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Open data : à  la recherche de standards communs pour la réutilisation de l'information publique

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par Josselin Henno
Université de Versailles Saint-Quentin-en-Yvelines (UVSQ) - Master 2 Droit des nouvelles technologies 2011
  

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C - Les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle

31 - Une des problématiques juridiques majeures soulevées par l'Open Data est la gestion des droits de propriété intellectuelle susceptibles d'être attachés aux informations publiques. Comme énoncé en introduction, le concept Openness qui sous-tend l'Open Data suppose que les informations soient « libérées » de tout droit exclusif. Or la directive ISP prévoit déjà en son article 1er 2. b) que la directive ne s'applique pas « aux documents dont des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ». Le législateur communautaire précise dans le considérant (22) de la directive que la notion de droits de propriété intellectuelle recouvre uniquement les droits d'auteur et les droits voisins (incluant les formes de protection sui generis, ajoutant aussitôt que la directive

33 Jeff Howe, The rise of crowdsourcing, n°14.06, Juin 2006

34 http://fr.wikipedia.org

35 Wikipédia est donc un très bon exemple de crowdsourcing. En effet ce projet d'encyclopédie collaborative est porté par de nombreux contributeurs (plus de 5000 contributeurs actifs pour le Wikipédia français), dont les connaissances sont agrégées sous forme d'articles thématiques.

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n'est pas applicable « aux documents visés par les droits de propriété industrielle, comme les brevets, les dessins déposés et les marques et modèles ». En outre, il est précisé que les obligations imposées par la directive « ne s'appliquent que dans la mesure où elles sont compatibles avec les dispositions des accords nationaux sur la protection des droits de propriété intellectuelle ». Il ne s'agit là que d'un paradoxe apparent. En effet, le législateur communautaire a entendu réaffirmer le principe d'exclusivité qui garantit la protection des droits de propriété intellectuelle. Dès lors, l'Open Data ne remet pas en cause les fondements juridiques de la propriété intellectuelle ; il s'agit pour les Etats de concilier respect des droits de propriété intellectuelle et ouverture des informations publiques. Ainsi, la mise en oeuvre juridique de l'Open Data implique une autorisation d'exploiter les droits de propriété intellectuelle qui peuvent accompagner les informations publiques (Voir Chapitre 2).

32 - L'ordonnance du 6 juin 2005 a transposé ce principe d'exclusion des droits de propriété intellectuelle en son article 10 c), qui modifie insensiblement la formule laconique de l'article premier de la directive. Ainsi, ne sont pas des informations publiques « les informations contenues dans des documents (...) sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ».

33 - En pratique, les contours de cette exclusion sont difficiles à cerner dans la mesure où le législateur semble avoir assoupli cette limite au sein du régime d'accès. En effet, la protection des droits de propriété intellectuelle était déjà prévue dans la version initiale de la loi de 1978 en matière d'accès aux documents administratifs. Ainsi l'article 10 de la loi prévoyait que « Les documents administratifs sont communiqués sous réserve des droits de propriété littéraire et artistique ». Cette disposition était assortie d'un second alinéa, prévoyant l'interdiction « de reproduire, de diffuser ou d'utiliser à des fins commerciales les documents communiqués ». Or le nouvel article 9 de la loi, issu de l'ordonnance de 2005, a conservé le premier alinéa mais pas le second. Dès lors, il semblerait que les documents administratifs obtenus dans le cadre de la procédure d'accès puissent faire l'objet d'une réutilisation, quand bien même ils renfermeraient des objets protégés par des droits de propriété intellectuelle, ou du moins des droits de propriété littéraire et artistique.

34 - Par ailleurs, les « tiers » de l'article 10 c) ne font l'objet d'aucune définition. Les informations publiques étant produites ou reçues par les administrations, il convient d'envisager la possibilité que les tiers ainsi désignés soient les fonctionnaires, premiers artisans de l'information

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publique. Depuis la loi DADVSI36, les fonctionnaires sont considérés comme étant titulaires ab initio d'un droit d'auteur sur les oeuvres qu'ils créent, au même titre que les salariés37. Cette déclaration ne doit pas masquer le régime des auteurs fonctionnaires, qui demeure spartiate tant dans ses attributs moraux que patrimoniaux. D'une part, l'article L. 121-7-1 du code de la propriété intellectuelle soumet l'exercice de son droit de divulgation par « l'agent » au « respect des règles auxquelles il est soumis en sa qualité d'agent », et il ne peut ni « s'opposer à la modification de l'oeuvre dans l'intérêt du service », ni « exercer son droit de repentir et de retrait ». D'autre part, l'article L. 131-3-1 du code de la propriété intellectuelle organise une cession de plein droit à l'Etat du droit d'exploitation sur l'oeuvre, « Dans la mesure strictement nécessaire à l'accomplissement d'une mission de service public ». Néanmoins, si l'Etat souhaite réaliser une exploitation commerciale de ces oeuvres, il ne dispose plus envers l'agent que d'un droit de préférence38. Cette dernière considération est à prendre en compte s'agissant de la question de la gratuité des informations publiques. En effet, dès lors qu'une administration39 envisage de commercialiser des informations publiques contenant une oeuvre créée par un fonctionnaire, il doit au préalable conclure un contrat avec cet agent, en usant de son droit de préférence. A défaut de contrat, l'exploitation commerciale violerait les droits d'auteur de l'agent et la réutilisation de cette oeuvre serait une contrefaçon. Néanmoins, le risque pour les réutilisateurs d'informations publiques est à nuancer : la Licence Ouverte qui en cadre la réutilisation d'informations en France (Voir Titre II) dispose en effet que « Le « Producteur » garantit que « l'Information » ne contient pas de droits de propriété intellectuelle appartenant à des tiers ». Dès lors, en cas de litige relatifs à des droits de propriété intellectuelle, les réutilisateurs d'informations publiques pourraient engager la responsabilité du Producteur de l'Information.

35 - Il semblerait que le législateur ait souhaité que les informations publiques et les droits de propriété intellectuelle n'entretiennent aucun rapport entre eux. Cette analyse est corroborée par la formule de l'article 10 c) : « Ne sont pas considérées comme des informations publiques (...) les

36 Loi du 1er août 2006 relative aux droits d'auteur et aux droits voisins dans la société de l'information

37 L'article L. 111-1, alinéa 3, du Code de la propriété intellectuelle dispose : « L'existence ou la conclusion d'un contrat de louage d'ouvrage ou de service par l'auteur d'une oeuvre de l'esprit n'emporte pas dérogation à la jouissance du droit reconnu par le premier alinéa, sous réserve des exceptions prévues par le présent code. Sous les mêmes réserves, il n'est pas non plus dérogé à la jouissance de ce même droit lorsque l'auteur de l'oeuvre de l'esprit ou un agent de l'Etat, d'une collectivité territoriale, d'un établissement public à caractère administratif, d'une autorité administrative indépendante dotée de la personnalité morale ou de la Banque de France. »

38 Article L. 131-3-1 alinéa 2 du Code de la propriété intellectuelle : « Pour l'exploitation commerciale de l'oeuvre mentionnée au premier alinéa, l'Etat ne dispose envers l'agent auteur que d'un droit de préférence ».

39 La formulation du deuxième alinéa de l'article L. 131-3-1 vise « l'Etat ». Il s'agit d'une maladresse du législateur car la disposition s'applique en fait à toutes les administrations.

38 - La directive du 17 novembre 2003 exclut de son champ d'application les « documents

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informations contenues dans des documents (...) sur lesquels des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle ». Mais les innombrables références aux droits de propriété intellectuelle dans le régime de réutilisation trahissent l'ambiguïté de ce rapport. Au soutien de cet argument, l'on citera l'article 25 de la loi de 1978, qui porte l'art de la contradiction à son climax. Dans un chapitre intitulé « Dispositions communes » (aux régimes d'accès et de réutilisation), cet article énonce : « Lorsqu'un tiers est titulaire de droits de propriété intellectuelle portant sur un document sur lequel figure une information publique, l'administration qui a concouru à l'élaboration de l'information ou qui la détient indique à la personne qui demande à la réutiliser l'identité de la personne physique ou morale titulaire de ces droits ou, si celle-ci n'est pas connue, l'identité de la personne auprès de laquelle l'information en cause a été obtenue ». Autrement dit, il se peut qu'une information publique soit grevée par des droits de propriété intellectuelle... Face à cette contradiction manifeste, la garantie d'absence de droits propriété intellectuelle qui est fournie par la Licence Ouverte (Voir Titre II) est une bénédiction.

36 - Nous avons vu que le législateur a expressément exclu du champ des informations publiques les informations les informations sur lesquelles des tiers détiennent des droits de propriété intellectuelle. Il ressort de cette exclusion de principe que le cadre juridique de l'Open Data ne remet pas en cause le droit de la propriété intellectuelle. Cependant, la portée de cette disposition sibylline est difficile à évaluer eu égard à l'absence de précision quant à la notion de « tiers » qu'elle évoque. L'article 25 de la loi, qui évoque l'hypothèse de l'existence de droits de propriété intellectuelle assis sur un document « sur lequel figure une information publique » rend d'autant plus opaque cette exclusion. En somme, le réutilisateur d'informations publiques ne peut que se parer de la garantie d'absence de droits de propriété intellectuelle sur les informations publiques mises à disposition.

37 - A mi-chemin entre les informations exclues du champ de la réutilisation et les informations devant faire l'objet d'une mise à disposition, on trouve les informations produites par les établissements et institutions d'enseignement et de recherche et les établissements culturels, qui font l'objet d'un régime dérogatoire.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry