102
Chapitre IV. Décentralisation et organisation des
collectivités territoriales
Ici, la perspective d'analyse met en exergue surtout la
question de l'État dans un dynamisme de décentralisation.
À cet égard, la nation haïtienne est confrontée
à un dilemme qui permet soit, dans une simplicité non viable, de
rester accrocher au bon office de la communauté internationale, ou soit,
dans un esprit combattif, de mobiliser ses ressources en priorisant ses
intérêts pour reconquérir l'essence de
l'indépendance nationale. Ce combat, s'il est engagé, est
fonction du respect de l'application du minimum consensus qui s'établit
fondamentalement dans la Constitution de 1987 et sur certains aspects
socio-anthropologiques des valeurs traditionnelles de la société
haïtienne.
Par cette indépendance, il s'agira de pouvoir disposer
de la latitude de définir des politiques103 publiques qui,
ressortant des plans : politique, économique et social, concernent les
entreprises publiques, la production nationale, l'agriculture, la
réforme agraire, etc. Ainsi, une des principales démarches
revient à disposer des connaissances réelles et approfondies des
mécanismes de fonctionnement de notre économie, des ressorts
profonds de la société et des sources de son dynamisme. Ce
faisant, le but se détermine dans la définition des
priorités dans les choix de politique économique (F. Deshommes,
2005).
Aussi convient-il de disposer des allocations
budgétaires nécessaires par rapport au processus de
développement. Ce qui exige des facteurs préalables de
planification en matière de politiques publiques qui doivent soutenir un
effort programmé d'action visée au mécanisme de production
de développement des ressources humaines, d'infrastructures
routières et de services de bases qui participent dans la ligne
d'intérêts généraux de l'État et des
collectivités territoriales dans leurs intérêts locaux. Ces
actions programmées sont donc vouées à conduire à
une économie qui renoue avec la croissance positive. Mais, cette
croissance doit être bénéfique pour toutes les couches
sociales. Et, l'une des voies privilégiées par la Constitution de
1987 pour arriver à acheminer les signaux de progrès
économique dans tous les coins du pays est la bonne gouvernance. Cette
dernière peut être effectuée dans le cadre de la
décentralisation qui est un choix structurel de changement de politique
administrative accordant de l'autonomie aux collectivités territoriales.
En ce sens, elle entame la décentralisation politique qui est une
dévolution de compétence limitée à
103 Nous entendons par politique publique toutes les
décisions politiques qui accordent des priorités à des
objectifs qui s'intéressent à certains enjeux fondamentaux
théoriques et pratiques pour le développement de la
communauté en question.
103
l'intérieur des frontières géographiques.
Les collectivités territoriales sont l'émanation de l'article 61
de la Constitution de 1987 qui leur confère des compétences en
qualité d'institutions locales autonomes jouissant de
personnalité juridique et des ressources propres en vue d'administrer
leurs affaires locales sous l'égide de l'État unitaire (Privert,
2006). Les autorités locales sont élues par la population de la
circonscription géographique pour assurer la gestion des affaires
collectives y relatives.
À la considération d'un besoin de
décentralisation de l'État, il parait évident qu'il y a
une relation de transitivité entre la décentralisation et le
développement local (Deberre, 2007). La décentralisation est ce
partage de responsabilité que l'État unitaire centralisé
consent de manière dévolutive aux collectivités
territoriales qui s'engagent à gérer en toute autonomie leurs
propres ressources en vue de mener des actions de développement
économique pour leurs populations. La décentralisation de
l'État à travers des collectivités territoriales est un
acte significatif qui engage deux entités.
L'État central transfert des pouvoirs aux
autorités locales et garde ses prérogatives de contrôle.
Les autorités locales accusent des responsabilités de gestion qui
les habilitent à concevoir de véritables politiques publiques
pour le développement de leur communauté dans le respect des
intérêts généraux de l'État. Chaque concept
sera développé de manière séparée dans
toutes ses dimensions théoriques.
Léger (2000, p. 87) précise que la
décentralisation est un projet de société qui
réunit tous les acteurs : nationaux, régionaux et locaux. Un
partage proportionnel de responsabilités s'y opère dans la
gestion publique des domaines relatifs au développement. Le but
essentiel renvoie à l'emploi adéquat et rationnel de moyens pour
satisfaire des besoins.
Cette assertion démontre le caractère purement
économique de la décentralisation, celle de l'homo-oeconomicus.
Or il n'y a pas de frontière étanche entre l'économique et
le social. Dans ce sens, Azoulay (2002) précise que : «
l'amélioration des conditions matérielles d'existence des
personnes impose finalement le fondement de l'économique et cette
amélioration est comme le tissu nerveux dans la biologie humaine pour la
notion de développement.»(p. 26).
104
4. 1.-Rappel historique du fondement de la
décentralisation en Haïti
Ce concept est largement développé par la
Constitution de 1987 qui en fait une option structurelle de
développement par excellence. Mais en réalité, il y a
diverses dispositions légales attestant les idées de la
décentralisation en prélude de cette Constitution. En effet, deux
courants disputent le fondement des idées de la décentralisation
dans ses parcours historiques. L'un détecte son immixtion dans notre
législation depuis la création de la Commune en 1816 dont la
subdivision de l'Arrondissement en Commune104 dispose d'un
représentant de la Commune dans une chambre de communes et un chef
tenant lieu dans le département, et, l'autre en décrit sa
prépondérance fonctionnelle avec la Constitution de 1843. La
charge des écoles primaires est confiée aux Communes et aux
villes celle des écoles supérieures105. En outre,
d'autres responsabilités à la fois civiles et financières
sont attribuées à un projet comme chef d'administration (conseil
d'arrondissement) et un maire de la Commune. Il est créé depuis
lors le principe d'autonomie des collectivités territoriales. Mais en
réalité, aucun effort concret n'a été engagé
dans un processus d'implémentation de la décentralisation.
Contrairement à la France qui a dû affronter les
difficultés de la centralisation à outrance pour commencer avec,
d'abord des programmes d'aménagement du territoire, puis la
décentralisation au cours des années 1960. C'est au cours des
années 1980 qu'Haïti a timidement commencé à pencher
sur la solution de la décentralisation pour permettre aux
collectivités territoriales de contribuer à la gestion de
l'espace territorial.
4.1.1.-Fondement légal de la
décentralisation en Haïti
L'idée de la décentralisation a traversé
la société haïtienne depuis le XIXe
siècle. Elle a laissé des traces vivaces avec plusieurs lois et
décrets qui ont consacré des matières constructives au
renforcement des capacités fonctionnelles des Communes. Certaines
dispositions légales ont été prises en vue de permettre la
réalisation de l'autonomie de gestion et l'augmentation des revenus
communaux qui sont nécessaires au processus de décentralisation.
C'est notamment le cas de la loi du 13 février 1968 règlementant
les services hydrauliques de la République, de la loi du 12 juin 1974
relative à l'usage des eaux souterraines, des décrets du 3 mars
1981 et du 21 avril 1983 sur le SMCRS désormais transformé en
SNGRS. Mais cette transformation tend à centraliser. C'est
104 Ces informations sont fournies dans la constitution
d'Haïti de 1816, les articles 42 et 43.
105 Ces informations sont fournies dans la constitution
d'Haïti de 1843, les articles 31 et 135.
105
une manière d'enlever le pouvoir de décider des
collectivités territoriales sur la gestion de leurs déchets. Il
peut bien y avoir de la coopération inter-régionale,
inter-communale, etc.
En effet, depuis 1974, on commença à utiliser
formellement le terme de décentralisation avec des textes légaux
portant sur la mobilisation fiscale en faveur des structures communales. S'y
ajoutent le décret du 5 avril 1979, modifié par le décret
du 23 décembre 1981 relatif à la CFPB, stipulant un impôt
réel communal basé sur la valeur locative de tout immeuble
(Paillant, 2015), la loi du 18 septembre 1978 sur les délimitations
territoriales et la loi du 19 septembre 1982 relative à l'adoption d'une
politique cohérente d'aménagement du territoire et de
développement à partir des entités régionales
issues du regroupement des départements géographiques et des
arrondissements de la République.
Selon Privert (2006, p. 197), l'article 67 du
décret-loi du 22 octobre 1982 sur la Commune institue le schéma
d'inscription des recettes et des dépenses au budget communal par
chapitres et sections. Cela démontre bien, dès lors, l'effort qui
se déployait pour structurer la gestion administrative des Communes qui
vont être considérées comme des collectivités
territoriales avec des compétences fiscales plus étendues.
Reste que le chantier de la décentralisation
présente encore de nombreux travaux à faire, en dépit de
différents textes de loi et décret qui rejoignent des dispositifs
constitutionnels tendant à encadrer le processus, faciliter la
disponibilité des ressources, etc. En 1991, il y avait une loi sur les
collectivités territoriales qui a été votée, mais
non promulguée par le pouvoir exécutif. Rien ne précise si
le pouvoir exécutif en avait fait objection. La CFGDCT instituée
par la loi du 20 août 1996 apporte un complément sur le plan
financier aux revenus communaux dans l'objectif de promouvoir l'autonomie
administrative et financière des collectivités territoriales.
Certainement, nous retenons la promulgation de la loi du 4 avril 1996 portant
organisation de la collectivité territoriale de la Section communale.
Aussi le décret du 28 septembre 1987 sur la Patente et le décret
du 15 janvier 1988 portant sur les recettes des collectivités
territoriales contribuent-ils aux efforts visant à accroître les
revenus des collectivités territoriales. En outre, sont introduits les
décrets du 1er février 2006 : 1) fixant le cadre
général de la décentralisation ; 2) portant organisation
et fonctionnement des Sections communales ; 3) portant sur l'organisation et le
fonctionnement du Département ; 4) portant sur l'organisation et le
fonctionnement de la collectivité territoriale municipale ; 5) portant
sur la fonction publique territoriale. Ils participent dans l'optique de
renforcement des structures d'organisation de ces entités pour leur
établissement
106
opérationnel. Enfin, sont arrivés le
décret de 2007 sur la création du fonds de développement
au niveau local, le décret du 22 juillet 2015 identifiant et
établissant les limites territoriales des Départements, des
Arrondissements, des Communes et des Sections rurales et le décret de
2017 qui établit des révisions sur la fiscalité locale des
collectivités territoriales. Mais dans un autre registre, la loi
constitutionnelle du 9 mai 2011 portant amendement à la Constitition du
29 mars 1987 a enlevé des fonctions dans l'appareillage des
collectivités territoriales. La modification au niveau de l'article 192
de la Constitution amendée est assez significative. Compte tenu des
attributions que les conseils départementaux détenaient dans le
processus de désignation des membres du conseil électoral
permanent.
4.1.2.-Approche théorique de la
décentralisation
L'approche de la décentralisation se distingue
à travers deux grands courants théoriques : en premier lieu, nous
retrouvons les théories normatives ou celles dites encore
libérales prônant dans leurs objets, la gestion efficace et
efficiente des affaires publiques dans la promotion de la démocratie et
le développement. S'y rejoignent des théories politiques de la
bonne gouvernance estimant que la décentralisation est un facteur de
stabilité politique, la théorie de la gestion de
l'efficacité qui établit la nécessité de la
relation harmonieuse entre le gouvernant et le citoyen en vue de recueillir de
meilleures informations sur les besoins de la population et d'autres
théories de choix politiques qui concernent l'accès de la
population à des services de meilleure qualité avec des
institutions de contrôle spéfiquement établies.
L'approche normative s'opère ainsi par de nombreuses
dispositions légales contraignantes ; en second lieu, les
théories analytiques dites descriptives qui, reconnaissant les
caractéristiques de la bonne gouvernance et la gestion de
l'efficacité, se distinguent par l'idée que l'État est un
instrument au service des classes dominantes qui se rattachent
elles-mêmes aux superstructures de la communauté internationale.
C'est ainsi qu'elles considèrent l'importance de la prise en compte du
contexte dans lequel s'appliquera la décentralisation qui établit
toujours une confrontation des intérêts divergents entre des
acteurs différents. Cette étude dégage ses
affinités pour l'approche normative. Mais, il est important d'interroger
à quel degré ses multiples dispositions légales ont-elles
contribué à changer les comportements et modifier les
mentalités ? La question de mentalité se révèle
donc un paramètre crucial qui doit conduire à la
concrétisation des mécanismes de la décentralisation.
À propos, l'enjeu de la décentralisation enjoint des
préoccupations sur la mise en
107
place d'un espace de concertation d'où surgissent
l'alliance, l'articulation entre les opérations, entre les acteurs
socio-économiques (Mengin, 1989, p. 22). Mais comment arriver à
mettre ensemble des groupes aussi hétérogènes des
composantes sociales haïtiennes ?
4.1.3.-Théorie juridique de la
décentralisation
La décentralisation, étant donné la
multitude d'instances autonomes de décisions, interpelle les organes
locaux106 de maitriser juridiquement leurs actions et de prendre en
toute liberté dans l'unique respect des lois et règlements, la
décision qu'ils veulent. En ce sens, Aron (1965) précise que la
caractéristique fondamentale des collectivités territoriales est
l'organisation des pouvoirs (p. 37).
Nombre d'écrivains produisent des réflexions
sur la thématique de la décentralisation. Nous passons à
pieds joints sur une revue de littérature du concept en
commençant par Baguenard (1980/2006, p. 9) qui conçoit que la
décentralisation renvoie à l'idée de gouvernement local.
Elle met l'accent sur l'auto-administration des collectivités
territoriales. Elle s'inscrit dans une logique de démocratie
locale107. Pour sa part, Léger (2000, p. 87) estime que la
décentralisation est un projet de société visant à
impliquer les instances locales dans la gestion publique par un partage plus
équilibré des responsabilités dans des domaines importants
du développement.
La décentralisation conduit à la bonne
gouvernance par trois moyens : premièrement, en améliorant
l'efficacité de l'allocation de ressources ; deuxièmement, en
promouvant la transparence qui réduit les possibilités pour la
corruption ; et enfin, en améliorant le recouvrement de coûts. Les
gouvernements locaux, étant plus proche aux citoyens, se retrouvent en
mesure de répondre à leurs besoins. Mais des conditions
préalables s'imposent pour pouvoir influencer la performance des
autorités publiques locales : la définition claire des
responsabilités de tous les niveaux de l'État pour éviter
tout quelconque chevauchement en matière de pouvoir et juridiction. Il
faut instituer une loi décrivant en détail les structures et
statuts des institutions publiques, surtout au niveau local (Thélusme,
2017). Car, les dispositions du code rural ne sont pas suffisantes. Le
contrôle est le point crucial qui garantit la bonne utilisation des
deniers de l'État. Pour cela, il est
106 Pour pouvoir mieux s'organiser dans la défense de
leurs intérêts, les organes locaux se regroupent en Haïti.
Les maires font partie de la Fédération Nationale des Maires
d'Haïti(FENAMH), créée en 1995. Les CASEC rejoignent
l'Association des CASEC d'Haïti qui est créée en 2005 et les
ASEC intègrent la Fédération Nationale des Asec
d'Haïti. Cf [
www.fenamh.org.ht].
107 Ce concept de démocratie locale est compris dans un
sens de foyer naturel de la démocratie et de la participation citoyenne
qui tend à la valorisation contemporaine de la proximité des
citoyens de la concentration et la personnalisation des pouvoirs en vue de
porter un regard actif sur les pouvoirs exécutifs et
délibératifs. CF [Lefebvre, Rémi, « Démocratie
locale» in Dictionnaire des politiques territoriales |En ligne
publication 2020 |http :www.cairn.info, page consultée le
16/03/2023].
108
nécessaire d'instituer une loi sur les
mécanismes de contrôle et de suivi. En support des lois
organiques, il faut un cadre réglementaire, les pratiques de
l'institution détaillées. Finalement, les élections
locales devraient se tenir régulièrement à un moment
différent de celles étant nationales.
4.2.-Responsabilité des ordonnateurs dans la
gestion de la finance dans le cadre de la décentralisation
La gestion des comptables de deniers publics tient à
l'efficacité et leur responsabilité en tant qu'ordonnateurs et
liquidateurs des dépenses publiques. Ils encourent une
responsabilité qui peut être disciplinaire, pénale et
civile sans préjudice des sanctions qui peuvent leur être
infligées par le Juge des Comptes à raison de leurs fautes de
gestion108.
4.2.1.-Prégnance de la corruption :
l'érection des institutions efficaces de contrôle
La gestion financière est un domaine très
important pour caractériser les activités financières qui
concourent à réaliser les objectifs des politiques publiques pour
le développement des communautés. Mais comme le souligne Gousse
(2012), « l'organisation et la gestion des administrations publiques dans
les pays en développement souffrent souvent de lourdeurs et de
dysfonctionnements qui vont les rendre particulièrement
vulnérables à la corruption. L'inflation des
réglementations contraignantes et complexes et la faiblesse des
contrôles y sont des caractéristiques fréquentes. »
(p. 55). Pour Haïti, le procès du fonctionnement de
l'administration publique est accablant dans son verdict. La corruption est un
fait socio-historique qui accable toutes les structures sociales. Des efforts
doivent être engagés pour en sortir à travers des
dispositifs fonctionnels du renforcement et de consolidation des institutions
efficaces dans le contrôle et la répression des actes
corruptibles.
Dans sa thèse intitulée : vers une
refondation du droit des finances publiques locales en Haïti,
Valmera(2021) a repris l'idée de Julien Mérion qui a dit que
la réforme constitutionnelle de 1987 vise à parachever la
construction de l'État enlisée dans les méandres du
néo-patrimonialisme et à moderniser des structures
étatiques en appuyant sur la démocratie et la
décentralisation. Dans la même ligne, Charles L. Cadet
(cité dans Valmera, 2021) a écrit que : « la période
qui s'ouvre avec la loi constitutionnelle de 1987 constitue
théoriquement une rupture dans l'évolution
108 Ces informations sont fournies dans le décret du
décret du 16 Février 2005 faisant office de loi organique sur la
préparation et l'exécution des lois de finances suivant ses
articles 79, 80 et 82. Même si le texte ne renferme pas des
précisions sur le concept de faute de gestion.
109
institutionnelle et politique du pays en tant qu'elle inaugure
des types de démarche pouvant rapprocher l'État le plus que
possible d'un idéal de modernité ». Et dans ses propos,
Doré (2002) considère que cette loi mère met fin au
corporatisme d'État (p. 108).
L'institution internationale de dénonciation de la
corruption TI (2002) précise que « c'est tout un système de
contre-pouvoirs et de garde-fous qu'il s'agit de mettre en place pour s'assurer
que les organismes et les institutions publiques rendront comptes et garantir
le respect des principes fondamentaux contenus dans la loi et dans la
Constitution. » (p. 65).
Le résultat d'une bonne gestion financière
dépend des institutions de contrôle. Le contrôle permet de
mesurer l'efficacité d'une institution. À cet égard,
Haïti accuse toutes ses faiblesses. Les différentes institutions
telles que : CSCCA, ULCC, UCREF, IGF, etc. ont montré des manquements
évidents dans le contrôle des deniers de l'État. La
justice, dans son appareillage n'a pas su non plus manifester ses
capacités pour réprimer systématiquement les actes de
corruption. D'où s'ensuit un cycle infernal d'impunité qui
s'érige en système en Haïti.
4.3.-Organisation de l'administration centrale de
l'État
Les articles 234 et 234 al.1 de la Constitution de 1987
définissent l'administration publique comme l'instrument par lequel
l'État concrétise ses missions et objectifs. Elle est
constituée de l'administration d'État et de l'administration des
collectivités territoriales. Pour garantir sa rentabilité, elle
doit être gérée avec honnêteté et
efficacité. Ce qui rejoint un point fort de l'approche normative de la
décentralisation.
La loi constitutionnelle a consacré la question de la
décentralisation comme une stratégie de développement
économique collaboratif avec les différentes entités
régionales et locales qui s'alignent dans les efforts à divers
niveaux sous l'auspice du pouvoir central. La décentralisation apparait
à la fois comme une technique et un enjeu sociétal. Cette
Constitution contraint aussi à la marche de pair la
déconcentration administrative et la décentralisation. Ainsi, les
articles 85 et 86 de la section E se réfèrent à la
délégation au niveau départemental et aux vices
délégations dans les Arrondissements comme représentants
de l'administration centrale ; 61 à 87 définissent des
collectivités territoriales, de leurs représentants, de la
décentralisation et l'article 217 des finances locales.
110
4.3.1.-Finance dans le processus de la
décentralisation
La Constitution de 1987 stipule que les collectivités
territoriales jouissent de l'autonomie, administrative et financière
(art. 66). L'État fournit un cadre structurel de formation sociale,
économique, civique et culturelle dans les Sections communales (art.
64). Dans les rapports entre l'État central et les collectivités
territoriales, le principal se matérialise par la question
d'intérêt général signifiant la gestion des
ressources au niveau administratif et politique (art. 74, 81, 87.2 et 87.4). En
cela, Mordacq (2011) soutient que la finance publique est une question centrale
dans le pilotage des politiques publiques quant à la
soutenabilité des modes appropriés de la bonne gouvernance (p.
41).
En appréciation du partage, du transfert, de l'octroi
de pouvoir ou compétence que confère l'État central via la
décentralisation aux collectivités territoriales, le principe de
subsidiarité109 trouve un canal privilégié pour
la consécration de la gestion de proximité en toute connaissance
de cause des subtilités culturelles des affaires d'intérêt
local dans le souci du bien de la collectivité. Mais la question de
fonds fiduciaire demeure un défi à l'effet de la
décentralisation. Car, l'administration publique et celle des
collectivités territoriales ne suscitent pas de confiance dans la
gestion de fonds. Elles ont du mal à émettre des obligations qui
les permettront d'attirer des investisseurs. Ainsi, Philippes Bezes et Michel
Bouvier (cités dans Valmera, 2021), ont beau essayer de démontrer
combien la consolidation financière est importante. Sans elle,
l'État (dans le cadre des États unitaires et
décentralisés) et les collectivités locales sont en fait
des acteurs inactifs du développement. Cette conception trouve une large
adhésion. À propos, Alexandre Desrameaux (cité dans
Valmera, 2021), accentue son analyse sur les finances publiques qui occupent
une place de plus en plus conséquente dans les débats publics. Il
avance que sans moyens financiers « appliquer et faire respecter les
décisions publiques demeure voeux pieux ». Aussi,
109 Le principe de subsidiarité se précise en
importance capitale comme technique de transfert de compétences aux
collectivités territoriales à côté des principes de
dévolution et de progressivité. Elle constitue essentiellement
une technique de répartition temporelle par la division de tâches
étatiques attestant l'inefficience dûe à la lourdeur de
l'appareil politico-administratif de l'Etat unitaire centralisé,
intervient l'action des entités locales disposant d'un délai au
cours duquel celles-ci ont été autonomes dans la gestion des
attributions de leurs compétences. En effet, la subsidiarité
impose une condition à l'attribution de la compétence en assurant
la transition entre deux compétences, dans le sens de continuité
de service public. Elle se manifeste, en général, lorsqu'un
composant n'est pas en mesure de remplir sa mission, un autre palliera son
absence ou son échec. L'efficience est une des causes qui peut, en
effet, provoquer l'actualisation de la compétence subsidiaire. «
Ainsi dans le cas qui concerne essentiellement Haïti, la
décentralisation par le principe de subsidiarité répond
à un besoin de régionaliser [Privert, Jocelerme. (2006),
Décentralisation et collectivités territoriales. Contraintes,
enjeux et défis. Editions le béréen, Québec]
la gouvernance qui découle par le transfert de compétences aux
collectivités territoriales dont leurs capacités sont
évaluées par l'Etat central afin de leur permettre d'exercer des
attributions que leurs capacités se révèlent suffisantes
à remplir. »
111
indique-t-il dans la même veine que « les
décisions financières et budgétaires doivent être
prises en tenant compte de données politiques, économiques et
sociales, nationales et internationales, qu'elles contribuent en même
temps à faire évoluer » (p. 38). Les recettes fiscales et
les autres ressources propres constituent une part de ressources
déterminantes pour les collectivités territoriales.
Enfin, en Haïti, face à la lourdeur
administrative qui bloque toute avenue économique de l'État
unitaire centralisé, la décentralisation devient un
impératif qui pourra - avec les effets probants du principe de
subsidiarité - permettre aux collectivités territoriales
d'exploiter leurs ressources potentielles et spécifiques pour leur
développement. Aussi, s'agit-il d'envisager la décentralisation
dans ses dimensions : politique (transfert de fonctions dévolutives
à des collectivités), administratives (fourniture de services
publics de biens) et fiscales (génération de revenus). En
matière de décentralisation, le principe de subsidiarité
conduit l'État à déléguer certains de ses pouvoirs
aux collectivités territoriales lorsqu'il considère qu'elles sont
mieux à même de les assumer, compte tenu de leur proximité
aux citoyens. À l'inverse, certaines missions remontent ou restent
naturellement au niveau de l'État : diplomatie, défense, police,
justice, recherche fondamentale, infrastructures de base, solidarité et
cohésion nationale110...
En allant sucer la roue de ces idées, nous pouvons
remarquer que la répartition des compétences n'est pas la
condition suffisante pour prétendre que l'agent de la
collectivité territoriale est le seul responsable du
développement de son espace territorial. Donc, l'aide du pouvoir central
demeure un outil très utile pour soutenir les efforts des agents locaux
(Baguenard, 1980/2006, p. 41).
TABLEAU 2 : TYPOLOGIE DE
DÉCENTRALISATION
ILLUSTRATION DES DIFFÉRENTES TYPOLOGIES QUI
CARACTÉRISENT LA
DÉCENTRALISATION
|
Types
|
Responsables politiques
|
Responsables de
l'exécution
|
Provenance du
financement
|
Déconcentration (Ce
n'est pas la décentralisation)
|
Élus nationaux
|
Agents du
gouvernement central
|
Budget national
|
Délégation (Subsidiarité)
|
Élus nationaux et élus locaux
|
Agents locaux sont
supervisés par des
|
Budget local avec ou sans paiements contractuels de
|
|
110Ces informations ont été fournies
sur le site de
https://www.toupie.org/Dictionnaire/Subsidiarite.htm,.
112
|
employés du
gouvernement central
|
l'État, venant du budget national ou local
|
Dévolution (la
forme la plus
avancée dans le
processus de la
décentralisation)
|
Élus locaux
|
Agents locaux de la collectivité territoriale
(incluant des corps d'employés nationaux)
|
Budget local : impôt et transfert de l'État
central venant du budget national en appui aux collectivités
|
Source : Ce tableau est complété suivant le
modèle tiré du texte de mémoire de Fils-Aimé
(« s.d. »)
|
|
La complexité de l'adoption du modèle de
gestion décentralisée implique différents acteurs. Il
s'agit de mettre en évidence l'importance des efforts de
prélèvement de ressources fiscales. Des actions qui doivent
être engagées par l'initiative des agents locaux. Cette attitude
est déterminante dans la responsabilité des dirigeants nationaux
ou locaux. Ils ont des tâches à remplir qui dépendent d'une
bonne gestion des deniers de l'État. À rendre possible la lutte
contre la corruption, l'État crée des institutions de
prévention et de répression de telles infractions.
4.4.- Rôle de l'État dans la mise en
place de la décentralisation : dotation des collectivités
territoriales des moyens de concevoir de véritables politiques
publiques
Le rôle fondamental de l'État dans la
construction sociale peut s'établir dans la décentralisation.
Cette oeuvre traduit l'appui nécessaire aux collectivités
territoriales dans la capacité de développer des politiques
publiques de développement local. Elle s'accentue aussi sur le
rôle structurant de l'État dans le processus de la
décentralisation. Dans une démarche concrète de
décentralisation nous pouvons entreprendre les chantiers
d'implémentation du principe de subsidiarité (légitimant
les transferts de compétences) puis arriver à la
dévolution. Les collectivités territoriales auront connu des
étapes qui partent du droit à
l'expérimentation111, la
péréquation112 pour aboutir à
l'autonomie financière, etc. C'est ainsi que le processus de
décentralisation doit pouvoir tenir compte de : la
spécificité des localités, la diversité dans
l'apport des valeurs anthropologiques des groupes sociaux et la rationalisation
dans les décisions à adopter.
