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De la garantie des droits fondamentaux en République Démocratique du Congo. Cas de la province du Sud-Kivu

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par Dominique KAMWANGA KILIYA
Université de Kisangani, Centre Universitaire extension de Bukavu - Licence en Sciences Politiques et Administratives 2003
  

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INTRODUCTION

1. ETAT DE LA QUESTION.

Il existe déjà une abondante littérature sur les conflits armés et sur les droits de l'homme. Ces divers travaux ou, du moins, ceux que nous avons pu consulter nous ont inspirés dans le choix et la formulation du présent sujet de recherche.

Rosemary ABI-SAAB1(*) se pose, à titre de problématique générale, les questions de savoir dans quelle mesure le droit humanitaire peut-il avoir une emprise sur des phénomènes habituellement perçus comme relevant essentiellement de la compétence interne des Etats, ou en des termes plus généraux; le droit humanitaire est-il capable de s'imposer dans la sphère traditionnel de la souveraineté de l'Etat. Elle a choisi l'angle de l'histoire législative de deux textes fondamentaux représentant les efforts marquants du droit humanitaire pour faire face aux conflits internes. Il s'agit, en effet de l'article 3 commun aux quatre conventions de Genève de 1949 et du protocole additionnel de 1977 relatifs à la protection des victimes des conflits armés non internationaux. Son étude se fonde sur l'examen des documents et des travaux préparatoires de conférences diplomatiques, les rapports d'experts réunis par le C.I.C.R. L'étude a eu pour but de suivre l'évolution de la réglementation juridique en matière des conflits internes devant l'évolution des faits, de mettre en évidence les efforts du C.I.C.R. et de certains Etats pour que grande protection soit accordée aux victimes de tous les conflits armés malgré l'existence de l'arbitraire politique. Après analyse, l'auteur a constaté que certains progrès ont été accomplis pour la protection des victimes des conflits armés internes. Cet apport réside dans les articles concernant la protection des populations civiles et des biens à caractère civil, les garanties concernant la protection de la mission sanitaire. D'autre part, elle a relevé une interaction entre l'évolution politique de la Communauté Internationale et l'évolution des concepts. Ainsi on ne parle plus de guerre mais de conflit armé, du droit humanitaire au lieu du droit de la guerre, de parties insurgées ou belligérantes à la place de rebelles ainsi que des droits des victimes à la protection en remplacement du respect de certains comportements des belligérants dans les hostilités.

Face à la catastrophe humanitaire qui se déroule en République Démocratique du Congo (plus de trois millions de décès depuis le 02 Août 1998), Jean MIGABO Kalere2(*) a voulu faire entendre la voix du peuple Congolais auprès de la Communauté Internationale et contribuer à la rupture de l'impunité des auteurs des massacres de populations civiles au Congo. Ses recherches s'enracinent dans l'Accord de Lusaka, les Résolutions du Conseil de Sécurité de l'O.N.U., les rapports ou les réactions des associations des droits de l'homme et les organisations de développement. Parcourant ces Résolutions et rapports, il se pose la question suivante en guise de problématique : Qui parmi toutes les parties signataire de l'Accord de Lusaka respecte totalement ses engagements relatifs aux droits de l'homme ? Cette étude se fonde sur la dialectique entre les dispositions légales ou conventionnelles et les réalités vécues par les populations Congolaises, décrit et analyse surtout les massacres collectifs perpétrés par les rebelles, souvent en dehors de toute bataille rangée entre deux groupes armés. A la suite de la description des faits et l'analyse approfondie de la situation, l'auteur débouche sur les conclusions d'après lesquelles l'étude comparative des massacres observés sur l'ensemble du territoire Congolais prouve l'existence de la stratégie de terre brûlée. Celle-ci consiste à arrêter les gens, à les rassembler dans une maison et à les brûler vifs à l'aide des produits inflammables dans les provinces sous occupation rebelle. Il existe, selon lui, un mépris manifeste des résolutions de l'O.N.U. depuis le début de la deuxième guerre, du droit international humanitaire fondé sur les conventions de Genève, de la convention relative au génocide. Dans ce contexte, seule la restauration de la paix, la démocratie et la réconciliation nationale permettraient le décollage du développement durable pour la stabilité de tous les Etats de la région de Grands Lacs.

Pour sa part, Michel RWAMIRINDI3(*) constate que malgré la bonne volonté de protection de la personne humaine ; ses droits sont régulièrement violés dans les pays à maturité démocratique ou non. Suite à cela, il se pose alors la question de savoir ce qu'il faut faire pour, à la fois, assurer le minimum de respect des droits de la personne humaine pendants les circonstances exceptionnelles et sauver l'existence de la Nation. A la fin du travail, il est arrivé à la conclusion selon laquelle les conventions prévoient le recours à l'Etat d'exception pendant les circonstances exceptionnelles. Mais cet état d'exception est conditionné par les éléments ci-après :

· l'Etat ne peut s'exercer dans le but autre que celui par lequel il a été prévus, c'est-à-dire n'y recourir que pour la sauvegarde de la vie de la nation ;

· ce droit (le droit de dérogation ou l'Etat d'exception) n'est justifiable qu'en cas de guerre ou autre danger menaçant la vie de la Nation. Le péril considéré doit avoir un caractère extraordinaire et menacer l'existence de la nation. L'origine du danger importe peu.

Pour ne pas enfoncer une porte déjà ouverte nous avons, quant à nous, choisi d'orienter nos recherches dans le domaine de la sociologie des droits de l'homme avec pour sujet la « De la garantie des droits fondamentaux en période de guerre en République Démocratique du Congo : Cas du Sud-Kivu ». Cette étude est consacrée à l'analyse des causes et des conséquences socio-politiques de diverses violations des droits humains constatées et régulièrement dénoncées par les organisations spécialisées en matière de leur protection et leur promotion tant sur le plan local, national qu'international. Ce sont donc ces violations systématiques et massives des droits humains dont toutes les parties belligérantes se sont pourtant engagées à protéger et à promouvoir malgré les circonstances.

En effet, depuis près d'une décennie, la région des Grands Lacs d'Afrique est caractérisée par une crise socio-politique qui se manifeste, notamment, par des guerres. Ces guerres opposent, d'une part, les gouvernements centraux et groupements politico- militaires plus ou moins organisés et, d'autre part, les groupes socio-culturels ou bandes armées dénommées mouvement de résistance populaire et/ou force d'autodéfense populaire. La République Démocratique du Congo (D.C.) n'était pas épargnée par cet état de guerre. C'est, en effet, depuis 1996 que ce pays est entré dans le cycle des guerres dites de « libération ». Cette situation de guerre civile ou internationalisée, en plus des dégâts sur le plan économique, structurel et politique, ne manque pas d'effets néfastes sur la vie quotidienne des populations Congolaises, en général, et celle du Sud-Kivu, en particulier, en matière du respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Les droits et libertés sont pourtant protégés par l'Etat et la Communauté Internationale.

Plusieurs voix se sont fait entendre pour dénoncer et condamner les violations commises sur les populations civiles. A titre d'exemple, Roberto GARRETON mentionnait dans ses rapports l'existence de plusieurs massacres en R.D.C. depuis le début et durant toute la deuxième guerre dite de « libération ». La 56e Commission de l'O.N.U. sur les droits de l'homme parle, pour sa part, d'une situation préoccupante en R.D.C. dans sa partie orientale et la persistance des violations massives commises vis-à-vis des droits de l'homme et du droit humanitaire pendant ces conflits armés. De façon beaucoup plus pratique, des organisations tant nationales qu'internationales de défense des droits humains ont abouti au constat selon lequel il y a eu des tueries dans les villages situés dans les territoires de la Province du Sud-Kivu (Shabunda, Mwenga, Kamituga, Uvira, Fizi, etc.)4(*).

Ainsi, la présente étude couvre la Province du Sud-Kivu et s'intéresse à la période allant du 02 Août 1998 à décembre 2002, c'est-à-dire la période pendant laquelle la gestion de la Province était sous contrôle du mouvement rebelle, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (R.C.D.). Cette délimitation spatio-temporelle est motivée par le fait que les archives consacrées à la première guerre dite de « libération » menée par l'A.F.D.L. ont été, en grande partie, détruites. D'autre part, la situation de la deuxième guerre dite de « rectification » a semblé être la plus meurtrière.

En effet, les estimations faites suite aux enquêtes menées par I.R.C. indiquent plus de trois millions de morts parmi la population civile5(*). Cet état des choses ne laisse personne indifférente dans la recherche de solutions à ces violations des droits de l'homme.

L'espace retenu comme champ de recherche est celui du Sud-Kivu. La raison qui milite sur ce choix est que c'est l'une des provinces qui ont les plus souffert et payé le lourd tribut des guerres qui sévissaient en R.D.C. Elle connaît, évidemment, un très grand nombre de cas de violations des droits des citoyens par les différents groupes opérant alors dans la province (R.C.D., Mayi-Mayi, interahamwe, ex-FAR, Armée rwandaise, bandits à mains armées, etc.) et même les troupes gouvernementales.

2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES

La violence armée n'a pas disparu. Elle a plutôt tendance à s'accroître à l'heure actuelle dans la société humaine, en général, et sur le continent africain, en particulier, en dépit de multiples efforts fournis par la Communauté Internationale pour y mettre fin. Ces guerres sont souvent les causes des plus graves violations des droits de l'homme et des libertés fondamentales alors que presque la totalité d'Etats et des groupes combattants expriment leur attachement à la dignité de la personne et à l'établissement d'Etats respectueux des droits de l'homme.

De nombreux êtres humains voient ainsi leurs droits à la vie, à la liberté, à la sécurité constamment menacés. L'égalité entre tous ni la dignité de chacun ne sont pas respectés, les nouvelles barrières se dressent pour des motifs liés à la race, au sexe, à la couleur, à la langue, à l'origine sociale ou nationale comme le souligne l'abbé Noël MPATI Ne Nzita6(*). A cela s'ajoutent, selon lui, les déplacements forcés et massifs des populations, les limites posées aux possibilités de secours désintéressés, les tortures, les emprisonnements et les exécutions sommaires sans garanties de la justice, les restrictions imposées pour motif de racisme, les brimades et les persécutions religieuses perpétrées dans le secret. Telles sont autant d'atteintes inadmissibles aux impératives éthiques qui s'imposent à toute conscience pour garantir la dignité de l'homme et assurer la véritable paix entre les hommes.

Le Sud-Kivu, vivant aussi une situation de guerre, à l'instar d'autres provinces de la R.D.C. ; a connu et continue à connaître cette situation combien catastrophique en matière des droits de l'homme. La situation est dénoncée à la fois par la Communauté Nationale (les groupes de défense des droits humains locaux) et par la Communauté Internationale. En effet, au Sud-Kivu, les populations civiles sont massacrées, forcées aux déplacements, condamnées à la famine et à la misère, etc. à cause de la guerre qui aurait fait plus de trois millions de victimes bien qu'elle soit présentée par LAUTERPCHT comme le « recours ultime d'un peuple ou d'une partie du peuple pour lutter en faveur d'un changement des structures socio-politiques soucieuses du bien-être de la population et l'introduction de la justice sociale »7(*). La guerre porte en elle les germes de sa propre destruction car elle est à la base de la perturbation des conditions de vie et de travail, de la destruction des infrastructures socio-économiques, de la création des foyers de tension, d'insécurité et surtout de l'aggravation des violations des droits humains8(*).

Eu égard à ce qui précède, les questions suivantes méritent d'être posées à titre de problématique de travail :

- Comment les violations des droits de l'homme se traduisent-elles concrètement au Sud-Kivu ?

- Quelles seraient les causes et les conséquences socio-politiques des violations des droits de l'homme dans la Province du Sud-Kivu ?

- A l'avenir, quels sont les mécanismes envisageables pour lutter contre ces violations massives des droits de l'homme ?

A titre d'hypothèses, nous estimons que les violations des droits de l'homme se traduiraient par des massacres des populations civiles, des arrestations arbitraires, des tortures, des sévices corporelles et des viols, des exécutions sommaires et assassinats, des enlèvements forcés, d'enrôlements forcés dans les différents groupes armés, de prises d'otage de la paisible population civile, etc. Les principales causes des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu seraient, d'abord, la réticence de la population vis-à-vis de la rébellion et le rejet de la guerre ; ensuite, les représailles des acteurs au conflit armé qui soupçonneraient que la population civile collabore avec la partie adverse ou après des défaites enregistrées sur le champ de bataille ; puis, les parties prenantes au conflit dans la Province du Sud-Kivu s'illustreraient dans les violations des droits et libertés fondamentaux pour s'attirer l'attention de la Communauté Internationale et prouver leur capacité, force et importance dans les débats consacrés au conflit armé en R.D.C. Enfin, le caractère autoritaire de la rébellion et de divers groupes armés pousserait ceux-ci à faire usage de la contrainte et de la répression de toutes sortes pour se faire accepter et imposer leur volonté.

Comme conséquences des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, l'on noterait le nombre très élevé de morts parmi la population civile innocente, les déplacements massifs des populations de leurs villages vers les forêts ou les villes à peu près sécurisées, les séparations des familles, la non assistance de cette population condamnée et exposée à la famine, aux maladies à cause de l'insécurité persistante dans la Province. Ces violations accentueraient ainsi la répugnance des groupes armés par la population (rébellion et bandes armées) à travers la manifestation de leur hostilité par l'indifférence, la désobéissance civile, etc. ; renforçant alors la tendance nationaliste, patriotique et l'illégitimation de la rébellion.

Ainsi, la seule voie à court, moyen et long termes pour mettre fin aux violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, en particulier, et en R.D.C., en général, serait la cessation de la guerre, la mise en place effective d'institutions qui rétablissent la paix et la démocratie, l'Etat de droit respectueux de la dignité humaine, la lutte contre l'impunité.

3. OBJECTIFS ET INTERET DU SUJET

La machine de guerre, bien que régie par des règles particulières, est source des violations massives des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces violations constituent un mal qu'il faut absolument vaincre. Or, tout mal ne peut être vaincu que si l'on parvient à la compréhension de ces motivations et effets les plus profonds. Ainsi, la recherche des causes et des conséquences socio-politiques des violations des droits de l'homme pendant la période de guerre au Sud-Kivu facilitera-t-elle la mise en oeuvre de mécanismes de leur protection et de leur promotion. Ensuite, cette étude, par la pertinence de ses recommandations, permettra de contribuer à la promotion des droits de l'homme ; mais aussi et surtout d'interpeller la conscience des hommes politiques Congolais, actuels et avenirs, sur la valeur sacrée de la personne humaine au nom de laquelle ils prétendent mener les luttes armées et politiques.

Ce travail permets, en outre, de connaître comment les droits de l'homme sont protégés tant sur le plan universel, régional que national, pendant les périodes de paix comme celles de guerre ; d'évaluer leur degré de protection dans la Province du Sud-Kivu par les autorités en place. La compréhension des causes et des conséquences socio-politiques oriente dans la détermination des mécanismes envisageables pour la lutte contre ces violations au Sud-Kivu et en R.D.C., en général.

4. METHODOLOGIE DE TRAVAIL

A. Les Méthodes.

Moyen de parvenir à un aspect de la vérité, de répondre plus particulièrement à la question « Comment », est liée au problème d'explication9(*), dans la recherche de l'interprétation des faits que nous analysons, deux méthodes nous paraissent ainsi les plus adaptées. Il s'agit, d'abord, de la méthode fonctionnelle dans son approche dite relativisée défendue par Robert King MERTON et, ensuite, de la méthode génétique proposée par Madeleine GRAWITZ.

a. La méthode fonctionnelle

Mathématiquement, le mot « fonction » désigne « une relation entre deux ou plusieurs éléments, tel que tout changement introduit dans l'un provoque une modification dans l'autre ou les autres entraînent de leur part une adaptation »10(*). Ici, ce qui est mis en exergue, c'est l'interdépendance qui existe entre les éléments. Dans ce même sens, le but poursuivi dans l'analyse fonctionnelle est d'arriver à cerner la variable indépendante la plus lourde, c'est-à-dire celle qui exerce la plus grande influence sur la variable dépendante. La variable dépendante est le phénomène qui varie en fonction d'un ou de plusieurs autres phénomènes, à l'endroit desquels il se trouve dans une certaine situation de dépendance. Elle est donc à expliquer tandis que la variable indépendante est explicative11(*). Ainsi, par exemple, les violations accrues des droits de l'homme constatées et dénoncées en R.D.C., en général, et au Sud-Kivu, en particulier, dépendent de la situation politique dans le pays, à savoir, la guerre.

Robert King MERTON, représentant éminent du fonctionnalisme et défenseur de l'approche ou la conception relativisée, propose quatre concepts fonctionnels dans son analyse : la dysfonction, l'équivalent ou substitut fonctionnel, la fonction manifeste et celle latente.12(*)

1° La Dysfonction.

Alors que les fonctions sont, parmi les conséquences observées, celles qui contribuent à l'adaptation ou à l'ajustement d'un système donné ; les dysfonctions, par contre, sont celles qui gênent l'adaptation et l'ajustement d'un système. Ramenant cette réflexion à la réalité Congolaise, nous pouvons dire que l'état de guerre que le pays a connu gêne ou empêchait l'Etat de remplir pleinement ses missions dont celle de la garantie, de la protection et la promotion des droits de l'homme ainsi que l'assurance de la sécurité des citoyens. Raison pour laquelle l'on assistait au Sud-Kivu à des violations croissantes et massives des droits individuels.

2° L'équivalent ou substitut fonctionnel.

Un élément culturel ou social peut jouer un rôle d'équivalent ou de substitut fonctionnel à un autre pour exercer une activité à sa place. La réalité ne montre-t-elle pas des besoins humains et sociaux, qui peuvent être satisfaits de façons différentes : un seul élément pouvant remplir plusieurs fonctions, de même qu'une seule fonction peut être remplie par les éléments interchangeables.

En effet, depuis le déclenchement de la seconde guerre dite de « rectification » en R.D.C., l'on assiste à une partition de fait du territoire national. Une partie est contrôlée par le gouvernement central et une autre est partagée entre diverses factions rebelles et bandes armées. Cela implique que les missions de l'Etat jadis remplies par le seul gouvernement central sur tout le territoire national se trouvent ainsi partagées entre eux en vue d'assurer la continuité de l'Etat. Dans ce cas, bien que ces belligérants ne soient pas reconnus comme gouvernements d'Etat, ils ont l'obligation de promouvoir et de respecter les droits de l'homme et d'assurer la sécurité des citoyens Congolais et étrangers des territoires qu'ils administrent au même titre que l'Etat. Ces belligérants remplissent donc le rôle de substitut de l'Etat.

3° Les fonctions manifestes et les fonctions latentes.

Les fonctions manifestes sont les conséquences objectives qui, contribuant à l'ajustement ou à l'adaptation du système, sont comprises et voulues par les participants du système. En revanche, les fonctions latentes sont essentiellement celles qui ne sont ni comprises ni voulues mais qui n'en n'existent pas moins. Ces fonctions latentes sont parfois remplies par des rites anciens qui, ne jouant plus leur rôle, substituent leur but initial à une autre fonction.

Dans le cas d'espèce, disons que les acteurs politiques, en menant la guerre dite de « rectification », ont eu pour objectif principal et officiellement défendu ; le remplacement des institutions existantes considérées selon eux comme autoritaires et inefficaces ; donc, de les remplacer par celles qui garantiraient le respect des droits de l'homme, la justice et le bien-être social ainsi que la démocratie en R.D.C. Telle a été la fonction manifeste de la guerre dans les conditions normales.

Cependant, l'évolution du conflit a démontré une toute autre réalité qui se distancie presque totalement de l'objectif de départ. En effet, les mouvements rebelles dont le R.C.D./Goma, au lieu de garantir la justice sociale et le bien-être du peuple Congolais pour lequel ils prétendent se battre, se plaisaient à en violer les droits et libertés les plus fondamentaux. C'est une situation, certes, non voulue mais qui déforme voire modifie le sens même de l'intérêt de la guerre. Cette violation des droits humains constitue donc la fonction latente, parmi tant d'autres, de l'état de guerre.

b. La méthode génétique

Comme son nom l'indique, la méthode génétique recherche la genèse des évènements, c'est-à-dire les antécédents. Il s'agit, selon Madeleine GRAWITZ13(*), d'un processus se déroulant dans le temps, c'est-à-dire d'une explication diachronique. Mais pour la génétique, le temps est secondaire différemment de l'explication historique. C'est le sous-produit d'une genèse qui a son propre rythme et cherche une causalité dans les faits eux-mêmes. Le but de la méthode génétique est donc de trouver la cause initiale, le fait générateur d'un phénomène social donné.

Les violations de droits de l'homme, nous l'avons dit dans la précédente méthode, sont successives à l'état de guerre au Sud-Kivu. L'usage de cette seconde méthode se justifie par le fait que la présente étude s'oriente vers la recherche des causes qui seraient à la base des violations des droits humains dans la Province du Sud-Kivu sous la rébellion ou la guerre menée par le R.C.D./Goma. Aussi, faisons remarquer que nous nous attèlerons à mentionner les conséquences qui en découlent tant sur la vie des populations que du présent et de l'avenir des rebelles et des autres responsables des bandes armées dans la province.

B. Les Techniques.

La collecte et le traitement des données ont été rendus possibles par l'usage de certaines techniques d'investigation, à savoir : l'analyse documentaire, l'entretien, le questionnaire d'enquête et l'analyse du contenu14(*).

a. Les techniques d'enquête

1° L'analyse documentaire.

L'usage de cette technique nous a permis de trouver des informations utiles à l'étude des droits de l'homme et de leur protection. Ainsi, les bibliothèques, les archives et les banques de données abondent des données qui ont retenu notre particulière attention. Elles sont réparties principalement en documents écrits à caractère officiel ou non, public ou privé, national ou internationale. Les données recueillies ont subi, éventuellement, quelques adaptations pour qu'elles se conforment à notre objet de recherche. Il s'agit, en effet, d'ouvrages, d'articles de travaux de mémoires, de textes légaux, etc.

2° L'entretien.

Il nous a permis d'avoir un contact direct avec nos interlocuteurs au sujet de la situation des droits de l'homme au Sud-Kivu. Nous avons ciblé, ici, les responsables des organisations locales de défense des droits de l'homme (Héritiers de la Justice, Voix des sans Voix et Liberté, Groupe Jérémie, Initiative Congolais pour la Justice et la Paix ; MONUC, section des droits de l'homme, APPRODEPED, etc.) afin qu'ils nous livrent ou nous fournissent les informations sur leurs perceptions des événements ou de la situation des droits de l'homme au Sud-Kivu, leurs interprétations des faits ainsi que leurs expériences dans la compréhension des mobiles liés aux différentes violations constatées et à leurs conséquences sur la vie socio-économique et politique de la province. Cet entretien était semi-directif en ce sens qu'il était canalisé par un certains nombre de questions ouvertes pour la plupart. Le guide d'entretien était composé de 23 questions. Cette technique nous a ainsi permis de compléter les informations fournies par l'analyse documentaire et de les préciser.

3° Le questionnaire d'enquêtes.

La technique d'enquête par questionnaire consiste à poser à un ensemble de répondants, le plus souvent représentatif d'une population, une série de questions relatives à leur situation sociale, professionnelle ou familiale, à leurs opinions, à leur attitudes à l'égard d'options ou enjeux humains et sociaux, à leurs attentes, à leur niveau de connaissance ou de conscience d'un événement ou d'un problème, ou encore sur tout autre point qui intéresse les chercheurs. Elle vise la connaissance de la population en tant que telle (conditions et modes de vie, valeurs ou opinions), l'analyse d'un phénomène social que l'on pense pouvoir mieux cerner à partir d'informations portant sur les individus de la population concernée et des cas où il est nécessaire d'interroger un grand nombre de personnes et où se pose un problème de représentativité.

Etant donné que l'univers d'enquête (la province du Sud-Kivu) est trop vaste, nous avons considéré un échantillon représentatif de 108 personnes dont l'âge varie entre 18 et 66 ans. Cet échantillon est constitué de 79,6% d'étudiants et 20,4% d'individus tirés au hasard dans les autres secteurs de la vie sociale (enseignants, chômeurs, religieux, personnel sanitaire, défenseurs judiciaires, agents des services publics et entreprises privées, etc.) à Bukavu.

Le questionnaire est constitué de 10 questions : 2 questions d'identification et 8 questions d'opinion sur les enquêtes. Les questions sont soit fermées (permettent à l'enquêté de répondre par oui ou non), soit à éventail de réponses laissant ainsi à l'enquêté plusieurs possibilités de réponses dans le souci de vérifier nos hypothèses sur les attitudes de la population face aux violations des droits humains au Sud-Kivu.

b. Technique d'analyse des données

Pour l'analyse des données collectées sur le terrain, la technique d'analyse du contenu a été utile. C'est une démarche qui donne au chercheur la possibilité de traiter de manière méthodique des informations et des témoignages qui présentent un certain degré de profondeur et de complexité, comme, par exemple, les rapports d'entretiens semi directifs et les opinions populaires. Elle permet de satisfaire harmonieusement aux exigences de la rigueur méthodologique et de la profondeur inventive qui ne sont pas toujours facilement conciliables ainsi que d'élaborer une interprétation qui ne prend pas pour repères les propres valeurs et représentations du chercheur.

Ainsi, les données récoltées se devaient d'être bien interprétées et adaptées à l'orientation de cette étude. En outre, dans le souci de produire un travail fondé sur les informations fiables, nous avons procédé au tirage systématique tant sur le plan quantitatif que sur le plan qualitatif des données recueillies sur le terrain.

5. DIFFICULTE RENCONTREE

La difficulté à laquelle nous nous sommes est celle liée au fait que nous avions peur de nous lancer, en tant que politiste, dans un domaine des droits de l'homme qui, le plus souvent, est considéré comme l'apanage des seuls juristes. Cela explique, d'ailleurs, la rareté d'ouvrages de politistes sur cet aspect. Fort heureusement, cette peur a été vaincue par la mise en application du principe de l'interdisciplinarité des sciences qui signifie, selon nous, qu'il n'existe pas de domaine de recherche exclusivement réservé à une option ou une faculté, mais que celles-ci sont plutôt complémentaires. Cela nous a ainsi stimulé à aller jusqu'au bout de notre étude et à présenter les résultats convaincants.

6. SUBDIVISION SOMMAIRE DU TRAVAIL

Mises à part l'introduction et la conclusion, le travail se subdivise en deux parties. La première est consacrée à la théorie générale sur les droits de l'homme dans laquelle nous nous faisons une approche conceptuelle et présentons le cadre normatif relatif aux droits de l'homme. La deuxième partie est consacrée au rapport entre le conflit armé et les droits de l'homme au Sud-Kivu qui indique diverses violations ainsi que leurs implications socio-politiques.

PREMIERE PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME : UN CONCEPT QUI S'INSCRIT DANS LA THEORIE GENERALE DE L'ETAT

La partie que l'on aborde se concentre à la mise en évidence des champs épistémologique et conceptuel de l'étude ainsi que les sources juridiques relatives aux droits fondamentaux de l'homme.

CHAPITRE I : CHAMPS EPISTEMOLOGIQUE ET CONCEPTUEL

Ce chapitre est consacré à la théorie politique à laquelle le sujet de travail se réfère et à la définition des concepts clés qui composent le thème de recherche.

SECTION 1 : L'ETAT : PROTECTEUR PRIVILEGIE DES DROITS DE L'HOMME

L'Etat est défini par MULUMBATI Ngasha comme une forme d'organisation politique où les relations entre commandants ou dirigeants et commandés ou dirigés, qui impliquent tout à la fois un certain consensus et une certaine contrainte, sont diversifiées par des institutions. Il s'agit d'une réalité sociologique qui s'impose comme telle à travers trois éléments principaux, à savoir, la population, le territoire et les pouvoirs publics organisés. Ces trois éléments constituent de véritables invariants dans la mesure où c'est à travers eux que l'Etat s'est imposé à travers les différentes sociétés humaines et continue à s'imposer comme réalité sociologique. A ces trois éléments constitutifs de l'Etat, il est ajouté un quatrième plutôt juridique que sociologique, à savoir la reconnaissance15(*).

L'Etat, selon Dominique TURPIN16(*), est un cadre de pouvoir. Du point de vue temporel, la notion de l'Etat est, en effet, contingente. Elle est née, d'une certaine manière, au Ve siècle avant Jésus-Christ dans le cadre de la cité grecque. Dans l'espace, par contre, même si l'on s'en tient à l'époque contemporaine, on relève que les Etats ne constituent pas le seul cadre du pouvoir, lequel existe aussi en déça et au-delà de lui. En déça parce que de nombreuses institutions disposent d'un pouvoir propre sur leurs nombres : églises, partis, syndicats, ordres professionnels, associations, familles avec, pour chacune d'elles, la même distinction entre détenteur et destinataires de l'autorité. Au-delà de l'Etat, parce que certaines autres institutions, plus ou moins supranationales, disposent d'un pouvoir normatif et d'un pouvoir de contrainte. En fin de compte, s'il ne peut y avoir d'Etat sans pouvoir, on trouve du pouvoir sans Etat. Les deux notions ne concordent donc pas exactement, mais l'Etat constitue cependant pour le pouvoir un cadre privilégié.

Paragraphe 1 : Les buts et les tâches de l'Etat

A. Les buts de l'Etat

Deux théories concurrentes aident à expliquer des buts poursuivis par l'Etat. Il s'agit notamment de la théorie économique moderne et libérale et la théorie marxiste17(*). La théorie économique moderne et libérale part du principe d'une séparation entre l'Etat et l'économie. L'intervention des pouvoirs publics n'est justifiée que pour maintenir la stabilité du système économique, empêcher des évolutions néfastes et rétablir une authentique économie de concurrence. Etant donné que, en fin de compte, seuls les hommes sains et aptes au travail peuvent participer activement à la concurrence, l'Etat doit donc s'occuper de tous ceux qui ne sont plus « concurrentiels » pour des raisons de santé ou d'âge. C'est dans cette optique que le système des prestations sociales se justifie dans son ensemble comme une externalité fournie par les pouvoirs publics à titre de compensation. L'Etat devient ainsi la nouvelle « main invisible » qui assure une équitable répartition des biens dans le contexte général axé sur le « laisser faire ».

La théorie marxiste prend le contre-pied. La domination de classe et l'exploitation ont faussé l'homme et la société : le but est d'établir une nouvelle forme de société composée d'hommes libres, sociaux. Pour les libéraux, les êtres humains sont des demi-dieux qui suivent rationnellement les processus du marché et sont capables de porter un jugement. En revanche, pour les marxistes, les hommes sont les aliénés et des exploités qui ne pourront être libérés que par la dictature du prolétariat.

L'approche marxiste, aussi bien que l'optique libérale, considèrent l'activité de l'Etat sous le seul angle de la répartition des biens. D'autres perspectives sont, en revanche, énoncées, notamment, la reconnaissance des droits civils et politiques qui sont considérés comme découlant de la dignité inhérentes à la personne humaine, de l'idéal de l'être humain libre, jouissant des libertés et libéré de la crainte et de la misère.

