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Quelle législation foncière, comme outil de cohésion sociale et de développement économique, adaptée aux réalités socio-culturelles du Burkina?

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par W. Paul DABONE
Ecole Nationale des Régies Financières du Burkina - Inspecteur des Impôts 2008
  

Disponible en mode multipage

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Ministère de l'Economie et des Finances BURKINA FASO

Secrétariat Général Unité - Progrès - Justice

Ecole Nationale des Régies financières Année académique 2007 - 2008

Direction des Etudes et des Stages

Pour l'obtention du diplôme du cycle A de l'Ecole Nationale des Régies financières

Présenté et soutenu publiquement par :
Paul W. DABONE
Option : Fiscalité

Directeur de Mémoire

Hassane OUEDRAOGO

Inspecteur des Impôts, Receveur des Domaines et de la Publicité Foncière Mars 2008 de BOGODOGO

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DEDICACE

A Papa,

A Maman,

A mes frères défunts,

A vous qui êtes si proches de nous aujourd'hui, par votre douloureuse absence.

Loin de nos yeux, si proche de nos coeurs que jamais la mort ne pourra vous faire oublier !

Morts d'hier, toujours vivants en nous aujourd'hui ! Oh mort, où est donc ta victoire ?

Merci chers aimés, d'habiter chacun de nous vivants, vous que nous ne pouvions si abondamment partager.

Morts d'hier, toujours vivants en nous aujourd'hui !

Reposez dans la paix du Vainqueur de la Mort, et veillez sur nous,

Qui ne vous oublierons jamais !

Paul DABONE

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AVERTISSEMENT

Ce mémoire a été réalisé en vue de l'obtention du diplôme du cycle A de l'Ecole Nationale des Régies Financières (ENAREF). Il a été rédigé sous la supervision de mon Directeur de Mémoire et avec le concours de plusieurs personnes ressources. Il constitue cependant le fruit d'un

travail personnel et comporte des opinions personnelles qui ne sauraient nullement engager l'ENAREF, mon Directeur de Mémoire ou toutes autres personnes.

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SOMMAIRE

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : ETUDE SOMMAIRE DES LEGISLATIONS FONCIERES

APPLIQUEES AU BURKINA FASO

CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE

CHAPITRE2 : LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE

CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE DU BURKINA

CONCLUSION PARTIELLE
DEUXIEME PARTIE : PROPOSITION DE REFORME

CHAPITRE1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE REFORME EN COURS : LA

POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE COHESION

SOCIO-CULTURELLE ?

CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE

DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?

CONCLUSION GENERALE

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ABREVIATIONS

A.N : Assemblée Nationale

A.N.T.R : Agence Nationale des Terres Rurales

A.O.F : Afrique Occidentale Française

C.F.R : Commission Foncière Rurale

C.N.S.F.M.R : Comité Nationale pour la Sécurisation Foncière en Milieu Rural

C.V.D : Comité Villageois de Développement

D.F.C.T : Domaine Foncier des Collectivités Territoriales

D.F.E : Domaine Foncier de l'Etat

D.F.N : Domaine Foncier National

I.N.S.D : Institut National de la Statistique et de la Démographie

M.A.H.R.H : Ministère de l'Agriculture, de l'Hydraulique et des Ressources

Halieutiques

P.N.G.T : Programme National de Gestion des Terroirs

P.N.S.F.M.R : Politique Nationale de Sécurisation Foncière en Milieu Rurale

R.A.F : Réorganisation Agraire et Foncière

R.D.P : Révolution Démocratique et Populaire

INTRODUCTION GENERALE

« Nous n'héritons pas de la terre de nos parents, nous l'empruntons à nos enfants. » L'étude que nous voulons mener repose sur cette assertion d'Antoine de

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Saint-Exupéry qui pose par elle-même le problème de l'usage et de la gestion pérenne de la terre, par la définition des droits dont elle peut faire l'objet, de la modalité de leur constatation et de leur transmission.

Quelle législation foncière le Burkina Faso pourrait-il mettre en oeuvre, afin d'assurer le développement économique auquel il aspire, tout en préservant l'ensemble de cette ressource unique et non proliférante que constitue la terre, pour les générations futures ? Quelle législation foncière le Burkina Faso pourrait-il mettre en oeuvre, qui définit un régime juridique unique et constitue par ce fait, un outil de cohésion sociale autour d'objectifs de développement communs, parce que conforme aux facteurs socio - culturels du pays ? Jeanne-Marie TRAORE affirme, parlant des problèmes d'aménagement urbain en Haute Volta, que « l'un des inconvénients relatifs aux modes d'aménagement employés par l'Etat provient du fait que ces modes sont restés fondamentalement basés sur des principes d'aménagement européens, français en particulier, la plupart des concepteurs étant toujours influencés par le mode de penser occidental. Les textes législatifs et réglementaires en matière d'aménagement urbain ont été également conçus à partir de textes français, sans tenir réellement compte des modes de vie de la société concernée... »1

Nous nous demandons, si l'une des difficultés des législations foncières appliquées jusque-là au Burkina Faso ne résiderait pas dans le fait que ces textes (législatifs et réglementaires), ont été influencés par une conception européenne de gestion foncière, fruit d'un héritage colonial que leurs concepteurs ont intégré dans leur mode d'approche, de conception et de traitement de la question foncière. Dans la même logique que le colonisateur, les régimes politiques qui lui ont succédé n'ontils pas mis en place des législations foncières, en n'intégrant pas suffisamment les paramètres socio - culturels ?

Notre conviction est qu'il n'est pas possible de mettre en place une politique foncière durable et qui organise la gestion et l'appropriation du domaine foncier national sans tenir compte de ces paramètres socio - culturels. Nous pensons enfin que la législation foncière devrait prendre en compte les caractéristiques actuelles de la société à laquelle elle veut s'appliquer afin de ne pas être caduque ou dépassée, dès sa mise en place. « Au terme du recensement général de la population effectué

1 Espaces disputés en Afrique noire ; éditions karthala, Paris 1986, page 33

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au cours de l'année 2006, le Burkina Faso a une population totale estimée à treize millions trois cent dix mille (13 310 000) habitants, dont environ 70% ont moins de 35 ans, tandis que le groupe compris entre 15 et 34 ans représente 30% de cette population. Quant aux moins de 20 ans, ils représentent plus de 50%. Ce tableau nous montre que la population burkinabè est essentiellement jeune1. » Une législation foncière n'intégrant pas ces paramètres ne sera-t-elle pas source de conflits sociaux dans le futur ?

Nous voulons essayer d'apporter notre modeste contribution au débat qui a cours actuellement partout en Afrique de l'Ouest sur la question du choix d'une législation foncière qui ne favorise pas les conflits sociaux, mais constitue plutôt un outil de développement économique, en traitant le thème suivant : quelle législation foncière comme outil de cohésion sociale et de développement économique, adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina Faso ? Ce choix a été motivé par deux raisons essentielles que voici :

- l'intérêt que nous avons porté à ce sujet nous a conduit à effectuer des recherches sur les études qui en ont déjà traité. Au fil de nos lectures nous avons réalisé que le sujet était non seulement d'actualité mais n'était toujours pas épuisé ;

- le Burkina Faso a entrepris une série de reformes des textes législatifs et réglementaires qui traitent de la question foncière. Ces reformes étant toujours en cours, nous espérons pouvoir apporter notre modeste opinion aux débats qui se mènent actuellement.

Afin de pouvoir aborder ce sujet, il nous paraît indispensable de donner d`abord une définition de la « législation foncière ».

Selon le dictionnaire `'le petit Larousse illustré» la législation est un ensemble de lois qui traitent d'une matière donnée. La législation foncière peut donc être définie comme l'ensemble des règles juridiques applicables aux immeubles d'un pays donné, qui détermine les différents droits dont ils peuvent faire l'objet, ainsi que les modalités de leur constatation, de leur exercice et de leur protection.

Afin de proposer une législation foncière conforme aux réalités socio - culturelles du Burkina, nous articulerons notre étude en deux (2) parties.

Dans une première partie, nous procèderons à une analyse sommaire des législations foncières qui se sont succédées au Burkina Faso, de la période coloniale

1 Journal « Le Pays » n° 3956 du mardi 18 septembre 2007, page 12.

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à nos jours. Cette analyse nous permettra de relever les caractéristiques des différents régimes juridiques dont la terre a fait l'objet ainsi que les différents types de droits véhiculés par chacun de ces régimes.

Dans la deuxième partie nous essayerons de faire une proposition de reforme qui intègre les réalités socio - culturelles et les objectifs de développement économiques du Burkina Faso.

