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Débat autour du concept de journalisme de paix

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par Charline Burton
Université Libre de Bruxelles - Licence en information et communication 2006
  

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1.4.2. Présentation de deux projets significatifs

Radio Okapi (RDC)

La radio est le médium le plus adapté pour des applications en temps de guerre ou post-guerre dans presque tout le continent africain. C'est en effet un moyen de diffusion relativement bon marché pour les auditeurs, flexible et celui qui parvient à toucher le plus grand pourcentage de la population dans des zones où peu de gens sont lettrés et où la tradition orale prédomine2. Dans un pays rongé par la corruption et la guerre depuis des décennies, à peine sorti de ce qui fût nommé la << première guerre mondiale africaine >>, ils étaient 45 millions d'auditeurs potentiels.

1 Institut Panos http://www.panos.org.uk tel : +44 207 278 1111 contact : James Dean (directeur).

2 Au sujet du choix du médium le plus approprié dans la mise sur pied de programmes proactif, voir HIEBER L., Lifeline media, reaching populations in crisis, loc. cit., pp. 49-72 (chapter IV : choosing the right medium).

Avec de larges parties du pays échappant au contrôle du pouvoir central, 900.000 réfugiés, 2.400.000 citoyens déplacés et 300.000 personnes souffrant de malnutrition, la République Démocratique du Congo avait besoin d'aide. Alors, le 25 février 2002, date du lancement du dialogue inter-congolais, l'ONG suisse Fondation Hirondelle et la Monuc (mission d'observation des Nations Unies au Congo) lançaient la Radio Okapi. Depuis le début, celle-ci a été claire sur sa position : << Okapi . la fréquence de la paix, Okapi . la voix du dialogue, Okapi . une radio congolaise pour les Congolais »

Promouvoir le dialogue et la paix en RDC, c'est le mandat spécial que s'est donné la Radio Okapi. Sa vocation est de fournir une information fiable et rigoureuse aux auditeurs, les accompagnant dans le processus de paix. Cette structure est de loin le projet radiophonique le plus important qu'aient eu à gérer ses deux fondateurs et, en moins d'un an, elle est devenue le réseau le plus large et le plus important dans tout le pays. Pourtant, une question se pose : alors que l'on compte 200 stations de radio communautaires, commerciales et associatives sur le territoire, que vient apporter la radio Okapi que les autres ne puissent offrir au peuple congolais?

Premièrement, la qualité de ses programmes. En se centrant sur des thématiques telles celles de la santé, l'éducation, les droits de l'homme et la culture, elle a permis d'offrir une information pluraliste et équilibrée sur l'évolution de la situation nationale. Radio Okapi, que l'Institut Panos Paris qualifie d'ailleurs du << plus grand succès de la MONUC>>1, a par exemple pris en charge la publicité des débats lors du dialogue inter-congolais, avec une équipe de reporters envoyés sur place, à Sun City (Afrique du Sud). Dans ses bulletins d'information, Radio Okapi prête une attention particulière aux activités des Nations Unies, à ses agences spécialisées et à la mission de la Monuc. Il s'agit donc d'offrir des informations fiables et de qualité ; mais également une visibilité aux activités des Nations Unies au Congo-Kinshasa. Il s'agit d'ailleurs d'un point qui récolte bon nombre de critiques des observateurs, qui voient dans la radio Okapi d'avantage un outil de << propagande >> Onusien qu'un service d'utilité publique. Pourtant, la MONUC représente la plus grande mission de maintien de la paix actuelle et sa présence, assez visible dans les centres urbains, se doit d'être expliquée aux habitants. Dès lors, détailler aux Congolais le rôle de cette mission de maintien de la paix, ses opérations militaires passées et futures, n'apparaît pas tant comme un geste de propagande, mais plutôt comme un soucis de transparence, en adéquation avec la ligne éditoriale de la radio, laquelle vise à << accompagner le peuple Congolais dans le processus de transition et de paix >>.

1 Actes de l'Atelier Interrégional de Bagamoyo, p. 92.

Disponible sur http://www.panosparis.org/fr/doc/Actes_Bagamoyo_pour_site.doc

Deuxième avantage de la Radio Okapi sur les autres médias locaux, c'est sa rigueur : En effet, celle-ci n'est pas sujette à l'improbabilité de nombreuses radios locales, lesquelles sont souvent l'objet d'une gestion improvisée, manquent de moyens de production et disparaissent du jour au lendemain ; ou, pire encore, sont prises d'assaut par des mouvements rebelles. L'origine de cette stabilité provient en grande partie dans ses ressources financières : financée par la coopération suisse, britannique et néerlandaise d'une part (via la fondation Hirondelle) et par le géant Onusien d'autre part, la radio fonctionne sur un budget annuel de 8 millions de dollars1. De quoi s'assurer un minimum de garanties... De même, il faut souligner que l'indépendance de cette radio par rapport aux acteurs locaux (milices, militaires, opposition, ...) lui confère une liberté de mouvement que bien d'autres stations ne peuvent se permettre. La << radio de la MONUC >>, comme bon nombre de Congolais l'appellent, est un << mammouth >> radiophonique, bien difficile à ébranler au niveau local.

Enfin, radio Okapi pallie les défaillances des médias publics nationaux : diffusant dans les cinq langues nationales, la radio est la seule qui dispose d'une couverture suffisante pour toucher l'ensemble des nationaux, remplissant dès lors une mission de service public. Avec des décrochages locaux d'une heure par jour en ondes courtes, il s'agit là d'une valeur sûre sur laquelle même les habitants de villages les plus reculés de la RDC peuvent compter. Elle dispose, outre le studio principal à Kinshasa, de 8 stations régionales, d'une vingtaine d'émetteurs FM et de 3 émetteurs ondes courtes. Dans ces stations une petite centaine de journalistes, animateurs et techniciens travaillent 7 jours sur 7 pour offrir à la RDC une information sûre et crédible en français, lingala, swahili, tshiluba et kikongo, ce qui permet de toucher une majorité de la population.

La tâche de cette radio mi-Hirondelle mi-Monuc est assez délicate. En effet, à la Fondation Hirondelle, l'on vise sans détour un objectif de résolution des conflits et de construction de la paix. Pourtant, au même moment, il lui faut s'attacher à respecter une stricte politique d'impartialité, symbolisée par le Code d'Ethique de la Monuc2. Jean-Marie Etter, président de la fondation, explique que l'essentiel dans cette mission est de demeurer impartial. << Lorsque les auditeurs savent que la station est précise et crédible, alors ils savent qu 'ils peuvent croire [ce qu 'ils entendent], alors ils vont vers cette radio. On ne leur dit pas « fais ceci » ou « fais cela ». Nous

1 http://www.radiookapi.net, rubrique << A propos de nous >> La contribution annuelle de la Fondation Hirondelle s'élève à presque 3.5 millions de dollars US par an, financés principalement par le gouvernement suisse, le RoyaumeUni et les Pays-Bas. La contribution de la MONUC a été estimée à 4.5 millions de dollars annuels. (Source : Yves Laplume, directeur adjoint de la radio Okapi).

2 HOWARD R., et al. The Power of the media, a handbook for peacebuilders, Untrecht, European Centre for Conflict Prevention, 2003, pp. 111-117.

leur disons : d'après ce que nous savons, ceci est exactement la manière dont les choses se sont déroulées >>1.

Si la semaine est consacrée principalement aux bulletins d'informations, aux débats et aux sujets de société, les week-ends sont principalement consacrés à la programmation musicale. Le studio diffuse quantité d'informations sur des thèmes dits sérieux, mais la partie plaisir n'a pas été oubliée. David Wimhurst, porte-parole du département des Nations Unies pour la sauvegarde de la paix, expliquait peu de temps avant le lancement de Radio Okapi que << en Afrique, tout le monde écoute la radio. Le Congolais aime la bonne musique. Ils sont d'excellents musiciens. Nous allons créer notre radio de sorte que ce soit une radio écoutable, attractive à l 'oreille. Pas une radio de propagande. Nous diffuserons des informations extrêmement utile, mais nous le ferons dans un contexte général qui rendra la station attractive >>2.

La radio, qui vient de fêter ses quatre années d'existence, cherche à représenter et à servir l'intérêt public, ce qu'elle fait en basant toutes ses activités dans la communauté, en recrutant la majorité de son personnel parmi les Congolais. Tout le travail de terrain est réalisé par les locaux et c'est uniquement aux tâches de gestion et de direction que l'on retrouve des Occidentaux. << Seuls les locaux passent à l 'antenne. Notre but est de puiser dans la population locale, pour y former des journalistes professionnels >> explique Christian Schmidt, chargé de programmes Okapi à la Fondation Hirondelle3.

Pourtant, le grand défi de radio Okapi, aujourd'hui, c'est la question de la pérennité : avec la tenue d'élections démocratiques prévues en juin 2006, le mandat de la Monuc devrait s'achever en septembre 2006 et avec lui, les fonds pour le fonctionnement de la radio Okapi. Aujourd'hui, la direction de la radio Okapi s'emploie à mettre en place le mécanisme pour passer d'une <<radio de crise en une radio nationale d'un Etat démocratique>>, fonctionnant sur des revenus propres, issus notamment de l'ouverture des ondes aux annonceurs. Mais il faut bien se rendre à l'évidence : l'économie locale n'est pas en mesure de faire tourner cette `super-radio' congolaise. Il ne fait aucun doute que, sans financement extérieur, radio Okapi devra diminuer soit son temps d'antenne, soit sa couverture, si elle ne veut pas sacrifier la qualité de sa programmation. L'avenir de radio Okapi ? Un grand point d'interrogation.

1 http://real.sri.ch/ramgem/fh/okapi/swissmix.rm, reportage radiophonique de la Radio Suisse Internationale.

2 HOWARD R. et al., loc. cit. p. 115.

3 Entretien téléphonique du 07 septembre 05.

Feuilleton radiophonique New Home, New Life (Afghanistan)

New Home, New Life est un feuilleton radio créé en 1994 pour l'Afghanistan par le Afghan Education Project de la BBC World Service. Produit sur place, il est diffusé par la BBC en pashto et en perse, les deux langues principales du pays. A vocation éducative, l'émission est construite sous forme de fiction mettant en scène les habitants de trois villages imaginaires. New Home, New Life est diffusé trois fois par semaine et aborde des thèmes tels que la santé, les soins des enfants, la résolution des conflits, les mines anti-personnel, l'illettrisme, la situation de la femme ou encore la culture d'opium. Ces questions sont, en Afghanistan, tout aussi importantes que quotidiennes. Shirazuddin Siddiqui, directeur d'AEP, explique qu' << au départ, en 1994, il s'agissait de fournir des informations qui leur permettraient de gérer les difficultés de la vie de tous les jours. Désormais, la mission a clairement changé : il s 'agit à présent d'aider les Afghans à reconstruire leur pays et leur vie >>1.

Résumé des épisodes 13-242

Jandad a été sérieusement blessé au pied par une mine. Alors qu'il est à la clinique, il a un besoin urgent d'une transfusion sanguine. Le groupe sanguin de Zaynab, sa mère, n'est pas compatible avec celui de Jandad et personne d'autre n'est prêt à offrir son sang pour le sauver, inventant des excuses pour ne pas le faire. Finalement, Karim se décide et grâce à son don de sang, il sauve la vie de Jandad. Plus tard, le docteur se voit forcé d'amputer le pied de Jandad.

Peu après que Gulalai ait été désignée comme soignant à la clinique, apparaît une épidémie de malaria dans le Village d'en Haut. Palwasha, la plus jeune fille d'Akbar et Zarmina, est la première affectée par la maladie après avoir été piquée par un moustique dans la maison de Zaynab. Nek Mohammed en tire une leçon et décide de fixer des moustiquaires aux fenêtres de sa maison pour les empêcher de leur transmettre la maladie.

Intervention de Lakhdar Brahimi3, représentant spécial des Nations Unies pour l'Afghanistan :

Mr. Brahimi, qui joue son propre rôle, répond à une fillette : << Mon voeu est qu 'il y ait des écoles pour filles et garçons dans chaque village de ce pays. Car il est clair que la pauvreté et la maladie peuvent être éliminées grâce à l 'éducation des filles et des femmes. Il est essentiel que chacun se sente responsable de l 'éducation des filles. Les menaces sécuritaires envers les écoles de filles perturbent énormément et je continuerai de parler de cela au monde >>.

