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La démocratie dans les politiques d'Aristote

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par Valentin Boragno
Université Paris X Nanterre - Master 1 2006
  

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2.2. Les classifications selon les parties du peuple ( ô? ì?ñç ôï? ä?ìïõ) (IV, 6, 1292 b 22 - 1293 a 11)

Au chapitre IV, 6, Aristote inaugure une classification des espèces http://www.perseus.tufts.edu/cgi-bin/morphindex?lang=greek&lookup=to%2F&bytepos=283522&wordcount=3&embed=2&doc=Perseus%3Atext%3A1999.01.0057de la démocratie et de l'oligarchie, relativement semblable à celle des quatre premières espèces du IV, 4 106(*), au détail près qu'elle se fait selon les parties du peuple au pouvoir. Le critère de classement des parties du peuples n'est pas seulement un critère socio-professionnel. Les différentes parties étudiées tour à tour sont en effet : les paysans, les citoyens de naissance, les hommes libres, et les citoyens des villes dans la dernière espèce. La qualité du gouvernement dépendra du temps, du loisir que chacune de ses parties pourra consacrer à la cité, et surtout de la manière dont elle le consacrera. Dans ce chapitre, Aristote donnera donc une description plus poussée de la démocratie mesurée qu'au chapitre précédent.

- les espèces où le gouvernement se fait selon les lois ( êáô? í?ìïõò)

« Quand donc la partie agricole et celle qui possède une forme mesurée http://www.perseus.tufts.edu/cgi-bin/morphindex?lang=greek&lookup=ku%2Frion&bytepos=282705&wordcount=1&embed=2&doc=Perseus%3Atext%3A1999.01.0057 sont souveraines dans la constitution, le gouvernement se fait selon les lois. Ces gens-là, en effet, ont de quoi vivre de leur travail, mais ne peuvent pas mener une vie de loisir, de sorte qu'ayant établi la loi au-dessus de tout ils ne tiennent pas les assemblées indispensables. Il est permis aux autres de participer au pouvoir quand ils ont atteint le cens défini par les lois, de sorte que tous ceux qui possèdent un patrimoine équivalent au leur ont le droit d'y participer. En soi, le fait de ne pas permettre à tous cette participation est oligarchique, mais il est impossible d'avoir du loisir quand on n'a pas de revenus suffisants. Qu'il y ait là une espèce de démocratie, telles en sont les causes. 107(*) »

Seuls ceux qui ont du loisir, c'est-à-dire les riches, qui paient le cens, peuvent participer au pouvoir. Or, les caractéristiques communes aux démocraties du chapitre VI, 2, ne faisaient pas mention de cette possibilité d'être gouverné par une classe censitaire. Aristote signale lui-même le caractère oligarchique d'une telle constitution : « En soi, le fait de ne pas permettre à tous cette participation est oligarchique », mais il confirme pourtant qu' « il y a bien là une espèce de démocratie ». Une constitution démocratique peut donc reposer sur des citoyens qui « ne tiennent pas les assemblées indispensables108(*) », c'est-à-dire des citoyens absentéistes. « Avoir du loisir » ne signifie pas exclusivement « ne pas travailler ». Le verbe grec ó÷ïë?æåéí a un sens actif. Le loisir est une activité à part entière, d'ailleurs la seule activité qui vaille, et non un moment de repos ou de divertissement. C'est le moment où l'homme libre s'accomplit.

La deuxième espèce ressemble de très près à la première. Il s'agit d'une démocratie de citoyens pauvres et bien nés 109(*), qui correspond à la troisième espèce du chapitre IV, 4110(*). A nouveau, ne gouvernent que ceux qui peuvent en avoir le loisir ( äõíáì?íïõò ó÷ïë?æåéí) 111(*). La loi est respectée pour deux raisons. Le fait que seuls les biens nés participent au pouvoir limite la taille du corps civique. Par ailleurs, le fait qu'ils soient pauvres fait de cette démocratie elle-même un régime pauvre, et donc incapable de payer beaucoup de rétributions. Les assemblées, et donc les décrets, se trouveront limités, et donc la loi se trouvera respectée. Ainsi la pauvreté n'est pas forcément une faiblesse. Au contraire, les démocraties de la dernière espèce sont des régimes riches112(*).

