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L'identification de l'acte de contrefaçon de marque en Tunisie

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par Kaïs Berrjab
Faculté des Sciences Juridiques, Ploitiques et Sociales de Tunis - DEA en Sciences Juridiques Fondamentales 2004
  

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TITRE PREMIER :

L'approche synthétique de l'acte de

contrefaçon : une atteinte au droit de propriété

sur la marque

Alors qu'il était conçu d'une manière purement analytique dans les articles 15, 16 et 17 du décret du 3 juin 1889, l'acte de contrefaçon de marque s'identifie aujourd'hui, au sens de l'article 44 alinéa 1 de la loi n°36-2001, à l'idée commune de « toute atteinte portée aux droits du propriétaire de la marque».

L'unification du concept de l'acte de contrefaçon est une nouveauté apportée par la loi n°36- 2001, en ce sens, l'article 44 al. 1 de la dite loi se propose d'exposer en termes clairs l'économie générale de l'identification de l'acte de contrefaçon.

Partant de l'idée selon laquelle l'article 44 de la loi n°36-2001 se présente comme la pierre angulaire de l'identification de l'acte de contrefaçon, on se trouvera d'emblée amené à penser l'acte de contrefaçon dans le paradigme de la spécificité. Une spécificité qui découle fondamentalement de la spécificité du droit auquel il porte atteinte, en l'occurrence, le droit de propriété sur la marque. C'est en effet, une atteinte spécifique à un droit spécial.

L'apport théorique de l'approche synthétique du concept de contrefaçon aura donc pour effet, a priori, de le distinguer en fonction de ces spécificités telles qu'elles se dégagent de l'article 44 al. 1 qui dispose que « Toute atteinte portée aux droits du propriétaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile et pénale de son auteur ».

Sur la base de cet alinéa, l'acte de contrefaçon ne peut intervenir sans la réunion de deux conditions cumulatives intimement liées à savoir un droit exclusif sur la marque et une atteinte qui lui est perpétrée. Ces deux conditions résument pertinemment l'économie générale de l'acte de contrefaçon et dévoilent sommairement ses caractéristiques propres.

D'un point de vue chronologique, on ne peut envisager de parler de la contrefaçon de marque sans l'existence préalable d'une marque. La marque comme tout bien incorporel tire son existence de la loi 1 et par une décision de la loi. Elle consiste, au sens de l'article 2 de la loi n°36-2001, en un signe visible servant à distinguer, dans le commerce, les produits et services d'une personne physique ou morale par rapport à leur semblable.

Etant un bien immatériel, la marque s'acquiert exclusivement et initialement par un mode spécial qu'est l'enregistrement. Ce dernier confère à son titulaire, conformément à l'article 21 de la loi n°36-2001, un véritable droit de propriété sur le signe qui la constitue dans son application aux produits et services désignés dans l'enregistrement.

1 CARBONNIER (J) : Droit civil, Les biens. 12ème éd, Thémis, PUF 1988. N°19 et 83. p. 87 et 373.

Ceci étant, l'efficacité du droit de propriété sur la marque se trouve subordonnée à l'observation de conditions légales strictes qui tiennent à sa validité lors de sa création et à son opposabilité lors de son exploitation.

En conséquence, une marque nulle ou dont les droits qui s'y rattachent sont inopposables n'est en rien une marque, dès lors, son propriétaire ne pourra plus bénéficier de la protection spéciale que lui garantie la loi des marques. En effet, la loi n°36-2001 ne protège la marque que si elle répond à ses conditions rigoureuses relatives à la validité et l'opposabilité du droit dont elle fait l'objet.

Il s'ensuit que si l'une de ces conditions fait défaut dans une marque, tout l'édifice des dispositions échafaudées sur la loi des marques cessera de lui être applicable, ceci aura donc pour conséquence de déplacer le débat en dehors de la loi n°36-200 1 et c'est ainsi qu'un changement de paradigme s'opère.

En effet, étant une atteinte aux droits du propriétaire de la marque, l'acte de contrefaçon est érigé en délit pénal selon les articles 51 et 44 al. 2 de la loi n°36-2001. Ceci dit, on ne peut qualifier une atteinte, aux droits sur la marque, de contrefaçon qu'en application de la loi n°36- 2001, or si le droit sur la marque n'est pas valablement constitué ou utilement opposable, la loi des marques ne lui sera plus applicable, dès lors et par ricochet, il n'y aura plus lieu d'identifier une quelconque atteinte comme constitutive d'acte de contrefaçon.

Ainsi, se dévoile la première spécificité de l'atteinte constitutive de l'acte de contrefaçon. Une spécificité directement rattachée aux caractéristiques propres de son objet, en l'occurrence, le droit de propriété sur la marque. ( Chapitre 1 )

A l'image de toute propriété incorporelle, la marque évoque le droit de propriété par son opposabilité quasiment absolue du moment qu `elle peut être défendue contre quiconque y porte atteinte. Par ailleurs, le droit de propriété s'analyse comme un rapport de droit entre son titulaire et la chose ou le bien objet du droit, ce rapport implique par sa nature certaines prérogatives dont le bénéfice revient exclusivement au propriétaire.

En raison de sa nature exclusive, le droit de propriété sur la marque se trouve naturellement assorti, à l'égard des tiers, d'une interdiction formelle de porter atteinte aux droits privatifs accordés au propriétaire. C'est précisément de la violation de ces droits que découle l'atteinte constitutive de l'acte de contrefaçon au sens de l'article 44 al. 1 de la loi n°36-2001.

Toutefois, si l'acte de contrefaçon résulte d'une atteinte aux droits du propriétaire de la marque, il convient de préciser qu'il est des cas où la qualification d'atteinte ne pourra être retenue soit parce que le propriétaire autorise un tiers à exercer un quelconque droit sur la marque soit parce que la loi greffe le droit de propriété sur la marque de servitudes légales comparables à celles supportées par le propriétaire d'un bien immeuble conformément à l'article 165 C.D.R.

Pour qu'il y ait donc atteinte constitutive de contrefaçon, il faut que l'acte reproché au tiers soit intervenu en dehors d'une quelconque autorisation de nature à le rendre fondé en droit.

Dans cette optique, l'acte de contrefaçon se présente comme l'atteinte qui contredit, en dehors de toute autorisation, les droits du titulaire de la marque dans leur acception privative ou exclusive.

Par ailleurs, pour qu'il y ait atteinte à la propriété sur la marque, il faut que cette atteinte soit située dans les limites objectives des droits conférés par l'enregistrement. Ceci nous amènera nécessairement à délimiter le champ dans lequel les droits sur la marque s'exercent et se localisent.

En effet, la portée du droit de propriété sur la marque se trouve triplement délimitée. En premier lieu, la protection de ce droit est fonction de son objet spécifique et qui se limite en substance aux produits et services pour lesquels la marque a été enregistrée conformément à l'article 21 de la loi n°36-2001, c'est ce que la doctrine et la jurisprudence ont convenu à appeler le principe de la spécialité de la marque.

En deuxième lieu, à l'image de tout droit subjectif, le droit de propriété sur la marque n'a d'existence que dans les limites géographiques de l'ordre juridique au sein duquel il est crée et reconnu, il s'ensuit que l'acte de contrefaçon doit nécessairement se localiser dans cette aire géographique d'efficacité du droit sur la marque, c'est ce qu'on entend par le principe de la territorialité du droit des marques et plus généralement de l'ensemble des droits de propriété intellectuelle.1

En dernier lieu, compte tenu du caractère temporaire 2 des droits sur la marque et qui se limite à dix ans à compter de la date du dépôt, la conséquence en est que les droits sur la marque ne sont opposables aux tiers que de durant cette limite temporelle. Il s'ensuit que l'atteinte constitutive de contrefaçon ne peut exister et n'aura de sens que si elle intervient dans cette durée de protection légale.

C'est seulement dans sa localisation tridimensionnelle, entendue dans le sens de la spécialité, la territorialité et la temporalité des droits sur la marque, que l'acte de contrefaçon revêt un sens et une spécificité par rapport à n'importe quelle atteinte 3 perpétrée à la marque.

Ainsi, se dégage le deuxième volet de l'identification de l'acte de contrefaçon dans sa double spécificité qui tient à la violation de l'exclusivité des droits sur la marque d'une part et à sa localisation tridimensionnelle d'autre part. (Chapitre 2)

1 Voir en ce sens, BOUCHE (N) : « Le principe de territorialité de la propriété intellectuelle ». Collection Logiques Juridiques 2002.

2 La temporalité étant le principe, ceci n'empêche pas le propriétaire désireux de conserver ses droits sur la marque de renouveler indéfiniment son dépôt à l'expiration de la période de protection de base fixée à dix ans selon l'article 6 de la loi n°36-2001 du 17 avril 2001..

3 En dehors de la spécialité et des limites spatio-temporelles des droits sur la marque, la protection de la marque ne peut être obtenue que dans les conditions du droit commun de la responsabilité civile que ce soit sur le terrain de la concurrence déloyale au sens de l'article 92 C.O.C ou sur celui de la responsabilité civile pour faute au sens des articles 82 et 83 C.O.C.

Toutefois, la localisation de l'acte de contrefaçon au sens de la trilogie citée plus haut n'est jamais aussi facile ou aisée à opérer pour deux raisons. En premier lieu, on note que la frontière est parfois mince entre une atteinte constitutive de contrefaçon et atteinte constitutive d'un acte de concurrence déloyale. Cette subtilité s'explique par le caractère dichotomique de l'atteinte portée à la marque et qui peut représenter à la fois une atteinte aux droits privatifs sur la marque et une atteinte à la règle de loyauté de la concurrence dans le domaine économique. Sur la distinction entre contrefaçon et concurrence déloyale, voir : PASSA (J) : « Contrefaçon et concurrence déloyale » LITEC, 1997.

En deuxième lieu, l'acte de contrefaçon est naturellement une question de fait dont l'appréciation relève souverainement du pouvoir discrétionnaire des juges de fond, or nul besoin de rappeler que la conviction du juge là dessus est largement teintée par une subjectivité inhérente à toute appréciation. C'est ce qui fait de l'identification de l'acte de contrefaçon une entreprise d'une exceptionnelle complexité et d'une évidente incertitude.

Chapitre 1 : Le droit sur la marque :

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault