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La responsabilité du banquier dispensateur de crédit

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par Aristide CHACGOM FOKAM
Université de Dschang - Master 2 en droit des affaires et de l'entreprise 2011
  

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Section 2 : Les conditions subjectives du soutien abusif: La
connaissance de la situation de l'entreprise

La situation sans issue de l'emprunteur et le maintien du crédit ne suffisent pas à mettre en jeu la responsabilité de la banque ; encore faut-il qu'elle soit au courant de cette situation et qu'elle ait manqué d'informer le débiteur.

En effet, lorsque le banquier disposait d'informations qui auraient dû alerter sa vigilance et renforcer ses contrôles, il a maintenu, voire augmenté les crédits accordés, la faute ne fait aucun doute. Il est reproché en réalité au banquier de n'avoir pas su apercevoir les signes clairs des difficultés graves dans lesquelles l'entreprise se trouve.

Or, il n'est pas simple de prouver que le banquier connaissait la situation de l'entreprise. C'est au demandeur qu'il appartient d'en apporter la preuve. C'est pourquoi, la jurisprudence, pour condamner le manque de vigilance, procède par présomption. Elle affirme, que le banquier « aurait pu connaître93 » ou « ne pouvait ignorer94 »la situation du débiteur. Elle a par conséquent crée, à la charge du prêteur, une obligation de se renseigner. L'obligation d'information met à la charge du banquier celle de s'informer, de se renseigner. Le donneur de crédit doit par conséquent se renseigner sur la situation financière de son débiteur. Il faut donc, pour la Cour de Cassation, que la situation de l'entreprise « ait été connue du banquier au moment de l'octroi du crédit ou du moins qu'il n'ait pu ignorer celle-ci en fonction des éléments qu'il connaissait ou devait connaître ».

Il existe certaines circonstances dans lesquelles la situation de son client ne peut être légitimement ignorée du banquier, notamment, lorsque ce dernier détient une participation au capital de la société bénéficiaire. Ainsi, on présume que le banquier a toute la latitude pour accéder aux informations.

Pour autant, même si le plus souvent la banque est extérieure à l'entreprise, elle ne peut soutenir qu'elle ignorait la situation réelle. Tenue d'une obligation de vigilance, elle doit s'informer sur la situation du client en prenant divers types de renseignements sur ses capacités financières ou l'évolution des ses affaires. La

93 Cass. Com., 7 October 1997, n°95-17.065, RJDA 1998, n°, n°90.

94 Cass. Com., 12 Juillet 1980, n°78-16.088, Bull. civ. IV, n°317, p. 256.

jurisprudence ne se contente pas d'apprécier la responsabilité du banquier en fonction des informations dont il dispose concrètement dans chaque espèce, elle fait peser sur le fournisseur de crédit un devoir général de s'informer sur la situation du client. La banque devra donc se livrer, en bon professionnel, à l'analyse des documents comptables de l'entreprise financée, auxquels elle ne pourra se fier que dans la mesure où ceux-ci ne présentent pas d'irrégularités évidentes. Dans cette perspective, le banquier doit exiger que son client lui communique les documents comptables prévisionnels intermédiaires au même titre que le bilan annuel. Il doit par ailleurs s'assurer de la régularité et de la sincérité des documents qu'il reçoit.

Mais seulement, l'investissement du banquier dans la recherche de l'information ne doit pas dépasser la limite du raisonnable pour se trouver sur le terrain de l'immixtion dans les affaires de son client. En effet, le banquier n'est pas « un policier » devant mener ses investigations sans limites, il est tenu d'un devoir de non immixtion ou de non ingérence dans les affaires de son client.

Pour que la responsabilité du banquier soit retenue, il faut que le débiteur soit dans une situation irrémédiablement compromise ou encore en situation désespérée. Cependant, la doctrine a révélé que la situation irrémédiablement compromise n'est pas la condition sine qua non de la responsabilité de la banque. Celui-ci doit encore être au courant de cette situation et avoir continué à soutenir son client au lieu de rompre le crédit. Toutefois, la décision n'est pas facile à prendre et peut même constituer un dilemme. La question étant de savoir s'il convient de renouveler le crédit ou l'interrompre au moment où l'entreprise est en difficulté, « le banquier est contraint de fonctionner en permanence entre le soutien abusif et la rupture abusive »95.

95 Cf. LIPZER (M.), Directeur à la Banque Populaire, cité par Amel GUAAYBESS, mémoire pré-cité, p. 52.

CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE

Le caractère particulier de l'activité de la banque a conduit la jurisprudence à déterminer l'étendue des obligations des établissements de crédit. Préteur par profession, le banquier est tenu d'obligations qui dépassent celles d'un simple préteur96. Il doit non seulement mettre à la disposition du débiteur les fonds promis, mais aussi s'assurer que ceux-ci ne sont pas source de préjudice pour le client. En effet, le crédit qu'il octroie doit être digne97. Cette notion de dignité du crédit se réfère davantage à l'opportunité financière du crédit mais aussi au regard de la situation générale de l'entreprise.

La jurisprudence distingue le devoir de discernement, le devoir de s'informer et le devoir de surveillance des fonds prêtés98et très récemment le devoir de mise en garde. Le banquier doit s'assurer au moment où il accorde un crédit, que celui-ci ne soit pas la cause de la chute du débiteur. Il doit éviter que son crédit ne vienne pas plutôt enfoncer le débiteur dans les profondeurs des procédures collectives en augmentant son passif. Le banquier est devenu une sorte de « conscience individuelle » de ses débiteurs, sans doute soutenu par l'idée que la banque accomplit une mission de « service public99 ». En effet, la moindre faute, fût-elle légère est de nature à engager la responsabilité du banquier.

Au total, l'appréciation de la responsabilité du banquier s'accompagne d'une extension de la notion de faute. C'est finalement la spécificité du contenu des obligations qui donne une coloration particulière à la faute commise par le banquier100. Cependant, la faute seule ne suffit pas ; d'autres éléments puisés dans le droit commun de la responsabilité doivent être associés pour véritablement mettre le banquier en cause

96 Cf. MILOGA (M.), « La responsabilité du banquier dispensateur de crédit », Séminaire AJBEF, Douala 05 au 09 novembre 2001, www.ajbef.info, p. 4.

97 Il est vrai qu'il est souvent dit que le client cesse d'être digne lorsqu'il a un comportement gravement répréhensible.

98 Cf. RIVES-LANGE (J-L.) et RAYNAUD (C.), Droit bancaire, D. 1986, n°546, p. 678

99 L'idée de service public ne doit pas être prise au sens technique et il ne faut pas lui attacher toutes les conséquences qu'elle emporte en droit public. Elle justifie seulement un renforcement des différentes obligations mises à la charge du banquier.

100 Cf. LOKO-BALOSSA (E-J.), « La responsabilité du banquier dispensateur de crédit », Annales de l'Université Marien NGOUABI Brazzaville - Congo, 2007, p. 2.

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