La troisième espèce élargit encore le corps civique, puisque tous, pourvu qu'ils soient libres 113(*) , peuvent participer au pouvoir. Mais, comme les autres, ils n'en ont pas le temps. Ce sont pourtant bien des démocraties : être citoyen en effet ne se réduit pas à la participation au pouvoir. C'est un ensemble de droits, et de privilèges économiques114(*), qui compensent l'absence de participation politique. Dans ces trois espèces, les lois gouvernent, car le peuple ne cherche pas à gouverner en promulgant des décrets. On peut être un bon citoyen sans pour autant avoir « l'assemblée facile ».

- les espèces où la masse est souveraine

« Quatrième espèce de démocratie, celle qui est apparue chronologiquement la dernière dans les cités. Car du fait que les cités sont devenus beaucoup plus importantes qu'à l'origine http://www.perseus.tufts.edu/cgi-bin/morphindex?lang=greek&lookup=kai%2F&bytepos=284153&wordcount=1&embed=2&doc=Perseus%3Atext%3A1999.01.0057 et plus riches de revenus, tous y participent au pouvoir dans la constitution du fait de la supériorité de la multitude, mais ils y prennent part comme citoyens parce qu'ils peuvent mener une vie de loisir et que les gens modestes touchent une indemnité. Et c'est avant tout une masse de ce genre qui a du loisir, car ces gens-là ne sont pas gênés par leurs affaires privées, alors que les riches ont cette gêne, de sorte que ceux-ci, souvent, ne participent ni à l'assemblée ni aux tribunaux. De là vient que c'est la masse des gens modestes qui est souveraine dans la constitution, et non pas ses lois.115(*) »

La quatrième espèce est, elle, foncièrement différente des précédentes. Elle n'existe que dans les cités riches et contemporaines d'Aristote. La redistribution des revenus publics ( ðñïó?äùí) en indemnités incite la masse des pauvres à participer au pouvoir. La situation est inversée par rapport aux précédentes. Du fait que les assemblées sont fréquentes et que les riches sont retenus par leurs affaires privées, alors que les pauvres ont tout le temps, les riches se retrouvent en minorité par rapport aux pauvres. Ceux-ci ne se privent pas de promulguer des décrets qui font contravention aux lois. 

Aristote semble penser que les riches sont plus aptes à respecter les lois que les pauvres. Parmi les arguments que donnaient les anti-démocrates en faveur de la classe censitaire, on peut citer l'habitude de manier des sommes importantes, l'éducation qui favorise la discipline et la rigueur, à la différence des nouveaux riches grossiers, et surtout et enfin, le temps qu'ils ont à consacrer à la cité116(*).

Dans ce chapitre, Aristote affirme l'efficacité, toute paradoxale, du désengagement partiel de la masse de la sphère du pouvoir. Est-ce seulement son emploi du temps qui fait qu'une masse est bonne ? ou au contraire celle-ci a-t-elle des qualités déterminées ?

* 106 Tricot, p. 277

* 107 Politique, IV, 6, 1292 b 25 - 35

* 108 Politique, IV, 6, 1292 b 29

* 109 Politique, IV, 6, 1292 b 36

* 110 Politique, IV, 4, 1292 a 2

* 111 Politique, IV, 6, 1292 b 37

* 112 Politique, IV, 6, 1293 a 2

* 113 Politique, IV, 6, 1292 b 40

* 114 Hansen, p. 127

* 115 Politique, IV, 6, 1293 a 1 - 11

* 116 Romily, J. de, p. 104

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