B. Les tâches ou missions de l'Etat.

Les tâches sont les fonctions qu'une organisation donnée remplit pour atteindre les buts ou les objectifs qu'elle s'est fixée. L'Etat, dans le cadre de ses activités, remplit certaines missions ou tâches pour le bien-être de la communauté. Il s'agit évidemment des tâches de protection intérieure et extérieure et des tâches sociales (mesures pour assurer l'existence de l'homme, les possibilités d'épanouissement, les tâches dans le domaine communautaire)18(*).

a. La protection interne et externe

La mission de protection fait partie des premières et des plus anciennes tâches de l'Etat et constitue l'une des tâches les plus incontestables pratiquement. L'Etat est donc tenu d'assurer la protection extérieure et celle intérieure à travers ses organes administratifs que Charles DEBBASCH19(*)et Bernard GOURNAY20(*)qualifient de mission ou fonctions de souveraineté.

Alors qu'autrefois les rois et leurs armées s'attachaient à la conquête de nouveaux territoires, de nos jours, les relations extérieures des Etats modernes se limitent à la défense de la souveraineté propre. La protection extérieure est constituée de la défense et de la conduite des affaires ou des relations extérieures. La défense consiste en la mobilisation économique de la nation, la préparation et la conduite des opérations militaires, la participation éventuelle des troupes au maintien de l'ordre en période de troubles graves. Autrement dit, il s'agit de maintenir l'intégralité du territoire et la sûreté de l'Etat contre les atteintes venant de l'extérieur. La conduite des relations extérieures se réalise, quant à elle, par la représentation du gouvernement à l'étranger, la protection des ressortissants nationaux, la participation aux conférences et aux organisations internationales, la conduite des négociations diplomatiques, la tutelle des territoires non autonomes, l'aide économique extérieure et l'assistance technique.

Parmi les tâches extérieures que les organes de l'Etat doivent accomplir, il convient de mentionner notamment que leur disposition à coopérer au sein des organisations internationales ne doit pas être conçue uniquement dans le but de préserver la souveraineté et l'autodétermination du pays, mais encore de travailler à l'édification des relations internationales plus justes. Dans ce contexte, il s'agit de la nécessité de développer une prise de conscience de la solidarité si l'on veut parvenir à consolider l'ordre international.

L'Etat veille aussi à la protection intérieure appelée aussi mission de police. Cette tâche consiste à assurer le maintien de l'ordre, à protéger les personnes et leurs biens en prévenant les crises et les délits, à assurer la protection civile, la police politique et sert d'institution d'information politique du gouvernement. La police a également pour rôle de régler les conflits sociaux ou individuels par la mise en place d'organes judiciaires civils et criminels qui exécutent les peines ou les organismes de conciliation. L'Etat moderne ne doit pas seulement, comme dans le passé, se contenter de protéger le citoyen des voleurs, des meurtries et autres criminels ou malfaiteurs, il a encore sensiblement étendu son champ de protection. En effet, les dépendances et interactions toujours marquées ont conduit à intensifier les communications, mais également à accroître les périls auxquels l'homme s'expose. Mais cet accroissement continu des missions de police implique du même coup des restrictions aux libertés du citoyen.

Malheureusement, dans presque tous les pays en voie de développement, la police est conçue moins comme protectrice de la population que comme instrument et bras armé du gouvernement qui se sert d'elle pour imposer ses lois et sa volonté au peuple ; de la sorte, les rapports de confiance avec la population sont le plus souvent détériorés. Ainsi, dès qu'un Etat n'est plus en mesure de remplir ces missions de protection, celles-ci sont très vite accomplies par des particuliers qui, dans certaines circonstances, créent même les milices d'autodéfense populaires. Tel est, en effet, le cas en République Démocratique du Congo avec des forces dites « d'autodéfense populaires » formées par les groupes rebelles dans les villages de la Province du Sud-Kivu, par exemple. Une telle évolution conduit rapidement à une destruction de la souveraineté de l'Etat par l'intérieur et donc à l'anarchie du fait que toutes ces bandes sont difficilement contrôlables. Lorsqu'une population a perdu confiance en l'Etat, elle ne la retrouve pas facilement. C'est pourquoi les pouvoirs publics doivent veiller à ce que l'Etat soit seul compétent pour accomplir les diverses tâches de protection par la détention du monopole de la force.

Mais cette force contraignante, les pouvoirs publics n'ont le droit d'y recourir que pour protéger la population et non pas pour leur bon plaisir et pour la violation des droits et libertés de cette même population car, avec l'évolution, le recours arbitraire à la force finit par provoquer une destruction interne de l'Etat et de son autorité.

b. Les tâches sociales de l'Etat

L'Etat à travers le monde s'occupe d'un certain nombre de tâches dans le domaine social qui contribuent à sa stabilité. Il s'agit des mesures pour assurer l'existence des hommes, des possibilités d'épanouissement des citoyens et des tâches dans le domaine communautaire.

1° Mesures pour assurer l'existence des Hommes.

Aujourd'hui encore, la famille reste le fondement d'une existence digne d'un être humain. Par conséquent, parmi les tâches que l'Etat doit accomplir, la protection, le soutien et l'épanouissement de la famille occupent une place de choix. Ainsi, l'Etat est-il tenu d'intervenir en matière de la santé et de l'hygiène dont le développement constitue une fonction parmi les plus modernes de la collectivité. Il s'agit de lutter contre les maladies et les accidents, de la distribution des soins, de la surveillance des denrées alimentaires et des produits pharmaceutiques. Les autres actions de l'Etat doivent être remarquables, notamment, en matière de logement et de l'urbanisme, la défense des intérêts des travailleurs salariés, la redistribution des revenues et l'amélioration de l'environnement. Bref, l'Etat doit veiller à la protection des faibles21(*).

La protection de l'eau, de l'air, du sol et la préservation des ressources naturelles pour les générations futures font également partie des tâches importantes et pour l'Etat moderne aussi bien que la sauvegarde de la liberté, la faculté d'épanouissement personnel et la sphère privée de l'être humain.

2° Les possibilités d'épanouissement des citoyens.

Ce sont les missions éducatives et culturelles. Ces missions cherchent à promouvoir dans tous les domaines les connaissances des citoyens, à développer le savoir et la culture. L'enseignement des enfants et des adolescents, des adultes, la recherche scientifique et la création artistique, l'information sont ainsi assumés et contrôlés par l'Etat22(*). A cela s'ajoutent les tâches des pouvoirs publics dans le domaine de la recherche fondamentale et de la poursuite du développement de la science.

3° Les tâches dans le domaine communautaire

Le fondement d'une tranquillité intérieure et d'un ordre établi n'est autre qu'un système juridique structuré, doublé d'un appareil judiciaire caractérisé par des procédures simples, rapides et correctes. Plus les citoyens ont confiance dans l'ordre juridique, moins ils cherchent à le contourner ou à manoeuvrer pour son contournement. Les règles de forme (le droit de procédure, l'organisation judiciaire, etc.) sont des aspects tout aussi importants pour une coexistence harmonieuse que les règles de fond (le droit de la famille, le droit des contrats, par exemple).

Il incombe également à l'Etat de veiller à la stabilité des prix, de défendre le pouvoir d'achat de la monnaie tant à l'intérieur qu'à l'extérieur et d'exercer une influence régulatrice sur le crédit en menant une politique prudente en matière de taux d'intérêt. Ces missions économiques cherchent à contrôler l'initiative privée de manière à garantir aux particuliers des prestations d'une qualité, d'une quantité ou d'un coût déterminé, soit à fournir directement des prestations aux administrés. Figurent aussi, parmi les missions économiques, le contrôle des moyens de communication, qu'il s'agisse des transports ou des postes et télécommunications ; de la recherche et de l'exploitation des sources d'énergie, de l'aménagement de l'espace et plus généralement pour le contrôle du développement économique. Il s'agit donc de la coordination générale de la politique économique de l'Etat.

Paragraphe 2 : L'Etat de droit : un système au service de la garantie effective des droits fondamentaux

Si les vues fondamentales concernant le juste pouvoir au service du peuple étaient fort répandues, la naissance de l'idée véritable des droits de l'homme est un évènement propre à l'histoire de l'Europe et à ses courants intellectuels. L'idée des droits de l'homme gagna beaucoup en importance au bas Moyen Age ; avec la sécularisation ou laïcisation progressive du pouvoir. Dès lors, le souverain édictait son propre droit, contrairement à l'époque où l'on considérait que le pouvoir venait de Dieu et trouvait ses limites dans le droit surnaturel, il fallait bien lui fixer certaines limites afin qu'il n'agisse pas de façon arbitraire et sans retenue aucune, mais qu'il tienne compte des droits de ses sujets.

Ce faisant, il est né l'idée des droits originels et inaliénables de l'homme envers le pouvoir de l'Etat. Dans ce contexte, il ne faut pourtant jamais perdre de vue que l'idée fondamentale d'un juste pouvoir au service du bien des hommes est sûrement propre à tous les peuples de la terre et que les cruautés, les abus et les violations du droit sont partout considérés et ressentis comme un mal, à l'exception de l'asservissement des ennemis23(*). Cette idée de droits originels et inaliénables de l'homme envers le pouvoir et l'Etat ne peut être considérée que dans une structure étatique qui oeuvre, en effet, pour le bien commun, le bien être de tous et l'intérêt général. Il s'agit de l'Etat de droit qui est notamment développé par Blandine KRIEGEL24(*).

A. Buts et éléments constitutifs de l'Etat de droit.

L'Etat de droit est constitué des notions de souveraineté et le non patrimonialisme. Le pouvoir souverain est, dans ce cadre, défini par Jean BODIN comme essentiellement civil. La relation privilégiée n'est pas le rapport de force, mais plutôt le rapport de droit qui en est son arme. Dans un Etat de droit, le pouvoir souverain, la puissance publique reposent sur la loi25(*).

Pour ce qui est du non patrimonialisme, les théoriciens de l'Etat de droit affirment que l'on ne doit pas traiter les sujets comme des esclaves ni tenir les hommes pour des choses sur qui l'on peut faire ce que l'on veut lorsque l'on est au pouvoir. Selon le principe chrétien, les hommes sont à l'image de Dieu et donc libres. Les rapports publics ne doivent donc pas être calqués sur le rapport de propriété, la puissance n'est pas une propriété. De là, une nouvelle définition non patrimoniale de la puissance. Au creux du développement de la nouvelle doctrine de la puissance publique s'affirment l'idée de l'assujettissement du pouvoir à la loi et le développement des droits de l'homme.

Ainsi, l'homme, indépendamment de son origine, de sa condition sociale ou de son milieu ; porte en lui un certain nombre de droits tellement inhérents à sa personne qu'ils ne sauraient être méconnus sans que, du même coup, son essence soit altérée. Ces droits qui ne doivent rien à la législation positive puisqu'ils lui sont antérieurs constituent autant de limites à l'action de l'Etat. Les pouvoirs publics sont, au contraire, tenus de créer des conditions nécessaires à leur réalisation quelles qu'en soient les circonstances (qu'il y ait guerre ou paix).

B. Les caractéristiques de l'Etat de droit.

Tout d'abord, l'Etat de droit substitue au bien civil, établi sur la guerre et sur les conquêtes, une société politique établie sur la paix et dans laquelle les litiges sont arbitrés par la négociation juridique et où le souverain, à la différence de l'« imperator » qui disposait d'un droit de vie et de mort sur le citoyen, doit reconnaître et garantir le droit à la sûreté des individus. L'Etat de droit rompt avec la forme impériale du pouvoir.

Ensuite, l'Etat de droit sépare la politique de l'économique et congédie la force dominante (seigneuriale) du pouvoir dans la mesure où elle remplace le régime de la puissance en propriété par une société où les hommes ne sont plus des choses.

Enfin, l'Etat de droit est une nouvelle doctrine du pouvoir qui organise un espace politique unifié, où la puissance publique est soumise à la loi et limitée par le droit individuel et est assortie d'une morale politique de la loi. Cette doctrine a été élaborée à travers les écrits des légistes et des philosophes.

Paragraphe 3 : L'effondrement de l'Etat26(*) : Un blocage à l'exercice et à la garantie des droits fondamentaux

Un Etat étant une institution politique dotée d'autorité qui exerce sa souveraineté sur un territoire reconnu. Cette définition repose, en effet, sur trois fonctions : l'Etat est l'autorité souveraine, par conséquent une organisation réelle chargée de prendre des décisions ; en même temps que le symbole intangible de l'identité ; enfin, il est le garant de la sécurité d'un territoire et de sa population. Ces trois fonctions sont étroitement imbriquées qu'il est difficile de s'en acquitter séparément : l'affaiblissement de l'une entraîne les autres dans la ruine.

Lorsque l'Etat ne parvient plus à s'acquitter de ses fonctions de base qu'il est appelé à remplir, telles qu'elles sont analysées dans les diverses théories, on parle dans ce cas de l'effondrement de l'Etat. C'est donc l'incapacité de l'Etat d'accomplir les fonctions inhérentes à sa raison d'être : le centre de décision du gouvernement est paralysé et impuissant, l'ordre n'est plus maintenu et la cohésion sociale se relâche. L'Etat symbole de l'identité n'est plus capable de conférer un nom à ses populations, non plus qu'un sens à l'action de la société, son territoire ne jouit plus de la sécurité, etc.

En définitive, pour le cas précis de la R.D.C., disons que c'est justement cet effondrement de l'Etat qui a conduit au déclenchement de différentes guerres qui sévissaient dans le pays. A leur tour, ces guerres ont rendu l'Etat incapable de remplir effectivement sa mission de protection et de sécurité des populations civiles sur tout le territoire devenu, d'ailleurs, ingouvernable parce que partagé entre diverses factions rebelles et le gouvernement central. Cette situation a ainsi fait place à des violations massives et systématiques des droits de l'homme et la remise en cause de l'Etat de droit qui a toujours tant de peine à s'installer dans la R.D.C. La présente étude s'attelle donc à l'analyse des causes et des conséquences socio-politiques de diverses violations enregistrées et décriées par les organisations spécialisées et la population, en général.

SECTION 2 : LES DROITS DE L'HOMME : UN CONCEPT POLYSEMIQUE AU CONTENU PRECIS

Paragraphe 1 : Définition

Le Petit Larousse illustré définit les droits de l'homme comme les droits naturels. Ils trouvent leur fondement dans la nature de l'homme et fournissent les règles universelles auxquelles doit se conformer, antérieurement à toute spécification du droit, la coexistence des individus et des sociétés. Ce sont des droits et libertés que chaque individu possède du seul fait de sa nature humaine27(*).

Mettant l'accent sur le fait que l'homme est un individu, Jeanne HERSCH considère les droits de l'homme comme les droits individuels. Elle les désigne aussi comme des droits naturels, primitifs, absolus, primordiaux ou personnels. Ce sont, selon elle, des facultés, des prérogatives morales que la nature confère à l'homme en tant qu'être intelligent ; ils sont sa propriété, inhérents à sa personnalité, partie intégrante de l'entité humaine. Ces droits sont des aspects, des manifestations de la personnalité humaine en son existence subjective, ou dans ses situations de relation avec la société ou les individus qui le composent28(*).

Pour VINCENSINI, les droits de l'homme sont des prérogatives gouvernées par les règles reconnues par le droit constitutionnel et le droit international. Elles visent, d'une part, à défendre les droits des personnes dans leurs relations avec le pouvoir de l'Etat et avec les autres personnes. D'autre part, elles tendent à promouvoir l'établissement des conditions permettant de jouir effectivement de ces droits29(*).

Quant à Jaques MOURGEON, les droits de l'homme ne sont analysables que par la description de leur nature et de leur contenu en dehors de toute interprétation théorique ou philosophique. Pour lui, la personne est dotée des prérogatives, c'est-à-dire des facultés de faire ou d'agir en toute conscience ou non ; de s'abstenir ou de refuser, de réclamer, d'obtenir et, surtout, de se protéger. Mais pour que ces prérogatives soient des droits, il faut que celles-ci aient un statut juridique particulier. Il faut donc que la règle y touche de quelque manière : par l'acceptation, la limitation, l'organisation, la régulation, l'obligation ou l'interdiction. Mais il existe des prérogatives qui échappent au droit auquel elles sont indifférentes30(*).

Des définitions qui précèdent, nous pouvons déduire que les droits de l'homme sont des facultés qu'un être humain ou un individu possède en toute liberté et dont les violations ou tout refus à y satisfaire sont considérés comme illégaux parce que reconnus par la collectivité. Ce sont aussi des standards fondamentaux, des prérogatives morales ou des règles que la nature confère à l'homme en tant qu'être doué d'intelligence auxquels doivent se conformer la coexistence des sociétés et des individus ; qui sont la manifestation de sa personnalité et qui lui permettent d'agir, de vivre, de se protéger. Ils sont le fondement de la liberté, de la justice et de la paix et dont le respect permet à l'homme de se développer pleinement.

Paragraphe 2 : La nature des droits de l'homme

Les droits de l'homme sont qualifiés de droits subjectifs par rapport aux droits objectifs. Ils sont, en effet, dits subjectifs parce qu'ils sont une qualité reconnue à toute personne capable de poser, d'avoir quelque chose et de faire quelque chose de juste. Ce « juste » peut être un pouvoir sur soi-même, sur autrui ou sur les choses. Les droits de l'homme sont des libertés que l'individu tire dans la nature et constituent les données juridiques premières de la vie. Ici, l'homme considéré comme l'individu hors de son monde social et de son histoire est la source des règles naturelles dont le législateur doit s'inspirer. Le droit est ainsi lié à l'individu, à la qualité propre de l'homme, à sa personnalité. Il devient donc l'émanation de l'homme, l'expression des possibilités inaliénables et éternelles31(*).

Paragraphe 3 : Les caractéristiques des droits de l'homme

Quatre caractéristiques majeures sont à souligner en ce qui concerne les droits de l'homme, à savoir, l'inhérence à l'être humain, l'universalité, l'inaliénabilité et l'indivisibilité32(*).

A. L'inhérence à l'être humain.

Les droits humains ne doivent pas être octroyés, achetés, gagnés ou obtenus par héritage. Ils appartiennent aux gens simplement parce qu'ils sont des êtres humains. A ce titre, les droits humains sont « inhérents » à chaque individu.

B. L'universalité.

Les droits de l'homme sont les mêmes pour tous les humains sans considération de la race, du sexe, de la religion, de l'ethnie, de l'opinion politique ou autre, de l'origine sociale ou nationale. Tous les hommes sont nés libres et égaux en dignité et en droit. Les droits humains sont « universels » parce qu'ils s'appliquent à tout le monde. Mais cette universalité est le plus souvent mise en mal par certains éléments inévitables liés à l'environnement et à la culture ainsi qu'aux civilisations. Il s'agit notamment de l'écart entre le monde occidental par opposition au Tiers-monde, au niveau de démocratisation, les pays à économie de marché et ceux a économie planifiée, les Etats à une religion officielle et les Etats laïcs, les régimes militaires et les régimes civils. Cette situation ne permet pas d'avoir une même vision des droits de l'homme étant donné que chaque type de régime est libre de faire le choix qui lui convient avec tous les effets sur les conditions humaines33(*).

C. L'inaliénabilité

Ces droits ne peuvent être enlevés car personne n'a le droit de priver une autre personne de ses droits sous aucun prétexte. Les gens ont toujours des droits humains même si les lois du pays ne les leur reconnaissent pas, ou quand elles les violent. Par exemple, quand l'esclavage est pratiqué, les esclaves ont toujours leurs droits même s'ils sont violés ou bafoués. Ainsi, on dit que les droits de l'homme sont inaliénables.

D. L'indivisibilité

Pour vivre la dignité, tous les êtres humains ont conjointement droit à la liberté, à la sécurité et au niveau de vie décent. Il est donc trompeur d'insister sur une polarisation de tel ou tel autre droit au détriment de l'autre parce que tous méritent une attention égale. L'un ne peut être protégé sans l'autre.Dans cette logique, les droits humains sont qualifiés d'« indivisibles ». La notion des droits de l'homme ne peut être analysée qu'en faisant aussi référence à la notion de liberté que Gilles LEBRETON considère comme un ensemble de pouvoirs que l'homme exerce sur lui-même (liberté d'aller et venir, de se déplacer). Elles s'exercent donc, par essence, dans l'indépendance, sans que l'intervention d'autrui soit nécessaire.C'est donc, théoriquement, un comportement positif, une obligation d'agir. Toujours selon lui, la liberté est la sphère qui échappe à la contrainte sociale et s'oppose à la servitude34(*).

Pour Jeanne HERSCH, les libertés peuvent être entendues comme le droit de tout homme à être honoré et à penser et parler sans hypocrisie et tout citoyen libre a l'assurance de n'être point inquiété dans l'exercice de sa propriété personnelle en dans l'usage de sa propriété réelle. Il a le droit d'aller, de rester, de penser, de parler, d'écrire, d'imprimer, de publier, de travailler, de produire, de garder, de transporter, d'échanger et de consommer35(*).

Paragraphe 4 : La classification des droits et libertés fondamentales de l'homme

La catégorisation classique fait une différence entre les droits civils, les droits politiques, les droits sociaux, économiques et culturels ainsi que les droits environnementaux et de développement36(*). Mais, en plus de cette classification, William A. SCHABAS propose d'autres catégorisations fondées, évidemment, sur la nature des obligations imposées par l'Etat, la limitation des droits et sur leur possibilité d'être dérogés37(*).

A. La catégorisation classique
1. Les droits civils et politiques ou droits de la première génération

Ces droits appartiennent à tous les membres d'une société quels que soient leur âge, leur sexe et leur nationalité. Ils sont regroupés en droits et libertés liés à la vie publique et privée de la personne, ceux liés à l'esprit et les libertés d'expression38(*).

a. Les droits et libertés liés à la vie de la personne.

Ils sont fondamentaux dans une société démocratique et doivent être reconnus largement par la constitution d'un Etat. Ils comprennent le droit à la vie et à l'intégrité physique, le droit à une protection égale des lois, le droit et la liberté de résidence et de circulation, le droit à l'intimité (droit à la vie privé et au secret de correspondance), le droit et la liberté de fonder une famille.

b. Les droits et liberté de l'esprit.

Les libertés de l'homme dans l'exercice de ses activités intellectuelles doivent être reconnues et garanties par le pouvoir. Ces libertés sont également des droits. Il s'agit de la liberté d'opinion (idées ou croyances diverses), la liberté d'expression (liberté de la presse), la liberté d'enseignement, la liberté d'information, la liberté de religion.

c. Les libertés d'expression collective.

Cette formule caractérise les droits et libertés qui sont reconnus à des individus mais qui sont réalisés collectivement par l'action commune de plusieurs personnes. Elles correspondent à la liberté d'association, à la liberté de réunion et de manifestation.

d. Le droit à la propriété.

Une personne ne se sent bien en sécurité, sûre d'elle-même que si elle possède quelque chose ou quelques biens en propriété personnelle. C'est le prolongement de sa personnalité. De ce fait, la propriété doit donc être garantie.

e. Les droits politiques.

Les droits politiques impliquent pour chaque individu le droit de prendre part à la direction des affaires publiques de son pays soit directement, soit par l'intermédiaire des représentants librement choisis et d'accéder dans les conditions d'égalité aux fonctions publiques de son pays. La volonté du peuple est le fondement de l'autorité des pouvoirs publics. Cette volonté s'exprime par des élections honnêtes qui ont lieu, en principe, périodiquement au suffrage universel égal et au vote secret ou suivant une procédure équivalente assurant la liberté de vote.

2. Les droits économiques, sociaux et culturels ou droits de la deuxième génération

En vertu du droit des peuples de disposer d'eux-mêmes, ceux-ci déterminent librement leur statut politique et assurent librement leur développement économique, social et culturel. Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas le peuple ne peut être privé de ses moyens de subsistance. Parmi ces droits, nous pouvons citer notamment le droit syndical, le droit à la grève, le droit au travail, le droit à l'éducation et à la formation professionnelle.

3. Les droits environnementaux, de développement, à la paix ou droits de la troisième génération

Appelés aussi « droits de solidarité », ils sont les plus récents et, à certains égards, les plus modernes. Le volet « droits collectifs » y est beaucoup plus présent39(*). Ces droits comprennent le droit de vivre dans un environnement propre et protégé de toute destruction de même que les droits liés au développement culturel, politique et économique.

Disons, pour terminer, que cette classification traditionnelle des droits n'est pas toujours clairement définie. Certains droits peuvent, en effet, se retrouver dans plus d'une catégorie. Aussi, lorsqu'on dit que chaque personne a des droits, on doit dire également qu'elle a des responsabilités en ce qui concerne les droits des autres. Les limites des droits et libertés des individus ne sont, en effet, placées qu'au point où ils commencent à nuire aux droits et libertés d'autrui. Il revient à la loi de reconnaître ces limites et de les marquer.

B. La classification suivant les obligations imposées par l'Etat.

Il s'agit de la dialectique « droits négatifs-droits positifs ». Dans le premier cas, l'Etat s'abstient simplement d'agir tandis que dans le second, il est tenu d'adopter certaines mesures concrètes afin d'assurer la reconnaissance et la propriété du droit. En principe, cette obligation peut être respectée si l'Etat n'intervient pas afin de limiter les libertés de religion, d'expression, et si ses responsables ne se livrent pas à des actes prohibés telle que la torture et les exécutions sommaires. Souvent les droits civils et politiques sont présentés comme des droits négatifs.

En revanche, les droits économiques, sociaux et culturels sont qualifiés de droits positifs, parce que l'Etat est obligé de fournir des services de santé, de l'éducation, etc. Mais cette obligation dépend du niveau de développement de l'Etat et de la condition de ses ressources. Logiquement, l'obligation pèse lourdement sur un Etat riche que sur un Etat pauvre. S'agissant des droits les plus fondamentaux tels que le droit à la vie, on y a reconnu un volet positif puisque l'Etat ne peut pas seulement s'abstenir d'enlever la vie de ses citoyens par le biais, par exemple, des exécutions sommaires, mais il doit également prendre des mesures de sécurité afin de les protéger et de protéger l'individu des exactions commises par les pouvoirs publics ou les particuliers.

C. Classification fondée sur la limitation des droits.

Il est question, ici, de la dialectique « droits individuels-droits collectifs ». La formulation des droits qui sont tributaires de l'idéologie libérale du XVIIIème Siècle vise exclusivement les individus et leurs rapports avec l'Etat40(*). Mais l'évolution de ces droits dans l'espace et dans le temps, une insistance démesurée sur les droits de l'individu peut porter atteinte aux droits légitimes de certains groupes d'individus pris collectivement. C'est dans cette optique que la Déclaration Universelle des droits de l'homme affirme, en son article 29, paragraphe 2 que « dans l'exercice de ses droits et dans la jouissance de ses libertés, chacun n'est soumis qu'aux limitations établies par la loi exclusivement en vue d'assurer la reconnaissance et le respect des droits et libertés d'autrui et afin de satisfaire aux justes exigences de la morale, de l'ordre public et du bien-être général dans une société démocratique ».41(*) Cette disposition est le prototype de clauses de « limitation » dont la mission est de rechercher l'équilibre entre les droits individuels et les droits collectifs.

Ainsi, la liberté de croyance peut-elle faire l'objet des restrictions qui sont nécessaires à la protection de la sécurité, de l'ordre et de la santé publique ou de la morale ou encore des libertés et des droits fondamentaux d'autrui, tandis que la liberté d'expression fait référence notamment à la réputation d'autrui comme justification des limitations. Plusieurs droits, par exemple, le droit à la vie et à l'intégrité physique, l'interdiction de la torture et de la prohibition de la discrimination, ne souffrent pas des limitations de ce genre. Toutefois, certaines limitations particulières existent même en l'absence d'une clause de limitation classique.

D. Classification fondée sur la possibilité de dérogation des droits.

Cette distinction établit une différenciation entre les droits dérogeables et les droits non dérogeables. L'expression « dérogation » est un processus qui est analogues à la suspension des droits de la personne par le biais des clauses même s'ils se trouvent dans les instruments qui les reconnaissent. Cette possibilité de suspension de leur application, au moins en partie, est prévue lors d'une situation exceptionnelle, d'urgence. En règle générale, la situation d'urgence doit être proclamée officiellement.

Mais cette dérogation ne doit pas être systématique et permanente sous peine de supprimer purement et simplement la liberté en cause car la liberté est la règle et la restriction l'exception. Elle ne peut pas entraîner une discrimination fondée sur la race, la langue, la couleur, le sexe, la religion ou l'origine sociale. De plus, certains droits sont intangibles ou « non dérogeables », en ce sens que la dérogation n'est pas permise, même en cas d'urgence. Les droits intangibles sont au nombre de six et diffèrent selon les conventions42(*). Ces droits ne peuvent jamais faire l'objet de dérogation, et cela, dans aucun régime conventionnel. Il s'agit de, en effet, du droits à la vie, de la prohibition des traitements inhumains, de l'abolition de l'esclavage, du droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion ainsi que de l'interdiction des infractions pénales rétroactives. Ces droits sont parfois identifiés comme le « noyau dur des droits de la personne humaine ».

SECTION 3 : LA GUERRE : UN PHENOMENE AUX CONSEQUENCES EVIDENTES SUR LA GARANTIE DES DROITS FONDAMENTAUX

William URY souligne que dans toute société, les hommes ont l'habitude de s'engager dans les conflits destructeurs, bien souvent mortels, dès lors qu'un différend sérieux se manifeste entre deux personnes, groupes ou nations. Ceci dit, le conflit, quelle que soit sa forme ou sa nature, est omniprésent dans tous les rapports humains43(*).

Disons également, avec Gaston BOUTHOUL, que dans le monde, il y a peu de phénomènes sociaux qui soient aussi répandus que la guerre. En effet, selon cet auteur, alors que tant d'institutions ne sont comprises ou pratiquée que par certains peuples, il n'y en a pas qui ne connaît pas la guerre. Celle-ci parait tellement évidente à tous, des plus civilisés aux plus frustrés, tellement mêlée à la vie des peuples et des individus, liées à leurs préoccupations, évoquée à chaque instant par leur légende et leur histoire que l'on ne songe guère à la définir44(*).

Paragraphe 1 : Définition de la guerre

Dans le langage courant, le mot « guerre » est souvent une situation souvent employée pour désigner les situations qui ne correspondent pas au « concept juridique » du même nom. Au sens du droit international, la guerre est un procédé de contrainte avec emploi de la force qui comprend obligatoirement deux aspects : un aspect militaire et un autre interétatique. La guerre est une lutte armée avec intention de guerre. En tant que telle, elle se distingue de la rétorsion et des représailles pacifiques qui excluent le recours aux armes et des représailles armées qui s'exercent sans intention de guerre45(*).

Pour sa part, Gaston BOUTHOUL propose la définition suivante : « la guerre est la lutte armée et sanglante entre groupements organisés »46(*). Cette lutte, pour présenter un caractère guerrier, doit obligatoirement être armée et sanglante.  Ce dernier trait permet, selon l'auteur, de distinguer la guerre des autres formes d'opposition ou de compétitions, comme la concurrence économique, les luttes sportives, la propagande politique ou religieuse et les discussions de toute sorte. Aussi, la lutte armée, pour mériter le nom de guerre, doit comporter des combats et des victimes.

En un mot, Gaston BOUTHOUL définit la guerre comme étant une forme de violence qui a pour caractéristique essentielle d'être méthodique et organisée quant aux groupes qui la font et aux manières dont ils la mènent. En outre, elle est limitée dans le temps et dans l'espace, et soumise à des règles juridiques particulières, extrêmement variables suivant les lieux et les époques. Tous ces traits découlent du caractère organisé des conflits guerriers47(*).