Pourquoi avoir choisi un médium tel que le feuilleton radio ? Ancré dans des situations similaires à celles de la vie réelle, il résonne comme authentique à l'oreille des communautés rurales et urbaines. L'approche des problèmes humains, des dilemmes et surtout la recherche de solutions par le dialogue, tout cela fait partie de ce genre de médium. Dès lors, le feuilleton radio s'adapte parfaitement aux messages éducatifs, puisant dans l'expérience présente et passée de la population et proposant des solutions pour l'avenir. De plus, c'est une source de divertissement

1 Vidéo : http://www.bbc.co.uk/worldservice/trust/projectsindepth/story/2003/09/030904_aep.shtml Interview vidéo de Shirazuddin Siddiqui, directeur de Afghan Education Programm. Remarque : propos traduits par l'auteur.

2 http://www.unesco.org/education/educprog/lwf/doc/portfolio/case3.htm

3 http://www.bbc.co.uk/pressoffice/pressreleases/stories/2003/08 august/03/soap un.shtml Lakhdar Brahimi a fait des apparitions dans trois épisodes de `New Home, New Life >>, en juillet- août 2003.

dans un pays où tout amusement avait été banni jusqu'il y a peu. Enfin, c'est d'une importance primordiale, le feuilleton radio permet aux auditeurs de s'identifier aux acteurs et de s'approprier leurs comportements positifs face aux problèmes rencontrés.

Très vite, le projet s'est étendu : puisqu'il s'avérait parfois difficile d'équilibrer la fiction et les conseils pratiques, le programme a dès lors été divisé. D'une part le feuilleton, d'autre part, une section de << renforcement >> comprenant des conseils, des interviews servant de complément à la fiction. Plus innovantes, des chansons portant sur les thèmes du feuilleton ont commencé à être diffusées régulièrement par les services pashto et perse de la BBC. Enfin, des études d'impact sur le terrain sont réalisées régulièrement par l'équipe de renforcement et les résultats de ces enquêtes sont publiés dans un magazine et une bande dessinée mensuelle. L'équipe << renforcement >> crée de temps en temps une édition spéciale, consacrant entièrement une B.D. à un thème abordé dans New Home, New Life.

Le programme connaît un impact et un succès énormes après de la population afghane. Kofi Annan, dans une lettre écrite à l'occasion des 10 ans du lancement du programme, déclarait : << Au cours de la guerre, alors que les possibilités de communication étaient rares, New Home, New Life a aidé les Afghans à rester en contact avec leurs frères et soeurs à travers le pays. Depuis la signature des accords de Bonn, l'émission a joué un rôle important en encourageant les Afghans non seulement à s 'informer, mais également à s 'engager dans les aspects clés des efforts de rétablissement et de réconciliation dans le pays >>1.

Et si le show a résisté au régime des Talibans, c'est parce qu'à leur arrivée au pouvoir, en 1996, son succès était déjà très large. Pourtant, le régime autoritaire avait tenté de censurer les voix féminines de la série. La réponse de Mr. Siddiqui avait été simple : << J'ai dit : pour que nos histoires soient réalistes, il nous faut des hommes, des femmes et des enfants. S'il n'y a pas de femme dans un village, ce n 'est pas un village, c 'est aussi simple que cela >>. Gordon Adam, directeur du service en pashto, croit savoir pourquoi cet argument a été accepté : << Bien sûr, ils l 'écoutaient tous [le programme]. C 'est facile de prendre les Talibans pour un tas de fous, un groupe monolithique, mais en réalité la plupart sont des gens ordinaires, qui essaient juste de réussir leur vie. Eux aussi veulent du divertissement. Et bien que notre agenda était pro-femmes, ils étaient heureux de pouvoir nous écouter >>2.

1ANNAN, K., Kabul, 30 avril 2004 http://www.bbc.co.uk/worldservice/trust/docs/bbcafghan2004.pdf

2 Auteur Inconnu, A long way from Ambridge, in : << The Guardian >>, jeudi 23 octobre 2001, disponible sur: http://www.guardian.co.uk/waronterror/story/0,1361,579231,00.html

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci