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La poursuite des crimes internationaux devant les juridictions militaires congolaises: analyse des garanties procédurales

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par Jean Paul MUSHAGALUSA RWABASHI
Université catholique de Bukavu - Licence en droit 2011
  

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§4. Du droit d'assistance et le contrôle de la détention provisoire.

S'agissant du droit d'être assisté d'un défenseur de son choix, cette garantie procédurale est limitée devant les juridictions militaires.

Cette limite du droit d'être assisté d'un défenseur de son choix s'affirme par le fait que d'une part, les avocats étrangers ne sont pas admis à assurer la défense des prévenus devant les juridictions militaires. En effet, l'art 61 du CJM dispose : « la défense des prévenus devant les juridictions militaires est assurée par des avocats inscrits au barreau, par des défenseurs judiciaires et des militaires agrées par le président de la juridiction. Les avocats, défenseurs judiciaires ou militaires agréés doivent être de nationalité congolaise»177(*).

D'autre part, l'assistance judiciaire gratuite n'est pas organisée devant les tribunaux militaires.

Un autre danger qui ruine l'assistance judiciaire est que les avocats qui interviennent devant les tribunaux militaires sont constitués ou désignés quelques jours seulement avant le début des audiences de jugement, voire en cours de procès.

Dans l'affaire Blaise Bongi par exemple, l'avocat de celui-ci, Maître BISIMWA NTAKOBAJIRA, n'a pu joindre Bunia, lieu de déroulement du procès, en provenance de Bukavu où il exerce, qu'après la première audience du procès.178(*) Dans d'autres cas, tel que l'affaire Kahwa, l'avocat du prévenu n'a pu conférer avec ce dernier pour la première fois que plusieurs jours après le début du procès179(*).

A ces défis allégués ci-haut, l'ineffectivité du droit à l'assistance est liée à trois autres faiblesses : d'abord, les avocats ne sont pas toujours familiers du droit pénal et de la procédure pénale militaire, mais également des droits de l'homme et du droit international pénal.180(*)

Au regard de tous ces maux, le législateur congolais devrait adapter le CJM aux instruments internationaux relatif au droit d'assistance en permettant aux justiciables de juridictions militaires, et encore plus, ceux poursuivis pour des crimes internationaux, de bénéficier l'assistance même celle des avocats étrangers.

Quant au contrôle de la détention provisoire : l'idée tirée de l'observation des prisons congolaises, fait montre d'une surpopulation carcérale et le nombre exacerbé des détenus préventifs.

Selon la déclaration de Maître SHEBELA MAKOMA, près de 80% de 3.500 personnes détenues au centre pénitentiaire de rééducation de Kinshasa (CPRK) étaient à titre préventif et poursuivis devant les juridictions militaires181(*).

En effet, l'analyse faite de la jurisprudence montre que ce phénomène est lié à l'absence de contrôle de la régularité de la détention provisoire devant les juridictions militaires.

L'affaire Germain KANTANGA et consorts illustre ces affirmations : arrêté le 19 mars 2005 avec d'autres chefs de milice de l'Ituri dont Thomas LUBANGA, ce dernier a été remis à la CPI le 17 mars 2006, laissant ses compagnons d'infortune en détention.

C'est sur cette occasion qu'il a été donné à la Haute Cour militaire, siégeant en chambre de conseil à la requête de l'auditeur général, de se prononcer. Chose surprenante, se fondant exclusivement sur l'art 209 du CJM, la haute Cour a non seulement déclaré régulière la détention préventive de Germain KATANGA pourtant vieille plus d'un an, mais elle l'a en plus prorogée en intimant l'ordre à l'auditeur de faire diligence pour l'instruction et envoyer l'affaire en jugement182(*). Dans l'affaire KILWA jugée par la Cour militaire du Katanga, les prévenus ont faits plus de 18 mois de détention préventive que la Cour justifiant par l'indice sérieux de culpabilité183(*). Malheureusement, la contradiction de la Cour en ce qui concerne les indices sérieux se manifesta par le fait que dans l'arrêt définitif, la plupart de prévenus furent acquittés184(*). De même, dans l'affaire ANKORO, les prévenus ont totalisé plus de 17 mois de détention préventive.

A notre avis, ces détentions prolongées contreviennent plusieurs instruments juridiques tant nationaux qu'internationaux.

En effet, l'art 209 du CJM dispose : « si l'instruction de l'affaire doit durer plus de 15 jours et que le magistrat militaire estime nécessaire de maintenir l'inculpé en détention, il en réfère à l'auditeur militaire. Celui-ci statue sur sa prorogation pour un mois ; et, ainsi de suite, de mois en mois, lorsque les devoirs d'instruction dûment justifiés l'exigent (...). Si la peine prévue est égale ou supérieure à six mois, la détention provisoire ne peut dépasser 12 mois consécutifs. Dépasser ce délai, la prorogation est autorisée par la juridiction compétente. A tout moment, le détenu peut demander à l'auditeur militaire sa remise en liberté ou la mise en liberté provisoire».

De plus, ces détentions prolongées violent l'art 9, point 3 du pacte international relatif aux droits civils et politiques en vertu duquel : « Tout individu arrêté ou détenu du chef d'une infraction pénale sera traduit dans le plus court délai devant un juge ou une autre autorité habilitée par la loi à exercer des fonctions judiciaires, et devra être jugé dans un délai raisonnable ou libéré » ainsi, l'art 9, point 4 du même pacte prévoit que : « qui conque se trouve privé de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal afin que celui-ci statue sans délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si sa détention est illégale ».

Nous estimons que la privation du droit au contrôle judiciaire de la régularité de la détention dans le plus bref délai est d'autant plus déplorable qu'au mépris du principe de la légalité des infractions.

Pour remédier à ce fléau, il serait souhaitable que le Droit congolais offre une contre mesure aux détenus de longue durée, en prévoyant leur indemnisation.

* 177 Article 61 alinéa 2 du CJM.

* 178 Ligue pour la paix et les droits de l'homme, Rapport d'observation du procès sur les crimes de guerre, Septembre 2006, p 14.

* 179 M. WETSH'OKONDA KOSO, Op.cit., p84.

* 180 Ibidem.

* 181 Déclaration de Me SHEBELA MAKOMA à l'occasion de la journée mondiale contre la peine de mort, cité par M. WETSH'OKONDA, Op.cit, p. 79.

* 182 Haute Cour militaire, Auditeur militaire c/Germain KATANGA er consorts, RP N° 001/05, 1 Décembre

2006.

* 183 Cour militaire du Katanga, Auditeur militaire c / C ILUNGA Adémar et consorts, RP 010/06.28 juin 2005, cité par M. WETSH'OKONDA, Op.cit, p.80.

* 184 Commission des droits de l'homme, procès de la Cour militaire du Katanga sur les crimes commis à Ankoro, cité par M. WETSH'OKONDA, Op.cit., p. 80.

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