Utilisant les concepts de « conflit armée » pour expliquer le phénomène de guerre, Rosemary ABI-SAAB48(*)dit, quant à elle, que ces termes impliquent l'existence d'hostilités entre les forces armées organisées. Les hostilités sont comprises comme les opérations de guerre ou l'état de guerre lui-même. Divers critères, matériels ou subjectifs, ont été recherchés pour préciser le contenu de ces termes : les forces armées placées sous un commandement responsable ; le contrôle territorial, le nombre de victimes, la durée et l'intensité des combats, etc. L'application stricte de ces critères exclurait cependant les troubles et les tensions internes, autrement dit des situations de conflits larvés malgré qu'ils causent des victimes qui ne sont pas moins nombreux pour autant.

De toutes les définitions proposées par les auteurs, il ressort que la guerre est une lutte armée, c'est-à-dire que tout différend surgissant entre deux groupes ou deux Etats ne peut être tranché que par le sort des armes et que les combats ne se déroulent qu'à moins armées. Ensuite, ce conflit armé doit opposer des groupements organisés qui peuvent être des Etats indépendants ou des groupes politico-militaires se trouvant dans un même Etat. Enfin, ce conflit armé doit être sanglant, c'est-à-dire qu'il doit faire des victimes.

Paragraphe 2 : Les dimensions de la guerre

Les guerres peuvent être internes qualifiées de conflit interne ou guerre civile, soit externes nommées guerre ou conflit international.

A. La guerre civile ou conflit armé non international.

D'après Gaston BOUTHOUL49(*), la guerre civile désigne le conflit armé qui s'élève entre citoyens d'un même Etat. Elle peut se dérouler entre portions territoriales d'un même Etat (guerre de concession), entre des groupes tels que les partis politiques ou les confessions religieuses dont les membres sont étroitement mêlés. Il s'agit donc d'une action hostile organisée qui est dirigée contre les autorités au pouvoir par les forces armées régulières pour y faire face. Elle implique la participation de plusieurs factions ou encore d'un ensemble d'actions qui surviennent entre les forces armées de deux ou plusieurs factions, que ces actions entraînent ou non l'intervention des autorités au pouvoir50(*).

B. La guerre ou le conflit armé international.

La guerre est internationale lorsque celle-ci oppose les forces armées des pays différents. Elle oppose deux groupes souverains se considérant comme entité de droit international absolument indépendante. Aussi, lorsque la guerre civile bénéficie de l'appui des forces armées étrangères, elle revêt alors un caractère international et sera qualifiée de conflit international et justifie également l'application du droit international51(*).

Cette justification de l'application du droit international s'explique par le fait que les Etats parties au conflit sont seuls sujets du droit international, par la recherche de l'objectivité et de neutralité pour une justice indépendante et impériale et, enfin, éviter que les parties impliquées au conflit ne soient juges et parties52(*).

Le conflit armé en R.D.C. revêt cette double dimension, c'est-à-dire qu'elle a un caractère à la fois interne et international. Nul ne peut, en effet, nier aujourd'hui la présence des responsables Congolais comme meneurs de la rébellion malgré les multiples qualifications leur attribuées. A ce titre, on parle de « conflit interne » ou de « rébellion congolaise ». Aussi, l'implication dans le conflit armé Congolais de plusieurs autres Etats invités ou non (le Rwanda, l'Ouganda, l'Angola, le Zimbabwe, la Namibie, le Burundi) lui attribue-t-elle le caractère international. D'où peut-on parler de « conflit interne internationalisé » ou purement de « conflit international ». Signalons, toutefois, que tous ces Etats ont officiellement retiré leurs troupes.

Paragraphe 3 : Les effets de la guerre

Selon COLLIER53(*), les guerres provoquent cinq types d'effets, à savoir, la destruction du capital physique et humain, la réduction de l'épargne, la fuite des capitaux et le déclin corrélatif des investissements intérieurs, la perturbation des transactions économiques, le détournement des dépenses publiques au profit du secteur militaire au détriment des services publics.

L'analyse des incidences de la guerre montre clairement que la guerre et les conflits civils peuvent entraver le développement économique pendant plusieurs années. Il est impossible de chiffrer précisément le coût des guerres en terme de pertes en vies humaines et autres formes de dépossession pour les populations qui les subissent.

Sur le plan humain, notamment, Gaston BOUTHOUL54(*) affirme que toute guerre est un conflit sanglant qui fait des victimes, combattantes ou non, tuées au cours des batailles volontairement massacrées ou victimes des privations et des dévastations. La population civile paie le lourd tribut de la guerre étant donné que c'est elle qui est envahie, rançonnée, affamée, massacrée, pillée, refoulée et parfois réduite ou amenée à l'esclavage.

Parlant spécifiquement de la R.D.C., Baudouin HAMULI Kabarhuza55(*) dit que l'intervention des acteurs extérieur, notamment le Rwanda et l'Ouganda dans le conflit Congolais a eu comme conséquence l'aggravation de l'ethnicisme et des violations des droits humains, l'envenimement des tensions ethniques locales qui hypothèquent, de ce fait, le dialogue et la réconciliation entre les communautés. L'instrumentalisation des causes ou revendications de certaines ethnies (l'exemple des banyamulenge dans le Sud-Kivu) pour légitimer leur entrée et leur présence sur le territoire Congolais affectera encore pendant longtemps leurs rapports avec les autres communautés au Kivu et dans tout le pays.

Yvon Christian ELENGA56(*) mentionne, pour sa part, que la guerre qu'a vécu la société Congolaise depuis le 02 août 1998 a ébranlé les institutions politiques et fragilisé tant les individus que la société. A l'Est comme à l'Ouest, elle s'est accompagnée de son cortège de désolation, de morts, de corps mutilés, d'entreprises pillées, de règlements de compte, de recrudescence de xénophobie, de haine ethnique, de famine, de maladies, etc.

Les définitions et notions sur les concepts clefs que renferme l'objet de recherche ainsi que son orientation théorique nous permet d'aborder maintenant le deuxième chapitre. Celui-ci est consacré au cadre normatif relatif aux droits de l'homme dans lequel nous allons esquisser la réglementation générale de ces droits fondamentaux pour la vie humaine.

CHAPITRE II : CADRE NORMATIF RELATIF AUX DROITS FONDAMENTAUX

Denis ALLAND57(*) a constaté dans ses analyses que pendant longtemps, les personnes privées n'ont pas été considérées comme des sujets de droit international ou des sujets médiats. Toutefois, l'évolution du droit international depuis 1945 a abouti à conférer aux individus des droits directement définis par le droit international dont ils sont immédiatement titulaires. Dans la mesure où ils peuvent faire valoir directement la violation éventuelle de leurs droits devant un organe international indépendant, leur qualité de sujet de droit des gens parait bien fondé et cela même si la reconnaissance d'une telle capacité demeure relativement fonctionnelle. Cette évolution du droit international en ce qui concerne les droits de l'homme montre l'ampleur et la spécificité de la protection accordée aux individus.

Jacques MOURGEON58(*) démontre, pour sa part, que même si les déclarations faites au niveau international obligent, à juste titre l'organisation dont elles émanent, celles-ci ne le font pas vis-à-vis des Etats pris isolément, même s'ils ont voté en leur faveur. C'est dire qu'elles expriment les positions de principe d'ordre moral, philosophique ou idéologique et traduisent une espérance plus qu'un fait. Ces déclarations n'ont de valeur juridique et de force obligatoire vis-à-vis des Etats que si les textes de droit interne, c'est-à-dire les textes de droit constitutionnel les y incorporent en y faisant référence. Ce n'est que dans ces conditions qu'elles acquièrent l'effectivité. Cette incorporation au droit de l'Etat enrichit leur reconnaissance.

Le fondement du respect des droits de l'homme est le caractère sacré et la dignité de la personne humaine créée à l'image de Dieu. Ce qui implique la lutte contre toute forme d'exploitation et de manipulation perpétrées au détriment des hommes, non seulement dans le domaine politique et économique, mais aussi culturel, idéologique et médical. Il s'agit donc d'une base solide pour construire l'édifice des droits de l'homme. L'ensemble des droits de l'homme correspond donc à la substance de la dignité de l'être humain compris dans son intégrité, ils se réfèrent à la satisfaction des besoins essentiels de l'homme, à l'exercice de ses libertés, à ses rapports avec les autres personnes59(*).

Abordant dans le même sens de la dignité de la personne, Jacques MOURGEON60(*) écrit : « la reconnaissance de la dignité inhérente à tous les membres de la famille humaine et de leurs droits égaux et inaliénables constitue le fondement de la liberté, de la justice et de la paix dans le monde ». Mais cet idéal de l'être humain libre ne peut être réalisé que si les conditions permettent à chacun de jouir de ses droits sont créées notamment la libération de la crainte et de la misère.

Pour Paul-Emile BOLTE61(*), les droits de l'homme sont fondés sur la dignité reconnue à tous les êtres humains, sur leur égalité et leur fraternité. Le devoir de respecter ces droits est un devoir de caractère universel. La promotion de ces droits est un facteur de paix ; leur violation est une cause de tension et de troubles, même au plan international. La dignité a, pour sa part, sa racine dans l'image et le reflet de Dieu qui sont en chacun des hommes. Par là, toutes les personnes sont essentiellement égales entre elles.

Sur le plan purement philosophique, Blandine KRIEGEL62(*) montre que la nature humaine comporte des droits inaliénables. C'est le droit naturel. La nature humaine c'est la nature avec la loi, c'est-à-dire un univers où l'exigence mathématique conduit en même temps à définir des lois de rapports entre êtres et à décrire l'égalité fondamentale des conditions. Les droits de l'homme sont une obligation et si les hommes veulent vivre en société, il leur faut respecter ce droit, sinon la société humaine sera dissoute. Ici, le fondement du respect des droits de l'homme est leur caractère obligatoire et leur inhérence à la nature humaine.

Au regard de ce qui précède, disons que le fondement des droits de l'homme et de leur respect réside dans le fait que ce sont, d'abord, des règles obligatoires pour toute la société humaine car ils sont inhérents à l'existence même de l'être humain et, ensuite, repose sur la dignité humaine qui doit bénéficier d'une promotion par toute autre personne ou toute institution. Ainsi, ce chapitre est subdivisé en cinq sections, à savoir, le système universel de protection des droits de l'homme, les systèmes régionaux de protection des droits de l'homme, le système national de leur mise en oeuvre, la protection des droits de l'homme en période de conflit armé et les droits de l'homme et l'exercice du pouvoir politique.

SECTION 1 : LES SOURCES INTERNATIONALES DE PROTECTION

Le système international est constitué par un ensemble de règles internationales d'origine conventionnelle ou coutumière, sur la base desquelles les individus ou les groupes peuvent escompter et/ou exiger un certain comportement ou certains avantages de la part des Etats. Les droits de l'homme sont des droits inhérents à chaque individu en tant qu'être humain. De nombreux principes et directives non conventionnels (sofl law) font aussi partie des normes internationales des droits de l'homme63(*).

D'après William SCHABAS, le droit des droits de la personne vise à la fois l'individu et la collectivité et ses sujets sont protégés non seulement dans leurs rapports avec les tiers, mais également dans leurs rapports avec l'Etat. C'est ce qu'il appelle les effets « verticaux et horizontaux » des droits64(*).

Des deux définitions proposées ci-dessus, nous pouvons, pour notre part, considérer le droit international des droits de l'homme comme un ensemble de règles édictées sur le plan international ou mondial et obligatoirement applicables par tous les Etats dont le but est d'assurer la protection des individus et de leurs droits fondamentaux. Ces règles peuvent être conventionnelles ou non.

Paragraphe 1 : Les instruments universels de protection

La création en juin 1945, à la Conférence de San Francisco, de l'Organisation des Nations Unies (ONU) va rendre effectif l'idéal de la promotion et de la protection des droits de l'homme et des libertés fondamentales sur le plan universel. Dès sa création, l'ONU s'est préoccupée d'encourager le respect des droits de l'homme. Au cours de ses six premières années, son activité dans ce domaine était essentiellement, mais non exclusivement, consacré à la définition des « droits de l'homme » et des « libertés fondamentales » et à l'établissement des normes et des principes généraux, surtout par l'adoption des instruments internationaux65(*).

Les principaux instruments en matière de protection et de promotion des droits de l'homme et du droit humanitaire sont : la Charte des Nations Unies (1945), la Déclaration Universelle des droits de l'Homme (1948), les deux Pactes relatifs aux droits (1966).

A. La Charte des Nations Unies.

Dès son préambule, elle proclame la foi de l'Organisation dans les « droits fondamentaux de l'homme, dans la dignité et la valeur de la personne humaine ». Nombre de dispositions affirment et réaffirment que l'ONU développera, encouragera et favorisera « le respect universel et effectif des droits de l'homme et des libertés fondamentales pour tous sans distinction de race, de sexe, de langue ou de religion » (Articles 1, 13, 55, 62, 68, 76)66(*).

B. La Déclaration Universelle des droits de l'homme.

Elle énumère les droits civils et politiques ainsi que les droits économiques, sociaux et culturels. Après avoir affirmé que tous les êtres humains naissent libre en dignité et en droit, elle énonce, à l'article 2, le principe de l'égalité, de la non discrimination sur les motifs de race, de sexe, de couleur, de langue, de religion, d'opinion politique ou de toute autre opinion d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou de toute autre situation. Mais en tant que résolution de l'Assemblée Générale des Nations Unies, elle ne constitue pas, techniquement, une source de normes qui lient les Etats, mais plutôt un « idéal à atteinte » comme le dit son préambule. C'est pour cette raison que les rédacteurs l'ont complétée par l'adoption de véritables traités relatifs aux droits et libertés : le Pacte relatif aux droits civils et politiques et ses deux protocoles facultatifs ainsi que le pacte relatif aux droits économiques, sociaux et culturels67(*). Ces Pactes possèdent en eux un caractère obligatoire parce qu'ils dépassent le stade de la « déclaration des droits » et se forcent de les définir pour les rendre opératoires.

C. Les Pactes internationaux jumeaux de 1966

Le pacte international relatif aux droits civils et politiques proclame le droit collectif des peuples à disposer d'eux-mêmes, le droit à la vie, les garanties judiciaires, le droit à la libre circulation, les libertés fondamentales, les droits politiques, le droit à l'égalité et des droits des personnes appartenant à des minorités. Il engage immédiatement les Etats à respecter et à garantir à tous les individus se trouvant sur leurs territoires et relevant de leur compétence les droits qui y sont reconnus selon son article deuxième. Mais le pacte contient également certaines clauses de limitation différenciées et d'une clause générale de dérogation qui permet de suspendre les droits reconnus au pacte, à l'exception de certains droits dits intangibles, dans le cas où le danger public exceptionnel menace l'existence de la nation. Ce pacte impose aussi l'obligation d'interdire, par la loi, la propagande en faveur de la guerre et « tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence » (article 20)68(*).

Quant au Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, il impose à l'Etat partie un engagement d'agir, tant par son effort propre que par l'assistance et la coopération internationale, notamment sur le plan économique et technique au maximum de ses ressource disponibles, en vue d'assurer progressivement le plein exercice des droits reconnus dans le pacte. Cet engagement de mettre progressivement en oeuvre les droits économiques, sociaux et culturels est pris notamment à l'égard du droit au travail, à des conditions justes et favorables au travail et de droits syndicaux, du droit à la sécurité sociale, du droit à un niveau de vie suffisant, du droit à la santé et du droit à l'éducation69(*).

Paragraphe 2 : Les mécanismes de mise en oeuvre du droit international des droits de l'homme

La distinction est faite entre les mécanismes universels, leur enrichissement par les systèmes régionaux ainsi que le prolongement de leur garantie en droit interne.

A. Sur le plan universel

Ce système est composé des organes établis sur la base de la Charte des Nations Unies ou par les principaux traités de droit international des droits de l'homme. La Commission des droits de l'homme et sa Sous-Commission de la promotion et de la protection des droits de l'homme sont les principaux organes créés sur la base de la Charte. La Commission a élaboré, au cours des deux dernières décennies, des procédures spéciales, tels que les rapporteurs spéciaux par thème ou par pays, ainsi que les groupes de travail chargés de contrôler et de faire rapport sur les situations des droits de l'homme entrant dans leur mandat70(*).

Six des principaux traités du droit international des droits de l'homme prévoient la création de Comités d'experts indépendants chargés de contrôler la mise en oeuvre de ces traités. Il s'agit des Comités des droits de l'homme (pacte international relatif aux droits civils et politiques), des droits économiques, sociaux et culturels, d'élimination de la discrimination raciale, pour l'élimination de la discrimination à l'égard des femmes, contre la torture, des droits de l'enfant.

Ainsi, chaque traité est doté d'un organe sensé faire le suivi et le monitoring de son application par les Etats signataires71(*).

Le Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, qui a la responsabilité première de protéger et de promouvoir ces droits, joue un rôle clé. Il veille à l'application pratique des normes internationalement reconnues en matière des droits de l'homme et s'attache à renforcer le programme des Nations Unies relatif aux droits de l'homme et à fournir le meilleur appui possible aux organes chargés de surveiller l'application des instruments aux mécanismes spéciaux mis en place par la Commission des droits de l'homme72(*). Il s'emploie aussi à améliorer l'efficacité de l'appareil des droits de l'homme des Nations Unies, à stimuler la mise en oeuvre et la coordination des droits de l'homme à l'échelle du système des Nations Unies, à développer la capacité nationale, régionale et internationale de promotion et de protection des droits de l'homme, et à diffuser des textes et de l'information sur les droits de l'homme.

B. L'enrichissement de la garantie par les systèmes régionaux

En parallèle avec le système universel, William SCHABAS distingue plusieurs mécanismes régionaux d'architectures viables et à des étapes de développement différentes. Ces mécanismes complètent les normes et les structures du système universel. L'existence de ces systèmes ajoute une richesse importante à la protection des droits de l'homme et apporte ses contributions particulières à l'élaboration des normes. L'auteur dénombre trois systèmes régionaux, à savoir, le système européen, le système américain et le système africain. Le continent asiatique est absent parce que son système encore en gestation n'est pas effectivement opérationnel73(*).

Le système européen a une influence sur la création des autres et comprend trois systèmes distincts, à savoir, le conseil de l'Europe, l'Union Européenne et l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe, tous imprégnés, de façon particulière, par la protection des droits de l'homme.

Dans le système américain, la Convention américaine des droits de l'homme est le principal traité de protection des droits de la personne. Elle est, à plusieurs égards, un instrument progressiste et original, comme en fait foi son article 4 sur les droits à la vie qui contient les stipulations les plus abolitionnistes relatives à la peine de mort. Cette Convention garantit également les droits civils et politiques de manière essentielle.

Quant au système africain, l'Organisation de l'Unité Africaine (Union Africaine) est la principale institution qui touche la protection des droits de l'homme en Afrique avec pour instrument, la Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples. La différence de cette Charte par rapport aux instruments précédents se situe à plusieurs égards, notamment au fait qu'elle proclame non seulement des droits mais également des devoirs, et elle garantit tant les droits individuels que les droits collectifs. Le mot « peuple » contenu dans la Charte conditionne la portée de la plupart des droits collectifs de la Charte tels que le droit des peuples à l'autodétermination et à l'indépendance qui trouve son sens dans le contexte de la décolonisation de l'Afrique. Aux droits des peuples, s'ajoutent plusieurs autres droits de solidarité dont le droit au développement économique, social et culturel ; le droit à la jouissance du patrimoine commun de l'humanité et le droit à un environnement satisfaisant et global. Elle n'a pas non plus remis en cause les droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels.

Mais dans son application, la Charte africaine n'offre pas de solution en cas de conflit entre les droits et les devoirs de l'individu, comme cela est plausible entre le devoir de ne pas mettre en danger la sécurité de l'Etat et le droit à la liberté d'expression. Il peut aussi y avoir des conflits potentiels entre les droits individuels et les droits collectifs. De plus, une importante partie des droits contenus dans les autres instruments a été omise dans la Charte tandis que d'autres sont formulés de façon vague et imprécise (exemple sur la peine de mort et le droit d'asile).

Toutefois, la Charte a créé des mécanismes de contrôle en instituant une Commission africaine des droits de l'homme et des peuples. Il y a deux autres traités spécialisés adoptés dans le cadre du système africain. Il s'agit de la Convention de l'O.U.A. régissant les aspects propres aux problèmes africains des réfugiés, adoptée le 10 septembre 1969, et la Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, adoptée en juillet 1990.

En ce qui concerne le système asiatique, le Conseil de la Ligue Arabe avait adopté en 1994 la fameuse Charte arabe des droits de l'homme. Mais cette Charte n'est pas encore entrée en vigueur. Elle comprend une énumération des normes fondamentales reflétant certaines particularités du droit musulman, dont mention est fait dans le préambule de la Charte qui fait également référence à la Déclaration Universelle des droits de l'homme et les pactes internationaux.

Notons qu'il est doté d'une cour des droits de l'homme chargée de juger les cas des violations des droits dont les Etats membres sont responsables. Ces cours constituent le maillon fort des systèmes de protections bien que celle africaine n'est pas encore opérationnelle par défaut de ratification (cinq Etats seulement sur les dix exigés pour son entrée en vigueur). L'action des tribunaux et des commissions régionaux des droits de l'homme, établis en application des principaux traités régionaux des droits de l'homme en Europe, aux Amériques et en Afrique, est propre au droit international des droits de l'homme et n'a pas d'équivalent en droit international humanitaire. Toutefois, ces mécanismes régionaux ont de plus en plus tendance à examiner aussi les violations du droit international humanitaire74(*).

C. Le prolongement de la protection internationale en droit interne

Jacques MOURGEON75(*) démontre que les déclarations obligent les organisations dont elles émanent mais non pas les Etats isolément, même si ceux-ci ont voté en leur faveur. C'est dire qu'elles expriment des positions de principe d'ordre moral, philosophique ou idéologique ; qu'elles traduisent une espérance plus qu'un fait. Ces déclarations sont dépourvues de valeur juridique et de force obligatoire dans les Etats. Il ne peut aller différemment que si les textes du droit interne, c'est-à-dire les textes du droit constitutionnel incorporent ces déclarations internationales au droit interne en y faisant référence, auquel cas elles acquièrent l'effectivité parfois réduite à la reconnaissance constitutionnelle des droits ; ou bien ils en font des textes de référence pour l'interprétation des règles internes. En s'incorporant au droit de l'Etat, ajoute-t-il, elles enrichissent d'autant la reconnaissance des droits par celui-ci. D'autre part, les conventions internationales reposent, pour leur mise en application effective, sur la seule action de l'Etat que, sauf dans de très rares cas que l'on retrouvera, nul ne peut sanctionner et auquel nul ne peut se substituer.

Les Etats sont donc tenus de prendre des mesures pour la mise en oeuvre du droit international humanitaire et du droit international des droits de l'homme en temps de paix comme en situation de conflit armé.

Pour ce qui est du droit international humanitaire, certaines mesures d'ordre juridique et pratique doivent être prise pour garantir le plein respect de ce droit, à savoir, traduire les traités de droit international humanitaire, prévenir et réprimer les crimes de guerre à travers l'adoption d'une législation pénale ,protéger les emblèmes de la Croix-Rouge et du Croissant Rouge, mettre en pratique les garanties fondamentales et judiciaires, diffuser le droit international humanitaire, former du personnel qualifié en droit international humanitaire et affecter des conseillers juridiques auprès des forces armées.

Quant au droit international des droits de l'homme, il contient lui aussi des dispositions obligeant les Etats à mettre en oeuvre ses règles, dans l'immédiat ou progressivement. Ainsi les Etats doivent adopter tout un éventail de mesures législatives, administratives, judiciaires et autres, en vue de donner effets aux droits inscrits dans les traités. Ces mesures peuvent englober l'adoption d'une législation pénale interdisant et réprimant les actes prohibés par les traités, ou prévoir le droit à un recours devant les juridictions nationales contre les violations des droits spécifiques et veiller à ce que celui-ci soit effectif76(*).

1. Mécanismes d'introduction des droits de l'homme en droit interne

Le plus souvent, selon Jacques MOURGEON77(*), la reconnaissance s'effectue par des règles écrites au premier rang desquels figure la constitution. Contenue dans un seul, ou parfois dans plusieurs textes successifs et complémentaires, la constitution renferme presque toujours des dispositions relatives aux droits de l'homme. Il importe peu que les textes constitutionnels relatifs aux droits de l'homme soient très détaillés ou brefs, ou bien qu'ils fassent l'objet d'articles de la constitution, ou de son préambule ; ou bien encore qu'une déclaration des droits antérieure leur soit incorporée en preuve de fidélité à une éthique établie.

Les prérogatives affirmées par la constitution ne sont pas seulement des attributs abstraits de la personne, mais deviennent des droits positifs et admis dans l'ordre social et, comme tels, ils sont non seulement inviolables, mais aussi imposables au pouvoir comme à autrui. Ils sont ensuite intangibles, car modifiables seulement par une révision de la constitution. Dans le cas où cette dernière contient d'importantes lacunes, des textes complémentaires, de nature législative, sont alors nécessaires, si bien que les droits relèvent des régimes juridiques différents (lois et constitutions) plus ou moins modifiables et conduisent à une précarité variable très démonstrative.

Toutes les Constitutions Congolaises (à partir de celle de 1964) ont fait et font mention du respect des droits fondamentaux de la personne. Les différents droits qui y sont consacrés sont imposables aussi bien aux pouvoirs exécutif, législatif qu'à celui judiciaire. Les dispositions ci-après méritent d'être mentionnées pour les différentes constitutions :

- La constitution du 1er Août 1964 (de l'article 12 à l'article 46). Les articles 12, 13, 14, 15 (alinéas 2 et 3), 16, 20 (alinéas 1 à 3), 22 (alinéa 2), 23, 24, 30 (alinéa 2), 31 à 37, 39 à 43 ne pourront jamais être dérogés même en cas de proclamation de l'état d'urgence ;

- La constitution du 24 juin 1967 consacre le respect des droits fondamentaux aux articles 5 à 18 ;

- La loi du 9 avril 1994 portant acte constitutionnel harmonisé relatif à la période de transition mentionne les droits fondamentaux et les devoirs des citoyens.

Par ailleurs, la reconnaissance des droits et des libertés fondamentaux de l'homme est promue même en temps de conflit armé. C'est pour ce motif que les parties belligérantes, bien que n'ayant pas toutes des constitutions comme des Etats, insèrent dans leurs objectifs les aspects ou les mots ayant trait à la reconnaissance de la dignité humaine et la promotion des droits sociaux, politiques, économiques, culturels et environnementaux.

Ainsi, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie, dans sa déclaration politique du 12 Août 1998, avait affirmé avoir pour objectifs l'instauration d'un Etat de droit sauvegardant l'identité citoyenne pour tous, combattant le tribalisme, l'ethnicisme, l'arbitraire, l'impunité généralisé, prêt à promouvoir le bien-être social du peuple Congolais par des mesures spécifiques notamment dans les secteurs de la santé, de l'éducation et de l'emploi ainsi que de construire une économie intégrée par une gestion rigoureuse et responsable en vue d'éradiquer la misère du peuple et de poser les bases du développement économique du pays. Aussi, il lutterait pour promouvoir l'auto-organisation des paysans, des travailleurs, des femmes et des jeunes pour la défense de leurs intérêts matériels et moraux. C'est, en fait, une synthèse des droits fondamentaux énoncés dans les diverses constitutions susmentionnées bien que nous soyons en pleine rébellion.

L'inclusion des dispositions relatives à la notion du respect des droits de la personne humaine dans la constitution (exemple des préambules des constitutions du 1er Août 1964, du 24 juin 1967, de la loi du 09 avril 1994) répond au principe de la primauté du droit international sur le droit interne. Cette suprématie du droit international est consacré toujours par la constitution qui dispose que les principes énoncés dans la déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 priment sur les dispositions ou les principes correspondant de la constitution de la République. Ces dispositions sont sensées être respectées en temps de paix comme en temps de conflit armé. C'est dans ce cadre que même les groupes armés et mouvements rebelles intègrent dans leurs actes constitutifs des dispositions marquant leur attachement aux instruments internationaux régissant les droits de l'homme. Tel est le cas des statuts de l'A.F.D.L. et de la déclaration politique du R.C.D. qui mentionnent leur souscription et leur adhésion à toutes les valeurs humaines prônées par la Déclaration Universelle des droits de l'homme, la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples ainsi les autres instruments y relatifs78(*).

2. Le contenu des engagements de l'Etat au respect des droits de l'homme

L'obligation de l'Etat à respecter et à promouvoir les droits de l'homme se résume aux devoirs de reconnaissance, de mise en oeuvre et de pédagogie de ces droits79(*). La reconnaissance se matérialise par l'adhésion aux instruments de protection. Mais pour que celle-ci ait un sens, il importe qu'au-delà d'elle, les droits de l'homme soient une réalité vivante grâce à leur introduction en droit interne. Dans le cas contraire, elle est lettre morte et son discours dénué de tout fondement.

La mise en oeuvre consiste, pour sa part, à la mise en place des conditions favorables à l'exercice et à l'éclosion des droits de l'homme. Il s'agit donc d'initier et de mettre en place un cadre juridique et institutionnel adéquats tant à l'intérieur qu'à l'extérieur des frontières nationales. Quant à la pédagogie des droits de l'homme, elle est une simple formation à apporter aux populations qui ignorent leurs droits. Loin, s'en faut, l'Etat doit apprendre les droits de l'homme à ses citoyens au sens de leur donner une parfaite connaissance de la substance de ces droits et leur en faire prendre conscience afin qu'ils en assurent la promotion et en cultivent le respect.

3. Les droits de l'homme et l'exercice du pouvoir politique

L'on assiste aujourd'hui, non sans conflit, au succès de l'idéal démocratique dans le monde. Ce succès va de pair avec une grande attention et une sollicitude pour les droits de l'homme.

a. Les droits de l'homme et les enjeux politiques.

Il apparaît avec Ronelingué TORIARA80(*) que les droits de l'homme sont mal protégés et même non protégés. La réalité est que dans le pays, les droits de l'homme prennent une forte connotation politique ; et en la matière, les incertitudes sont énormes. La reproduction interminable des mouvements de rébellions armées donne au pouvoir une justification pour sévir contre la population civile au nom de la raison d'Etat ou de la préservation de l'ordre public. Pour lui, le paradoxe est que du point de vue de l'Etat, le droit s'énonce de manière claire et précise, mais semble se piéger au bout par lui-même, face à la nécessité d'exercer la violence au nom de l'intérêt général. Parler de protection des droits de l'homme, dans ce cas, c'est tout simplement s'en servir pour les intérêts politiques. Tout en les violant au nom suprême des valeurs du pays, le pouvoir politique utilise les droits de l'homme de manière très sélective, comme article d'exposition à entretenir les alliances internationales.

S'il faut considérer que les droits de l'homme ne prennent un sens qu'à travers la manière dont ils sont vécus et respectés, ajoute-t-il, il y a lieu de constater le décalage entre ce qui est dit et ce qui se pratique. Les discours, les déclarations de principe ou d'intention deviennent inflationnistes. Une autre conséquence est que cela développe de manière considérable une polarité - raison d'Etat - contre laquelle se brise toute possession, tout mécanisme de contrôle, toute initiative de changement.

b. Droits de l'homme et démocratie

Denis MASUMBUKO Ngwas81(*) démontre qu'historiquement, à partir du monde occidental, l'humanité a évolué des monarchies absolutistes à la démocratie, de l'intolérance religieuse à la liberté de culte et de religion. Le passage d'une période à l'autre s'est opéré, en effet, progressivement grâce à des réflexions sur la politique et à des mouvements de lutte pour le changement politique et social. Depuis les premières formulations éclairées des droits de l'homme jusqu'aux formulations actuelles, comme la déclaration universelle des droits de l'homme, ceux-ci s'imposent comme racine et condition irrévocable de la démocratie et de l'Etat de droit.

1° L'idée substantielle du modèle démocratique82(*)

La pensée politique, depuis la fin du XIXe Siècle, s'est habituée à résumer le contenu de la démocratie dans la formule empruntée d'Abraham LINCOLIN, « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple ». On aurait pu penser, ici, que le collectif peuple qui est la source du pouvoir, et que si l'individu est concerné, c'est en tant qu'il fait partie du peuple au titre de citoyen. Mais la démocratie « classique », telle qu'elle se conçoit, met en oeuvre, plutôt, les droits de l'individu fondés sur la liberté individuelle, et ici, sur la liberté politique. Dans la tradition chrétienne, l'individu est la fin de la société, la fin de la politique, il est la fin du droit. En fin de compte, l'individu est la source de la finalité du pouvoir politique.

Dans ce sens, la démocratie est mise en oeuvre en ce qu'une bonne partie de la doctrine appelle « liberté - autonomie », qui représente la faculté par laquelle l'homme dispose de lui-même. C'est cette faculté qui commande la participation de chaque citoyen à l'établissement des règles qui le régissent et au choix de ses dirigeants. Telle est la tradition chez les grands théoriciens de l'Etat de nature (John LOCKE, Jean-Jacques ROUSSEAU, par exemple) et chez les révolutionnaristes de XVIIIe et XIVe Siècles (la Révolution Française, en particulier). Mais avec l'insertion de l'individu dans la société, la liberté individuelle a subi une opération de socialisation qui, d'une part, faisait de nombres de libertés individuelles et de libertés collectives ne pouvant se revendiquer et se réaliser (comme la créance) qu'en groupe, qu'en association, et, d'autre part, transformait l'individu de l'Etat de nature à l'homme situé, concret, avec cette fois des libertés qu'inspire la fonction sociale. D'où la diversification des droits et libertés qui, de politiques, deviennent également économiques, sociaux et culturels. Dans ce cas, la démocratie politique doit se compléter par une démocratie économique et sociale, la seconde donnant des moyens de sa réalisation à la première, permettant ainsi la satisfaction des besoins autres que politiques.

Le gouvernement démocratique ne sera donc pas uniquement celui qui émane du peuple, mais celui qui respecte, voire réalise, les droits et intérêts des citoyens. Mais ce qui caractérise la conception dominante de la démocratie c'est, découlant des valeurs de liberté et des droits individuels, d'abord le libéralisme et le suffrage, ensuite, le pluralisme et, enfin, la séparation des pouvoirs comme mécanisme de garantie de la liberté dans le fonctionnement de l'Etat ainsi que dans les rapports entre celui-ci et les citoyens.

Le libéralisme est le courant de pensée bâti autour de la valeur des droits de l'individu, et qui propose d'aménager la société de manière à assurer et à garantir la liberté individuelle. La société de droit ayant comme fin l'individu, les rapports entre gouvernants et gouvernés doivent être organisés de telle façon que la liberté du citoyen ne subisse aucune limitation de la part du pouvoir à laquelle l'individu n'ait consenti en ayant participé à la désignation des gouvernants. De plus, l'individu est l'acteur principal et le bénéficiaire privilégié de la vie sociale. Il y jouit de la totale liberté d'initiative, d'entreprise, de propriété pour satisfaire ses besoins, préserver ses intérêts et contribuer au progrès collectif. Enfin, en raison de ce qui précède, l'Etat est tenu de s'abstenir dans les activités des particuliers, de porter atteinte aux droits et libertés de l'individu.

2° Les droits de l'homme comme fondement de la démocratie

Les droits de l'homme proclamés universellement à partir de 1948, dit Denis MASUMBUKO Ngwas83(*), par les Nations Unies constituent une avancée considérable dans les pensées politique, juridique et sociale contemporaines. Périodiquement réaffirmés et précisés par d'autres textes juridiques, régulièrement soutenus par les assises juridictionnelles sans cesse développées, ces droits ne sont pas de simples déclarations d'intention, de simples idées lancées. Bien au contraire, ce sont des règles de droit qui engagent et obligent les Etats qui ne les ont pas acceptées et adoptées. Ces Etats doivent en garantir la jouissance et en assumer la protection pour leurs citoyens sans aucune distinction fondée sur les considérations humaines d'ordre subjectif. De façon plus directe et plus visible, ajoute-t-il, les droits de l'homme sont au fondement de la démocratie comme forme de gouvernement ou d'organisation sociale acceptable.

En effet, ces droits posent clairement des piliers de la démocratie lorsqu'ils énoncent les principes relatifs :

- aux libertés fondamentales de la personne humaine, aux droits et devoirs du citoyen, aux élections libres et transparentes, au pluralisme politique et social, etc. Soit la DEMOCRATIE POLITIQUE ;

- à l'égalité devant la loi, aux procédures régulières,... soit la DEMOCRATIE JUDICIAIRE ;

- à l'égalité devant les services sociaux, au pluralisme économique, etc. Soit la DEMOCRATIE ECONOMIQUE ET SOCIALE ;

- aux valeurs de fraternité, de tolérance, de coopération, (...) qui sont des facteurs pour la participation effective dans un esprit démocratique.

Mais les droits de l'homme et la démocratie sont en relation d'influence réciproques, en ce sens qu'ils se déterminent mutuellement. Les droits de l'homme constituent les piliers de la démocratie. En revanche, la démocratie est un facteur de promotion des droits de l'homme. Dans un certain sens, elle apparaît comme un contenant qui a pour contenu les droits humains. Dans les Etats où les droits de l'homme sont aujourd'hui plus ou moins affirmés et respectés existent des structures de société de nature démocratique. Des structures qui sont assez respectueuses de l'individu, et qui sont assez soucieuses de la vie sociale collective.

Par contre, là où les droits de l'homme sont méconnus ou violés massivement et/ou systématiquement, c'est pratiquement la « jungle sociale ». L'individu est écrasé, la masse populaire négligée et la collectivité étouffée sous la logique des forts, des puissants, généralement avec la complicité des élites minoritaires aliénées.

c. Les droits de l'homme et la limitation des pouvoirs

Le but final de l'instauration d'un régime politique n'est pas la domination, ni la répression des hommes, ni leur soumission au joug d'un autre. Ce à quoi l'on a visé par un tel système, c'est à libérer l'individu de la crainte, de sorte que chacun vive, autant que possible, en sécurité ; en d'autres termes, conserve au plus haut point son droit naturel de vivre et d'accomplir une action. Après quoi, ils seront en mesure de raisonner librement. Bref, le but de l'organisation de la société c'est la liberté84(*).

Alain TOURAINE85(*) fustige qu'aucun principe n'a d'importance plus centrale dans l'idée démocratique que celui de la limitation de l'Etat, qui doit respecter les droits humains fondamentaux. La limitation du pouvoir politique est née de l'alliance de l'idée de droit naturel et de celle de la société civile, conçue au début comme la société économique dont les acteurs revendiquaient la liberté d'emprise, d'échanger et d'exprimer leurs idées. Sans cette liberté « bourgeoise », l'idée des droits fondamentaux serait restée purement critique, se confondant avec la résistance à l'oppression défendue par la plupart des philosophes politiques, de Thomas HOBBES à Jean-Jacques ROUSSEAU ; et sans la défense des droits fondamentaux, l'esprit de libre commerce ne se serait pas transformé en esprit démocratique. Celui-ci est né de l'alliance de l'esprit de liberté et de l'esprit de l'égalité. L'appel aux droits de l'homme, ajoute-t-il, va dans le sens opposé à celui de la philosophie politique, qui domine le siècle qui sépare la « Glorious révolution » anglaise de la Révolution Française et qui ne voulait donner à la politique aucun autre fondement qu'elle-même. Pour cette pensée, aussi bien pour ROUSSEAU que pour HOBBES, l'ordre politique est l'ordre de la raison, qui s'oppose à l'ordre naturel, dominé par les désirs illimités de chacun, ou à l'ordre social dominé par l'inégalité et la corruption. La modernité consiste, dans ce domaine comme dans les autres, à faire triompher la raison, c'est-à-dire l'ordre sur le chao, la violence sur l'égoïsme.

Pour Désiré MOUSSOKI, citant RIVERO, une certaine doctrine soutient que le droit n'est que la mise en oeuvre des conceptions éthiques, sociales et économiques qui prévalent dans une société. C'est précisément sur la question des droits de l'homme, dont l'effectivité conduit à une certaine réduction de la sphère des compétences des autorités politico-administratives, que la question de leur violation, ou de leur méconnaissance est plus ardue et suscite que de nombreuses voix s'élèvent ou s'indignent86(*).

Nous venons donc de parcourir l'ensemble des législations relatives aux droits de l'homme et aux libertés fondamentales tant au niveau international, régional que national ainsi que leurs rapports avec le pouvoir politique. Dans le troisième chapitre nous allons pouvoir passer à la situation réelle de tous ces droits dans la Province du Sud-Kivu pendant la période de la deuxième guerre dite de « rectification ».

SECTION 2 : DU RESPECT DROITS FONDAMENTAUX DANS LES CONFLITS ARMES

Cette protection est spécialement assurée par le droit humanitaire qui couvre bon nombre d'aspects ne relevant pas du domaine d'application du droit international des droits de l'homme, tels que la conduite des hostilités, le statut des combattants et des prisonniers de guerre. De même, le droit international des droits de l'homme traite d'aspects de la vie en temps de paix qui ne sont pas réglementés par le droit international humanitaire, comme la liberté de presse, la liberté de réunion, le droit de vote et le droit de grève. Mais les deux ont pour objet de protéger la vie, la santé et la dignité des individus bien que sous un angle différent. Par exemple, les deux branches du droit visent à protéger la vie humaine, interdisent la torture ou les traitements inhumains ou cruels, définissent les droits élémentaires des personnes qui font l'objet d'une procédure pénale, interdisent la discrimination, comprennent des dispositions pour la protection des femmes et des enfants, réglementent des aspects du droit à la nourriture et à la santé87(*).

Appelé aussi droit de la guerre ou droit des conflits armés, Pierre GUSIRA, dans son exposé sur « l'introduction au droit international humanitaire », considère cette terminologie comme un ensemble de normes du droit international d'origine conventionnelle ou coutumière destinées à régler des problèmes survenant en période de conflits armés internationaux ou non internationaux (rébellions ou troubles internes diverses)88(*). Il règle donc les problèmes humanitaires découlant directement des conflits armés, protège les personnes et les biens qui sont ou peuvent être, directement affectés par le conflit et restreint aux parties y prenant part le droit d'utiliser les méthodes et les moyens de leur choix89(*).

On distingue deux grandes parties du droit international humanitaire, à savoir, le droit humanitaire empirique et le droit humanitaire moderne90(*).

Paragraphe 1 : Le droit humanitaire empirique

Il a toujours existé dans toutes les sociétés du monde, en effet, des coutumes humanitaires appliquées pendant la période de guerre. Ces coutumes servent à réglementer le comportement des combattants sur le champ de bataille, à leur donner une éthique de la guerre. La guerre, dans la tradition africaine, par exemple, était considérée comme un privilège des nobles, c'est-à-dire de la classe sociale la plus élevée. Elle était donc une action noble qui devait obéir à un certain nombre de règles et de principes en rapport avec le traitement des non combattants (les femmes, les enfants, les vieillards) et de leurs biens ; le traitement de l'ennemi capturé (les prisonniers de guerre) ; l'interdiction de certaines armes jugées trop dangereuses dans les combats, l'interdiction de certaines méthodes de combat, etc. Ces lois sont dites empiriques parce qu'elles sont valables selon les sociétés et selon les périodes. En plus, elles ne sont écrites dans aucun document.

Paragraphe 2 : Le droit humanitaire moderne

Il se distingue du premier par le fait qu'il est écrit, il est permanent et international. Ce droit s'applique en temps de guerre et vise la protection de l'homme pendant et après les hostilités. Il est né du droit de Genève en 1964 avec la publication de la première Convention de Genève par le Comité International de la Croix-Rouge (C.I.C.R.). On en distingue deux grandes branches : le droit de Genève et le droit de la Haye.

A. Le droit de Genève.

C'est le droit humanitaire proprement dit. Il porte sur la protection des personnes qui ne sont pas des combattants (les personnes civiles) et même les militaires hors combats (capturés, blessés, malades, etc.). Ces deux catégories doivent être traitées avec humanité. Le droit de Genève a un caractère spécifiquement humanitaire et vise le seul profit des victimes.

B. Le droit de la Haye.

Le droit de la Haye est le droit de la guerre proprement dit. Il est né à Saint-Pétersbourg en 1968 et fixe les droits et les devoirs des belligérants de la conduite des opérations. Il limite le choix des moyens à nuire à l'ennemi. Il s'agit de limiter, voire d'interdire certaines méthodes et moyens de combat qui tuent sans discrimination ou provoquent des souffrances excessives. Dans le même sens, le droit de la Haye traite de la protection des biens culturels, de l'environnement, etc.

Paragraphe 3 : Les instruments de protection y relatifs

A. Les Conventions du 12 Août 194991(*)

Adopté en 1864, la première convention vise l'amélioration du sort des blessés et des malades dans les forces armées en campagne (guerre sur terre). La deuxième convention de Genève (1899) vise, par contre, l'amélioration du sort des blessés, des malades et des naufragés dans les forces armées sur mer. La troisième convention de Genève (1929) est, quant à elle, relative au traitement des prisonniers de guerre.

La quatrième convention de Genève, enfin, est relative au traitement des personnes civiles en temps de guerre car l'apparition et la multiplication des missiles ainsi que d'autres armes qui tuent sans discrimination provoque beaucoup de perte en vies humaines du côté de la population civile. Cette dernière convention s'applique en cas de guerre déclarée ou de tout autre conflit armé surgissant entre deux ou plusieurs des hautes parties contractantes, même si l'état de guerre n'est pas reconnu par l'une d'elles. Elle s'applique également dans tous les cas d'occupation de tout ou partie du territoire d'une partie contractante, même si cette occupation ne rencontre pas de résistance militaire.

B. Les protocoles additionnels (1977)

Pour arriver à mieux protéger les civils, deux protocoles additionnels ont été créés, distinguant les conflits armés internationaux des tensions internes et des guerres de libération. Cette création est motivée par la naissance de la guérilla qui a fait que les combattants ne sachent plus distinguer leurs ennemis de la population non combattante.

Le protocole additionnel I protège les victimes des conflits armés internationaux tandis que le second protège les victimes des conflits armés non internationaux.

Paragraphe 4 : Les liens entre le droit humanitaire et le droit des droits de l'homme

Le droit des droits de l'homme et le droit humanitaire ont la même origine historique et philosophique. Ils sont tous deux fondés sur la nécessité de protéger la personne humaine contre les forces mauvaises qui la menacent à savoir la guerre et l'arbitraire. Les deux systèmes constituent un ensemble de dispositions juridiques internationales assurant le respect de la personne humaine et son épanouissement.

Le lien entre ces deux volets du droit international public n'est apparu qu'à la fin des années 1960 avec les guerres faisant intervenir à la fois les aspects du droit international humanitaire et des droits de l'homme (guerres de libération en Afrique, conflit au Moyen-Orient : Nigeria et Vietnam, par exemple) que les gens en prirent conscience. C'est la Conférence internationale des droits de l'homme réunie en 1968 à Téhéran par les Nations Unies qui a servi de cadre où ce lien a été officiellement établi. Sa résolution XXIII intitulée « Respect des droits de l'homme en période de conflit armé » préconise « une meilleure application des conventions dans les conflits armés, ainsi que la conclusion des traités supplémentaires (...). La convergence du droit international humanitaire et des droits de l'homme montre que la paix et la guerre, les guerres civiles et les conflits internationaux, le droit international et le droit interne se chevauchent de plus. Il s'en suit que le droit humanitaire et le droit des droits de l'homme peuvent être applicables ensemble, de façon cumulative ou complémentaire »92(*).

Quelques éléments de différence méritent cependant d'être relevés entre le droit international humanitaire et le droit des droits de l'homme :

1° Le droit des droits de l'homme contient des principes généraux applicables en temps de paix (avec certaines dérogations en temps de guerre) en rapport avec l'Etat et ses propres ressortissants ;

2° Le droit humanitaire n'est applicable qu'au moment où la guerre vient empêcher ou restreindre l'exercice des droits fondamentaux de l'homme. Il est valable en cas de conflit armé et il traite des relations entre l'Etat et des ennemis. Celui-ci est au dessus des Etats et ses normes ont force obligatoire pour tous. Il n'y a pas de dérogation possible pour le droit humanitaire.

La deuxième partie qui suit aborde les aspects particuliers liés à la garantie des droits fondamentaux en République Démocratique du Congo, notamment dans la Province du Sud-Kivu, champ d'étude retenu pour la présente analyse.

DEUXIEME PARTIE : CONFLITS ARMES ET DROITS FONDAMENTAUX DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU

En R.D.C.en général et au Sud-Kivu en particulier, des milliers de civils sans défense sont illégalement tués. Beaucoup ont été torturés et un grand nombre d'entre eux sont portés disparus93(*). Baudouin HAMULI Kabarhuza estime que les deux dernières guerres, celles de 1996-1997 et 1998 à 2002, ont à elles seules totalisé environs trois millions de morts, plus de deux millions de déplacés internes et plus d'un million et demi de réfugiés dans les pays limitrophes. Toutes les provinces ont été touchées mais les provinces du Kivu et du Katanga, selon l'auteur, semblent avoir payé le lourd tribut94(*).

Pour Collette BRAECKMAN95(*), depuis le 02 Août 1998, la population de l'Est du Congo a été prise dans l'engrenage de la terreur, que les pillages se sont conjugués aux massacres. En 2000, l'ONG américaine, International Rescue Committee (I.R.C.), fit une projection établie grâce à des enquêtes de terrain dans sept villages de l'Est. Ces enquêtes ont été dirigées par l'épidémiologiste Lès ROBERTS. Ce dernier avait ainsi estimé le nombre de victimes à 1,7 millions puis 2,5 millions de morts. Il précise aussi que cette projection n'est qu'une estimation conservatoire car l'étude n'a pu être réalisée que dans les zones relativement d'accès facile. D'autres enquêtes, menées par Oxfam, Save the Children, Christian Aid et OCHA, l'Office humanitaire des Nations Unies ont corroboré le terrible constat de Lès ROBERTS.

Ces droits fondamentaux sont manifestement violés par les différents acteurs aux conflits et chacun d'entre a des motivations différents de ceux des autres bien que les conséquences soient, en pratique, les mêmes.

CHAPITRE I : DES DROITS FONDAMENTAUX MANIFESTEMENT VIOLES PAR LES ACTEURS AUX CONFLITS

Le 02 Août 1998, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie (R.C.D.) est créé à l'Est de la R.D.C. avec la bénédiction du Rwanda, de l'Ouganda et du Burundi qui sont, par ailleurs, parties prenantes au conflit armé. Simultanément débutent les massacres à l'Est comme à l'Ouest du pays. Au Sud-Kivu, l'état des droits fondamentaux de l'homme est passé, au fil du temps, aux stades critique, catastrophique et même insupportable. Les violences s'y poursuivent avec un acharnement qualifié d'indescriptible96(*).

SECTION 1 : LES PRINCIPALES VIOLATIONS ET LEURS AUTEURS

Qu'il s'agisse des droits humains fondamentaux, des droits reconnus à certains groupes sociaux (les enfants, les femmes, les réfugiés), des droits humains en période de guerre, etc., la situation de leur garantie est au plus bas niveau. Les violations sont considérables et peuvent être réparties en cinq grands groupes, à savoir :

1. Les violations politiques classiques (arrestations arbitraires, traitements dégradants, détentions dans les conditions inhumaines, représailles, tortures, purges punitives, etc.) ;

2. Les violations liées aux conflits intergroupes (de type classique, régionaliste ou ethnique, etc.) ;

3. Les violations liées au contexte de guerre (crimes de guerre, crimes de génocide et crimes contre l'humanité, etc.) ;

4. Les atteintes aux aspirations légitimes du peuple notamment en matière de développement économique, social et culturel ;

5. Les difficultés, pour le peuple Congolais, d'exercer le droit de disposer de lui-même (difficulté due principalement à la « colonisation interne » par plusieurs pouvoirs politiques de fait et à l'« internationalisation » du conflit politique Congolais).

Ces cinq groupes se résument donc, pensons-nous, aux violations de toutes les générations des droits de l'homme (les droits civils et politiques, les droits économiques, sociaux et culturels ainsi que les droits environnementaux). Les organismes de défense des droits de l'homme, les médias et les rapports de l'ONU ont, en effet, dénoncé plusieurs atteintes aux droits de l'homme, l'insécurité permanente et les massacres des populations dans les territoires jadis occupés par les groupes rebelles et leurs alliés.

Paragraphe 1 : Les droits civils et politiques

A. Les atteintes au droit à la vie.

L'article 6, alinéa 1, du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose : « le droit à la vie est inhérent à la personne humaine. Ce droit doit être protégé par la loi. Nul ne peut arbitrairement être privé de la vie ». Cet article vise les cas d'exécutions sommaires, extrajudiciaires, les massacres liés aux faits de guerre ou non dont les civils non armés sont victimes. Ces atteintes sont souvent commises sous forme de meurtres, volontaires ou non, perpétrés par les éléments des différentes armés ou de la police.

En effet, les affrontements qui ont ponctué la période de 1998 à 2002 ont fait des milliers de morts parmi la population civile qui n'est pourtant pas directement liée au conflit. Des crimes crapuleux ont été commis par les belligérants. Le tableau N°1 en annexe illustre les tourments vécus par ces populations du Sud-Kivu pendant ces années.

De l'analyse faite des informations figurant dans ce tableau, force est de constater que :

· Les mois d'août à décembre 1998 sont les plus marqués par le nombre élevé de victimes des massacres. Les exemples les plus patents sont notamment ceux des massacres d'Uvira du 03 août qui ont fait au moins 1500 morts selon les sources locales (Chef Coutumier, ligues coutières), les massacres de Kasika du 23 au 25 août avec à peu près 800 et 1.500 tués d'après les témoignages des églises, des rescapés, des ONGD et de Human Rights Watch. Makobola a été, par deux fois, attaqué (le 25 août 1998 avec 200 victimes et du 30 décembre 1998 au 1er janvier 1999 dont le nombre de morts fut estimé entre 500 et 1500 personnes). Uvira n'est pas en reste avec plusieurs attaques dont les plus importantes sont celles du 31 août 1998 (au moins 630 morts à Kasenga), du 9 mai 2000 à Katogota (entre 40 et 300 morts). Fizi a connu, en mai 2001 au moins 1000 morts selon les sources locales et humanitaires. Tous les territoires, districts, localités sont touchés par les massacres bien que leur ampleur en nombre de victime va diminuant au fil des années.

· Le tableau illustratif indique que les territoires les plus touchés sont, par le nombre élevé de victimes et par la fréquence d'attaque, Shabunda, Mwenga, Uvira, Kabare. La Ville de Bukavu, quant à elle, compte le moins de victimes du fait que c'est un centre urbain.

· Au début de la guerre, les massacres avaient un caractère purement collectif (cas de Makobola, Kasika, etc.). Avec l'évolution et la diminution des affrontements sur les principaux fronts, la situation s'est réduite progressivement aux cas isolés avec moins de morts. C'est le cas que l'on connaît à partir du début de l'année 2000 suite à la signature de l'accord de cessez-le-feu de Lusaka.

Ces massacres s'accompagnent, le plus souvent, de la destruction massive et aveugle d'infrastructures de base. L'on assiste donc à des incendies, à des destructions et pillages des villages attaqués. Cette pratique était rependue, en effet, dans de nombreux villages depuis le déclenchement de la guerre dans les provinces sous occupation de la rébellion. Jean MIGABO Kalere97(*) en a ainsi proposé quelques cas. Selon lui, les habitations ont été en effet incendiées et laissant de nombreuses familles sans abri (voir tableau N°2 en annexes). Ces actes de destruction sont posés dans distinction de lieux (lieux de Cultes, écoles, infrastructures sanitaires, maisons des particuliers, etc.) et ce sont les milieux ruraux qui sont les plus touchés.

En plus des massacres collectifs à grande échelle, l'on mentionne aussi les cas d'exécutions sommaires soit des combattants opposés aux ordres destructeurs de leur hiérarchie (cas des 200 soldats assassinés le 03 août 1998 à l'aéroport de Kavumu. Ils étaient accusés d'être restés fidèles au gouvernement de Kinshasa), soit des voleurs présumés ou des déserteurs. Ces exécutions étaient, pour la plupart, décidées par le Conseil de Guerre Opérationnel dans la province après des procès sommaires entachés de vices de forme et de procédure.

B. Les atteintes à la dignité humaine.

Il est relevé ici des cas qui choquent les consciences. Il s'agit, par exemple des cas d'arrestations arbitraires, d'enlèvement, de tortures, de mises en détention caractérisées par la force et l'arbitraire.

1. Les arrestations arbitraires

L'article 9, alinéa 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques dispose que « Tout individu a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l'objet d'une arrestation ou d'une détention arbitraire. Nul ne peut être privé de sa liberté, si ce n'est pour des motifs, et conformément à la procédure prévus par la loi ». Plusieurs personnes au Sud-Kivu ont été arrêtées et/ou détenues arbitrairement et cela souvent sans inculpation ni jugement et pendant des périodes prolongées. Si la justice ordinaire conserve encore son estime, les organes chargés de la distribuer ou de la dire constituent néanmoins une source de préoccupation.

Alors que le Code de procédure pénale prévoit que personne ne peut être arrêtée et mise en prison sans que la loi ne l'autorise ; ces détenus doivent être déférés devant le parquet dans les 48 heures suivant leur arrestation, au Sud-Kivu, hormis le non respect de ces règles élémentaires, les forces de l'ordre et de sécurité ainsi que les agents publics s'arrogent le pouvoir d'arrêter et de détenir des personnes sans mandat et sans les déférer devant le parquet dans le délai réglementaire. Parfois, les mandats de justice, les exploits d'instance et les autres démarches administratives et judiciaires sont même monnayés pour faire avancer rapidement l'affaire.

Ignorant ou négligeant carrément les procédures en vigueur, certains officiers de la police judiciaire avaient des maisons de détention sous leur responsabilité arrêtant ainsi abusivement n'importe où, n'importe quand et dans n'importe quelles circonstances les personnes présumées coupables d'infractions. Avec ou sans mandat d'arrêt, les policiers arrêtent les gens sur la route, au marché et dans les maisons ; les jettent en prison ou dans les cachots. Des centres de détention secrets ont même été créés pour accueillir les détenus (Mess des Officiers de l'Auditorat, résidences officielles des autorités politico-administratives et militaires, amigo, containers, puits, caves, prisons souterraines, etc.). Parfois, de paisibles citoyens sont arrêtés pour des faits civils comme les dettes, les conflits de parcelles ou fonciers qui sont transformés en infractions pénales par les officiers du ministère public dans l'intention de nuire. Ces arrestations sont suivies des traitements cruels, inhumains et dégradants, des tortures par flagellation (coups et fouets ou de verge), la privation des visites. La libération est subordonnée par le paiement d'amendes forfaitaire, arbitrairement fixés et sans aucune référence à la loi.

Voici, ci-après, quelques cas illustratifs enregistrés et suivis par les organisations membres de la Ligue des Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (L.D.G.L.) et ses membres sur le terrain, dans le rapport des années 2000 et 2001 :

· Du 10 au 27 mars 2000, détention dans des cachots de la Division Provinciale de la Sécurité et des Renseignements (D.S.R.) à Bukavu de Monsieur MUKABO MUCHUKI J.-M. ; ancien Coordinateur du R.C.D. à Uvira, soupçonné d'avoir collaboré avec les ennemis du mouvement qu'il servait.

· Le 13 avril 2000, les services de sécurité du R.C.D. ont arrêté et détenu Monsieur BYAMUNGU LUFUNGULO, propriétaire de la pharmacie SODIPHAR au motif qu'il soignerait les mayi-mayi et aurait mal parlé du mouvement et collaboré à la concrétisation des journées « villes mortes » à Bukavu en février 2000.

· Le 1er mai 2000, l'épouse de BAGULA BUHENDWA, directeur de l'école primaire Pendu de Mushekere en Commune Urbano-Rurale de KASHA, a été arbitrairement arrêtée en lieu et place de son mari absent de la maison pour des raisons qui n'avaient pas été élucidées.

· Le 23 juin 2000, monsieur Vicent, un sujet Hutu rwandais travaillant dans les champs du chef de quartier de Mushenyi, Monsieur KATEMBO et du Diacre MUKENDI Bin RUZINGI, a été arrêté à quelques mètres du bureau de la Croix-Rouge, antenne de Sange, territoire d'Uvira. Depuis lors, aucune nouvelle de lui.

· Le 29 août 2000, Messieurs Gervais CHIRHALWIRA, Paulin BAPOLISI, MUZALIYA WAKYEBWA et Madame Régine MUTIJIMA, respectivement Vice-Président de la Société Civile du Sud-Kivu, ancien directeur de Cabinet du Gouverneur de Province, directrice de l'école primaire Mwangaza et responsable de l'ONG Action pour le Développement Intégré de la Femme (ADIF) ont été arrêtés à Bukavu et déportés à Kisangani où ils ont été gardés pendant plusieurs semaines à la prison d'Osio. Ils ont été accusés d'avoir livré des informations compromettantes à la presse étrangère après l'attentant à la grenade qui a coûté la vie à 8 personnes lors de la Kermesse du 26 août 2000. Mais dans les couloirs cette arrestation était consécutive à leur nomination par le pouvoir de Kinshasa comme membres de l'Assemblée Constituante de la R.D.C.

· Le 09 octobre 2000, 12 animateurs de la Société Civile du Sud-Kivu, membres du Réseau des Associations des droits de l'homme du Sud-Kivu (RADHOSKI) ont été arrêtés par des militaires du R.C.D. conduits respectivement par les Commandants FUNU et CHUMA à Bukavu. Au moment de leur arrestation, les victimes ont été traînées dans la boue, battues à coups de fouets et de bâtons avant d'être conduits, certains au Camp SAIO et d'autres dans l'amigo de la D.S.R. Leurs biens parmi lesquels un ordinateur, des appareils de communication, des montres ont été emportés par les militaires du R.C.D.

2. Enlèvement, disparitions forcées, traitements cruels, inhumains et dégradants

Plusieurs personnes ont été enlevées délibérément au Sud-Kivu. Cette pratique porte atteinte à tout un ensemble de droits de l'homme inscrits dans les instruments juridiques nationaux et internationaux. Il s'agit notamment des droits à la vie, à la liberté et à la sécurité ; du droit à la dignité humaine. Des actes de torture (mutilations), de viol, de vol qu'il serait fastidieux d'énumérer étaient également commis. Les témoignages ou les allégations ne donnent pas toujours de précisions sur les circonstances de temps, sur le nombre et les identités des victimes.

La ligue des Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs, à travers ses associations membres, en donne des exemples dans ses rapports de 1998 à 2002 :

· Le 07 avril 1998, trois personnes du village Rubanga, situé à environ 10 kilomètres de Lemera-Centre en Collectivité de Bafuliro, territoire Uvira ; ont été enlevés et portés disparues. Le lendemain, cinq autres personnes ont subi le même sort à Lemera ;

· Le 07 septembre, en territoire de Kabare, trois personnes ont été portées disparues. Il s'agit de messieurs FATAKI habitant le localité Cirhavanyi, MUHANZI MUHIMUZI de Bahagarha, MATABARO MUHANZI également de Cirhavanyi, groupement de Bushwira ;

· Le 22 février 1999, Monsieur ZIRIMWABABO, un des chefs de village de la Chefferie de Ngweshe en territoire de Walungu a été battu et poignardé par les Mayi-Mayi accusés d'avoir accueilli les militaires du R.C.D./Goma en provenance de Kamanyola ;

· Dans la nuit du 10 au 11 mars 1999, des hommes armés envahissent la maison de Monsieur INGIMANYAGE MURONDA du quartier Mukukwe en Commune d'Ibanda à Bukavu. Après avoir ligoté la sentinelle, ces hommes avaient forcé la porte et pénétré dans la maison où ils frappèrent Monsieur et madame INGIMANYAGE avant d'emporter une partie de leurs biens ;

· Le 20 mars 1999, Monsieur SAFARI MARABU, habitant le village Nguliro à Chifunzi a été enlevé par des militaires et ne fut relâché qu'au 31 décembre de cette année.

· Le 02 juin 1999, Messieurs SHAMAMBA KANDOLE et MUHINYA, âgés respectivement de 18 et 16 ans, habitant le village Muhinga à Chifunzi, dans le groupement de Kalonge en territoire de Kalehe ont été portés diaprus ;

· Monsieur ZABANITA MIVUMBI habitant de Mukama/Kalehe a été détenu du 11 au 15 mai 2000 par les militaires du R.C.D./Goma sans motif légal. Pendant sa détention, il a été battu jusqu `à perdre l'usage de sa langue ;

· Le 1er juin 2000, madame Berthe âgée de 25 ans révolus, a été violée par un militaire près de Ndondu en territoire de Fizi. Son bourreau, après avoir assouvi ses appétits sexuels, avait tiré trois balles dans son appareil génital ;

· Monsieur Augustin BAMBE a été soumis à la bastonnade sur ordre du greffier du tribunal coutumier de Kalehe pour n'avoir pas pu rembourser une dette ;

· Le 12 avril 2002, Monsieur BUHAGARHA KACIS, âgé de 26 ans, a été enlevé par les militaires au service du R.C.D./Goma à Walungu pour non respect présumé des obligations dudit mouvement.

Au cours du même mois, le Commandant KYATENGA Patrick de la police à Kamituga, en territoire de Mwenga avait administré des coups de matraques sur l'organe génital de Monsieur BYEMBA RUBENI détenu dans le cachot de la police. Une expertise médicale avait établi, à ce sujet, que ces coups pourraient entraîner la stérilité de la part de la victime.

3. Les atteintes aux droits à la sécurité et à la paix

Aux termes de l'article 9 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, toute personne a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Cette sécurité des citoyens d'un pays repose sur le respect par celui-ci des droits de l'homme. Mais la sécurité est restée précaire sur tout le territoire congolais, en général, et dans la province du Sud-Kivu, en particulier ; cela en rapport avec les affrontements entre les forces gouvernementales et leurs alliés, d'une part, et le R.C.D. et ses alliés ainsi que les bandes armées, d'autre part. Il s'en suit alors une vague de violations massives d'autres droits humains et du Droit international humanitaire tels que la liberté de circulation, les prises d'otage, la soumission aux travaux forcés, etc.98(*)

4. La liberté de circulation

« Quiconque se trouve sur le territoire d'un Etat a le droit d'y circuler librement et d'y choisir librement sa résidence. Toute personne est libre de quitter n'importe quel pays, y compris le sien » (Article 12 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques). L'exercice de ce droit est constamment entravé par les bandes armées et la rébellion du fait de l'existence de plusieurs administrations suivant le groupe contrôlant le milieu. De nombreuses barrières ont, en effet, été érigées sur les axes routiers rendant la libre circulation des personnes et des biens difficile. Pour les franchir, les passagers et les véhicules sont le plus souvent soumis au paiement d'une taxe variant entre 2 et 5 dollars américains. Héritiers de la Justice a dénoncé dans ses rapports trimestriels de l'année 2001 les barrières érigées par les Mayi-Mayi sur le tronçon routier Bukavu - Mwenga. Tout passager étant soumis au paiement de la taxe variable selon l'humeur du préposé au contrôle de la barrière. Cette situation était la même en territoire de Walungu et de Shabunda.

5. Les travaux forcés

Aux termes de l'article 8 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, nul ne sera tenu en esclavage et à la traite des esclaves sous toutes ses formes, nul ne sera tenu en servitude ou ne sera astreint à accomplir un travail forcé et obligatoire. Les populations civiles sont battues, pillées, parfois réduites à l'esclavage dans la province du Sud-Kivu. Elles sont aussi contraintes de travailler dans les mines de Coltan (Colombo-Tantalite).

Il arrive, en outre, que les groupes armés utilisent des civils comme porteurs ou, en cas d'affrontements, comme boucliers humains car, selon ces assaillants, ils ne peuvent subsister sans ces misérables soumis à leur autorité : ils comptent sur eux pour les nourrir, se mettre à leur service, travailler sous leurs ordres99(*). Pour ce qui est du droit à la paix, l'article 20 du même pacte interdit toute propagande en faveur de la guerre ainsi que tout appel à la haine nationale, raciale ou religieuse qui constitue une incitation à la discrimination, à l'hostilité ou à la violence.

De l'observation faite de la situation du Sud-Kivu, il ressort que la crise politique était ponctuée par des discours de haine. Ceux-ci étaient tenus par les responsables tant politiques que militaires à l'occasion des meetings populaires. Ces discours étaient, pour la plupart, diffusés en direct ou en rediffusion sur les radios émettant à Bukavu notamment la R.T.N.C., la Radio « Patriote » détenue par des inconnus se faisant passer pour des mayi-mayi. La première diffusait, à titre illustratif, à travers l'émission « la politique », animée à l'époque par Philippe MBILIZI Mulonda, des appels à la haine contre les Katangais accusés d'avoir confisqué le pouvoir politique et spécialement, contre le président de la République, Laurent-Désiré KABILA. Pour sa part, la Radio « Patriote » diffusait des messages incitant à la violence et à la haine contre l'ethnie Tutsi en général et le « Banyamulenge » en particulier, l'Ouganda et le Rwanda qualifiés d'agresseurs contre la R.D.C.100(*)

C. L'état des libertés publiques

La population du Sud-Kivu n'avait, pendant la guerre aucune possibilité de jouir de toutes ses libertés publiques telles la liberté d'opinion, d'association, de culte et d'expression ; de réunion pacifique, etc.

1. Les libertés de presse, d'opinion et d'expression

« Nul ne peut être inquiété pour ses opinions. Toute personne a droit à la liberté d'expression ; ce droit comprend la liberté de rechercher, de recevoir et de répondre des informations et des idées de toute espèce, sans considération de frontières, sous une forme orale, écrite, imprimée ou artistique, ou par tout autre moyen de son choix » (Article 19, alinéas 1 et 2 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques). L'Est du territoire Congolais était caractérisé par une situation telle que l'exercice de ces libertés a été et est encore sérieusement mis à mal. Des membres de la société civile et certains dirigeants politiques ont été soit arrêtés, soit intimidés pour avoir exprimé publiquement des opinions contraires à celles de la rébellion. C'est le cas du président de la société civile, coordination de Bukavu, Monsieur CIRHALWIRA et de ses collègues qui ont été arrêtés et transférés à Kisangani après s'être prononcés sur l'attentant qui coûta la vie à plusieurs personnes à la Kermesse organisée par la Bralima à Bukavu en février 2000. L'arrestation est due à toute personne qui ose exprimer une opinion contraire à l'idéologie du « gouvernant » ou du maître des lieux sous son contrôle. Les ennuis réservés varient selon la gravité d'opinions émises et vont du séjour indéterminé dans les cachots à l'exécution extrajudiciaire.

Une telle situation explique ainsi la grande difficulté d'existence d'une presse libre dans les différents coins et recoins de la région du Kivu. Les autorités rebelles ont, en effet, multipliées des entraves à un libre exercice de la liberté de la presse. Les organes de presse étaient paralysés par les effets de la guerre. La presse publique audiovisuelle, instrument idéologique de la rébellion, y est demeurée la principale source locale d'information. Cependant, les journalistes qui y travaillent ne sont pas libres parce que soumis aux ordres et à la logique du pouvoir en place. Pour ce qui est des radios privées ayant vu le jour dans des conditions officielles au Sud-Kivu, les cahiers de charge leur étaient imposés ne pouvaient pas leur permettre de remplir pleinement leurs devoirs d'information de la population. Raison pour laquelle elles axent leurs émissions sur les domaines tels que la religion, le développement.

La volonté de bâillonner la presse se concrétise par les menaces proférées à l'endroit des journalistes. Plusieurs journalistes ont été arrêtés, humiliés, intimidés. L'exemple le plus frappant est celui de l'interdiction de commenter les faits de guerre qui aboutit à la suspension pour la première fois au mois de mai 1999 des activités de la Radio Maendeleo et l'arrestation de Monsieur KAMENGELE OMBA, animateur et chef des programmes radio de ladite chaîne. Il leur était reproché d'avoir publié certains articles critiques à l'égard du pouvoir notamment sur les réactions de la population bukavienne (jets de pierres) lors du meeting organisé quelques jours plus tôt à la place Major Vangu en Commune d'Ibanda. Autorisée à reprendre ses activités au mois d'août 2001, elle se verra, pour la seconde fois, retirée sa licence d'exploitation le 09 décembre 2002 pour avoir diffusé sur les ondes les avis de la population de Bukavu sur la mise en circulation des nouvelles plaques minéralogiques par les pouvoirs publics. Les radios qui continuaient d'émettre étaient soumises à un contrôle sévère et à la censure de toute publication prétextant la guerre, le respect de l'ordre public.

2. Les libertés d'association, de réunion et syndicale

Les articles 21 et 22 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques disposent que le droit de réunion pacifique est reconnu et que toute personne a le droit de s'associer librement avec d'autres, y compris le droit de constituer des syndicats et d'y adhérer pour la protection de ses intérêts. L'exercice de ces droits ne peut faire l'objet que des seules restrictions prévues par la loi et qui sont nécessaires dans une société démocratique, dans l'intérêt de la sécurité nationale, de la sûreté publique, de l'ordre public ou pour protéger la santé ou la moralité publiques ou les droits et les libertés d'autrui.

Le climat de terreur qui régnait dans la Province du Sud-Kivu a voué à l'échec toute liberté d'association ou de réunion publique pacifique. Toute idée de rassemblement dans un lieu privé ou public n'était pas sans risque d'être qualifiée d'atteinte à l'ordre public ou de connivence avec l' « ennemi ». L'exercice des libertés était aussi compromis par la multiplication des formalités à remplir à chaque réunion d'organes statutaires des associations. Les défenseurs des droits de l'homme n'ont pas été épargnés.

Ainsi, à partir de novembre 1999, tout déplacement sur le terrain devait requérir le visa de la coordination technique des agences onusiennes et des ONG, structure montée par les autorités rebelles pour entraver la liberté des animateurs de ces organisations. Un certain nombre de défenseurs des droits humains a été inquiété pour avoir osé dénoncer les différentes violations sans tenir compte de leurs auteurs. L'illustration est celle du saccage, le 05 juin 1999 par les soldats rebelles, des bureaux du groupe JEREMIE ; une organisation indépendante de défense des droits de l'homme basée à Bukavu pour avoir publié des critiques sur la détérioration de l'enseignement et d'autres services sociaux dans les zones sous contrôle de la rébellion101(*).

S'agissant de la liberté syndicale, son exercice a souvent été entravé par des menaces proférées à l'endroit des syndicalistes qui revendiquaient les droits de leurs syndiqués. La ligue des Droits de l'homme dans la région des Gands-Lacs (L.D.G.L.) cite, à titre exemplatif, le cas des délégués syndicaux de l'Office des Douanes et Assises (OFIDA), messieurs KAMITANJI, BABOLE, MATESO et SEKUNDI qui ont été interpellés et arrêtés pendant plus de quatre jours par les services de sécurité pour avoir réclamé une augmentation de la prime et dénoncé les affectations fondées sur des considérations ethnico-tribales.

D. La violence à l'égard des femmes

La violence à l'égard des femmes désigne tous les actes de violence dirigés contre le sexe féminin, et causant ou pouvant causer aux femmes un préjudice ou des souffrances physiques, sexuelles ou psychologiques, y compris la menace de tels actes, la contrainte ou la privation arbitraire de liberté, que ce soit dans la vie publique ou privée. Elle s'entend comme englobant, sans y être limitée, les formes de violence énumérées ci-après102(*) :

- la violence physique, sexuelle et psychologique exercée au sein de la famille, y compris les coups, les sévices sexuels infligés aux enfants de sexe féminin au foyer, les violences liées à la dot, le viol conjugal, les mutilations génitales et autres pratiques traditionnelles préjudiciables à la femme, la violence non conjugale, et la violence liée à l'exploitation ;

- la violence physique, sexuelle et psychologique exercée au sein de la collectivité, y compris le viol, les sévices sexuels, le harcèlement sexuel et l'intimidation au travail, dans les établissements d'enseignement et ailleurs, le proxénétisme (tirer profit de la prostitution d'autrui ou encourager) et la prostitution forcée ;

- la violence physique, sexuelle et psychologique perpétrées ou tolérée par l'Etat où qu'elle s'exerce.

Au Sud-Kivu et dans toute la partie orientale de la R.D.C. sous contrôle rebelle, des femmes étaient tuées de manière particulièrement atroce. Nombre de femmes et de jeunes filles ont été violées avant leur assassinat, d'autres pendant leur détention. La violence multiforme à l'égard des femmes est ainsi utilisée comme arme de guerre par toutes les parties belligérantes dans le cadre d'un effort pour gagner le contrôle sur les civils et les territoires qu'elles occupent et pour conserver ce contrôle103(*). Les femmes constituent donc des véritables entreprises de déshumanisation menées à une très grande échelle.

Faisant référence au rapport publié en mai 2002 par Human Rights Watch, Collette BRAECKMAN104(*) mentionne qu'il s'agit d'une guerre dans la guerre du fait que, poussée par une pauvreté extrême, les femmes continuent de se rendre au champ pour cultiver, dans les forêts pour y faire du charbon ou au marché pour y vendre leurs produits, même si de telles activités les exposaient à la violence sexuelle. Elles sont utilisées comme butin de guerre ou comme esclaves sexuelles, comme porteuses. Ces viols, ajoute l'auteur, sont accompagnés de brutalités extraordinaires (appareils génitaux coupés, seins amputés, etc.).

En illustrant la situation, Collette BRAECKMAN fustige que les femmes de Mwenga sont entrées dans le martyrologe de la R.D.C. : en septembre 1999, cinq d'entre elles avaient été accusées de sorcellerie par l'épouse d'un militaire. Elles furent alors battues, déshabillées, violées par les militaires puis jetées dans des trous d'eau salée. Les villageois, pour les sauver, avaient dû payer les militaires. Aussi, ajoute-t-elle, lors du passage de Louis MICHEL, le ministre belge des affaires étrangères, à Bukavu en Janvier 2002, un représentant de la Société Civile du Sud-Kivu lui montra une fillette de 13 dénommée Elizabeth. Celle-ci était la seule survivante d'une opération militaire après avoir été violée par plusieurs soldats en pleine campagne. Sa voisine qui l'accompagnait succomba peu de temps après.

Faisant aussi mention de la violence au quotidien dans la province du Sud-Kivu, Clotilde AZIZA BANGWENE et INTERAYAMANGA rapportent que les viols et enlèvements dans le mois de février 2002 de trois filles au village de Canjavu (le 11 février), de deux femmes dans le groupement de Burhale (le 12 février et le 13 du même mois)105(*).

E. La violation des droits de l'enfant.

Les enfants devront recevoir les soins et l'aide dont ils ont besoin et, notamment :

- Ils devront recevoir une éducation telle que le désirent leurs parents ou les personnes qui en ont la garde ;

- Toutes les mesures doivent être prises pour faciliter le regroupement des familles momentanément séparées ;

- Les enfants de moins de quinze ans ne doivent pas être recrutés dans les forces ou groupes armés, ni autorisés à prendre part aux hostilités. Dans le cas contraire au point précédent, une protection spéciale doit leur être applicable106(*).

Dans la pratique, pour ne citer que cet exemple, la République Démocratique du Congo, en général, et la Province du Sud-Kivu, en particulier, connaissent une situation telle que les enfants, dès l'âge de 8 ans, sont recrutés comme porteur, pisteurs, garde du corps ou soldats selon un rapport publié par l'UNICEF.

Paragraphe 2 : Les droits économiques, sociaux et culturels

L'article 22 de la Déclaration Universelle des droits de l'homme stipule que « Toute personne, en tant que membre de la société, a droit à la sécurité sociale, elle est fondée à obtenir la satisfaction des droits économiques, sociaux et culturels indispensables à sa dignité et au libre développement de sa personnalité, grâce à l'effort national et à la coopération internationale, compte tenu de l'organisation et des ressources de chaque pays ». Le développement des droits économiques et sociaux dépend de la situation des Etats et de leurs finances. Il est donc évident que dans un contexte de guerre ces droits soient ignorés au profit des dépenses et préoccupations militaires. C'est ainsi que l'environnement économique de l'Est de la R.D.C. se détériorait de jour au lendemain, renforçant la précarité des conditions de vie des populations.

En effet, depuis la conquête des provinces de l'Est par la rébellion, celle-ci s'est peu préoccupée de l'amélioration des conditions de vie de la population et consacrait une grande partie aux dépenses militaires. Aussi, les affrontements entre belligérants ont entraîné une forte détérioration des conditions de vie socio-économiques sur tous les plans. La pauvreté s'est accrue, l'insécurité alimentaire suite à la flambée des prix des denrées de première nécessité alors que le pouvoir d'achat de la population reste trop bas. Ces affrontements ont, par ailleurs, causé la destruction avancée de la plupart des infrastructures : routes, marchés, écoles, hôpitaux et centres de santé, bâtiments administratifs, etc. avec des répercutions sur les conditions de vie des populations civiles.

A. Economie et gestion des fonds publics.

L'absence d'un programme économique cohérent sur l'ensemble du territoire sous contrôle de la rébellion constitue un facteur déterminant dans le processus de désintégration économique de la Province du Sud-Kivu. Les importations et les exportations ont été mises à mal par les taxes exorbitantes qui découragent les opérateurs économiques et ralentissent de manière aussi drastique l'activité économique allant jusqu'à la paralysie de plusieurs secteurs.

En effet, le nombre de percepteurs des taxes s'est accru dans les marchés urbains et ruraux. Confrontée à cette pléthore de taxes et de surtaxes, la population ne sait plus lesquelles payer et lesquelles laisser. Et devant ces hésitations, la force de police intervient avec son lot de conséquences. Depuis août 1998, notent les rapports de la ligue des Droits de la personne dans la région des Gands-Lacs, les taxes dues à l'importation ont évolué de façon croissante. Elles atteignaient, en 1999, 13 à 14 % FOB (Free On Board) pendant qu'en Ouganda, pays voisin impliqué, par ailleurs, dans le conflit Congolais ; ces frais ne représentent que moins de 1 % du prix FOB. Pour l'importation de poissons salés et du riz, la taxe était de 18,45 % sur la valeur CAF (Coût, Assurance, Frêt). Le taux pour les véhicules variait entre 18,45 % et 35,6 % sur la valeur CAF. La taxe due à l'exportation du bois, de l'or et du café était successivement de 6 ; 0,75 et de 1 % sur la valeur FOB en 2000 et 2001. Cette situation a ainsi provoqué la hausse des prix des produits de première nécessité107(*).

A cela s'ajoute la mauvaise gestion des fonds publics, les détournements et autres formes d'abus. En effet, force est de constater que des recettes importantes sont enregistrées, notamment, les taxes perçues dans les marchés, les patentes périodiques et impôts de diverses entreprises et de grandes sociétés ainsi que d'autres recettes réalisées par les services publics et parapublics opérant au Sud-Kivu (OFIDA, Direction Provinciale des Contributions, SNEL, REGIDESO, Office Congolais de Café, Titres Fonciers, entités décentralisées, etc.).

La politique de maximisation des recettes prônée par les responsables rebelles n'a jamais été suivie de réalisations concrètes dans le développement socio-économique de la province. Pourtant, le cessez-le-feu observé depuis le dernier trimestre de l'année 2000 sur les principaux fronts par les belligérants devait, en principe, contribuer à la réduction des dépenses militaires au profit d'autres charges telles que la santé, les salaires des fonctionnaires, les soldes des militaires, l'aménagement de l'infrastructure, etc.

B. Santé, Education et travail.

Les articles 25 et 26 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme des nations Unies disposent que toute personne à droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille. Mais un niveau de vie suffisant suppose du travail, et du travail rémunéré de façon à satisfaire les besoins dont font partie les soins de santé. Ensuite, comment accéder aux soins de santé dans une province où hôpitaux, pharmacies et centres de santé sont détruits, incendiés et/ou pillés ?

En effet, au Sud-Kivu, le taux de chômage est très élevé. Le peu de fonctionnaires de l'administration publique est impayé malgré les recettes fiscales, parafiscales et douanières réalisées par les services publics. Dans les institutions privées, les responsables sont forcés à mettre leurs travailleurs en congé technique ou procéder à des compressions des effectifs suite au manque de finances suffisantes pour répondre aux obligations salariales suite à l'environnement économique malsain. Tel est le cas de la Bralima et de la Pharmakina qui ont procédé, plus d'une fois, à des licenciements pendant ces quatre années de guerre.

Concernant le droit à la santé, il y a lieu de relever que dans un contexte de guerre caractérisé par la crise économique, facteur de paupérisation généralisée de la population ; l'accès aux services de santé est devenu un véritable casse-tête. Les coûts sont, en effet, devenus très élevés. En outre, la destruction des infrastructures sanitaires a véritablement contribuée à la détérioration de l'état de santé des populations du Sud-Kivu. Cette destruction d'infrastructures sanitaires est prouvée par le tableau N°3 en annexe du travail que nous présente Jean MIGABO KALERE à titre illustratif. Le tableau reprend quelques services médicaux pillés et détruits pendant la période du 02 août 1998 à décembre 2000. Ici encore, ce sont les Centres des milieux ruraux qui sont les plus touchés par ces actes de pillage et de destruction.

L'insécurité a aussi conduit les médecins et les techniciens de santé de l'intérieur à fuir vers les grands centres urbains. Selon Médecins Sans Frontières, dans certains districts de l'Est de la R.D.C. plus ou moins 75 % des enfants de moins de 3 ans n'ont pas survécus. La mortalité infantile moyenne décime 60 % des enfants de moins de 5 ans. Près de 18,5 millions de personnes n'ont plus accès aux soins de santé, les enfants n'ont plus été vaccinés dans certains coins et la mortalité maternelle est l'une des plus élevés du monde avec à peu près 3000 décès sur 100 000 en couche. Cela est lié notamment à la guerre, et lorsque les armes se taisent, c'est la pauvreté et la misère qui tuent108(*).

Les écoles sont aussi victimes de la guerre dans la province du Sud-Kivu. Le secteur de l'éducation est, en effet, largement affecté par les effets de la guerre. Les infrastructures scolaires, surtout celles situées dans les zones rurales, ont été détruites par les belligérants. Plus de la moitié d'écoles ont été touchées et, dans certains villages, seulement un enfant sur deux fréquente l'école. D'où une diminution sensible du taux de scolarisation. Dans les territoires de Mwenga, Bunyakiri, Kalehe, Kalonge, par exemple, les écoles n'ouvrent pas souvent les portes à cause de l'insécurité. Dans d'autres comme Walungu, Fizi, Uvira, Shabunda ; les écoles ne sont opérationnelles que dans les chefs-lieux109(*). Dans la ville de Bukavu, par contre, les écoles ont fonctionné par intermittence au début de la guerre avant une stabilisation qui survint peu de temps après.

Un autre aspect non négligeable ayant affecté le domaine de l'éducation en faveur de la jeunesse du Sud-Kivu est le problème de frais d'études. Cette situation remonte à 1993, depuis que l'Etat Congolais démissionna des missions sociales par l'accumulation des arriérés de salaires des fonctionnaires et enseignants. Face à cette situation, les responsables d'écoles et les professeurs mirent au point, en accord avec les parents, le système de « prime » ou de « frais de motivation ». Mais, à l'heure actuelle, suite à la situation de conflit armé qui a accru le niveau de pauvreté de toute la population Congolaise, la plupart de parents sont incapables de payer cette prime due aux enseignants, prime variant entre 2,5 et 25 dollars le mois par enfant dans la ville de Bukavu. Cela a une lourde conséquence sur le taux de déperdition scolaire alors que le pays connaissait, vers la fin des années 1990, un taux de scolarisation de 30 % ; presque sans équivalent en Afrique110(*).

Ainsi, les enquêtes rapportées par la Ligue des Droits de la personne dans la région des Grands-Lacs (1999-2000-2001) démontrent que le taux de déperdition scolaire est de 35 % en 1999 et atteignait 40 % en 2000 uniquement dans la ville de Bukavu. Au niveau de l'enseignement supérieur et universitaire, ce taux était de 11 % à l'I.S.D.R. et de 7 % à l'I.S.T.M., par exemple, pour l'année académique 1999-2000. Il est passé, pour l'année académique 2000-2001 à plus de 15 %111(*).

Pour clore cette section, mentionnons que toutes ces violations des droits humains dont il est question sont en même temps des violences structurelles, instituées, vives, chaudes, massives et systématiques. Elles frappent la dignité humaine dans ses valeurs fondamentales d'ordre personnel (la vie, l'estime de soi, la liberté, l'auto-accomplissement) ou d'ordre relationnel et collectif (l'égalité, la tolérance, la fraternité, l'ouverture à l'autre, etc.)112(*). Elles ne distinguent pas aussi les lieux (marchés, lieux de cultes, installations sanitaires), les catégories socio-économiques (leaders coutumiers, intellectuels, commerçants, hommes d'églises ou personnalités religieuses) et touchent tant les villes que les villages de la province113(*).

Mais il faut noter que toutes les informations livrées sur les violations des droits humains au Sud-Kivu ne constituent qu'une infime partie de celles qui se commettent. Le nombre exact de victimes n'est souvent pas précisé et les données officielles ne correspondent pas toujours à celles des sources indépendantes constituées des sources locales renforcées par les investigations menées sur les lieux de violations par les organisations spécialisées. Cet état des choses est dû, notamment, au contexte d'insécurité qui régnait dans la majorité des territoires sous contrôle des bandes armées créant ainsi une inaccessibilité. Il y a aussi l'effacement de traces des forfaits par les auteurs des crimes.

Enfin, l'état de guerre dans lequel se trouvait la R.D.C., en général, et la Province du Sud-Kivu, en particulier, ne peut en aucun cas servir d'alibi pour toutes les atrocités commises sur les civils non armés. Aucun degré de violence de la part des violateurs ne saurait justifier ces massacres et autres violations dont les populations sont victimes. Mais qui sont, en fait, les auteurs des violations des droits humains en cette période de guerre dans la Province du Sud-Kivu ? La réponse à cette question est donnée dans le paragraphe qui suit.

Paragraphe 3 : Les auteurs des violations

Depuis le début de la guerre dite de « rectification » en R.D.C., plus ou moins 18 groupes armés, qualifiés de « forces négatives » se croisent, s'allient ou se combattent, selon les rapports des Nations Unies. Parmi eux l'on peut citer, notamment, les rebelles burundais (F.N.L., F.D.D.), les ex-Forces Armées Rwandaises, les extrémistes Hutu appelés interahamwe, les forces d'autodéfense locale formées par le pouvoir rebelle sous forme de milices levées dans les villages, les forces d'autodéfense populaires dites Nationalistes Mayi-Mayi, les rebelles ougandais, etc. Tous ces groupes ont, certes, des objectifs différents dans la conduite de la guerre mais le seul point commun qui les caractérise sur le terrain est qu'ils pillent les villageois, emportent les récoltes, tuent les récalcitrants, violent les femmes ou recrutent de force les jeunes garçons114(*).

Quoique que le Rassemblement Congolais pour la Démocratie ait prétendu contrôler tout le territoire sud-kivutien, la majeure partie de son intérieur était dirigée par les groupes armées dénommés « Mayi-Mayi » appuyés par les miliciens rwandais « interahamwe » et les ex-FAR. Cette forme de rébellion dans la rébellion a créé l'insécurité généralisée dans la grande partie des territoires notamment ceux de l'arrière-province (Kalehe, Fizi, Walungu, Kabare, etc.). Ainsi, dans les deux camps, les droits et libertés se trouvaient habituellement bafoués. A propos des forces du R.C.D., il faut mentionner les militaires incontrôlés, leurs alliés rwandais qui ont toujours été impliqués dans les grandes batailles ainsi que les forces de l'ordre et de sécurité. Les bandes armées, quant à elles, se spécialisaient plus dans les embuscades tendues sur certains axes routiers et dans les attaques contre les villages.

Comme toutes les parties au conflit ont combattu sur le terrain dans la Province du Sud-Kivu, il serait alors subjectif d'épargner aussi les troupes gouvernementales du fait que les affrontements avec les civiles ont été signalés au début de la guerre. D'où, le gouvernement Congolais est aussi auteur des violations des droits humains dans la Province du Sud-Kivu bien que celles-ci soient de faible intensité par rapport à d'autres groupes en présence.

Ainsi, toute la population du Sud-Kivu est unanime au fait que la guerre en R.D.C. était à la base des violations des droits humains dans la province (100 %). Quant à savoir qui en sont les auteurs, 63 % pensent que tous les acteurs au conflit sont responsables des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, 15,7 % mettent les violations au compte du R.C.D./Goma, 12 % pointent les armées étrangères en l'occurrence les alliés du R.C.D./Goma (Rwanda et Burundi) ; seulement 2,8 % de la population responsabilisent le R.C.D./Goma, les bandes armées et les armées étrangères tandis que les bandes armées seules sont nommées par 1,9 % de la population.

SECTION 2 : LES VIOLATIONS DES DROITS FONDAMENTAUX : UNE SITUATION AUX CAUSES MULTIPLES ET DIVERSIFIEES

Plusieurs causes sont à la base des violations des droits de l'homme dans la partie orientale de la R.D.C. et, spécialement, au Sud-Kivu. Pour Jean MIGABO KALERE115(*), les motifs des massacres et autres violations des droits humains sont de quatre principaux ordres, à savoir : l'opposition à la nouvelle guerre et l'impopularité de la rébellion, l'opposition populaire à la domination étrangère, l'opposition aux pillages des ressources économiques et la présumée installation des colonies de peuplement dans le Kivu. A cela s'ajoutent les représailles, la vengeance, les règlements de compte, les suspicions, l'intolérance, etc.

