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L'utilité des peines de prison pour les criminels

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par Paul-Roger GONTARD
Université d'Avignon et des Pays de Vaucluse - Maitrise de droit privé, option Carrières Judiciaires 2007
  

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B/ Une prison qui encourage au crime

Pour certains philosophes ou penseurs du droit pénal, plus qu'imparfaite dans le traitement de la récidive, la prison serait un facteur de croissance de la criminalité, une école du crime. Les plus hautes autorités républicaines semblent avoir été conquises par cette idée. Notre ancien Ministre de la Justice s'en faisait même l'écho en reprenant littéralement cette expression dans un célèbre hebdomadaire français22(*).

Mais cette idée, si bien partagée, est-elle un parti pris d'élites bien pensantes, ou une réalité sociale ? Les recherches entreprises pour ce travail nous montrent que cette affirmation est ancienne23(*) mais scientifiquement très mal étayée. Ce postulat semble émerger d'un constat empirique que l'inconscient collectif aurait fait et que chacun peu refaire, mais que très peu ont déjà mesuré. La plupart des études scientifiques publiques sur l'emprisonnement et la récidive ont été menées dans le dernier quart du XXème siècle, mais la quasi-totalité de ces études sont l'oeuvre d'anglo-saxons ou d'équipes canadiennes. Le cas français est donc très peu cité, et des études spécifiques sur une hypothétique criminogénéité des peines criminelles semblent inexistantes. Cependant une métha-analyse des recherches entreprises sur la relation emprisonnement-récidive a été faite en 1999. L'INCIDENCE DE L'EMPRISONNEMENT SUR LA RÉCIDIVE de Paul GENDREAU, Claire GOGGIN (Centre d'études sur la justice pénale Université du Nouveau-Brunswick) et Francis T. CULLEN (Département de la justice pénale Université de Cincinnati)24(*), regorge d'informations sur lesquelles nous allons nous appuyer pour la réflexion qui va suivre. En partant du principe que les peines de prisons sont exécutées dans leurs grands principes, et sur la même période, de façon identique, en France comme dans les pays cités dans cette étude, acceptons de décalquer leur conclusion sur notre population carcérale criminelle française. Ces conclusions sont assez simples. Après avoir confronté une cinquantaine d'études différentes portant sur une population de plus de 300.000 délinquants, les auteurs déclarent dans un résumé de cette étude sur le site du ministère de la sécurité publique du Canada25(*) : « on n'a établi aucun lien entre des peines de longue durée et la réduction de la récidive. En fait, il semblerait plutôt que ce soit le contraire : les longues peines étant associées à une augmentation de 3 % de la récidive. ». Certes, cette étude se base sur des populations délinquantes, mais qualifie de longue peine les peines supérieures à 2 ans. Or, les peines criminelles, auxquelles nous nous intéressons ici, sont généralement supérieures à ces 2 ans. D'où la conclusion, qu'il reste à corroborer par une étude spécifique aux longues peines criminelles françaises, que la prison serait, pour la population générale carcérale, un facteur d'accroissement de la récidive, et en particulier pour les longues peines.

Pour l'expliquer les psychologues américains BUKSTEL et KILMANN estiment, après avoir compilé plusieurs études, que les détenus exercent les uns sur les autres une « influence manifestement déterminante » qui se traduit par un renforcement de différents comportements antisociaux26(*). Ce qui pour nous revient à dire que le contact entre deux criminels exacerbe leur criminalité, soit en la flattant par le récit de leurs « exploits », soit en échafaudant de nouveaux desseins criminels pour le temps qui suit leur libération, ou bien encore parce que le criminel est souvent seul à sa sortie et que les seuls réseaux sociaux qui lui reste et sur qui il peut compter sont les connaissances de la prison.

De plus, un ancien phénomène semble être remis peu à peu au goût du jour. L'incarcération redevient un rite de passage dans les bandes organisées. Stanley WILLIAMS est aujourd'hui un condamné à mort qui patiente dans les geôles de San Quentin en Californie. Il est le créateur d'un gang meurtrier tristement célèbre, « le Cribs ». Mais depuis son incarcération, Stanley WILLIAMS a changé. Il lutte maintenant, depuis sa cellule, pour éloigner les jeunes gens des gangs de quartier. Il est l'auteur de plusieurs livres sur les gangs et sur son propre parcours, qui s'adresse à la jeunesse. Il est considéré par beaucoup comme un spécialiste dans le domaine des gangs, et a été mis à contribution pour que des paix soient signées entre les gangs de la côte Ouest27(*). Parmi les idées fortes qu'il défend dans ses ouvrages, il dissuade énergiquement les membres des gangs de considérer la première incarcération comme un rite de passage pour être accepté du groupe, ou pour entrer dans la vie adulte. La crainte de nombreux observatoires ou autorités françaises concernant la structuration de ces gangs de banlieue calqués sur le modèle américain28(*), est que, dans un futur proche, ce phénomène de rite d'initiation ne se développe que plus en France. Les prémices de ce glissement sont déjà là, notamment dans les quartiers mineurs des prisons ; ou plutôt à leur sortie des centres pénitentiaires, lorsque les libérés sont gratifiés d'un « Tu es un homme maintenant ! ».

* 22 Article : PRISONS : PASCAL CLÉMENT S'ENGAGE ; Le Nouvel Observateur - 2006/01/05

* 23 Les lois Bérenger (lois du 14 août 1885 et du 26 mars 1891) avaient pour philosophie d'aménager les peines de prison afin de limiter au maximum un effet criminogène.

* 24 Paul GENDREAU, Claire GOGGIN et Francis T. CULLEN ; L'INCIDENCE DE L'EMPRISONNEMENT SUR LA RÉCIDIVE ; Travaux publics et Services gouvernementaux Canada,

Numéro de cat. : JS42-87/1999F ISBN : 0-662-84222-7

* 25 http://ww2.ps-sp.gc.ca/publications/corrections/199911_f.asp

* 26 L. BUKSTEL. & P. KILMANN ; PSYCHOLOGICAL EFFECTS OF IMPRISONMENT ON CONFINED INDIVIDUALS. PSYCHOLOGICAL BULLETIN ;(1980) cité dans Paul GENDREAU, Claire GOGGIN et Francis T. CULLEN ; L'INCIDENCE DE L'EMPRISONNEMENT SUR LA RÉCIDIVE ; p°10 voir supra

* 27 le Council on Service and Civic Participation lui a décerné un prix spécial pour son action civique, et un parlementaire Suisse a proposé son nom pour le Prix Nobel de la Paix

Source : http://web.amnesty.org/library/index/fraAMR511872005?open&of=fra-392

* 28 Voir sur cette question les auditions et le rapport du sénat sur LA DÉLINQUANCE DES MINEURS : LA RÉPUBLIQUE EN QUÊTE DE RESPECT

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