fouet le système juridique sénégalais.Beaucoup d'initiatives des autorités publiques sont motivées par un souci évident d'assurer la sécurité juridique dans le cadre de l'élaboration et de la mise en oeuvre des normes. Ainsi, bien qu'elle soit absente de l'ordre positif(Chap. 1), la sécurité juridique reste une valeur du système juridique(Chap. 2).

Chapitre 1 : La sécurité juridique, un principe absent de l'ordre positif

Le principe de sécurité juridique n'est pas admis en droit sénégalais en tant que principe positif. Il est introuvable dans le corpus juridique (sect. 1). Cependant, la sécurité juridique reste un principe en devenir dans le contexte sénégalais(sect.1).

Section 1 : L'introuvable principe de sécurité juridique

La sécurité juridique n'a reçu aucune consécration formelle en droit administratif sénégalais.Aucun principe général de sécurité juridique n'est admis dans le contexte sénégalais (Par. 1).Il s'y ajoute un refus de reconnaissance d'un droit subjectif à la sécurité juridique (Par. 2).

Paragraphe 1 : La non-consécrationd'un principe général de sécurité juridique

Le principe de sécurité juridique ne se rencontre dans aucun texte. Du sommet de la pyramide à sa base, pour reprendre l'idée si chère à HANS KELSEN, aucune norme ne fait référence à un supposé principe de sécurité juridique.De même, il est introuvable dans la jurisprudence administrative sénégalaise. La sécurité juridique serait donc un principe formellement clandestin dans l'ordre positif sénégalais. Cette clandestinité formelle de la sécurité juridique s'explique largement.

En effet, tout d'abord, si l'on considère la sécurité juridique comme un élément inhérent à l'ordre juridique, sa consécration dans l'ordre positif relèverait de l'ordre du tautologique. Un droit qui n'assurerait pas la sécurité des relations sociales qu'il entend régir ne dévierait-il pas de sa vocation naturelle. La règle juridique ne constitue pas une fin en soi. Elle n'est nécessaire qu'autant qu'elle garantit la stabilité sociale. C'est ce qui fait dire à J. L. BERGEL qu'« à aucune époque de son histoire, dans aucun système juridique, la sécurité juridique n'est absente des préoccupations sur le droit »20(*). Plus profonde encore est l'analyse de J. BOULOUIS qui considère qu'« undroit qui n'assurerait pas la sécurité des relations qu'il régitcesserait d'en être un »21(*). Dans cette perspective, une consécration d'un principe de sécurité juridique dans le corpus juridique ne semblait pas véritablement s'imposer.

Ensuite, une consécration d'un principe de sécurité juridique dans l'ordre positif sénégalais était difficilement concevable au regard de la nature du système juridique. Le système juridique sénégalais, fortement inspiré de celui de l'ancienne métropole, est marqué par une tradition légaliste très prégnante. Depuis la codification napoléonienne, le système juridique de tradition française s'est fortement démarqué par son caractère éminemment légaliste. Dans ce système juridique, la norme comme émanation de l'entité étatique est sacrée. La norme juridique, du moment qu'elle ne contrevient pas au principe de légalité, reste intouchable. L'Idée dominante est que si la norme existe, elle est forcément porteuse de sécurité dans les relations sociales.La sécurité juridique serait donc un élément consubstantiel à la notion d'Etat de droit. Là où l'Etat est soumis au droit, l'idée de sécurité juridique n'est pas véritablement très éloignée. Le principe de légalité ne pouvait dès lors cohabiter avec un soi-disant principe de sécurité juridique. La légalité remplirait à elle seule ce souci de sécurité juridique. Le principe de sécurité juridique compliquerait davantage la donne car même si légalité et sécurité juridique relèvent a priori de la même logique, c'est-à-dire du souci de garantir l'ordre et la justice sociale, il reste que ces exigences peuvent s'opposer dans leur mise en oeuvre. C'est ce qui explique que la sécurité juridique soit considérée dans la tradition juridique française comme une valeur à atteindre et non comme un principe positif qu'il convient de consacrer dans le corpus juridique. Ainsi, pour A. LEVADE, « le principe de sécurité juridique s'apparente à ce que les juristes qualifient de standard et serait même unanimement considéré comme consubstantiel au modèle de l'Etat de droit »22(*).