Paragraphe 1 : L'opposition à la guerre et l'impopularité de la rébellion

Ces deux éléments constituent le premier motif. Du point de vue social en effet, la rébellion n'a jamais été, en effet, acceptée par les populations du Sud-Kivu. Cela se manifestait notamment par la dénonciation de l'inopportunité de la guerre suite aux espoirs qui les nourrissaient après la prise du pouvoir par feu le président Laurent-Désiré KABILA, par la considération de la nouvelle « libération » comme une agression au vu du contexte qui précéda le déclenchement de la guerre, notamment, la demande du président de la République du départ des troupes alliées (Rwandaises et Ougandaises) de la R.D.C. Cet acte est le plus souvent interprété comme la libération de la soumission vis-à-vis de ces Etats étrangers et le signe de nationalisme et de patriotisme auquel se sont alliées ces populations116(*).

Eu égard à ce qui précède, les populations ont montré ou manifesté leur hostilité au mouvement par l'indifférence, la dénonciation des abus commis par celui-ci pour se faire accepter par la force et leur refus de la guerre. Les fréquentes tueries peuvent alors s'analyser comme la volonté des autorités rebelles à obliger les populations locales à se soumettre à leur action politico-militaire et à inhiber toute forme de résistance suite à la terreur.

Paragraphe 2 : L'opposition aux pillages des ressources économiques

La guerre de la R.D.C. était aussi présentée par la plupart d'observateurs comme ayant pour objectif la recherche des ressources économiques de la part des pays impliqués et des rebelles et groupes armés en présence.117(*)

En effet, au terme de l'enquête effectuée par le panel des inspecteurs des Nations Unies, il est mentionné l'exploitation illégale des ressources minérales et forestières de la R.D.C. Cette exploitation s'y déroulait à un rythme inquiétant et distinguait le pillage systématique qui consistait au stock des minerais, de bois, de café, du bétail et des fonds se trouvant dans les territoires conquis par les armées étrangères alliées à la rébellion pour y être soit transférés, soit exportés sur les marchés internationaux. Il distingue aussi l'exploitation endogène développé grâce aux structures préexistantes mises au point lors de la lutte pour le pouvoir menée par l'A.F.D.L. Ces structures ont été améliorées à l'exploitation exogène, elle a été mise en place par l'Ouganda et le Rwanda pour le contrôle des ressources minières et financières en violation de la souveraineté de la R.D.C., de la législation nationale et parfois du droit international118(*). Cette convoitise des richesses naturelles du Congo est présentée par Baudouin HAMULI KABARHUZA comme étant une cause majeure de la poursuite de la guerre à l'Est dont les conséquences sont, notamment, la mort et le déplacement des communautés entières. Bref, les violations des droits de l'homme119(*).

Dans ce contexte, le peuple Congolais s'opposait à ces pillages. Cette opposition populaire ne manquait pas de conséquences sur la sécurité de la population civile. En fait, les massacres à grande échelle dénoncés et reconnus par les dirigeants rebelles du R.C.D./Goma se faisaient autour des mines d'or traditionnellement exploitées par les populations locales. Cette opposition, devenant permanente, entraînait donc des milliers de victimes dans les couches des populations civiles non armées tuées, en guise de réaction, par les rebelles et leurs alliés.

Paragraphe 3 : L'opposition à la domination étrangère

Nul n'ignore que le conflit armé en R.D.C. mettait aux prises à la fois les armées étrangères et les groupes nationaux et locaux. La présence des troupes étrangères « non invitées » était ainsi perçue comme une agression et une domination tant politique qu'économique par le peuple Congolais. Aussi, les objectifs présentés par ces alliés des rebelles Congolais, à savoir, la sécurité des frontières communes et la prévention des attaques de leurs pays respectifs par les groupes rebelles présents dans l'Est du Congo n'acquiert pas l'assentiment de la majorité des populations Congolaises, en général, et celles du Sud-Kivu, en particulier. Ainsi, pour faire admettre ces populations civiles non armées les buts de la guerre et ses « bien-fondés », des actes de terreur, de menace qui finissent par porter atteinte aux libertés et droits de l'homme dans les territoires contrôlés par ces armés.

Paragraphe 4 : La présumée installation des colonies de peuplement dans le Kivu

Pour certains, du point de vue de l'objectif politique de la guerre, ceci est l'une des finalités est l'occupation du Congo et surtout dans sa partie orientale. L'installation des populations qui proviendraient de l'extérieur du pays rencontre ainsi la forte densité des populations autochtones farouchement opposées à toute domination étrangère conduirait les rebelles à créer des espaces vides par des attaques des villages ciblés. Les populations autochtones seraient alors obligées de se déplacer pour leur sécurité. Ce qui constitue déjà une violation des droits humains et du droit humanitaire.

Paragraphe 5 : Les représailles et les règlements de comptes

A l'issue des conspirations militaires auxquelles les populations ont opposé un refus ou après des revers militaires au front, les représailles infligées sont à la hauteur des pertes subies. Toutes ces représailles étaient commises, d'une part, sans prétexte ou sous couvert, tant dans les villes que dans les milieux ruraux, des mesures de protection ou de participation à la reconstruction nationale. En effet, les autorités rebelles justifiaient souvent la mort des populations civiles et le rançonnement des milliers de paisibles citoyens par les attaques perpétrées contre les milices, c'est-à-dire les combattants Mayi-Mayi, les interahamwe et ex-FAR, etc.120(*) D'autre part, les parties au conflit accusaient la population civile d'apporter de l'aide et du soutien à la partie adverse121(*). Ces soupçons se nourrissaient évidement du fait de l'incompréhension et de la divergence des vues sur les raisons qui ont poussé au déclenchement de la guerre dite de « rectification » entre les populations Kivutiennes et les acteurs politico-militaires.

Les autres causes ou buts des massacres évoqués par les défenseurs des droits humains sont notamment l'esprit de vengeance et les règlements de compte. En effet, plusieurs tueries ont été ordonnées par les responsables militaires pour venger la mort de leurs combattants au front après affrontements. D'autres l'ont fait suite à la découverte des massacres de leurs protégés par le camp adverse. Ainsi, par exemple, les massacres de Kilungutwe, de Makobola, de Kasika, de Zokwe sont présentés comme ayant eu pour but de venger la mort de quelques 30 combattants du Rassemblement Congolais pour la Démocratie et membres de l'Armée Patriotique Rwandaise, victimes d'une embuscade tendue par les Mayi-Mayi non loin de la paroisse. Ceux de Mboko auraient aussi la même cause122(*).

Quant aux règlements de compte, ils paraissent la forme la plus sûre et la plus utilisée de justice dans les milieux occupés par les groupes armés. Bien des gens règlent, en effet, leurs différends en se faisant justice eux-mêmes par la violence, les fausses accusations. Des allégations indiquent que beaucoup d'actes du genre ont été commis et continuent à l'être par des personnes qui entretiennent certains rapports avec les différents protagonistes123(*).

Signalons, pour clore ce chapitre que les violations auxquelles il est fait allusion se commettaient en toute impunité. Leurs auteurs utilisaient menaces et intimidations pour prouver leur véritable force et leur domination ; et, ainsi, mettre en garde toute tentative de dénonciation et d'opposition à leur volonté. Exploitant aussi les tensions et divisions ethnico-tribales, les auteurs des massacres et autres violations des droits de l'homme visent à camoufler leur responsabilité dans les faits commis pour les qualifier de massacres interethniques. En outre, l'entretien de la confusion et la négation des faits sont utilisés afin de cacher l'existence de ces actes à l'opinion nationale et internationale. La conséquence de ces dissimulations est la confusion dans la détermination des preuves lors d'éventuelles enquêtes124(*). Toutes ces violations ne manquent pas, en effet, de victimes et de conséquences sur la vie quotidienne de la population, voire sur le succès des forces qui contrôlaient cette partie du territoire. Tels sont les éléments qui font l'objet chapitre qui suit et qui est, par ailleurs, le dernier du présent travail.

CHAPITRE II : LA CRISE HUMANITAIRE DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU : UNE SITUATION AUX CONSEQUENCES NEFASTES SUR LES VICTIME ET NECESSITANT DES MESURES APPROPRIEES POUR SON ERRADICATION

Ce chapitre comprend trois sections. La première porte sur les principales victimes des violations perpétrées en cette période de guerre. La deuxième évoque, en fait, les différentes conséquences de ces violations sur la vie quotidienne de la population sud-Kivutienne et sur les différents groupes en présence. La troisième, quant à elle, propose les mécanismes envisageables pour la lutte contre toute violation au Sud-Kivu, spécialement, et en R.D.C.

SECTION 1 : LES POPULATIONS CIVILES : VICTIMES INNOCENTES DES VIOLATION DES DROITS FONDAMENTAUX

On entend par « victimes », des personnes qui, individuellement ou collectivement, ont subi un préjudice, notamment une atteinte à leur intégrité physique ou mentale, une souffrance morale, une perte matérielle ou une atteinte grave à leurs droits fondamentaux, en raison d'actes ou d'omissions qui enfreignent les lois pénales en vigueur dans un Etat, y compris celles qui prescrivent les abus criminels de pouvoir. Une personne peut être considérée comme une « victime » que l'auteur soit identifié ou non, arrêté, poursuivi ou déclaré coupable, et quels que soient ses liens de parenté avec la victime. Le terme « victime » inclut aussi, le cas échéant, la famille proche ou les personnes à la charge de la victime directe et les personnes qui ont subi un préjudice en intervenant pour venir en aide aux victimes en détresse ou pour empêcher la victimisation125(*).

La guerre en R.D.C. qui était caractérisée par la violation massive des droits humains a fait beaucoup de victimes. En effet, des milliers de civils sans défense sont des cibles des combattants lors des tueries délibérées et arbitraires. Le Rassemblement pour le Progrès (R.P.) mentionne que les populations Congolaises, en général et les Kivutiens en particulier, martyrisées par 32 ans de règne dictatorial et fortement déstabilisées par une arrivée des réfugiés rwandais en 1994 sont, depuis 1996, victimes des massacres126(*). Des hommes, des femmes, des vieillards et des enfants se réduisent à des silhouettes en fuite, à des corps jetés dans des fosses communes, voire à des chiffres127(*).

Toutes les catégories sociales sont ainsi touchées et concernées par les actes de violations des droits humains mais avec une particularité : celle des catégories les plus vulnérables notamment les femmes, les enfants et les vieillards. Jean MIGABO Kalere128(*) classifie les victimes des violations selon l'âge (les personnes du troisième âge, les femmes enceintes et les enfants mineurs) et selon les fonctions exercées dans la société.

Paragraphe 1: Selon l'âge et le sexe

A. Les enfants mineurs.

Le livre-document publié par M.S.F. se contente de montrer que dans certains districts de l'Est de la R.D.C., près de 75 % des enfants de moins de 3 ans n'ont pas survécu et que la mortalité infantile moyenne décime 60 % des enfants de moins de 5 ans129(*).

B. Les femmes enceintes et les personnes du troisième âge

Durant tous les massacres dans les territoires jadis sous contrôle de la rébellion les femmes, en générale, et celles qui sont enceintes et vieilles, en particulier étaient victimes des violations des droits de l'homme. Elles étaient la cible privilégiée des groupes armés pour la simple raison qu'elles sont facilement exploitables. Le rapport de M.S.F. mentionne aussi que le taux de mortalité maternelle au moment de la couche s'est sensiblement accru depuis le début de la guerre pour atteindre le niveau le plus élevé dans le monde avec le décès d'à peu près 3.000 mères sur 100.000 uniquement en R.D.C.

Paragraphe 2 : Selon les fonctions sociales exercées

Toute personne pouvant être vecteur d'une certaine opinion sociale et capable d'organiser, de mobiliser les populations ou de participer à leur développement social et économique était pourchassée. La rébellion dirigeait ses attaques surtout contre les leaders religieux et coutumiers et contre les intellectuels oeuvrant dans les organisations de développement et diverses associations. De nombreux pasteurs et diacres des églises protestantes, des diacres laïcs, des séminaristes, des prêtres et des religieuses catholiques ont ainsi été massacrés, assassinés, torturés depuis le déclenchement de la seconde guerre.

Sont aussi constamment victimes des violations des droits de l'homme, des personnes indépendantes ou des organisations qui se sont engagées ardemment dans la dénonciation des auteurs d'abus ou de violations. En réponses aux dénonciations relatives à l'existence des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, certaines autorités provinciales ont menacé de suspendre ou de fermer les activités des organisations citées.

Paragraphe 3 : Attitudes et moyens de défense des victimes face aux violations subies

Face à la méconnaissance des droits de l'homme et à leur violation, il y a toujours, de la part des victimes trois types de situations, d'attitudes ou de comportements possibles, à savoir, la résignation ou la soumission, le recours à la violence et le recours à la non-violence130(*).

A. La soumission et la résignation.

Cette attitude favorise le statu quo et s'explique par l'ignorance. En R.D.C., de vastes masses populaires ignorent, en effet, tout de leurs droits, surtout en milieu rural. Leur apport au savoir ou à l'information est dérisoire, médiocre ou carrément nul. Après l'ignorance, l'environnement culturellement pauvre influe beaucoup sur le type d'attitude. Ainsi, même informées, les victimes affichent souvent des comportements de soumission face aux violations de leurs droits. Enfin, le poids des structures sociales et politiques. Quand ces structures sont oppressives ou répressives, elles écartent les victimes et les condamnent à l'attentisme. La soumission constitue donc un obstacle à la promotion des droits de l'homme et une cause majeure de leurs violations.

B. Le recours à la violence.

Ici, les victimes réagissent par la violence lorsque leurs droits sont violés. Quand cette violence est mise en oeuvre, soit pour violer les droits de l'homme, soit pour les défendre, elle s'exprime dans toutes ses formes (violence du regard ou du geste, du discours, violence intellectuelle qui est celle de l'Etat, des régimes politiques ou des groupes armés, etc).

C. La confiance aux organisations de défense des droits humains.

Elle est la façon efficace mais la moins courante d'exiger le respect des droits de l'homme et de travailler pour la construction de la paix. Elle est un ensemble de valeurs stratégiques, de techniques d'action visant à défendre les droits de l'homme et la paix dans des situations d'oppression interpersonnelles et intergroupes. Dans son essence, la non-violence s'ordonne aux valeurs fondatrices de la dignité humaine (respect de la vie) et aux valeurs constructrices des interactions humaines positives (amour, vérité, justice, etc.).

Ainsi, aussi impuissante, la population du Sud-Kivu a-t-elle assisté à des exécutions sommaires et extrajudiciaires des militaires, des civils et des religieux ; à des assassinats délibérés et arbitraires des personnes innocentes ; à des arrestations et détention illégales, à des enlèvements et disparitions ; à des actes de torture et autres mauvais traitements et aux scènes d'impunité131(*). La violence des atrocités entraîne une peur dans le chef de la population qui se résout à abandonner toute idée de résistance de peur de subir les représailles de la part des groupes armés. La population Sud-Kivutienne accepte donc avec docilité extraordinaire de se soumettre aux abus de toutes sortes. Elle se soumet surtout face à la pression des autres qui sont soumis en majorité et qui craignent d'effaroucher l'autorité publique. Le contrôle du groupe pour maintenir le statu quo devient alors paralysant et entretient le système des violations. Toute tentative de résistance entraîne au sein du groupe la désapprobation parce que celui-ci se sent menacé par ceux dont les actes sont porteurs de répression. C'est, en fait, la résignation qui est appliquée parce que les victimes vivent les atrocités. Ce qui signifie qu'elles représentent un terrain préparé pour faciliter les abus de leurs persécuteurs car ils ne font rien pour s'en sortir collectivement132(*).

Ce moyen se relevant inefficace, les victimes se confient alors aux organisations spécialisées dans la matière de défense des droits humains, des églises et très rarement chez les supérieurs hiérarchiques des violateurs. Ces organisations élaborent ainsi des programmes d'assistance aux victimes. Ces programmes développent des mécanismes de revendications et de dénonciation, de l'observation de la situation des droits de l'homme et le comptage des violations, des alertes en cas de situations confuses, la formation sur les droits de l'homme dans les milieux ruraux et urbains pour apprendre aux gens à revendiquer les droits en cas des violations. Même si les actions des ONG de défense des droits humains ne parviennent pas à éradiquer les violences sur les populations civiles dans la Province du Sud-Kivu, elles influent toutefois sur le taux de prévalence de cas des violations. Concrètement, les actions des ONG de défense des droits humains ont obligé quelque part la reconnaissance de certaines violations des droits de l'homme par les belligérants bien que celles-ci aient été souvent qualifiées d'actes isolés ou de simples bavures. Aussi, les actions des ONG de défense des droits de l'homme ont particulièrement attiré l'attention de la Communauté Internationale sur la catastrophe humanitaire existante à l'Est de la R.D.C.

En effet, au début du conflit armé en R.D.C., les massacres se sont produits dans un silence souvent qualifié de complice de la Communauté Internationale. Cette culpabilisation est à la suite de l'incapacité de cette dernière de prévenir et d'empêcher, voire de favoriser les massacres. Ce silence était qualifié de soutien tacite à la guerre, à la présence des forces armées étrangères ainsi qu'à la violation des droits humains car l'ONU, l'OUA ou l'Union Africaine et les autres organisations internationales s'abstenaient à réagir face à la violence et aux violations massives des droits humains à l'Est de la R.D.C. et, spécialement, au Sud-Kivu133(*).

Ce n'est que quelque temps après les dénonciations faites, d'abord, par les confessions religieuses notamment les sources d'information catholiques alimentées par les réseaux missionnaires, ensuite, par les organisations membres de la société civile que cette communauté internationale est sortie de son mutisme. Mais au début tout au moins, ces informations alarmistes étaient accueillies avec un relatif scepticisme. La Communauté internationale emboîta ainsi le pas en critiquant aussi la persistance des violations particulièrement graves des droits de l'homme sur base des rapports graves de Monsieur Roberto GARRETON. Ce dernier confirmait l'existence de plusieurs massacres au Congo durant la deuxième guerre dite de « libération ». C'est dans ce cadre que différentes résolutions ont finalement été prises, notamment celle 1234 du 09 avril 1999 dans laquelle l'ONU condamnait les massacres perpétrés par toutes les parties au conflit armé et demandait aux Etats engagés dans la guerre de respecter la souveraineté et l'intégrité territoriale de la R.D.C. Dans sa Résolution 1291 du 24 février 2000, le Conseil de Sécurité décida de l'envoi d'une mission de maintien de la paix en R.D.C., la MONUC, et exprima ses préoccupations sur le pillage des ressources et richesses naturelles du Congo, et exigea, enfin, le retrait de toutes les troupes étrangères de la R.D.C. Par sa Résolution 1304, l'ONU insista sur la démilitarisation de la Ville de Kisangani suite aux affrontements armés entre les troupes rwandaises et Ougandaises et condamna les massacres et autres atrocités commis quotidiennement sur le sol Congolais. L'Union Européenne n'est pas du reste des organisations internationales qui ont condamné les actes de violence contre les populations civiles. En effet, elle a également demandé à tous les belligérants au conflit Congolais de respecter les droits fondamentaux de l'homme et le droit international humanitaire dans les zones qu'ils contrôlaient. Enfin, des Organisations Internationales des droits de l'homme comme Amnesty International et Human Rights Watch ont aussi publié des rapports sur les violations des droits humains pendant la guerre au Congo. Des constats sur l'existence des tueries dans différents villages, ces organisations ont formulé des recommandations à l'endroit des auteurs et des acteurs nationaux et étrangers impliqués dans la guerre Congolaise134(*).

Toutefois, les diverses actions des organisations locales de défense des droits humains ont eu beaucoup plus d'effets dans les villes et les campagnes jadis sous contrôle rebelle que dans ceux contrôlés par les bandes armées (Mayi-Mayi, ex-FAR, interahamwe, Rebelles burundais des F.D.D., etc.). Des démarches ont été initiées pour négocier l'accès à ces zones par différentes organisations. Aussi, faut-il souligner, que bien que les organisations de défense des droits humains sont parvenues, grâce aux dénonciations, à influencer l'application des sanctions à l'égard de certains auteurs des violations sous ordres des autorités rebelles du R.C.D./Goma, à obtenir des interpellations au profit des victimes ; les réparations, quant à elles, ne se faisaient pas du tout suivre. Cet état de chose remet, toutefois, en cause l'efficacité même des actions des ONG de défense des droits humains.

SECTION 2 : LES CONSEQUENCES DE LA CRISE

Les multiples violations des droits humains constatées et dénoncées à l'Est de la R.D.C. et au Sud-Kivu particulièrement ne manquent pas d'effets néfastes tant sur la vie quotidienne de la population que sur la survie politique et la popularité des groupes armés en présence. Cette section est donc consacrée, d'une part, aux conséquences socio-économiques et sanitaires des populations et, d'autre part, aux conséquences du point de vue politique.

Paragraphe 1 : Du point de vue socio-économique et sanitaire

Parmi les conséquences socio-économiques et sanitaires des violations perpétrés sur les populations civiles, les plus importantes sont les suivantes : la fuite des populations dans les forêts, la destruction des tissus économique et social, la haine entre communautés ethniques, la propagation des maladies infectieuses, le traumatisme psychologique, etc.

A. Le déplacement de la population.

A la suite des massacres et autres exactions, des populations civiles ne prenant aucunement part à la guerre qui sévissait dans la Province du Sud-Kivu, les paysans étaient obligés de fuir loin dans des forêts ou vers les centres urbains à la recherche désespérée d'un asile et d'une protection. Ainsi, selon Collette BRAEKMAN135(*), ces exactions et massacres ont pousse près de deux millions de civils à prendre fuite et à se transformer en déplacés internes. Les déplacements des populations de leurs milieux d'origine ne sont pas aussi sans conséquences.

En effet, les centres urbains sont maintenant surpeuplés et connaissent une situation de crise et de pénurie alimentaire du fait de l'abandon de l'activité agricole des paysans qui constitue, cependant, la principale source de revenu pour les populations rurales qui représentent pratiquement 71% de la population en province136(*). L'autre effet des déplacements des populations rurales dans les forêts est que celles-ci sont exposées, d'abord, aux nouvelles attaques des bandes armées dissimulées dans la brousse, c'est-à-dire à de nouveaux actes de violation de droits humains. Ensuite, abandonnées à elles-mêmes dans ces forêts, plusieurs familles sont exposées aux intempéries par manque d'abri adéquat entraînant des maladies inconnues, à la famine car elles n'y subsistent que grâce à quelques racines, herbes et fruits ; elles sont aussi à la merci d'animaux sauvages (les réfugiés des parcs nationaux). Aucune assistance ne leur est apportée.

B. Le traumatisme psychologique des populations victimes.

Les violations des droits de l'homme ont des conséquences graves sur le psychisme des survivants dont les séquelles sont très profondes et difficiles à guérir. Les témoins des massacres se disent encore hantés par les scènes de violence, de massacres macabres et sont frappés par du chagrin et du désespoir, et maudissant leur propre existence. Toutes les personnes qui ont survécu à ces barbaries sont totalement et profondément marquées. Beaucoup d'entre les victimes survivantes ont ainsi choisi, une fois de plus le chemin de l'exil vers les pays étrangers tels le Burundi, la Tanzanie, etc.137(*)

C. La destruction des tissus socio-économiques.

Les violations des droits humains dans les milieux ruraux, surtout, entraînent, comme nous l'avons signalé précédemment, les populations à l'exil soit dans les forêts, soit dans les centres urbains ou encore dans les pays étrangers. Cet exode massif menace de déstabiliser ou déstabilise déjà les villages, notamment dans les secteurs économique et social.

En effet, en dépit de la persistance de quelques activités de survie, la vie économique dans la Province du Sud-Kivu est pratiquement arrêtée, asphyxiée, les activités bancaires et commerciales sont totalement paralysées. Cette situation est consécutive aux pillages commis par les forces en présence et aux multiples tracasseries des autorités politico-militaires et administratives rebelles. Les quelques recettes provinciales perçues, au lieu d'être utilisées pour l'amélioration de l'économie locale, étaient par contre, orientées principalement vers l'effort de guerre138(*).

D'où, la population se trouve ainsi clochardisée et son dynamisme habituel est rompu à la suite de la situation d'insécurité permanente. Cette thèse est confirmée, en effet, par une enquête menée à Bukavu par le Rotary Club au début de l'année 1999 sur un échantillon de 267 jeunes âgés entre 17 et 39 ans. Les résultats de cette enquête indiquent que 100 % de l'échantillon affirme vivre une situation précaire dont les manifestations sont l'insécurité généralisée (65 %), l'arrêt des activités socio-économiques (53 %)139(*).

La violence et les violations des droits humains corrompent, piègent et bloquent les relations interpersonnelles ou intergroupes : entre deux ou plusieurs individus, entre deux ou plusieurs groupes sociaux. Elles sont considérées comme des descriptions ou des analyseurs permettant de décrire et de comprendre les conflits interpersonnels et/ou intergroupes, comment ces conflits naissent et se développent140(*). En effet, la violence alimente la haine entre ethnies ou entre groupes sociaux ainsi que la peur et la méfiance entre les populations. Les violations des droits humains dont sont auteurs les ex-rebelles du R.C.D./Goma et leurs alliés, le Rwanda et le Burundi enveniment les tensions ethniques locales et hypothèquent, de ce fait, le dialogue et la réconciliation entre les communautés. Au Sud-Kivu, par exemple, les Banyamulenge ont toujours éprouvé des difficultés à faire reconnaître leur identité Congolaise auprès d'autres ethnies locales. Cela est dû notamment à l'instrumentalisation de leur cause afin de légitimer l'entrée des troupes rwandaises au Congo. Cette situation s'est aggravée par la difficulté ou l'impossibilité de distinction entre rwandais et Banyamulenge auteurs des multiples tueries, exactions et autres violations des droits humains dans la province. La confusion dont il est question affectera, pendant longtemps encore, les rapports des Banyamulenge avec les autres communautés au Kivu comme dans tout le pays141(*).

D. La propagation des maladies infectieuses et Rejet des victimes par la société.

Cette propagation des maladies infectieuses, notamment le SIDA, est due à l'existence de la violence sexuelle à l'égard des femmes et des jeunes filles. Les experts soulignent que parmi les forces militaires qui évoluent dans la région, la prévalence du SIDA est de 60 % et que les maladies sexuellement transmissibles sont un fléau généralisé. Une fois violées, les femmes sont exposées au rejet par leurs familles, au reniement de leurs maris. Les enquêteurs de Human Rights Watch rapportent le cas de ces femmes seules, abandonnées, rejetées et méprisées qui, pour survivre, n'ont plus d'autre recours que de camper aux abords des rues et de se livrer à la prostitution. Peu de mesures significatives sont prises pour protéger ces femmes142(*).

E. La perte de confiance vis-à-vis des collaborateurs de la rébellion.

La terreur qui régnait dans le Kivu n'est surtout pas moins gratuite qu'on le croit. Elle n'est pas le simple corollaire de la guerre, car elle dépeuple la région, oblige les paysans à fuir. Cette terreur visait aussi à réduire au silence les intellectuels, à neutraliser les chefs traditionnels, les leaders d'opinion qui pourraient prendre la tête d'éventuelles révoltes. C'est ainsi que presque tous les Bami de la région qui représentent la dernière autorité incontestée sont entrés en clandestinité. D'autres ont été assassinés. Ceux des Bami qui ont été séduits par les autorités rebelles et leurs alliés sont purement et simplement désavoués par les populations de leurs entités143(*).

Paragraphe 2 : Sur le plan politique

Le conflit armé de la R.D.C. avec son lot de violations des droits humains ont eu d'énormes conséquences sur le succès même de la rébellion et de différentes forces armées en présence dans la Province du Sud-Kivu et dans toute la partie orientale du pays. En effet, l'on a assisté à une illégitimation de la rébellion et à un renforcement de l'esprit nationaliste et patriotique, à la résistance et la méfiance vis-à-vis des actions et décisions des autorités rebelles.

En effet,  le déclenchement de la seconde guerre dite de « rectification » a été opéré dans un contexte tel que la population Congolaise en général, et celle du Sud-Kivu, en particulier, espérait déjà un changement socio-économique positif après la lutte armée qui mit fin à la dictature mobutienne. Selon Jean-Charles MAGABE144(*), ancien gouverneur de la Province du Sud-Kivu, la population de Sud-Kivu n'a jamais cru à la seconde « libération » parce que la prise du pouvoir de Monsieur Laurent-Désiré KABILA représentait un espoir qui renaissait déjà avec quelques réalisations socio-économiques ainsi que la promesse des élections présidentielles faite par le Chef de l'Etat. Les autorités rebelles n'ont donc pas convaincre le peuple sur le bien-fondé de leur rébellion.

Les violations des droits humains ont accentué, chez les populations Congolaises, ce sentiment de rejet de la rébellion ainsi que de tous leurs collaborateurs. Cette impopularité se manifestait notamment par la méfiance vis-à-vis des promoteurs de la guerre à savoir le R.C.D./Goma et leurs alliés. La population ne participait plus à des activités édictées par les hauts responsables rebelles. Ce qui fait qu'il n'a existé, durant toute la période de rébellion, aucun mécanisme mobilisateur capable de redynamiser la population145(*). Les populations Congolaises du Kivu se trouvaient ainsi devant des rebelles dont la quasi-totalité avait une mauvaise renommée. Ce qui impliquait automatiquement, pour le mouvement rebelle, un manque d'assise et de légitimité populaire pourtant nécessaire dans la poursuite de sa lutte146(*).

L'impopularité se traduisait concrètement par le fait que les populations des territoires occupés ne se retrouvaient pas dans la rébellion et ne cachaient plus leur hostilité. Dans la province du Sud-Kivu, le Rassemblement Congolais pour la Démocratie et ses alliés, considérés comme promoteurs de la guerre dont les conséquences sont les violations des droits humains, n'ont eu de souteneurs que quelques individus désireux d'accéder à des postes jugés rémunérateurs en période de vaches maigres. L'une des raisons avancées sur la manifestation de cette hostilité est notamment celle du comportement des troupes sur le terrain. L'on n'a jamais vu, en effet, une armée s'adonner au pillage systématique d'un territoire à libérer, se plaire à massacrer la population à libérer, faire la chasse aux animateurs de la vie socio-économique, etc.147(*)

Chaque effet ayant aussi sa conséquence, nous pouvons souligner que cette impopularité implique la démonstration de la résistance populaire qui se manifestait notamment par la désobéissance civile, la méconnaissance de certaines autorités installées par la rébellion, la sympathie envers les bandes armées dites « Nationalistes », les « Mayi-Mayi ». En effet, au Sud-Kivu et dans les autres provinces occupées par les rebelles et leurs alliés, les gens ne se bousculaient pas pour participer aux manifestations politiques organisées par la rébellion. A plusieurs reprises, les responsables du Rassemblement Congolais pour la Démocratie ont été largement contestés et largement hués lors des meetings qu'ils organisaient, lors des cérémonies « officielles » ou lors des représentations quelconques.

Tel en est, par exemple, le cas lors des deux rassemblements populaires tenus, respectivement, au mois d'août 1998 pour l'explication des pourquoi de la guerre à la Grand-place de la poste et le 13 mars 1999 à la place Major Vangu dans la ville de Bukavu. Parler de la rébellion ou de la guerre lors des cérémonies où participe la population telles les collations des grades académiques, les participations aux conférences-débats ou colloques, les représentations aux activités socio-culturelles était considéré comme un tabou ou une provocation. Le mouvement rebelle était ainsi réduit au silence et ne s'exprimait le plus souvent que par la voie des ondes, à la Radio Télévision Nationale Congolaise considérée comme un instrument idéologique du mouvement rebelle.