111 L'expérimentation est un dispositif
créé en France consistant à autoriser une loi à une
collectivité territoriale d'adapter une politique publique qui ne
ressort pas de ses attributions légales pour une période
donnée. Cf [
www.vie-publique.fr, « En
quoi consiste l'expérimentation législative locale ? » |En
ligne en date du 22/02/2021, page consultée 07/03/2023]
112 La péréquation tend à trouver
l'égalité dans les ressources des collectivités. Du sens
horizontal, elle permet de partager les ressources des collectivités
territoriales les plus riches aux plus démunies. Dans le sens vertical,
il s'agit à l'État de donner aux collectivités
territoriales. Cf [
www.vie-publique.fr, « En
quoi consiste l'expérimentation législative locale ? », en
ligne le 9/01/2023].
113
Dans cette même veine, Baguenard (1980/2006, p. 23)
estime que la décentralisation se mesure à la marge de manoeuvre
dont dispose les collectivités territoriales dans l'État
unitaire. Elle caractérise une balance sensible qui résulte d'un
compromis dynamique entre, d'un côté, des forces
centripètes tendant au renforcement de l'unité nationale, et, de
l'autre, des forces centrifuges incitant à l'épanouissement de la
diversité locale. Sa survie dépend de la vigueur des
collectivités territoriales et de la contribution du pouvoir central.
Sinon, la décentralisation reste un voeu pieu. La fusion des actions de
l'État et des agents de la collectivité territoriale a
particulièrement motivé ce travail de recherche dans la mesure
où des questions du questionnaire d'entretiens revenaient à
détecter l'intervention de l'administration de l'État par le
traitement accordé à la 2e Section Lociane dans les
différents services publics fournis aux membres de cette population.
4.4.1.-Définition du concept de la
collectivité territoriale
Il reste cependant très rare de trouver une
définition bien précise du concept de collectivité
territoriale. Une tournée est faite vers le professeur Prophète
(cité dans Dorisca, 2010, p. 86) décrivant trois conceptions
différentes qui ressortent de l'approche de collectivités
territoriales :
? Avec la conférence de Rio au Brésil en 1992,
elles s'entendent une unité de gestion qui s'imbrique dans des
activités économiques, sociales et écologiques.
? Un point de vue sociogéographique s'en dégage
avec une société de personnes rassemblées par des
filiations sociologiques dans l'occupation d'un espace territorial physique
déterminé dont les limites relèvent d'un ordre
juridique.
? L'aspect purement juridique démontre la
collectivité territoriale comme une entité publique distincte de
l'État et dotée de la personnalité morale disposant un
territoire. En principe, l'État détient exclusivement de la
personnalité morale à travers son espace propre.
Issus de suffrage direct des collectivités
territoriales, les membres des collectivités territoriales subjuguent la
gestion des collectivités territoriales avec le conseil municipal qui se
charge principalement du développement socio-économique de la
Commune113. Les administrateurs locaux assurent la
garantie de la personnalité morale dans l'autonomie administrative avec
la disposition d'un personnel propre et d'un budget propre de la
collectivité territoriale. D'où s'ajoutent, selon Boeuf et Magnan
(2006, p.7), des compétences propres et l'exercice de pouvoir
113 Le conseil municipal se charge des missions qui se
rapportent :1) urbanisme et aménagement du territoire et les services
des travaux publics (construction de marchés publics, édifices
municipaux, les services d'incendie et de police) ;2) aménagement urbain
qui consacre l'embellissement des espaces publics, infrastructure
routière, eau potable, politique d'hygiène.
114
de décision délibérative. Ces
tâches fondamentales rendent les administrateurs locaux responsables par
devant leur électorat de leur gestion locale (Dumornay, 1995, p. 6).
Force de l'abstraction faite de la décentralisation territoriale qui
s'applique aux collectivités territoriales. La décentralisation
s'applique sur l'espace territorial, comme nous l'avons déjà
précisé, de la République d'Haïti, instituée
à travers la mise en place de trois niveaux de collectivités
territoriales y compris leurs nombres (10 Départements, 146 Communes,
571 Sections communales) sur l'étendue géographique de 27,750
km2. Ledit espace géographique est
territoire114.
Mais, comme but visé à l'objectif du projet
d'étude, l'horizon général de la limite frontalière
du territoire de l'État est d'abord considéré. Et puis,
toute l'attention est fixée sur la spécificité de la zone
frontalière de la 2e Section communale de Lociane, dans ses
dimensions socio-économiques et la gestion territoriale. Selon Mathelier
et al. (2004) précisant que le territoire, espace sur lequel s'exerce
une autorité - celle de l'État - et dont les limites sont
fixées par les frontières, est à la fois support et levier
du développement. Ce qui conduit à des modes particuliers
d'appropriation et de gestion. La composante du territoire se
réfère alors à une dimension de limites fixées par
les frontières d'un autre État qui se définit avec Max
Weber (cité dans Etienne, 2007) :
« [...] il faut concevoir l'État contemporain
comme une communauté humaine qui, dans les limites d'un territoire
déterminé- la notion de territoire étant une de ses
caractéristiques-, revendique avec succès pour son propre compte
le monopole de la violence physique légitime. Ce qui est en effet le
propre de notre époque, c'est qu'elle n'accorde à tous les autres
groupements, ou aux individus, le droit de faire appel à la violence que
dans la mesure où l'État le tolère : celui-ci passe donc
pour l'unique source du «droit» à la violence. »
D'où résulte l'importance de la compréhension de
l'État dans sa définition et sa conception.
4.4.2.-Définition fondamentale dans la conception
de l'État
Diverses définitions essayent de saisir le concept de
l'État. Ce travail se réfère à l'Encyclopaedia
Universalis(1989) pour utiliser certaines d'entre elles : « selon
Hans Kelsen, l'État est comme un système de normes. Pour
Friedrich Hegel, l'État est la substance consciente d'elle-même.
C. Frédéric Bastiat, économiste, conçoit
l'État comme une grande fiction à travers laquelle tout le monde
s'évertue à vivre aux dépens de tout le monde. Raymond
Carré de Malberg, dans`Contribution à la théorie
générale de l'État' en 1921, pense que l'État est
une communauté d'hommes, fixée sur un territoire propre
et
114 Dans ses cours en DSD, le professeur Jean Maxius Bernard
enseigne que c'est le modèle de subdivision de territoire de l'Italie
qui a prédominé dans le monde occidental. En effet, en 1790, les
pouvoirs publics français ont imité les circonscriptions
ecclésiastiques, établies depuis le IVe siècle à
Rome, pour adopter la commune et le département.
115
possédant une organisation d'où
résulte pour le groupe envisagé dans des rapports avec ses
membres une puissance suprême d'action, de commandement et de
coercition.» Cp. 844).
Dans sa réalité conceptuelle, l'État est
une idée. C'est qu'il est pensé. D'où résulte son
essence. Encore dans l'Encyclopaedia Universalis, est-il
précisé que « L'homme a inventé l'État
pour ne pas obéir à l'homme. L'État n'est pas un
phénomène naturel, comme le clan, la tribu ou la nation. Il est
construit par l'intelligence humaine à titre d'explication et de
justification du fait social qu'est le pouvoir politique ». Ce
pouvoir politique est la consécration d'une mission exercée sur
le corps social. L'État est l'une des institutions qui assure l'ordre
dans la société. Il se retrouve dans la superstructure politique
et juridique (Louis, 2019).
Selon Braud (2004, p. 7) l'État désigne d'une
part, une société politiquement organisée, et d'autre
part, un pouvoir qui s'exerce en son sein à partir d'un noyau. Encore
Hegel voyait-il dans l'État, le triomphe progressif de la Raison dans
l'Histoire. Il faisait référence certainement à l'histoire
des origines115 de l'État qui remontent aux bouleversements
des sociétés occidentales au cours du XVIe siècle.
L'État s'inscrit dans l'ordre des
réalités sensibles quoique disparates lorsqu'il s'exerce dans la
substance officielle, la sécurité nationale ou l'injonction
fiscale. En substance territoriale, il s'incline dans le fait de
spatialité agissant par des symboles aux frontières. Des acteurs
politiques dirigent l'État. Il est visible à travers des domaines
tels que l'éducation, l'infrastructure, la sécurité, la
santé, etc. Mais le symbolisme de l'État est plus fort dans les
représentations mentales. L'État s'établit dans un ordre
constant d'indépendance par rapport à des puissances
extérieures. Il s'agit donc de la souveraineté qui s'exerce dans
les limites d'un territoire. Selon Foucault (2004, p. 13), la
sécurité s'exerce sur l'ensemble d'une population qui a
institué un État. L'important est tout aussi le branchement de
l'efficacité politique de la souveraineté sur une distribution
spatiale.
115 L'histoire des origines de l'Etat est l'objet de bien de
controverses. Pour l'essentiel, trois étapes ont été
produites à l'engendrement de la forme d'organisation des
sociétés humaines : première étape, les groupements
des premiers humains caractérisent un besoin de sécurité
contre les autres clans ou autres groupes. Par l'ensemble, les décisions
sont prises pour organiser la vie de leur groupement ; deuxième
étape, quand les membres du groupement deviennent trop nombreux, les
liens familiaux se dissolvent ou se disloquent au fur et à mesure que
les individus se séparent. L'ensemble pose un nouveau problème
dans la prise de décision. Il s'avère donc nécessaire de
déléguer un individu ou un petit groupe pour décider pour
l'ensemble. C'est la délégation de pouvoir. Mais les
règles d'attributions du pouvoir ne sont pas définies. Ce qui
occasionne une situation d'instabilité ; troisième étape,
à la recherche d'une base stable, permanente et abstraite,
l'institutionnalisation du pouvoir s'impose. D'où le dicton : `le
roi est mort vive le roi '. La continuité du pouvoir s'organise
dans l'Etat. Mais les règles d'attributions du pouvoir posent encore des
problèmes.
En marge des connaissances anthropologiques et historiques,
les philosophes du XVIIe siècle interrogèrent sur les
raisons qui ont poussé à la création de l'Etat. La
volonté divine est la réponse facile qui demeurait pendant
longtemps. Mais en se distanciant de la métaphysique, cette croyance ne
tenait plus avec le temps. Trois théories vont concourir à
clarifier l'interrogation : 1) les théories du contrat, 2) les
théories du conflit, 3) les théories de la
fondation-adhésion.
116
Mais selon l'approche marxiste, L'État sert de support
à l'infrastructure économique caractérisant la base de
l'activité humaine au profit de groupes détenteurs des moyens de
production. Ces derniers dominent l'appareil de l'État au
détriment des classes non possédantes par l'exploitation.
Revenons-nous en au monopole de souveraineté de l'État qu'il
détient et remplit exclusivement dans les attributions souveraines de la
contrainte légitime, de la fiscalité et du crédit. Car la
souveraineté est un attribut d'État. L'État en Haïti
[dit unitaire se définit comme la structure comportant un État
sur un territoire à organisation juridique, politique et
économique lui conférant l'ensemble des attributions de la
souveraineté nationale dans un gouvernement116 (trois
pouvoirs : exécutif, législatif et judiciaire)].
Par gouvernement, selon Boyard (2010, p. 31), nous entendons
une administration politique qui bénéficie de la puissance
publique et de la capacité de commander et de se faire obéir. Et
la population est représentée par l'ensemble des nationaux de
l'État, c'est-à-dire, par tous les individus jouissant de la
nationalité de l'État.
C'est en vertu de telles substantivités que nous
pouvons signifier ainsi l'État : diplomatie, défense, police,
justice, recherche fondamentale, solidarité, infrastructures de base et
cohésion nationale117. Ce sont des champs où
interviennent ses actions monopolistiques. Entre autre monopole de
l'État, s'inscrivent la dynamique et la complexité des
transformations sociales et politiques ainsi que l'articulation du politique et
du social, du global et du local dans une perspective de gestion de la
sécurité nationale qui connait plusieurs théories
notamment celle qui est classique, s'étendant de l'extérieur vers
l'intérieur à partir des services diplomatiques externes et des
systèmes traditionnels de protection des espaces frontaliers avec des
services douaniers et ceux des aéroports et des côtes
maritimes.
Entre-temps, des conceptions modernes se développent
en la matière avec des mécanismes économiques y compris
des outils de technologies de l'information et de la communication. Par
l'approche de la sécurité nationale, Joseph (2005) explique que
la notion évolue avec le temps pour sortir du clivage classique des
notions d'équilibre inter-étatique de rapports de force, de
souveraineté et de respect des frontières étatiques. Le
paradigme économique a surgit depuis peu. Mais le tiers-monde fait
exception aux théories nouvelles de la sécurité nationale.
En ce sens, le danger y est de plus de l'intérieur qu'à
l'extérieur à cause de l'instabilité politique qui y
règne.
116 Voir les articles 59 et 59.1 de la Constitution d'Haïti
de 1987.
117 Ces informations ont été fournies sur le site
de
https://www.toupie.org/Dictionnaire/Subsidiarite.htm,.
117
Ainsi, le clivage classique inter-étatique y
subsiste-t-il. En ce qui concerne la frontière dont fait l'objet cette
étude, elle se définit, selon Acloque (2022), dans un sens
restreint, comme une limite fixée par traité entre deux
États. En substance, elle a caractérisé l'apparition des
États modernes qu'Etienne(2007) suppose « une rationalisation de
domination politique, grâce à l'institutionnalisation de la
participation des citoyens à la gestion de la chose publique.
»(p.30). Charles Tilly (cité dans Bonazzi, 2009) pense que
l'État moderne représente un processus historique de formation
d'un noyau autonome. La société féodale s'embourbait dans
une crise de structure sociale qui favorisa l'émergence de
l'État.
À la fin du moyen âge, l'Europe a connu des
transformations socio-économiques qui ont largement contribué
à l'apparition de l'État. C'est ainsi qu'il s'opère une
mise en relation entre la construction de l'État et la modification de
la structure sociale. Il résulte bien une désintégration
de la société traditionnelle qui assume beaucoup de
résistance d'ailleurs. Un nouveau modèle d'échange
s'entend avec l'État qui s'impose avec la division du travail social
engendré par le développement économique. Très
tôt déjà, l'État se confronte à la limite de
la frontière qui détermine la discontinuité entre deux
foyers différents d'appropriation territoriale. Alors, la limologie ou
science des frontières est, à cet égard, d'un appui
très précieux pour la géographie politique. Elle touche au
droit, à l'histoire, à la science politique. Mais la
frontière, renvoie à une réalité concrète
qui en fait un cas intéressant à la géographie qui en
étudie donc les conséquences du phénomène
`frontière' (Sanguin, 1974).
4.4.3.-Définition des choix
stratégiques de développement économique en matière
de politiques publiques
L'État se doit de prioriser la définition des
instruments qui encouragent des investissements dans des domaines qui
relèvent de trois ordres : premier ordre, des investissements sont
réservés essentiellement à l'intervention des entreprises
privées ; deuxième ordre, ceux qui reçoivent
l'intervention des entreprises privées sous la supervision des
structures étatiques ; et troisième ordre, ceux qui se
réservent dans l'espace de souveraineté nationale. En tout cas,
le mécanisme de définition des instruments nécessaires au
développement socio-économique et politique ne doit pas
échapper à la compétence de l'État.
Ensemble, l'État et le secteur privé doivent
s'incliner devant les prérogatives de l'État de droit
régissant des rapports de progression dans l'orientation de
développement. Cela traduit un
118
processus qui tient ses lignes directives dans la concertation
des forces antagoniques interagissant dans la défense de
l'intérêt collectif, dans une logique continue de dialogue, de
concertation et de consensus. À l'effet d'un tel modus
operandi, nous attendons que l'État dégage assez de
ressources de toutes sortes qui lui permettront de contribuer à
réorganiser la dynamique des structures socio-économiques et
politiques au niveau interne. Et, à l'évidence
d'implémentation de nouvelles orientations socio-économiques.
Haïti tendra ainsi à insuffler une autre dynamique dans ses
relations avec les autres pays, en particulier la République
Dominicaine. Ces considérations lient intimement la dynamique interne
dans les relations avec l'extérieur. Celle-ci se manifeste
véritablement par le besoin d'adopter de nouveau paradigme dans la
définition de lignes directrices et de priorités comme vecteur de
développement.
4.4.4.-Politique publique : de la naissance à
l'acception moderne
À l'origine, les politiques publiques ressortent du
renforcement des pouvoirs du roi avec la monopolisation sur la
fiscalité, la monnaie, la police ou la guerre. Ces fonctions
régaliennes vont constituer le socle inébranlable de
l'État moderne. Michel Foucault développe la conception de
savoirs de gouvernement pour montrer l'ensemble des technologies qui permettent
à l'État de gouverner les territoires et les populations.
À travers cette gouvernementalisation118, l'État
impose sa légitimité par la capacité de faire
régner l'ordre, de maitriser les connaissances nécessaires au
contrôle de l'espace territorial et d'apporter des services de base
indispensables à la population. Le développement fulgurant connu
aux États-Unis au cours des années 1950 a essentiellement
marqué l'origine de la notion de politique publique. Elle a eu son
acception moderne par l'utilisation du mot Gouvernment pour
désigner les actions publiques du gouvernement américain.
En Europe, les penseurs tels que Hegel, Marx et Weber ont
pourtant bien longtemps mis en exergue le concept de l'État comme
institution qui domine la société, la façonne et la
transcende. Mais, particulièrement en France et en Angleterre, c'est au
cours du XIXe siècle que l'État a commencé à se
pencher sur les activités qui entrent dans le cadre de politiques
publiques. Les interventions de l'État qui caractérisaient des
politiques publiques étaient marquées surtout par la lutte contre
les effets du marché capitaliste. Ainsi, Karl Polanyi (cité dans
Muller, 2009, pp. 6-8) souligne-t-il
118 Gouvernementalisation est une notion utilisée par
Michel Foucault pour désigner la superstructure équipée de
l'État qui, dès XVIIIe siècle, se charge de
résoudre tous les défis auxquels la population fait face tout en
assurant le contrôle sécuritaire sur celle-ci.
119
que les effets de dislocation que l'extension du marché
et l'industrialisation entrainent sur la société ont permis
à ce que les premières politiques publiques visaient
essentiellement le secteur social. Aussi la société de salariat
créée par le capitalisme a-t-elle occasionné les
interventions de l'État dans le secteur de l'assistance sociale avec
l'État Providence.
4.4.4.1.-Caractéristique de politiques
publiques
Les politiques publiques ont un caractère sectoriel.
Chaque politique publique intervient dans un secteur découpé de
manière spécifique de la société pour constituer un
objet d'action publique. Deux situations engendrent l'action de politique
publique. Dans un cas, le secteur préexiste à la politique. Il
s'agit d'une fonction de structuration verticale des rôles sociaux par la
définition des règles de fonctionnement, de sélection,
d'élaboration des normes et des valeurs spécifiques, de fixation
de champ. Dans un autre, la politique provoque un problème dans un
secteur d'intervention, il renvoie à ce qui s'est produit avec les
politiques sociales.
De toute façon, les politiques publiques ont pour
objectif de gérer les déséquilibres provenant de la
sectorisation et dans la complexification des sociétés modernes.
De même, un secteur peut produire ses propres objectifs de politiques
publiques. En ce qui a trait au processus de décentralisation, il
participe largement dans la mise en oeuvre de projet de société.
Cela implique une administration de l'État définissant les
règles et les règlements. Et les acteurs des collectivités
territoriales gèrent les objectifs visés par
l'implémentation de politiques publiques pour les différents
secteurs à divers niveaux.
4.5.-Condition nécessaire à
l'implémentation de la décentralisation
La décentralisation prônée dans
l'État moderne est considérée par l'assimilation de la
logique de Aron (1965, p. 66) à une organisation administrative. C'est
d'abord avec des dispositions légales qu'il convient d'envisager sa
réalisation. Néanmoins, l'arsenal juridique haïtien en
contient un grand nombre de textes. Il faut avoir des cadres théoriques
pour orienter le processus de décentralisation. C'est ce dont le travail
retient, selon l'auteur, pour réaliser la décentralisation :
? la détermination d'une sphère de
compétences spécifiques au profit des collectivités
territoriales ;
? l'autonomie d'action des autorités locales par
rapport au pouvoir central, tant pour leur nomination que pour leur
révocation ;
·
120
l'autonomie de gestion des affaires119 locales par
les collectivités territoriales (Baguenard, 1980/2006, p. 24).
Dans l'interprétation de la Constitution de 1987,
Léger(2000) se réfère aux enjeux globaux du processus de
la décentralisation sur le plan : administratif, juridique et
institutionnel. Il s'agit d'entreprendre un cadre de transfert de
compétences du pouvoir central vers des collectivités
territoriales et établir un canal de participation de la
société civile. À cet égard, des lois et
règlements doivent, souligne-t-il, compléter la prescription
constitutionnelle pour fixer la répartition des acteurs et leurs
attributions. Il est entendu que la participation de la société
civile constitue un aspect crucial dans la définition des enjeux et
l'édification de la réglementation qui doit désigner entre
autres :
· Les compétences administratives de chaque
acteur qui distingue l'intérêt général étant
du ressort de l'État central et les affaires locales relevant des
collectivités territoriales ;
· Le degré d'autonomie à accorder à
chaque niveau de collectivité ainsi que les ressources correspondantes
à transférer : humaines, financières et matérielles
;
· Le type de contrôle à exercer par
l'administration centrale suivant qu'il s'agit de déconcentration, de
délégation ou de dévolution ;
· La tutelle est exercée par le pouvoir central,
étant donné l'inexistence de hiérarchie entre les
collectivités territoriales ;
· Les relations entre les autorités locales
élues et la délégation ;
· Les modes de résolution des conflits entre
différents paliers de gouvernement local ;
· Les modalités d'implication de la population et
de la société civile (p. 95).
Mais ce qui caractérise une partie de la faiblesse de
ces théories dans le contexte de la 2e Section Lociane, c'est
qu'elles ne tiennent pas en compte des conditions socio-économiques
précaires qui ne puissent permettre de disposer des ressources humaines
efficaces à même de représenter dignement des
collectivités territoriales. Alors, il revient à l'État
via le ministère de tutelle à savoir le MICT de se charger de la
formation des agents locaux à côté des différentes
associations où ils s'affilièrent. Toute la littérature
sur cette matière porte à convaincre de l'importance de la
compétence et la disposition des ressources humaines dans la
défense des intérêts de la collectivité
territoriale. Car il est impérieux que les agents locaux soient bien
imbus de l'objet sur lequel ils
119 Les affaires locales c'est une notion qui, reposant sur des
choix politiques, se révèle tout à fait subjective et
complexe à maitriser.
121
doivent se baser pour diriger leur communauté. Ce qui
conduira à pouvoir identifier les affaires locales et les distinguer des
intérêts généraux.
4.5.1.-Distinction entre intérêt
général et affaires locales
L'intérêt général que nous
évoquons ci-dessus s'appréhende comme critère transversal
et finalisé, déterminé à un but précis. Le
corps social, constitué en groupement d'individus,
déléguant la souveraineté au gouvernement qui doit assurer
l'ordre social et politique. Le but implique à satisfaire les
préoccupations des citoyens. Mais entre l'intérêt public
qui ressort des compétences de l'État et les affaires locales
qu'il délègue aux collectivités territoriales dans des
choix politiques, il y a une distinction. La notion des affaires locales est
subjective et complexe. Assimilée à une tranche localisée
de l'intérêt général. « Les affaires
locales n'ont traditionnellement pas d'existence juridique objective. Le
critère territorial n'étant d'aucun secours, dès lors
qu'il permet seulement de déterminer la sphère
géographique d'intervention des autorités
administratives.» (Baguenard, 1980/2006, p. 26). La distinction
surgit avec l'intervention de l'État qui se fait uniquement dans
l'intérêt général.
4.5.2.-Question de l'autonomie de gestion des
collectivités territoriales
Sur le plan de leur existence, les organes de pouvoir local
s'exercent de manière indépendante du pouvoir central dans une
société à organisation politique
décentralisée. L'approche de l'autonomie de gestion est donc
fonctionnelle. Les organes locaux jouissent d'une indépendance
fonctionnelle leur permettant une libre gouvernance (administration) des
affaires locales.
Alors la question de la garantie juridique cristallise la
reconnaissance de la qualité des collectivités territoriales.
Comme personnes morales, les collectivités territoriales
représentent un acte de vie juridique. Elles ont des droits et
obligations qui leur permettent d'agir en leur qualité d'entité
proprement autonome. Qu'il s'agisse de patrimoine et d'engager leur
responsabilité. Elles peuvent user des prérogatives de puissance
publique. Mais cependant, cette qualité juridique ne garantit pas
totalement une réelle autonomie de gestion des collectivités
territoriales qui ont obligation de se soumettre aux injonctions des
intérêts généraux dans leur ensemble de
décisions. Et ces intérêts généraux sont
définis par l'État. Néanmoins, les acteurs locaux ont une
responsabilité qui les habilite à investir la gestion des
collectivités territoriales. Ce qui caractérise encore une plus
grande importance dans l'objectif d'une démonstration magistrale de leur
utilité dans la dynamique des rapports dans la frontière entre
Haïti et la République Dominicaine
122
4.5.3.- Organisation de la Section communale Lociane sur
le plan politique
La Section communale est organisée par la loi. Elle est
administrée par un organe exécutif : le CASEC assisté d'un
organe délibératif : l'ASEC. Ces organes sont élus pour
quatre ans avec pour attributions entre autres sanctionner et ratifier la
politique de développement de la Section communale
préparée et présentée par le
CASEC120.
D'après l'article 66 al. 2 du décret
électoral 2015. Pour les Sections communales ayant moins de 10,000
électeurs, 5 représentants sont élus. C'est le cas pour la
première Section de Matelgate. Pour les Sections de plus de 20,000
électeurs, 9 représentants sont élus. C'est le cas pour la
2e Section Lociane qui avait autant d'élus membres ASEC aux
dernières élections sous l'égide dudit décret.
À signaler que ses premiers élus CASEC et ASEC ressortirent des
élections de 1990.
Par ailleurs, les CT souffrent du manque de dispositions
légales qui établissent des appuis formels aux actions des
décideurs étatiques dans les milieux ruraux dans le cadre du
développement local. Sur ce, nous concluons ce chapitre qui a permis
d'élucider les différentes conceptions de l'État.
D'où relèvent ses responsabilités de rechercher
l'efficacité de son fonctionnement administratif dans le choix de la
décentralisation. Cette dernière est assimilée à
une côte de la colonne vertébrale de l'étude. Elle implante
sa fonction en agrémentant les fondements légaux du processus.
Elle agite le rôle prépondérant de l'État qui tient
son fondement dans la raison des Hommes, selon Hegel. La
décentralisation implique l'orientation dans une nouvelle gestion des
espaces territoriaux avec l'accentuation des responsabilités des agents
locaux dans l'implémentation de politiques publiques. La capacité
dont les autorités locales font montre pour concevoir des politiques
publiques de développement local et plus particulièrement pour le
développement de la zone frontalière de la 2e Section
Lociane signifie une avancée dans notre problématique.
L'enchevêtrement des forces agissant sur le terrain de la recherche
enjoint le choix théorique de notre approche globale d'analyse. Ainsi,
est-ce en fonction du prisme analytique structuro-fonctionnaliste que nous
évaluons les résultats de terrains. Pour le prochain chapitre,
cette phase traduit les résultats analysés des entretiens
semi-dirigés réalisés dans l'étude. Ce qui
caractérise également l'étape représentant la
structure empirique de l'opération de la recherche.
120 La loi du 4 avril 1996 sur l'organisation de la
collectivité territoriale de Section communale fixe à 3 membres
de Casec. Et les ASEC dépendent de l'importance démographique
soit 7 représentants élus pour un nombre inférieur ou
égal à 5000 habitants, 9 pour 5001 à 14999 habitants et 11
représentants élus pour les Sections communales ayant 15000
habitants et plus.
123
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