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La permanence de la qualité d'associé

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par Inès KAMOUN
Faculté de droit de Sfax - Mastère en droit des affaires 2006
  

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Conclusion de la deuxième partie

La stricte application de la force obligatoire du contrat fait de la qualité d'associé une qualité permanente. Cette permanence a pour conséquence d'empêcher la sortie d'un associé sur sa propre initiative. Il en résulte qu'un associé désireux de quitter la société peut se trouver prisonnier de celle-ci, ce qui est excessivement contraignant pour lui. Une telle situation présente également un danger pour la société puisque, dans ce cas, l'associé prisonnier pourrait devenir un élément perturbateur susceptible d'entraîner un blocage du fonctionnement de la société et même d'en menacer la survie. C'est la raison pour laquelle la doctrine et la jurisprudence reconnaissent à l'associé le droit de ne pas rester prisonnier de ses titres. Le législateur autorise également le départ de l'associé désireux de quitter la société. Un tel départ traduit juridiquement la prohibition des engagements perpétuels et peut s'effectuer soit avec maintien, soit avec disparition du groupement.

La cession des droits sociaux et le retrait de l'associé sont deux modes de sortie de celui-ci qui s'effectuent avec maintien de la société.

S'agissant de la cession des droits sociaux, elle transfère la qualité d'associé à autrui. Elle a donc pour conséquence le départ de l'associé cédant et l'entrée d'un nouvel associé au sein de la société lorsque la cession est effectuée à un tiers. C'est pourquoi la cession est plus ou moins aisée selon la forme de la société et selon l'intensité de l'intuitus personae qui la domine. Ainsi, la cession des titres dans les sociétés de personnes requiert-elle en principe l'accord unanime des associés. Un associé désireux de quitter la société risque donc de se trouver prisonnier de celle-ci. En revanche, il ne court jamais ce risque dans les sociétés de capitaux et les sociétés à responsabilité limitée lorsqu'il trouve un acquéreur de ses titres. D'une part, la cession dans ces sociétés est plus facile que dans les sociétés de personnes. Dans les S.A.R.L., elle est, en effet, libre entre associés. Concernant la cession à un tiers, la loi n'exige pas l'accord unanime des associés ; elle n'exige que l'accord de la majorité représentant au moins les trois quarts du capital. Dans les sociétés de capitaux, le principe est celui de la libre cessibilité des actions, principe d'ordre public qui peut être limité par le jeu des clauses d'agrément mais qui ne peut en aucun cas être supprimé. D'autre part, que ce soit dans les S.A.R.L. ou dans les sociétés de capitaux, la sortie de l'associé est garantie, en cas de refus d'agrément, par l'obligation légale d'achat qui oblige la société à acquérir ou faire acquérir les titres dont le projet de cession a été repoussé.

Outre la cession des titres, le retrait constitue également une échappatoire à la permanence de la qualité d'associé par lui redoutée. Ce droit est expressément reconnu par le législateur au profit des associés des sociétés à capital variable et revêt, à cet égard, un caractère d'ordre public. Par conséquent, s'il peut être aménagé, il ne peut en aucune manière être supprimé.

Le droit de retrait peut aussi être reconnu par une clause au profit des associés des sociétés à capital fixe. Les clauses de retrait sont, en effet, valables tant au regard du droit des contrats qu'au regard du droit des sociétés. Cependant, l'associé désireux de quitter une société à capital fixe ne peut le faire en l'absence d'une clause autorisant son retrait. C'est la raison pour laquelle on s'est demandé s'il ne convient pas que le droit tunisien évolue en la matière. A cette question on a répondu par l'affirmative en partant d'un constat et d'une nécessité. On a, en effet, constaté que si l'associé peut utiliser la cession de ses titres pour quitter la société, des difficultés peuvent le rencontrer dans la réalisation de ladite opération. Ces difficultés tiennent surtout à l'absence d'un acquéreur des titres et se rencontrent notamment lorsque ceux-ci appartiennent à un associé minoritaire d'une société par actions ne faisant pas appel public à l'épargne ou à un associé d'une société de personnes. Elles peuvent avoir pour effet de rendre un associé prisonnier de la société alors même qu'il ait perdu l'affectio societatis. Sur la base de ce constat, une intervention législative en matière de retrait se révèle nécessaire à plus d'un titre. D'une part, elle serait de nature à protéger l'intérêt personnel de l'associé désireux de quitter la société. D'autre part, elle permettrait de préserver l'intérêt social puisqu'elle éviterait les dangers que l'associé prisonnier pourrait présenter sur le bon fonctionnement de la société, voire sur sa survie.

Le départ de l'associé peut également s'effectuer avec disparition de la société lorsque ce dernier en demande la dissolution. Une telle possibilité est reconnue par le législateur aux associés des sociétés en nom collectif et des sociétés en commandite simple à durée illimitée quand ils se trouvent dans l'impossibilité de céder leurs parts. En outre, tout associé a le droit de demander la dissolution de la société pour justes motifs tels que l'inexécution par un ou plusieurs associés de leurs obligations et la survenance d'une mésentente grave entre associés. L'exigence d'un juste motif montre le souci du législateur de préserver l'intérêt social puisque la disparition de la société est en jeu. Mais l'intérêt personnel de l'associé n'a pas été négligé dans la mesure où le droit de demander la dissolution de la société pour justes motifs est reconnu comme étant d'ordre public. L'associé ne peut, par conséquent, en aucune manière en être privé.

Au terme de cette étude, il apparaît que la permanence de la qualité d'associé, telle qu'elle découle du droit des contrats, est loin d'être absolue.

La stricte application de la force obligatoire du contrat fait que la sortie d'un associé de la société doive être consentie tant par celle-ci que par l'associé dont la sortie est envisagée. Ainsi, la société ne peut-elle pas écarter un associé contre son gré alors même que son intérêt l'exige. Inversement, un associé désireux de quitter la société ne peut le faire par sa seule volonté et risque, par conséquent, de se voir prisonnier de ses titres. La qualité d'associé présente donc un caractère permanent, désiré par l'associé dans le premier cas et par lui redouté dans le second.

Or, le principe de la permanence de la qualité d'associé est excessivement contraignant en la matière. C'est la raison pour laquelle plusieurs modes de sortie de la société viennent atténuer sa rigueur. Qu'elle soit désirée ou redoutée par l'associé, la permanence de sa qualité subit des atténuations, voire des exceptions justifiées tantôt par l'intérêt social, tantôt par l'intérêt de l'associé.

Ainsi, la permanence de la qualité d'associé par lui désirée est-elle fortement atténuée par la diversité des cas d'exclusion. Ces cas se justifient par le souci de préserver l'intérêt de la société, celle-ci étant une institution, une personne morale autonome par rapport aux associés. Loin d'être permanente, la qualité d'associé se révèle donc précaire. Il est à noter, à cet égard, que bien que le droit tunisien consacre plusieurs hypothèses d'exclusion, la situation actuelle n'est pas satisfaisante et on espère que l'exclusion sera au nombre des prochaines interventions du législateur en droit des sociétés. L'intervention du législateur devrait se faire dans un sens qui permettrait de libéraliser davantage l'exclusion d'un associé afin d'assurer une meilleure protection de l'intérêt social.

La précarité de la qualité d'associé est, cependant, contrebalancée par les garanties accordées à l'exclu. Celui-ci reçoit, en effet, un remboursement de son apport. Il peut, en outre, soumettre au juge le contrôle de son exclusion, à la fois quant à sa procédure et quant à ses motifs, afin d'écarter toute exclusion arbitraire. Un tel contrôle peut même aboutir à la réintégration de l'associé injustement exclu qui reprend ainsi sa qualité.

Quant à la permanence de la qualité d'associé par lui redoutée, elle subit aussi des atténuations justifiées par l'intérêt personnel de l'associé et traduisant l'idée selon laquelle celui-ci a un droit à quitter volontairement la société et à ne pas rester prisonnier de ses titres. Ces atténuations traduisent également la prohibition des engagements perpétuels. Ainsi, un associé peut-il échapper à la permanence de sa qualité par lui redoutée en exerçant l'un des modes de sortie qui lui sont permis.

La cession des droits sociaux constitue l'une des échappatoires possibles. Elle a l'avantage de permettre la survie de la société suite au départ de l'un des associés. Elle est plus ou moins aisée selon la forme de la société et selon la qualité de l'acquéreur. Eu égard à l'intensité de l'intuitus personae dans les sociétés de personnes, la cession dans ces sociétés n'est, en effet, pas garantie par la loi dans la mesure où elle requiert en principe l'accord unanime des associés. Au contraire, dans les sociétés de capitaux et les S.A.R.L., elle est garantie par la loi puisque ses conditions ne sont pas assez rigoureuses et surtout puisqu'une obligation légale d'achat bénéficie à l'associé désireux de quitter la société en cas de refus d'agrément.

Le retrait de l'associé constitue une autre échappatoire permettant à celui-ci de fuir la permanence de sa qualité par lui redoutée. Comme la cession des titres, ce mode de sortie a l'avantage de laisser survivre la société à laquelle appartenait l'associé partant. Il permet, par conséquent, la conciliation des intérêts en présence. Ce droit est consacré par le législateur au profit des associés des sociétés à capital variable et est reconnu, à cet égard, comme étant d'ordre public. Il peut également être reconnu par le jeu d'une clause aux associés des sociétés à capital fixe. Mais à défaut de fondement conventionnel, ces associés ne peuvent exercer un tel droit. Une intervention législative en la matière dans le sens de la généralisation du droit de retrait serait donc la bienvenue.

La demande de dissolution de la société permet également à l'associé de quitter celle-ci. Mais le départ de l'associé entraîne dans ce cas l'anéantissement de la personne morale. Ainsi, un associé d'une société en nom collectif ou d'une société en commandite simple à durée illimitée pourrait-il demander la dissolution de la société lorsqu'il se trouve dans l'impossibilité de céder ses parts. Un associé pourrait également invoquer un juste motif de dissolution, comme l'inexécution par un ou plusieurs associés de leurs obligations ou la mésentente survenue entre associés, afin de provoquer l'éclatement de la société et assurer par là même sa sortie de celle-ci. Une telle possibilité est unanimement reconnue comme étant d'ordre public.

Toutes ces possibilités constituent des applications du droit de l'associé de ne pas rester prisonnier de la société et permettent donc de tempérer la rigueur de la permanence de sa qualité par lui redoutée.

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