Enfin, une consécration d'un principe de sécurité juridique se heurterait au fait qu'elle est une notion en soi rebelle à toute tentative de conceptualisation, mais aussi à la nature imprécise de ses fondements.En effet, la notion de sécurité juridique ne présente pas une unité conceptuelle suffisante telle qu'elle puisse être intégrée dans le droit positif sans davantage rendre la donne complexe. Elle est polymorphe en ce sens qu'elle renvoie à des exigences très diverses et qui peuvent même se révélercontradictoires. C'est ainsi qu'à sa dimension objective peut s'opposer une dimension subjective. C'est ce qui fait dire à J.P. PUISSOCHET que « la sécurité juridiqueappartient à une galaxie bien autrement diverse, puisqu'on y trouve des impératifsoccasionnellement discordants et qu'en relèvent à la fois le respect de la légalité et les atténuations qu'il doit recevoir en vue de la protection de droits acquis ou légitimement attendus »23(*).

En outre, les fondements de la sécurité juridique se révèlent être épars. A priori, la sécurité juridique peut être considérée comme une composante essentielle de l'Etat de droit. Elle trouverait son fondement dans le principe de la soumission de l'Etat au droit. L'Etat de droit appelle nécessairement la prééminence du droitqui pourrait fonder le souci de sécurité juridique en droit positif.

De manière beaucoup plus concrète, le principe de sécurité juridique trouverait son fondement dans l'article 16 de la déclaration de 1789 en ce qu'il érige la garantie des droits en principe constitutionnel fondamental. En effet, il dispose que « toute société dans laquelle la garantie des droits n'est pas assurée, ni la séparation des pouvoirs déterminée,n'a point de constitution ».

Par ailleurs, le principe de sécurité juridique peut trouver son fondement dans l'article 02 de cette Déclaration de 1789 dans la mesure où il fait de la sûreté un droit imprescriptible de l'homme. En effet, à côté de la sûreté des personnes et des biens, une sûretédans l'exercice des droits serait envisageable. La sûretéainsi entenduecommanderait selon F. LUCHAIRE la « protection des droits »24(*) qui constitue un élément essentiel de la sécurité juridique.

Paradoxalement, pour reprendre l'idée d'ANNE-LAURE VALEMBOIS25(*), cette multitude des fondements de la sécurité juridique n'est pas de nature à faciliter son intégration en tant que principe dans le droit positif en ce qu'elle ne permet pas un ancrage suffisant de ses exigences essentielles.

Tout compte fait, il est possible de dire que le refus de consacrer le principe de sécurité juridique dans le droit positif reste très lié à une question d'identité juridique, mais aussi à une certaine conception tautologique de la notion de sécurité juridique. Toutefois, il apparait aujourd'hui que le droit administratif de tradition française s'inscrit dans un processus irréversible de recomposition. C'est ce qui amène J. CAILLOSSE à dire que « le droit administratif apparait porteur d'identités multiples et mouvantes entre lesquelles il serait vain de prétendre choisir »26(*). Ainsi, ce processus de changement d'identité du droit administratif appellera-t-il une éventuelle consécration du principe de sécurité juridique. L'avenir promet surement une réponse à une telle question.

D'un autre côté, longtemps considérée comme consubstantielle au droit, la notion de sécurité juridique prend progressivement son autonomie. En effet, dans sa conception classique, la sécurité juridique constitue avec la justice et le progrès social la trilogie des buts du droit alors que dans sa conception moderne, elle remplit une fonction de sécurisation de l'ordre juridique. Face au phénomène de l'insécurité juridique, le principe de sécurité juridique serait un rempart non négligeable.

Somme toute, la sécurité juridique n'a pas encore accédée à la dignité de principe positif en droit sénégalais. Ce refus de reconnaissance formelle de la sécurité juridique s'accompagne d'une certaine négation d'un droit subjectif à la sécurité juridique.

* 20 JEAN LOUIS BERGEL, « La sécurité juridique », R. du N 271, 2008, p.273

* 21 JEAN BOULOUIS, « Quelques observations à propos de la sécurité juridique », Mélanges PESCATORE, 1987, p.53

* 22 ANNE LEVADE, « Propos introductifs : la sécurité juridique », 4ème Convention des juristes de la méditerranée : Actes du colloque d'Alger, 09-10 Décembre 2012, La Semaine Juridique, Ed. Général, supplément, n°27, 1 Juillet 2013, p.10

* 23 J.P.PUISSOCHET « Le principe de sécurité juridique dans la jurisprudence de la CJCE », Cahiers du Conseil Constitutionnel, n°11, 2001, p.149-159

* 24 F. LUCHAIRE, « La sécurité juridique en droit constitutionnel français », Cahiers du ConseilConstitutionnel, n°11, 2001, p.67

* 25 ANNE-LAURE VALEMBOIS « La sécurité juridique : une constitutionnalisation en marche mais non aboutie », LPA, 2006, n°117, p.7

* 26 J. CAILLOSSE, « Sur quelques problèmes actuels du droit administratif français : Bref essai de mise en perspective », AJDA, 2010, p.931

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