Les responsables rebelles ont, eux-mêmes, pris acte de cette impopularité comme une des caractéristiques du Rassemblement Congolais pour la Démocratie parce qu'ils confirmaient l'incapacité de mobilisation de la masse populaire et d'un défaut d'adhésion à sa logique politico-militaire. Cet état des choses a conduit ainsi une frange de la population à ne plus avoir peur de dénoncer l'incapacité du R.C.D./Goma et ses alliés d'assurer la sécurité des territoires qu'ils contrôlaient148(*). Tels sont, à titre d'illustration, le message de Noël 2001 et Nouvel an 2002 du Mwami NGWESHE-XV WEZA-III, Pierre J-M. NDATABAYE Muhigirwa du 23 décembre 2001, dans lequel il dénonçait la prise en otage du peuple par quelques « politicailleurs » marquée par de tueries généralisées et de viols, de profanation et de pillage à grande échelle des richesses du pays, une association de malfaiteurs qui s'est liguée pour terroriser et intimider par des massacres et des tortures dont la violence est la seule voie de réussite dans la vie. Il ajoute que c'est la population Congolaises qui en est la victime malgré le raisonnement, en ce début du siècle de la nouvelle civilisation dénommée « mondialisation » que les promoteurs veulent nous la faire accepter selon leur règle de jeu.

Dans ses lettres ouvertes adressées au Président du Rassemblement Congolais pour la Démocratie (au total 12 lettres) de 1999 à 2003, Monsieur Idésbald BYABUZE dénonçait tous les abus commis par le mouvement rebelle sur les populations Congolaises des territoires sous contrôle de la rébellion. Prenant pour cas deux d'entre elles (celle du 13 octobre 2001 qui est la cinquième et celle du 12 mars 2002, la douzième), signalons que l'auteur y mentionne les arrêtés du gouverneur de la Province du Sud-Kivu remplaçant les absents de leurs postes de travail suite à la décision des fonctionnaires de rester à la maison à cause de non paiement de leur prime et du refus du Rassemblement Congolais pour la Démocratie d'accepter l'envoi des arriérés de salaire promis par le Gouvernement de la république. Il y dénonce aussi les pillages, les viols, les meurtres et la traîtrise dont sont auteurs les rebelles en appelant le peuple à se rappeler à tout instant de ces pires maux qui lui sont infligés depuis le début de la guerre d'août 1998. Selon lui, en effet, la guerre a ramené Bukavu, en particulier et le Sud-Kivu en général, à l'âge de la pierre taillée et leurs habitants, de vrais australopithèques, des hommes ayant oublié les attributs de la modernité à cause des actes de barbarie, les uns les plus crapuleux que les autres tels que l'enterrement des femmes vivantes, les viols sadiques et sans considérations, les tueries par tous les procédés, etc.

La résistance et l'opposition à la rébellion se manifestait également par la dispersion des lettres anonymes ou des tracts appelant soit à des villes mortes, à des grèves généralisées ou encore l'interdiction de paiement de certaines taxes en faveur des autorités rebelles. Les exemples ci-après méritent d'être mentionnés en guise de preuve :

· Message du G.D.S.K. intitulé « Réveillez-vous peuple Congolais » dans lequel le groupe remercie la population pour avoir boycotté la rentrée scolaire, l'encourage à rester vigilante, ferme et fidèle malgré les intimidations, les tueries, met en garde les Congolais qui jettent la population dans la misère, la domination et promet l'échec du fait que le peuple prend conscience de la réalité des choses ; demande à la population de poursuivre la résistance et appelle aux services générateurs de recette de cesser toute perception et à la population de ne plus payer les taxes, aux fonctionnaires de ne plus perdre leur énergie pour un travail non rémunéré ; décrète, enfin la journée du 05 décembre 1998 ville morte en mémoire de tous les Congolais tombés sous les balles de la rébellion et de leurs alliés (à Kavumu, Kasika, Uvira et Bukavu). Le message date du 24 novembre 1998 à Bukavu ;

· Le Front Démocratique pour la Libération du Congo, dans son « Flash d'info » N° 001 de novembre 1998, affirme que le R.C.D. et ses alliés sont les principaux artisans de la misère du peuple. Il les avertit, à cet effet, que la colère de ce peuple assujetti n'est point contrôlable lorsqu'elle se déchaîne et que la vindicte de celui-ci arrivera tout en encourageant les amis de la résistance et d'alerte ;

· Les Nationalistes pour la résistance dans « Compatriote du Sud-Kivu : finis la peur, les intimidations et la terreur » appellent, quant à eux, à partir du 31 janvier 2000, à une grève générale des fonctionnaires, des agents de l'Etat, des privés et des services générateurs de recettes, des écoles et universités, des policiers et militaires, de tous les commerces sur toute l'étendue de la Province du Sud-Kivu ;

· Le Conseil de Sécurité de la Résistance locale du Sud-Kivu, dans son compte rendu de la réunion du 02 février 2000, écrivit une lettre ouverte aux Rebelles Congolais, à leurs alliés et à la Communauté Internationale. Dans cette lettre, le Conseil accuse les deux premiers cités à entretenir la misère de la population, le pillage des richesses, les massacres et tueries à grande échelle des innocents civils, des enlèvements, des exactions et autres barbaries perpétrés à Makobola, Kasika, Burhinyi, Mwenga, etc. Il indique, en outre, que les populations du Sud-Kivu ne resteraient pas indifférentes malgré les intimidations et promet d'autres actions de plus grande envergure en cas de surdité politique ;

· Le Parti de la Résistance Nationale, dans sa déclaration politique N°01/P.N.R./S-G/2002 du 10 janvier 2002 à Uvira, décréta aussi les dates de 16 et 17 janvier 2002 journées villes mortes de recueillement en guise de protestation contre la paupérisation des populations et en souvenir des compatriotes victimes des massacres de plus de 3,5 millions de civils innocents (Makobola, Sange, Kasika, Burhale, Izege, Kabare, Bunyakiri, Masisi, Beni, Butembo, Isiro, Kisangani, etc). Le Parti recommandait ainsi à toutes les couches populaires à rester en famille réfléchir sur le cycle infernal de violence dans le pays et envisager des solutions à court terme et à long terme pour la libération totale des consciences. Aux hommes politiques du R.C.D./Goma et à leurs alliés, il leur a été demandé de démissionner en bloc et demander pardon au peuple Congolais pour les préjudices subis par leurs actes ; aux Organismes Internationaux, en signe de compassion envers les populations meurtries, de focaliser leur aide humanitaire vers les territoires sous contrôle des « Mayi-Mayi » jusque là abandonnées à leur propre sort.

En plus, la résistance opposée par la population aux actions de la rébellion a rendu l'exécution de certaines décisions prises par les autorités rebelles difficile voire impossible. Aussi, la poursuite de la guerre impopulaire ponctuée par des violations flagrantes et massives des droits humains a renforcé le sens patriotique et l'esprit nationaliste dans les esprits des habitants du Sud-Kivu. Pendant la guerre, en effet, malgré la partition de fait de l'Etat Congolais, les populations des territoires sous contrôle de la rébellion, spécialement celles du Sud-Kivu, avaient plus tendance à la reconnaissance d'un seul gouvernement, à savoir, celui basé à Kinshasa, capitale de la R.D.C. et siège des institutions nationales149(*). C'est pour cette raison que tout le peuple Congolais a toujours prié pour la fin de la guerre et le recouvrement de l'intégrité territoriale de la R.D.C. à travers divers messages et actions des organisations de la société civile, les églises et les organismes internationaux. Tels sont les exemples des messages de Monseigneur Emmanuel KATALIKO, archevêque de Bukavu aux fidèles de Bukavu et aux hommes de bonne volonté du 05 décembre 1998, la Déclaration des Pasteurs des la Communautés membres des églises du Christ au Congo en ville de Bukavu du 21 décembre 1998150(*), le message du Cardinal Frédérique ETSOU à l'occasion de l'intronisation de son Excellence Monseigneur Charles MBOGHA Kambale, archevêque de Bukavu le 03 juin 2001, les messages de paix de la Société Civile du Sud-Kivu, à l'exemple de celui à l'occasion du 39e anniversaire de l'indépendance de la R.D.C. adressé le 16 juin 1999 aux présidents de la R.D.C. et du R.C.D.

Concernant la difficulté de l'exécution des décisions prises par les autorités rebelles, la plus importante a avoir été boycottée par la population du Sud-Kivu, pensons-nous, est celle liée à la mise en circulation de nouvelles plaques minéralogiques sur tout le territoire contrôlé par le R.C.D./Goma par la Décision N°001/R.C.D./CUPSG/2002 du 21 juillet 2002 et l'Arrêté Départemental N°077/DPFBP-RCD/JMEE/2002 du 23 juillet 2002. Dans la lettre numéro 519.02/1/97,en effet, l'archevêché de Bukavu a clairement donné sa position négative sur le changement desdites plaques en argumentant que cela pouvait attendre la réunification du pays du fait que la décision relevait entièrement des compétences de souveraineté, c'est-à-dire de la seule compétence du gouvernement de la République.

Aussi, l'église Catholique refusait qu'il soit imposé à la population de financer le « mouvement-parti ». Toujours à ce sujet, « Conscience Patriotique » a lancé des tracts sur lesquels on pouvait lire : « Toutes les couches sociales ont réagi et manifesté leur désaccord à l'égard de cette nouvelle manoeuvre de pillage et d'extorsion. Le R.C.D. n'administre rien ici, sauf piller, taxer et voler [...]. Refusons de prendre ces plaques trop exorbitantes et inutiles. Attendons le gouvernement issu des négociations en cours, un gouvernement d'union nationale qui, seul, est habilité à mettre en circulation de nouvelles plaques minéralogiques [...]. Acceptons de marcher à pieds, fermons nos activités si le R.C.D. nous y oblige et refusons une fois pour toute à enrichir les criminels et les traîtres qui ont déjà tué plus de 4 millions de Congolais ».

Sans avoir la prétention d'avoir énuméré toutes les conséquences socio-économiques et politiques qui paraissent innombrables, nous nous limitons à celles mentionnées ci-haut que nous considérons, personnellement, comme étant les principales. Dans la section qui suit, nous allons faire allusion aux différents mécanismes envisageables en vue de mettre fin aux violations des droits humains en R.D.C., en général, et dans la Province du Sud-Kivu, en particulier.

SECTION 3 : LES PERSPECTIVES DE SORTIE DE CRISE EN MATIERE DE RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX

Les guerres et les conflits civils ont souvent pour causes l'ethnicité, l'exclusion des accords de partage du pouvoir et les rivalités entre clans ou factions. Leurs conséquences sont aussi, le plus souvent, les violations des droits humains, la destruction totale et généralisée des infrastructures socio-économiques et culturelles ainsi que les violations massives et flagrantes des droits de la personne humaine.

Pour remédier à ces violations des droits de l'homme et donc aux violences et aux situations conflictuelles qu'elles entraînent dans une sorte de cercle vicieux ou de réaction en chaîne, les solutions les plus salutaires pour en finir sont les stratégies de la non violence. Il est, en effet, contradictoire et illusoire de vouloir faire évoluer les droits de l'homme en recourant à la violence, quelles qu'en soient l'origine et la forme151(*). On peut donc lutter contre ces violations en mettant complètement fin à la guerre, par la création d'un système de représentation politique durable fondé sur l'intégration, la mise en place d'un Etat fort précurseur de l'Etat de droit respectueux de la constitution, de la primauté du droit et du respect des droits de la personne, apte à satisfaire les besoins des citoyens et à promouvoir le développement socio-économique sans que ces principes fondamentaux ne soient mis en péril152(*). En outre, la lutte contre l'impunité est nécessaire par le jugement de tous les responsables d'actes ayant causés préjudice aux populations civiles.

Paragraphe 1 : La cessation de la guerre et l'établissement d'un Etat fort

Malgré le calvaire subi, les populations Congolaises, en générale, et celles du Kivu, en particulier ont toujours été pacifiques et ont toujours lutté en faveur de la paix et de la cessation des hostilités en privilégiant le dialogue, le débat d'idées, plutôt que la violence, pour sortir la région de la tourmente. C'est dans ce cadre que les organisations membres de la Société Civile et les églises ont depuis fait appel aux parties au conflit Congolais à envisager la paix et à arrêter le cycle de violence qui dessert toute la région des Grands-Lacs153(*).

Ces pressions conjuguées par ces organisations locales, nationales et internationales ont poussé les belligérants à choisir l'option de la négociation politique pour sortir de la crise qui a mis à genoux l'Etat dans l'exercice de ses fonctions. Le long processus s'est, en effet, réalisé en plusieurs étapes154(*). Il a finalement abouti à la signature de l'accord global et inclusif entre représentants de tous les groupements politiques et les belligérants à Pretoria (Afrique du Sud) le 17 décembre 2002 sur fond de concessions mutuelles. L'accord prévoyait, en effet, la cessation des hostilités dans laquelle les parties acceptent de prendre toutes les mesures nécessaires à la sécurisation des populations sur l'ensemble du territoire national. A cet effet, les dispositions visant à garantir cette sécurité devraient être prises. En plus de cela, l'accord a institué un type de régime politique exceptionnel (un président secondé par quatre vice-présidents) pour permettre à toutes les parties de participer à la gestion du pouvoir politique en R.D.C.

Toutefois, bien que la population du Sud-Kivu soit unanime que le fait que seul le rétablissement de la paix en R.D.C. est l'option qui contribue à la cessation ou à l'éradication des violations des droits de l'homme (96,3%) ; la grande partie demeure septique sur l'aboutissement du processus de paix en cours en R.D.C. En effet, seulement 52,8% de la population pensent que le processus de paix en cours dans le pays aiderait à mettre fin à la violence et aux violations des droits humains en R.D.C. et dans la Province du Sud-Kivu, en particulier. Les 47,2 % restant disent ne pas avoir confiance ou ne pas être convaincus de la détermination des hommes politiques Congolais de mettre fin à la guerre pour des intérêts égoïstes.

La fin de la guerre doit être suivie par la réhabilitation d'un Etat fort qui signifie la mise en place des institutions étatiques capables d'organiser la redistribution des revenus au sein des populations. Dès lors, l'idée d'un Etat fort en R.D.C. exclut sans équivoque tout soutien aux régimes dictatoriaux modernes, de l'espèce de la dictature mobutienne de triste mémoire, qui sont à la base de l'effondrement de l'Etat avec pour manifestations les violations des droits de la personne et la réduction de tout un peuple à la mendicité155(*). L'Etat fort est, d'entrée de jeu, le précurseur ou constitue un prélude à l'émergence progressive d'un Etat de droit.

Paragraphe 2 : Un retour rapide à un Etat de droit et la lutte contre l'impunité

Une des caractéristiques de l'Etat de droit est l'application et le respect des dispositions constitutionnelles et de toutes les lois de la République. Dans cette perspective, les droits fondamentaux, dans leur universalité, ont une signification profonde pour les citoyens. L'Etat de droit est le résultat de la collaboration des gouvernants nationalistes avec les autres acteurs acquis au développement humain. Ainsi, l'Etat de droit est un Etat tout court en perpétuelle évolution politique, économique et sociale ou morale plaçant l'homme au centre de ses préoccupations. Le rétablissement de l'Etat de droit ne pourrait toutefois pas, à lui seul, aboutir au renforcement de la primauté des droits humains au Sud-Kivu et en R.D.C. après cette longue guerre fratricide qui a fait autant de victimes. Il est alors impérieux de mettre en place des structures chargées de rendre justice pour tous les crimes qui ont été commis pendant cette période de guerre afin de lutter contre l'impunité.

En effet, le gouvernement de la république et les mouvements rebelles Congolais ont toujours reconnu la commission d'actes de violations des droits de la personne dans les territoires sous leur contrôle. Or l'histoire contemporaine a enseigné et enseigne qu'il y a une tendance irréversible vers l'identification et la responsabilisation de ceux qui ont commis tous ces crimes. Plus personne, et notamment ceux qui font partie de la « Caste des puissants », ne devra être à l'abri de devoir, un jour, répondre devant la justice de sa responsabilité vis-à-vis des crimes qu'il a commis ou commandités. Cela peut prendre certainement du temps mais ce moment devrait impérativement arriver de façon certaine et irrémédiable en R.D.C.156(*)

Pour Christian HEMEDI BAYOLO157(*), le contexte général de violences armées ainsi visualisées et de conflagration régionale qui demeure depuis 1996 ne peut qu'entraîner des violations massives des droits de l'homme, du droit international humanitaire et du droit des gens qualifiées de crimes de guerre, de crime contre l'humanité, de génocide ou de crime d'agression. Amnesty International parle de « la dignité humaine réduite à néant en R.D.C. » (Londres, mai 2001). Cette situation appelle donc, dans le cadre de la lutte contre l'impunité des Nations Unies, des poursuites et des sanctions pénales à l'encontre de leurs auteurs et de leurs complices par des instances judiciaires compétentes ; ralliant ainsi l'opinion de l'ancien rapporteur spécial des Nations Unies en R.D.C. sur la situation des droits humains, Monsieur Roberto GARRETON.

Eu égard à ce qui précède, au-delà de la volonté de respecter la Convention de Genève du 12 Août 1949 relative à la protection des personnes civiles et temps de guerre, la Communauté Internationale et même les belligérants se sont sentis interpellés et ont affirmé la nécessité de mettre en place des mécanismes adéquats pour la protections des droits de l'homme dans ce conflit. Il s'agit notamment des textes suivants :

· La Résolution 1341 (2001) du 22 février 2001 du Conseil de Sécurité, notamment, le point 14, souligne spécialement que les forces occupantes devront être tenues responsables des violations des droits de l'homme commises sur le territoire qu'elles contrôlent ;

· La Résolution 1304 (2000) du 16 juin 2000 du Conseil de Sécurité, notamment les points 13, 14 et 15 ; le Conseil de Sécurité spécifie qu'il « est d'avis que les gouvernements rwandais et ougandais devraient fournir des réparations pour les pertes en vies humaines et les dommages matériels qu'ils ont infligés à la population civile de Kisangani [...] » ;

· La Résolution 1234 (1999) du 9 avril 1999 du Conseil de Sécurité, points 6 et 7. Il y est exposé que le Conseil de Sécurité condamne tous les massacres perpétrés sur le territoire Congolais et demande, afin que tous les responsables soient traduits en justice, qu'une enquête internationale soit ouverte sur toutes les affaires de ce type, notamment sur les massacres dans la Province du Sud-Kivu et autres atrocités. Bien d'autres textes ont abordé dans ce même sens à l'exemple de l'Accord de Paix de Syrte du 18 avril 1999, la Résolution N° 2002/14 du 19 avril 2002, l'Accord de Cessez-le-feu de Lusaka de 1999.

Deux autres évènements majeurs confirment la volonté des parties au conflit en R.D.C. de lutter contre l'impunité en envisageant des mécanismes de répression des crimes internationaux commis dans le pays. Il est question ici de :

· la ratification du Statut de Rome portant création de la Cour Pénale Internationale qui réprime tous les faits qualifiés de crime de guerre, de crime contre l'humanité, de crime de génocide et de crime d'agression par le gouvernement Congolais, le 30 mars 2002 ;

· l'adoption consensuelle à Sun City, par la plénière du dialogue intercongolais, des résolutions de la Commission de paix et réconciliation numéros 20/DIC/AVRIL/2002 et 21/DIC/AVRIL/2002. La première porte création « d'une Commission Nationale Vérité et Réconciliation » chargée de rétablir la vérité et de promouvoir la paix, la justice, le pardon et la réconciliation nationale. La seconde, quant à elle, porte requête du gouvernement de transition au Conseil de Sécurité d'instituer comme pour l'ex-Yougoslavie, le Rwanda, la Sierra Leone, un tribunal pénal international pour la République Démocratique du Congo.

Cette requête du gouvernement de transition est corroborée par la population du Sud-Kivu. En effet, 100 % de nos enquêtés sont favorables à la poursuite judiciaire contre toute personne qui serait identifiée comme auteur ou complice des actes de violations des droits de l'homme pendant la période qu'a duré le conflit armé au Sud-Kivu et en R.D.C. en général. 91,8 % d'entre eux sont favorable à l'institution d'un tribunal spécial pour la R.D.C. par souci d'équité, d'impartialité et d'objectivité. Les 8,3 % qui s'y opposent pensent, quant à eux, que cette procédure prend trop de temps et n'aboutirait pas à un jugement équitable comme c'est le cas, par exemple, du Tribunal Pénal International pour le Rwanda basé à Arusha, en Tanzanie. Pour eux, il est donc préférable que les auteurs et responsables des crimes en R.D.C. soient jugés par les institutions judiciaires nationales.

Mais pour la population du Sud-Kivu et de la R.D.C., la formation d'un gouvernement de transition consacrant la réunification du pays et l'intégration des forces rebelles ayant exterminé des milliers des fils et filles Congolais des territoires occupés sans jugement préalable ne constitue pas une garantie à la promotion et à la protection futures des droits humains dans la province et dans le pays. Ainsi, 85,2 % pensent que tous les auteurs identifiés ou responsables des violations des droits humains durant cette période de guerre ne devraient pas être responsabilisés dans la gestion des institutions de la transition, voire de la prochaine République issue des élections libres, démocratiques et transparentes. Aussi, 94,4 % sont pour leur exclusion pure et simple de la gestion de l'Etat. Seule cette procédure permettrait de mettre fin à l'arbitraire qui a pour effet la mise en faillite de l'Etat Congolais. Le temps n'est plus à la « Révolution-Pardon » comme le souligne KIZITO wa Payeye158(*).

Quelles sont, en définitive, les résultats de cette étude ? La réponse à cette question est reprise dans la partie conclusive qui suit et qui synthétise notre analyse.

CONCLUSION

Nous voici arrivé au terme de notre étude consacrée à la problématique de la garantie des droits fondamentaux en période de guerre en République Démocratique du Congo. Cas du Sud-Kivu. Elle a essentiellement consisté à analyser les causes et des conséquences socio-politiques des violations dénoncées tant au niveau local, national qu'international avant de proposer les perspectives de sortie de crise.

En abordant ce travail, l'on a été animé par le souci de compréhension des motivations profondes et les effets des violations des droits humains. Cette compréhension des motivations et des effets d'un mal président toute mise au point de mécanismes de lutte contre les violations, de protection et de promotion des droits humains en temps de paix comme en temps de guerre conformément aux législations existantes.

L'étude par la pertinence de ses recommandations, serait ainsi notre façon de contribuer à la promotion des droits de l'homme au Sud-Kivu, mais aussi et surtout une interpellation de la conscience des hommes politiques Congolais, actuels et avenir, sur la valeur de la personne humaine au non de laquelle ils prétendent mener les luttes politico- militaires. Dans cette perspective, notre problématique s'est articulée autour de trois questions, à savoir, comment les violations des droits de l'homme se traduisaient-elles concrètement au Sud-Kivu ?, quelles en seraient les causes et les conséquences socio-politiques ?, à l'avenir, quels sont les mécanismes envisageables pour lutter contre ces violations massives des droits de l'homme ?

Répondant à ces questions à titre d'hypothèse, nous avons pensé que les violations des droits de l'homme se traduiraient par les massacres des populations civiles, des arrestations arbitraires, des tortures, des sévices corporelles et des viols, des exécutions sommaires et assassinats, des enlèvements forcés, d'enrôlements forcés dans les différents groupes armés, de prises d'otage de la paisible population civile, etc. Les principales causes des violations des droits de l'homme au Sud-Kivu seraient, d'abord, la réticence de la population vis-à-vis de la rébellion et le rejet de la guerre ; ensuite, les représailles des acteurs au conflit armé qui soupçonneraient que la population civile collabore avec la partie adverse ou après les défaites enregistrées sur le champ de bataille ; puis, les parties prenantes au conflit dans la Province du Sud-Kivu s'illustreraient dans les violations des droits et libertés fondamentaux pour s'attirer l'attention de la Communauté Internationale et prouver leurs capacité, force et importance dans les débats consacrés au conflit armé en R.D.C. Enfin, le caractère autoritaire de la rébellion et de divers groupes armés pousserait ceux-ci à faire usage de la contrainte et de la répression pour se faire accepter et imposer leur volonté.

Comme conséquence, l'on noterait le nombre très élevé de morts parmi les populations civiles innocentes, les déplacements massifs de ces populations de leurs villages vers les forêts ou les villes à peu près sécurisées, les séparations des familles, la non assistance des populations condamnées et exposées à la famine, aux maladies suite à l'insécurité persistante dans la province. Ces violations accentueraient ainsi la répugnance des groupes armés par la population (rébellion et bandes armées) à travers la manifestation de leur hostilité par l'indifférence, la désobéissance civile, etc. ; renforçant alors la tendance nationaliste, patriotique et l'illégitimation de la rébellion. Ainsi, la seule voie à court, moyen et long termes pour mettre fin aux violations des droits de l'homme au Sud-Kivu, en particulier, et en R.D.C., en général serait la cessation de la guerre, la mise en place effective d'institutions qui rétablissent la paix et la démocratie, l'Etat de droit respectueux de la dignité humaine, la lutte contre l'impunité.

La vérification des hypothèses a été rendue possible par l'usage de la théorie générale de l'Etat, de certaines méthodes, à savoir, la méthode fonctionnelle dite relativisée dont le tenant est Robert King MERTON et la méthode génétique.

L'on sait, en effet, que l'Etat, à travers ses missions, est le seul garant de la sécurité intérieure, du maintien de l'ordre et de la protection des personnes et de leurs biens en prévenant toute crise et tout délit. Lorsqu'il n'est plus en mesure de remplir cette mission de protection, celle-ci est exposée et risque d'être accomplie par tout particulier qui, dans certaines circonstances, dégénère vers la violation des droits les plus fondamentaux de la population et de tous les citoyens suite à la confusion alors que l'Etat de droit est, en principe, au service du bien du peuple et de la justice sociale. Ainsi, l'effondrement et la faillite de l'Etat conduisent au déclenchement de la guerre qu'il l'empêche, de ce fait, à accomplir ses missions dont celle de protection et de promotion des droits de l'homme. L'on assiste aussi à une partition de fait du territoire national impliquant aussi un partage de l'exécution des missions étatiques selon la que l'espace territorial est contrôlée par chacun des belligérants au même titre que l'Etat unifié. Aussi, bien que la guerre ait été présentée comme une nécessité de remplacement d'institutions autoritaires par celles qui garantissent la justice sociale, le respect des droits humains et la démocratie, elle s'est détournée de cet idéal par les violations massives et systématiques des droits humains.

Dans la méthode fonctionnelle dite relativisée, Robert King MERTON a proposé quatre concepts clefs : la dysfonction qui gène l'ajustement et l'adaptation du système, l'équivalent ou le substitut fonctionnel qui montre qu'une fonction peut être remplie par les éléments différents mais interchangeables, les fonctions manifestes qui sont des conséquences objectives comprises et voulues par les participants du système, et, enfin, les fonctions latentes dont leur existence est inévitable bien que n'étant pas comprises ni voulues par les participants du système. L'étude des causes et des conséquences socio-politiques nous a également inspiré le choix de la méthode génétique. Des techniques telles que l'analyse documentaire, l'entretien, le questionnaire d'enquêtes, l'analyse du contenu nous ont servi dans la collecte de données, l'analyse et l'interprétation des résultats.

A la suite des enquêtes et analyses, il apparaît clairement que nos hypothèses de départ sont pratiquement confirmées. Les résultats du travail prouvent, en effet, que toutes les générations ou catégories de droits de l'homme ont été violés dans la Province du Sud-Kivu pendant la période de guerre, c'est-à-dire des droits civils et politiques aux droits environnementaux et à la paix en passant par les droits sociaux, économiques et culturels. Les violations se traduisaient par les massacres (droit à la vie) de plusieurs milliers des populations civiles non armés qui s'accompagnaient de la destruction systématique et aveugle des infrastructures de base (logements, installations administratives, économiques et sanitaires, etc.) ; les atteintes à la dignité humaine (arrestations et détentions arbitraires, enlèvements et disparitions forcés, traitements cruels, inhumains et dégradants, la soumission aux travaux forcés, etc.) ; les atteintes au droit à la sécurité qui restreint la libre circulation des populations et de leurs biens dans les différents territoires de la province ; les atteintes au droit à la paix (discours de haine, état de guerre) ; les atteintes aux libertés publiques (libertés d'opinion, d'expression, de presse, d'association, de réunion et syndicale). A cela s'ajoutent les violences à l'égard des femmes et les violations des droits de l'enfant (viols, enrôlement des mineurs dans l'armée, etc.), les violations des droits économiques, sociaux et culturels (la mauvaise gestion des fonds publics, la réduction de l'économie à un état chaotique, l'inaccessibilité aux soins de santé primaires, à l'éducation, le non paiement de salaires des fonctionnaires, bref, la paupérisation de la population).

Toutes les parties au conflit se sont rendus coupables des violations des droits humains au Sud-Kivu dont les causes sont notamment l'opposition à la guerre, aux pillages des ressources économiques de l'Etat congolais, à la domination étrangère, à la conquête et l'installation présumées des colonies de peuplement dans le Kivu ; les représailles et les règlements de compte ; l'impopularité de la rébellion. Les principales victimes de ces actes de violation des droits humains au Sud-Kivu sont les populations civiles non armées et sans défense et surtout les catégories les plus vulnérables, à savoir, les femmes, les enfants, les vieillards, les paysans et les plus démunis. Ces victimes sont condamnées à la soumission ou la résignation et, quelques fois, au recours à la violence. Elles se confient aussi aux organisations de défense des droits de l'homme en dernier recours.

Pour ce qui est des conséquences , les violations des droits humains au Sud-Kivu ont, sur le plan socio-économique et sanitaire , poussé les populations de l'intérieur à fuir vers les forêts et les Centres Urbains, abandonnant ainsi leurs activités agricoles qui approvisionnent les villes en denrées alimentaires et avec pour effet l'exposition aux nouvelles attaques des bandes armées dans ces forêts, aux maladies, à la famine, etc. ; elles ont causé la destruction des tissus socio-économiques (alimentation de la haine interethnique et intergroupe, arrêt des activités économiques) ; la propagation des maladies infectieuses suites aux viols et violences sexuels ; le traumatisme psychologique des populations victimes ; la perte de confiance ou la méfiance à l'égard collaborateurs de la rébellion (civils ou non).

Du point de vue politique, le succès et la réussite de la rébellion et des bandes armés ont été compromis à causes des violations des droits humains dont elles se sont rendues coupables au Sud-Kivu. Les violations des droits humains ont, en effet, accru le sentiment de rejet de la rébellion qui, dès le départ, était impopulaire suite à la divergence de vue sur le bien fondé de la guerre ; la méfiance, l'insubordination aux actions entreprises par les autorités rebelles base de son illégitimation ; la résistance par la désobéissance civile, la méconnaissance de l'autorité rebelle, la sympathie envers les bandes armées, le renforcement du sens patriotique et de l'esprit nationaliste ; l'absence d'adhésion populaire aux idéologies de la rébellion, le boycott de l'exécution des décisions prises par le pouvoir rebelle, etc.

Pour ce faire, les mécanismes envisageables pour lutter contre les violations des droits de l'homme sont la cessation de la guerre, le rétablissement de la paix et la restauration d'un Etat de droit respectueux de la dignité humaine et soumis à la loi, d'un Etat fort et démocratique, la lutte contre l'impunité qui consiste au jugement de tous les responsables identifiés des violations des droits humains durant cette période de guerre dite de « rectification ». Cela passe, en effet, par l'institution d'un tribunal pénal international pour la R.D.C. afin de juger les crimes de guerres et les crimes contre l'humanité, la disqualification de tous les auteurs des violations des droits de l'homme de la gestion des institutions politiques de la transition voire de la troisième république à venir.

Eu égard aux résultats auxquels nous sommes parvenus, l'étude laisse apparaitre de nouvelles perspectives de recherche en terme vérification des suggestions ci-après formulées :

· Qu'il y ait intensification de la sensibilisation et de la formation et information des populations, surtout rurales, sur les droits de l'homme et les libertés fondamentales auxquels ils ont droit ;

· La formation de la future armée nationale sur le respect des droits de l'homme et du droit international humanitaire dans l'exercice de ses fonctions ;

· Que les hommes politiques congolais apprennent désormais à mettre l'homme au centre de tout intérêt politique et oeuvrent pour son épanouissement intégral ;

· Que les lois en matière de protection et de promotion des droits de l'homme soient rigoureusement appliquées en vue de décourager tous ceux qui auraient, une fois de plus, l'intention maléfique d'y porter atteinte.

BIBLIOGRAPHIE

1- Ouvrages

1. ABI-SAAB, (R), Droit humanitaire et conflits internes. Origines et évolution de la réglementation internationale, A. Pédone, Paris, 1986, 280 p.

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28. MULUMBATI, (N), Sociologie politique, Editions Africa, Lubumbashi, Collection Savoir et Connaître, 1988, 223 p.

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31. POUGOUE (P.G.), MAUGENEST (D), (Dir), Droits de l'homme en Afrique Centrale. Colloque de Yaoundé (9-11 Novembre 1994), Karthala, Paris, 1996, 283 p.

32. QUIVY (R), CAMPENHOUDT (L.V.), Manuel de recherche en Sciences sociales, Dunod, Paris, 1995.

33. Rassemblement pour le Progrès, Pour que l'on n'oublie jamais. Mourir pour avoir accueilli, aimé et protégé, s.v., s.d., 48 p.

34. ROCHER, (G), Introduction à la sociologie générale. L'organisation sociale, Vol 2, Ed. H.M.H., Paris, 1968, 252 p.

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41. VINCENSINI, (J-J), Le livre des droits de l'homme, Ed. Robert Laffont, Paris, 1985.

42. ZARTMAN (W) (Dir), L'effondrement de l'Etat. Désintégration et restauration du pouvoir légitime, Nouveaux Horizons, Paris, 1995.

2- Articles, Revues, Rapports, Mémoires et T.F.E., Textes juridiques, Notes de cours.

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3. Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples de Juin 1981.

4. Congo - Afrique, N° 318, octobre 1997.

5. Congo - Afrique, N° 328, octobre 1998.

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9. Congo - Afrique, N° 369 - 370, Novembre - décembre 2002.

10. Déclaration des principes fondamentaux de justice relatifs aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir, Résolution 40/34 du 29 novembre 1985.

11. Déclaration politique du R.C.D., Département de la mobilisation et propagande, Goma, 12 Août 1998, 6 p.

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19. Héritiers de la Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Cas du Sud-Kivu, Bukavu, avril 1999, 31 p.

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23. L.D.G.L., Rapport sur la situation des droits de l'homme dans la région des Grands-Lacs : Burundi, Rwanda, R.D.C., Exercice 2002, COFICO, Kigali, 2003.

24. L.D.GL., Grand-Lacs, entre la violence impunie et la misère. Rapport sur la situation des droits de l'homme : Burundi, Rwanda, R.D.C., années 2000 - 2001, COFICO, Kigali, 2002, 162 p.

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26. Nations Unies, Rapport du groupe d'expert sur l'exploitation des ressources naturelles de la R.D.C., S/2001/357, 2001, 26 p.

27. Pacte international relatif aux droits civils et politiques, Résolution 2200 A (XXI) du 16 décembre 1966.

28. Protocole additionnel aux conventions de Genève du 12 août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (Protocole II) du 8 juin 1977.

29. Revue Amani, N°33-34, Février-mars 2002.

30. RWAMIRINDI (M), La question du respect des droits de l'homme pendant les circonstances exceptionnelles, Mémoire, Droit, U.N.R., Butare, 2001, 70 p.

TABLE DES MATIERES

DEDICACE-------------------------------------------------------------------------------------------------I

REMERCIEMENTS -------------------------------------------------------------------------------------II

SIGLES ET ABREVIATIONS ------------------------------------------------------------------------III

INTRODUCTION 1

1. ETAT DE LA QUESTION 1

2. PROBLEMATIQUE ET HYPOTHESES 4

3. OBJECTIFS ET INTERET DU SUJET 6

4. METHODOLOGIE DE TRAVAIL 7

A. Les Méthodes. 7

a. La méthode fonctionnelle 7

1° La Dysfonction. 8

2° L'équivalent ou substitut fonctionnel. 8

3° Les fonctions manifestes et les fonctions latentes. 9

b. La méthode génétique 10

B. Les Techniques. 10

a. Les techniques d'enquête 10

1° L'analyse documentaire. 10

2° L'entretien. 11

3° Le questionnaire d'enquêtes. 11

b. Technique d'analyse des données 12

5. DIFFICULTE RENCONTREE 12

6. SUBDIVISION SOMMAIRE DU TRAVAIL 12

PREMIERE PARTIE : LES DROITS DE L'HOMME : UN CONCEPT QUI S'INSCRIT DANS LA THEORIE GENERALE DE L'ETAT 14

CHAPITRE I : CHAMPS EPISTEMOLOGIQUE ET CONCEPTUEL 14

SECTION 1 : L'ETAT : PROTECTEUR PRIVILEGIE DES DROITS DE L'HOMME 14

Paragraphe 1 : Les buts et les tâches de l'Etat 15

A. Les buts de l'Etat 15

B. Les tâches ou missions de l'Etat. 15

a. La protection interne et externe 16

b. Les tâches sociales de l'Etat 18

1° Mesures pour assurer l'existence des Hommes. 18

2° Les possibilités d'épanouissement des citoyens. 18

3° Les tâches dans le domaine communautaire 19

Paragraphe 2 : L'Etat de droit : un système au service de la garantie effective des droits fondamentaux 19

A. Buts et éléments constitutifs de l'Etat de droit. 20

B. Les caractéristiques de l'Etat de droit. 20

Paragraphe 3 : L'effondrement de l'Etat : Un blocage à l'exercice et à la garantie des droits fondamentaux 21

SECTION 2 : LES DROITS DE L'HOMME : UN CONCEPT POLYSEMIQUE AU CONTENU PRECIS 22

Paragraphe 1 : Définition 22

Paragraphe 2 : La nature des droits de l'homme 23

Paragraphe 3 : Les caractéristiques des droits de l'homme 24

A. L'inhérence à l'être humain. 24

B. L'universalité. 24

C. L'inaliénabilité 24

D. L'indivisibilité 25

Paragraphe 4 : La classification des droits et libertés fondamentales de l'homme 25

A. La catégorisation classique 26

1. Les droits civils et politiques ou droits de la première génération 26

a. Les droits et libertés liés à la vie de la personne. 26

b. Les droits et liberté de l'esprit. 26

c. Les libertés d'expression collective. 26

d. Le droit à la propriété. 26

e. Les droits politiques. 26

2. Les droits économiques, sociaux et culturels ou droits de la deuxième génération 27

3. Les droits environnementaux, de développement, à la paix ou droits de la troisième génération 27

B. La classification suivant les obligations imposées par l'Etat. 27

C. Classification fondée sur la limitation des droits. 28

D. Classification fondée sur la possibilité de dérogation des droits. 29

SECTION 3 : LA GUERRE : UN PHENOMENE AUX CONSEQUENCES EVIDENTES SUR LA GARANTIE DES DROITS FONDAMENTAUX 29

Paragraphe 1 : Définition de la guerre 30

Paragraphe 2 : Les dimensions de la guerre 31

A. La guerre civile ou conflit armé non international. 31

B. La guerre ou le conflit armé international. 32

Paragraphe 3 : Les effets de la guerre 32

CHAPITRE II : CADRE NORMATIF RELATIF AUX DROITS FONDAMENTAUX 34

SECTION 1 : LES SOURCES INTERNATIONALES DE PROTECTION 36

Paragraphe 1 : Les instruments universels de protection 36

A. La Charte des Nations Unies. 37

B. La Déclaration Universelle des droits de l'homme. 37

C. Les Pactes internationaux jumeaux de 1966 37

Paragraphe 2 : Les mécanismes de mise en oeuvre du droit international des droits de l'homme 38

A. Sur le plan universel 38

B. L'enrichissement de la garantie par les systèmes régionaux 39

C. Le prolongement de la protection internationale en droit interne 41

1. Mécanismes d'introduction des droits de l'homme en droit interne 42

2. Le contenu des engagements de l'Etat au respect des droits de l'homme 44

3. Les droits de l'homme et l'exercice du pouvoir politique 45

a. Les droits de l'homme et les enjeux politiques. 45

b. Droits de l'homme et démocratie 46

c. Les droits de l'homme et la limitation des pouvoirs 48

SECTION 2 : DU RESPECT DROITS FONDAMENTAUX DANS LES CONFLITS ARMES 50

Paragraphe 1 : Le droit humanitaire empirique 51

Paragraphe 2 : Le droit humanitaire moderne 51

A. Le droit de Genève. 51

B. Le droit de la Haye. 51

Paragraphe 3 : Les instruments de protection y relatifs 52

A. Les Conventions du 12 Août 1949 52

B. Les protocoles additionnels (1977) 52

Paragraphe 4 : Les liens entre le droit humanitaire et le droit des droits de l'homme 52

DEUXIEME PARTIE : CONFLITS ARMES ET DROITS FONDAMENTAUX DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU 54

CHAPITRE I : DES DROITS FONDAMENTAUX MANIFESTEMENT VIOLES PAR LES ACTEURS AUX CONFLITS 55

SECTION 1 : LES PRINCIPALES VIOLATIONS ET LEURS AUTEURS 55

Paragraphe 1 : Les droits civils et politiques 56

A. Les atteintes au droit à la vie. 56

B. Les atteintes à la dignité humaine. 57

1. Les arrestations arbitraires 58

2. Enlèvement, disparitions forcées, traitements cruels, inhumains et dégradants 60

3. Les atteintes aux droits à la sécurité et à la paix 62

4. La liberté de circulation 62

5. Les travaux forcés 62

C. L'état des libertés publiques 63

1. Les libertés de presse, d'opinion et d'expression 63

2. Les libertés d'association, de réunion et syndicale 65

D. La violence à l'égard des femmes 66

E. La violation des droits de l'enfant. 67

Paragraphe 2 : Les droits économiques, sociaux et culturels 68

A. Economie et gestion des fonds publics. 68

B. Santé, Education et travail. 69

Paragraphe 3 : Les auteurs des violations 72

SECTION 2 : LES VIOLATIONS DES DROITS FONDAMENTAUX : UNE SITUATION AUX CAUSES MULTIPLES ET DIVERSIFIEES 73

Paragraphe 1 : L'opposition à la guerre et l'impopularité de la rébellion 74

Paragraphe 2 : L'opposition aux pillages des ressources économiques 74

Paragraphe 3 : L'opposition à la domination étrangère 75

Paragraphe 4 : La présumée installation des colonies de peuplement dans le Kivu 75

Paragraphe 5 : Les représailles et les règlements de comptes 76

CHAPITRE II : LA CRISE HUMANITAIRE DANS LA PROVINCE DU SUD-KIVU : UNE SITUATION AUX CONSEQUENCES NEFASTES SUR LES VICTIME ET NECESSITANT DES MESURES APPROPRIEES POUR SON ERRADICATION 78

SECTION 1 : LES POPULATIONS CIVILES : VICTIMES INNOCENTES DES VIOLATION DES DROITS FONDAMENTAUX 78

Paragraphe 1: Selon l'âge et le sexe 79

A. Les enfants mineurs. 79

B. Les femmes enceintes et les personnes du troisième âge 79

Paragraphe 2 : Selon les fonctions sociales exercées 79

Paragraphe 3 : Attitudes et moyens de défense des victimes face aux violations subies 80

A. La soumission et la résignation. 80

B. Le recours à la violence. 80

C. La confiance aux organisations de défense des droits humains 81

SECTION 2 : LES CONSEQUENCES DE LA CRISE 83

Paragraphe 1 : Du point de vue socio-économique et sanitaire 84

A. Le déplacement de la population. 84

B. Le traumatisme psychologique des populations victimes. 84

C. La destruction des tissus socio-économiques. 85

D. La propagation des maladies infectieuses et Rejet des victimes par la société. 86

E. La perte de confiance vis-à-vis des collaborateurs de la rébellion. 86

Paragraphe 2 : Sur le plan politique 87

SECTION 3 : LES PERSPECTIVES DE SORTIE DE CRISE EN MATIERE DE RESPECT DES DROITS FONDAMENTAUX 93

Paragraphe 1 : La cessation de la guerre et l'établissement d'un Etat fort 93

Paragraphe 2 : Un retour rapide à un Etat de droit et la lutte contre l'impunité 95

CONCLUSION 98

BIBLIOGRAPHIE 103

TABLE DES MATIERES 108

ANNEXES

* 1R. ABI-SAAB, Droit humanitaire et conflits internes, Origines et évolution de la réglementation internationale, A. Pédone, Paris, 1986, 280p.

* 2 J. MIGABO Kalere, Génocide au Congo ? Analyse des massacres des populations civiles, Broederlijke, Bruxelles, 2002, 216p.

* 3 M. RWAMIRINDI, La question du respect des droits de l'homme pendant les circonstances exceptionnelles, Mémoire, Droit, U.N.R., Butare, 2001, 70p.

* 4J. MIGABO Kalere, Op. Cit., p.122.

* 5 Groupe Jérémie, Pour la sécurité des pays voisins, la guerre est-elle une solution ?, Bukavu, Juillet 2001, p1.

* 6 N. MPATI Ne Nzita, « Droits de l'homme dans l'enseignement de Jean-Paul II » in Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, pp. 497 - 498.

* 7 LAUTERPCHT, Cité par R. ABI-SAAB, Op. Cit., p. 8.

* 8 B. HAMULI Kabarhuza, Donner sa chance au peuple Congolais. Expérience de développement participatif, Karthala, Paris, 2002, pp. 58 - 61.

* 9 M. GRAWITZ, Méthodes des Sciences Sociales, 7e Edition, Dalloz, Paris, 1986, p. 448.

* 10 N. MULUMBATI, Introduction à la science politique, Collection Savoir et Connaître, Editions Africa, Kinshasa-Lubumbashi, 1977, p. 32.

* 11 G. ROCHER, Introduction à la sociologie générale. L'organisation sociale, Vol. 2, Ed. H.M.H., Paris, 1968, p. 164.

* 12 R.K. MERTON, Eléments de méthode sociologique, Ed. Plon, Paris, 1953, pp.95-138.

* 13 M. GRAWITZ, Op.Cit., pp.453-454.

* 14 R. QUIVY, L. V. CAMPENHOUDT, Manuel de recherche en sciences sociales, Dunod, Paris, pp.159-229.

* 15 N. MULUMBATI, Sociologie politique, Ed. Africa, Lubumbashi, 1988, Collection savoir et connaître, p.75

* 16 D. TURPIN, Droit Constitutionnel, 3e Edition, P.U.F., Paris, 1997, p.13.

* 17 T. FLEINER-GERSTER, Théorie générale de l'Etat, P.U.F., Paris, 1986, pp.440- 441.

* 18 T. FLEINER-GERSTER, Op.Cit., pp. 442456.

* 19 C. DEBBASCH, La science administrative, 5e Edition, Dalloz, Paris, 1989, p. 44.

* 20 B. GOURNAY, L'Administration, P.U.F., Paris, Collection Que sais-je ?, 1980, p. 9

* 21 B. GOURNAY, Op.Cit., p.10.

* 22 C. DEBBASCH, Op Cit., p.51.

* 23 T. FLEINER-GERSTER, Op.Cit., p.88.

* 24 B. KRIEGEL, Cours de philosophie politique, Librairie Générale Française, Paris, 1996, pp.12- 22.

* 25 Cité par B. KRIEGEL, Op.Cit., pp. 18-19.

* 26 W. ZARTMAN (Dir.), L'effondrement de l'Etat. Désintégration et restauration du pouvoir légitime, Nouveaux Horizons, Paris, 1995, p.6.

* 27S.a., Petit Larousse illustré, Ed. Larousse, Paris, 2001, p.350.

* 28 J. HERSCH (Dir), Le droit d'être un homme. Anthologie mondiale de la liberté, J.C.L./Unesco, Paris, 1990, p.129.

* 29 J.J. VINCENSINI, Le livre des droits de l'homme, Ed. Robert Laffont, Paris, 1985, p.12.

* 30 J. MOURGEON, Les droits de l'homme, 2e Edition, P.U.F., Paris, Collection Que sais-je ?, 1981, p. 7.

* 31 M. DEDONGA, Séminaire sur le droit public, inédit, G3 Droit/C.U.B., 1999 - 2000.

* 32 s.a., Vers une culture des droits humains en Afrique (extrait). Un manuel pour l'enseignement des droits humains, SINIKO, s.d., pp 2-3.

* 33 Haut Commissariat aux droits de l'homme, Techniques de communication en droits de l'homme. Actes du séminaire organisé du 18 au 21 mai 2001, Bureau sur le terrain en R.D.C., Goma, Juin 2002, pp.32-39.

* 34 G. LEBRETON, Libertés publiques et droits de l'homme, 3e Edition, Armand Colin, Paris, 1997, pp.16-18.

* 35 J. HERSCH, Op.Cit., p.149.

* 36 S.a., Vers une culture des droits humains en Afrique (extrait). Un manuel pour l'enseignement des droits humains, SINIKO, s.d., p.5.

* 37 W. A. SCHABAS, Précis du droit international des droits de la personne, Ed. Yvon Blais Inc, Québec, 1997, pp.40-45.

* 38 Lire P. de QUIRINI, Les droits des Citoyens Zaïrois, 2e Edition, CEPAS, Kinshasa, 1980, pp.16-68.

* 39 W. A. SCHABAS, Op.Cit., p.40.

* 40 Cfr. Charte Africaine des droits de l'homme et des peuples adoptée en Juin 1982.

* 41 W. A. SCHABAS, Op. Cit., p.42.

* 42 Cfr. Article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 ; l'article 4, alinéa 2 du pacte relatif aux droits civils et politiques de 1966 ; l'article 12, alinéa 2 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et l'article 27 de la Convention américaine des droits de l'homme.

* 43 W. URY, Comment négocier la paix. Du conflit à la coopération chez soi, au travail et dans le monde,

Nouveaux Horizons, Paris, 2001, pp. XI - XIV.

* 44 G. BOUTHOUL, Traité de sociologie. Les guerres, éléments de polémologie, Payot, Paris, 1951, p. 25.

* 45 N. Q. DINH et allii, Droit international public, 2e Edition, L.G.D.J., Paris, 1980, p. 855.

* 46 G. BOUTHOUL, Op.Cit., p. 35.

* 47 G. BOUTHOUL, Op Cit., p. 37.

* 48 R. ABI-SAAB, Op. Cit., p. 69.

* 49 G. BOUTHOUL, Op.Cit., p.447.

* 50 R. ABI - SAAB, Op.Cit., pp.67et 117.

* 51 Ibid.

* 52 J. MIGABO Kalere, Op;Cit., p.129.

* 53 Banque Africaine de Développement, Rapport sur le développement en Afrique 2001. Renforcement de la bonne gouvernance en Afrique, Economica, Paris, 2001, p. 125.

* 54 G. BOUTHOUL, La population dans le monde. Les grands événements historiques - Guerres et Populations - perspectives d'avenir, Payot, Paris, 1935, p. 209.

* 55 B. K. HAMULI, Op.Cit., pp. 60-61.

* 56Y. G. ELENGA, « L'Afrique des rébellions ou alibi démocratique », Congo-Afrique, N° 329, mars 1999, pp.147-150.

* 57 D. ALLAND, Droit international public, P.U.F., Paris, Collection droit fondamental, 2000, pp. 73-74.

* 58 J. MOURGEON, Op. Cit., p. 77.

* 59 N. MPATI Ne Nzita, « Droits de l'homme dans l'enseignement de Jean-Paul II », Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, pp.495-497.

* 60 J. MOURGEON, Op.Cit., p.54.

* 61 P-E. BOLTE, Les droits de l'homme et la papauté contemporaine, FIDES, Montréal, 1975, p.108.

* 62 B. KRIEGEL, Op.Cit., pp.118-119.

* 63 C.I.C.R., Mise en oeuvre Nationale du droit international humanitaire : Droit international humanitaire et droit international des droits de l'homme. Similitudes et différences, Services Consultatifs, Mai 2001, p.1.

* 64 W. SCHABAS, Op.Cit., p.1.

* 65 Nations Unies, L'ONU pour tous. Ce qu'il faut savoir de l'ONU, de ses travaux, de son évolution pendant les 20 premières années 1945 - 1965, 8e Ed., Service de l'Information, New York, Mars 1968, p.148.

* 66 N. Q. DINH et allii, Op. Cit., p.547.

* 67 W. SCHABAS et D. TURP, Droit international Canadien et Québécois des droits et libertés : Notes et documents, Ed. Yvon Blais, Québec, 1994, p.4.

* 68 Idem, pp.13-14.

* 69 Idem, p.31.

* 70 C.I.C.R., Op.Cit., p.4.

* 71 C. LUTUNDULA, « Des engagements et devoirs de l'Etat en matière de protection et de promotion des droits de l'homme », Congo-Afrique, N° 328, Octobre 1998, p.469.

* 72 Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Op.Cit., p.57.

* 73 W. A. SCHABAS, Op.Cit., pp.99-31.

* 74 C.I.C.R, Op.Cit., p.4.

* 75 J. MOURGEON, Op.Cit., pp.7-80.

* 76 C.I.C.R., Op.Cit., p.3.

* 77 J. MOURGEON, Op.Cit., p.71.

* 78 Lire s.a., « Des principes, programme minimum et Statuts de l'A.F.D.L. », Congo-Afrique, N° 318, Octobre 1997, pp.497-499 et s.a., Déclaration politique du R.C.D., Département de la mobilisation et propagande, Goma, 12 Août 1998, p.6.

* 79 N. N. MPATI, Op.Cit., pp. 63-68.

* 80 D. MAUGENEST & P.G. POUGOUE (Dir.), Droits de l'homme en Afrique Centrales. Colloque de Yaoundé (9-11 Novembre 1994), Karthala, Paris, 1996, pp.75-77.

* 81 D. MASUMBUKO Ngwas, « Les droits de l'Homme, la démocratie et la paix » in Haut Commisariat aux Droits de l'homme, Op.Cit., pp.24-25.

* 82 H. NGBANDA, Afrique : Démocratie piégée, Equilibre d'aujourd'hui, Paris, 1993, pp.24-27.

* 83 D. MASUMBUKO Ngwas, Op. Cit., pp. 26 - 27.

* 84J. HERSCH, Op.Cit., p.129.

* 85 A. TOURAINE, Qu'est-ce que la démocratie ?, Fayard, Paris, 1994, pp.57-61.

* 86 D. MAUGENEST et P.G. POUGOUE, Op.Cit., p.57.

* 87 C.I.C.R., Op.Cit., p.1.

* 88 Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme, Op.Cit., p.56.

* 89 C.I.C.R., Op.Cit, p.1.

* 90 Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'Homme, Op.Cit, pp.56-61.

* 91 C.I.C.R., Les Conventions de Genève du 12 Août 1949, 4e Edition, Genève, 1989, pp.157-171.

* 92 C. de ROOVER, Servir et protéger. Droits de l'homme et Droit humanitaire pour les forces de police et de sécurité, C.I.C.R., Genève, 1999, p.139.

* 93 AMNESTY International, « Les violences massives tuent la décence humaine. Extrait du rapport d'Amnesty International sur la R.D.C. », Congo-Afrique, N° 347, septembre 2000, p.390.

* 94 B. HAMULI Kabarhuza, Op Cit., p.59

* 95 ) C. BRAECKMAN, Les nouveaux prédateurs. Politique des puissances en Afrique Centrale, Fayard, Paris, 2003, pp.152-156.

* 96 Héritiers de la Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Rapport de 2e et 3e trimestre 1998.Cas du Sud-Kivu, Bukavu, Octobre 1998, p.1.

* 97 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., pp.85-86.

* 98 LDGL, Rapport sur la situation des droits de l'homme dans la région des Grands-Lacs : Burundi, R.D. Congo, Rwanda. Exercice 1998, Imprimerie de Kabgayi, Kigali, Juin 1999, p.51.

* 99 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.155.

* 100 Héritiers de la Justice, Op.Cit., p.15.

* 101 L.D.G.L., Op.Cit., pp.65-66.

* 102 Haut Commissariat des Nations Unies aux droits de l'homme, Déclaration sur l'élimination de la violence à l'égard des femmes, Genève, 1996-2000, p.3.

* 103 Human Rights Watch., La guerre dans la guerre, violence sexuelle contre les femmes et les filles à l'Est du Congo, New York, Juin 2002, pp.13-15.

* 104 C. BRAECKMAN, Op.Cit., pp.160-165.

* 105 B. AZIZA et R. INTERAMAHANGA, « Violence au quotidien », Revue Amani, N°33-34, février-mars 2002, p.5.

* 106 Haut Commissariat aux droits de l'homme, Protocole additionnel aux Conventions de Genève du 12 Août 1949 relatif à la protection des victimes des conflits armés non internationaux (protocole II) du 8 juin 1977, Genève, 1996-1999, p.3.

* 107 L.D.G.L., Op.Cit., p.94.

* 108 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.156.

* 109 Héritiers de la Justice, Situation des droits de l'homme en R.D.C. : Cas du Sud-Kivu, Bukavu, avril 1999, p.30.

* 110 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.158.

* 111 L.D.G.L., Op.Cit., p.95.

* 112 D. MASUMBUKO NGWAS, « Les droits de l'homme, la démocratie et la paix » in Haut Commissariat des Nations Unies aux Droits de l'homme, Op.Cit., p.27.

* 113 J. MIGABO KALERE, Op.Cit., pp.82-107.

* 114 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.160.

* 115 J. MIGABO KALERE, Op.Cit., pp.113-117.

* 116 S. MARYSSE et F. REYNTJENS (Dir.), L'Afrique des Grands-Lacs. Annuaire 2000-2001, Tome 5, L'Harmattan, Paris, 2001, pp.143-147.

* 117 P. MATHIEU & J - C. WILLAME (Dir.), « Conflits et guerres au Kivu et dans la région des Grands-Lacs. Entre tensions locales et escalade régional », Cahiers Africains, N°39-40, l'Harmattan, Paris, 1999, pp.174-175.

* 118 Nations Unies, Rapport du groupe d'experts sur l'exploitation illégale des ressources naturelles et autres richesses de la R.D.C., S/2001/357, 2001, p.2.

* 119 B. HAMULI Kabarhuza, Op.Cit., pp.59-61.

* 120 Héritiers de la Justice (1998), Op.Cit., p.2.

* 121 Amnesty International, « les violences massives tuent la décence Humaine » in Op.Cit., p.393.

* 122 Amnesty International, La guerre contre les civils non armés, Londres, EFAI, 1998, pp.12-14.

* 123 Héritiers de la Justice (1999), Op. Cit., p.30.

* 124 Lire à ce sujet  J. K. MIGABO, Op.Cit., pp.81-83. et C. BRAECMAN, Op.Cit., pp.153-154

* 125 Haut Commissariat aux Droits de l'homme, Déclaration des principes fondamentaux de justice relatif aux victimes de la criminalité et aux victimes d'abus de pouvoir du 29 novembre 1985, Genève, 1996-1999, p.1.

* 126 Rassemblement pour le Progrès, Pour que l'on n'oublie jamais. Mourir pour avoir accueilli, aimé et protégé, s.v., s.d., p.10.

* 127 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.155.

* 128 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., p.99-101.

* 129 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.156.

* 130 D. MASUMBUKO Ngwas, Op.Cit., pp.28-30.

* 131 Héritiers de la Justice (1998), Op.Cit., p.16.

* 132 D. MAUGENEST et P - G POUGOUE, Op.Cit., pp.72-73.

* 133 Rassemblement pour le Progrès, Op.Cit., pp.38-39.

* 134 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., pp.121-122.

* 135 C. BRAECKMAN, Op.Cit., p.161.

* 136 L.D.G.L. (1999), Op.Cit., p.63.

* 137 Rassemblement pour le Progrès, Op.Cit., pp.33-35.

* 138 Héritiers de la Justice (1998), Op.Cit., p.16.

* 139 J-C. MAGABE Mwene, « Martyre et résistance. Les populations du Kivu face à l'occupation », Colloque sur le factionnalisme en Angola, au Congo et En R.D.C., Nancy, le 06 mars 1999, p.3.

* 140 Haut Commissariat aux Droits de l'homme, Op. Cit., p.28.

* 141 B. HAMULI Kabarhuza, Op. Cit., pp.60-66

* 142 C. BRAECKMAN, Op. Cit., p.163.

* 143 C. BRAECKMAN, Op.Cit, p.167.

* 144 BAPUWA Mwamba, « Un transfuge dénonce l'occupation Rwandaise. Jean-Charles MAGABE, ancien gouverneur du Sud-Kivu, a fui la province occupée par la rébellion, qu'il accuse d'"assassinats et de pillages" », Jeune-Afrique Economie, du 16 au 29 Novembre 1998, pp.108-109.

* 145 Héritiers de la Justice (1998), Op. Cit., p.17.

* 146 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., p.113.

* 147 J - C. MAGABE, Op.Cit., p.4.

* 148 J. MIGABO Kalere, Op.Cit., p.113.

* 149 I. BYABUZE Katabaruka, Lettre ouverte à Monsieur le Président du R.C.D./Goma sur les résultats partiels du dialogue intercongolais, N/Réf. : DOC. 12.Idé.B.K., du 29 mars 2002, Bukavu, p.4.

* 150 Rassemblement pour le Progrès, Op Cit., pp. 40 - 45.

* 151 D. MASUMBUKO Ngwas, Op.Cit, p.28.

* 152 Banque Africaine de Développement, Op.Cit., p.146.

* 153 Rassemblement pour le Progrès, Op.Cit., p.40.

* 154 Lire S. MARYSSE et F. REYNTJENS, Op.Cit., pp.143-174.

* 155 KIZITO wa Payeye, « Etat fort, précurseur d'un Etat de droit », R.D.Congo-Débat Forum, 04/12/2002, pp.1-2.

* 156 R. GARRETON, « Lettre ouverte aux Congolaises et aux Congolais », Congo-Afrique, N°361, Janvier 2002, pp.16-17.

* 157C. HEMEDI Bayolo, « Lutte contre l'impunité : esquisse des mécanismes de répression des crimes commis en R.D.C. depuis 1996 », Congo-Afrique, N°369-370, Novembre-Décembre 2002, pp.569-574.

* 158 KIZITO wa Payeye, Op.Cit., p.4.






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