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PREMIERE PARTIE :
ETUDE SOMMAIRE DES LEGISLATIONS
FONCIERES APPLIQUEES AU BURKINA FASO

 

Plusieurs études ont été menées sur les législations foncières appliquées au Burkina. Nous n'avons pas la prétention d'apporter ici, des éléments vraiment nouveaux mais de relever, dans le cadre de l'approche méthodologique que nous avons adopté, les caractéristiques des différentes législations foncières qui ont administré la terre avant et depuis la période coloniale jusqu'à maintenant. Pour ce faire nous examinerons la législation foncière coutumière (chapitre 1) et règlementaire (chapitre 2). Un troisième chapitre sera consacré à l'analyse du statut juridique de la terre et permettra de relever les points de divergence et de convergence des différentes législations foncières afin de vérifier s'il est envisageable d'instituer une législation foncière unifiée.

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CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE

Avant la pénétration coloniale, les terres de l'actuel Burkina Faso étaient occupées par plusieurs groupes ethniques. Etabli en clan ou en famille, chaque groupe possédait des coutumes et des pratiques foncières différentes de celles des autres groupes. Ces terres étaient donc régies par autant de régimes fonciers qu'il existait de groupes sociaux. Malgré cette diversité de pratiques les régimes fonciers coutumiers présentent des similitudes permettant de les étudier ensemble.

SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER

COUTUMIER

Les caractéristiques du régime foncier coutumier comportent deux notions. Il s'agit de la personne habilitée à gérer la terre coutumière, et de la nature des droits coutumiers.

I - LA PERSONNE HABILITEE A GERER LA TERRE COUTUMIERE : LE CHEF

DE TERRE

L'administration des terres coutumières est assurée par un chef de terre. Celui-ci représente le premier occupant des lieux dont il est le descendant. Il a un double rôle : religieux et juridique.

- Son rôle religieux consiste à procéder aux offrandes sacrificielles nécessaires pour obtenir ou rétablir le droit d'user de la terre, au bénéfice des demandeurs.

- Son rôle juridique consiste à octroyer les droits d'usage pouvant être exercés sur la terre, et à régler les litiges fonciers.

II - LA NATURE DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS

Le régime foncier coutumier reconnaît un droit de propriété collectif et des droits d'usage individuels.

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II-1 :LE DROIT DE PROPRIETE

II-1-1 : Le mode d'appropriation de la terre

L'appropriation de la terre se faisait par des actions non violentes ou violentes.

a) L'appropriation non violente des terres : elle se faisait de deux façons : le droit de hache et le droit de feu.

- Le droit de hache : C'est le droit reconnu aux ancêtres d'un groupe ethnique d'avoir été les premiers à procéder à l'aménagement de la terre, par la coupe des arbres, et donc par l'usage de la hache.

- Le droit de feu : il est conféré à un groupe ethnique par le fait que ses ancêtres aient été les premiers à procéder à l'aménagement de la terre, par le défrichage de celle-ci par le feu.

b) L'appropriation violente de la terre : l'appropriation se faisait dans ce cas par la force. Elle peut être considérée aussi comme `'un trophée de guerre.» Elle consiste en l'annexion par les vainqueurs d'une guerre, de terres jusqu'alors occupées par les vaincus.

II-1-2 - La constitution du droit de propriété

Le droit de propriété est certes établi par le premier coup de hache ou le feu, mais il n'est tacitement reconnu par l'ensemble des communautés que lorsque celle qui s'est installée et a établi sa présence par la marque (de la hache ou du feu), occupe effectivement la terre pendant au moins trois générations. « Les territoires ainsi délimités et sur lesquels chaque communauté vit et exerce ses activités de subsistance, deviennent des propriétés collectives surtout à partir de la deuxième génération après celle qui les avait `'approprié» par le fait de l'occupation.»1

Deux conditions doivent donc être réunies pour que le droit de propriété soit reconnu par l'ensemble des communautés :

- l'occupation effective de l'espace ;

- l'occupation par trois générations consécutives au moins.

1 `'Espaces disputés en Afrique noire», Edition karthala, Paris 1986, page 43

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II-1-3- La nature du droit de propriété

Le droit de propriété est collectif et inaliénable.

- Le droit de propriété est collectif parce que la terre coutumière appartient à l'ensemble de la communauté et que les individus ne peuvent disposer du droit de propriété.

- Le droit de propriété est inaliénable parce que les communautés africaines considèrent la terre comme un don des ancêtres et des forces surnaturels et non comme un bien transmissible. C'est cette considération qui explique les cultes à la terre et aux divinités, conduits par le chef de terre.

II-2 : LE DROIT D'USAGE INDIVIDUEL

Le droit d'usage est soit direct, soit conféré

- Le droit d'usage direct est celui exercé par les descendants, membres authentiques de la communauté. Il se transmet de père en fils et ne peut être prêté aux tiers qu'avec l'accord du chef de la communauté.1Il est permanent, transmissible et en principe imprescriptible

- Le droit d'usage conféré. C'est le droit d'usage octroyé aux personnes étrangères. Dans ce cas, la terre leur est concédée sous forme de prêt conditionné ou sans condition. Dans le premier cas, la terre est concédée moyennant une redevance en nature (récolte, bétail, volailles... )2 . Dans le second cas, la terre est concédée au nom de la solidarité et de l'assistance mutuelle. Le droit d'usage conféré est permanent, transmissible mais précaire et révocable à tout moment.

III - LES COMPOSANTES DU REGIME FONCIER COUTUMIER

L'examen des différents rôles du chef de terre permet d'identifier deux composantes au régime foncier coutumier. Pour rappel, le chef de terre exerce principalement deux (2) rôles : religieux et juridique.

1 `'Espaces disputés en Afrique noire» éditions Karthala, Paris 1986, page 44

2 Idem que la note précédente

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Ces deux rôles représentent les deux aspects du régime foncier coutumier, et partant, les deux aspects de la terre telle que perçue par ce régime.

- le rôle religieux : il vient du fait que la terre coutumière est une entité sacrée. C'est de cette sacralité que viennent les différents cultes et rites sacrificiels conduits par le chef de terre.

- le rôle juridique : li vient du fait que les différents usages de la terre par la communauté peuvent occasionner des conflits que le chef de terre doit régler. Celui- ci intervient ainsi pour accorder le droit d'usage, veiller au respect des modalités de son exercice et régler les conflits fonciers.

Le double rôle du chef de terre est la résultante des deux aspects du régime foncier coutumier : une législation foncière, mais aussi une pratique religieuse.

Les deux composantes du régime foncier coutumier permettent aussi de comprendre les différents droits qui peuvent être exercés sur la terre et qui sont règlementés par la législation foncière coutumière.

IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE
IV-1- LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE

Le premier objectif est la préservation de la propriété collective pour les générations futures. Les autres objectifs sont :

- assurer et garantir la cohésion de la communauté en faisant de la terre un bien commun;

- pérenniser l'existence de la communauté en évitant le risque de dispersement des membres que pourrait causer la dépossession de ses terres.

Les modalités d'exercice du droit de propriété constituent l'élément principal de différenciation des législations foncières qui se sont côtoyées au Burkina. Ces modalités découlent du concept d'appropriation tel que perçu par chacune d'elle.

IV-2- LE CONCEPT D'APPROPRIATION

L'examen des différents modes d'appropriation de la terre et d'exercice du droit de propriété permet de comprendre la conception coutumière de la notion de propriété et partant du concept d'appropriation.

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- La constitution du droit de propriété : elle provient d'une action collective. C'est en effet l'acte posé par un groupe de personnes, ou par une personne mais pour le compte d'un groupe de personnes qui est reconnu par les autres. Ainsi, l'appropriation aussi bien violente que non violente se fait par ou pour plusieurs personnes. Par ailleurs, quel que soit le mode de constitution du droit de propriété (par des actions pacifiques ou violentes), les populations africaines ne perçoivent pas ce droit comme la résultante d'actions humaines uniquement. Une force supérieure invisible est toujours intervenue pour aider la communauté à prendre possession de l'espace terrestre. Voila pourquoi le chef de terre exerce un pouvoir qui ne lui est pas contesté. D'abord parce qu'il tire sa légitimité de sa filiation avec les ancêtres. Ensuite parce qu'il exerce un rôle mettant obligatoirement en présence, au moins deux entités : lui-même en tant que vivant et celui de qui il tire sa légitimité, c'est-à-dire son ancêtre. Les droits exercés sur la terre sont donc originellement collectifs parce que acquis collectivement (directement ou par héritage) et exercés pour le compte d'une communauté. Un chef nigérien exprime avec justesse cette conception lorsqu'il affirme : « à mon sens la terre appartient à une grande famille dont beaucoup de membres sont morts, quelques uns sont vivants et dont le plus grand nombre est encore à naître... »1

- L'exercice du droit de propriété : le caractère collectif de la propriété coutumière détermine le principe fondamental du droit de propriété coutumier : l'inaliénabilité de la terre. Cette inaliénabilité pourrait tirer son explication dans le mode de constitution du droit de propriété et dans la perception que les populations africaines ont de la terre.

L'article 544 du code civil définit le droit de propriété comme « le droit de jouir et de disposer des choses de la manière la plus absolue, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par les lois et par les règlements. » Le droit de propriété se présente ainsi comme le droit le plus absolu qui soit sur les biens. Il est exercé par le « propriétaire » du bien. La condition essentielle de l'exercice du droit de propriété est donc d'être le propriétaire du bien. Les communautés africaines considèrent les terres régies par le régime foncier coutumier comme la propriété exclusive d'êtres non vivants ou invisibles (ancêtres et autres êtres surnaturels). Les vivants exercent

1 DARGA Basile, « la problématique de la sécurité foncière au Burkina Faso : constat et perspective. », mémoire de fin d'études, ENAREF mars 1998, page 9.

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sur elles, uniquement un droit d'usage. Le droit d'usage n'étant pas le droit de propriété stricto sensu, les vivants ne peuvent transmettre que ce qu'ils possèdent.

Par ailleurs, la conception africaine du foncier place le caractère sacré de la terre avant tout usage et par conséquent, avant tout droit qui peut être constitué sur elle. Léopold S. SENGHOR la décrira en ces termes : « la première de nos entraves, c'est le titre qui rend la propriété respectable ; c'est la défense faite à l'homme de toucher à ce qui appartient à un autre, sans le consentement du propriétaire... Mais les hommes ont voulu posséder exclusivement ce qu'ils avoient reçu pour en jouir en commun. Il a bien fallu dès lors que l'art inventât des limites, et que la justice les rendît sacrées. Voilà le vrai fondement de la société, et l'objet comme la source de toutes les lois... Leur esprit est de consacrer la propriété : il faut donc que la propriété leur soit antérieure. Mais la propriété elle-même n'a pu être que l'effet d'une société quelconque. D'où il suit qu'il y a dans le monde un principe secret, plus ancien que les lois, indépendant du pacte social ... »1

Selon le dictionnaire le petit Larousse illustré, l'appropriation désigne l'action d'approprier c'est-à-dire de rendre propre à un usage, d'en faire sa propriété2.

Et pour Etienne le Roy, pour passer de l'idée d'appropriation à la propriété privée, il faut que l'on passe d'une conception sacrale de la terre à une conception mercantile3.

C'est dire que tant que l'aspect sacré de la terre existe, l'appropriation telle que définie par la législation foncière moderne n'existe pas dans celle coutumière. Etienne le Roy définira pour ce faire, l'appropriation dans la conception africaine traditionnelle comme « l'affectation de l'espace à un usage »4. Léopold S. SENGHOR abondera dans le même sens lorsqu'il affirmera lors d'une conférence à Strasbourg en 1964 qu'en Afrique noire traditionnelle, la terre ne peut être l'objet de propriété : elle est seulement l'objet d'usufruit.

L'appropriation, pour la législation foncière coutumière, consiste donc à affecter un espace à un usage.

1 `' L'appropriation de la terre en Afrique noire» Editions KARTHALA, Paris, 1991, page 28

2 Le petit Larousse illustré, Paris, 1968, page 78

3 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire `', Editions Karthala, Paris, 1983, page 30.

4 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire `', Editions Karthala, Paris, 1983, page 30

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SECTION 2 - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE
COUTUMIERE

I - LE RESPECT DES PRINCIPES FONCIERS COUTUMIERS

La législation foncière coutumière a bravé toutes les tentatives de la supprimer, de la période coloniale à nos jours. La dualité des systèmes de gestion des terres s'est imposée à tous les régimes politiques. Même après la suppression légale des droits fonciers coutumiers, l'ensemble de la population burkinabè, décideurs politiques et citoyens ordinaires continuent de faire recours aux autorités coutumières dès qu'ils envisagent acquérir une terre aussi bien pour l'usage communautaire (pour les autorités communales par exemple) que pour l'usage individuel. Cette situation constitue une force de la législation foncière coutumière. En effet, si personne ne permettait aux responsables coutumiers d'exercer leur autorité dans la gestion des terres burkinabè, la législation foncière coutumière s'éteindrait d'elle-même. Mais tout le monde a recours à l'autorité coutumière pour obtenir la terre. «...en effet, dans la pratique, tout le monde y compris ceux-là même, qui sont chargés de concevoir et de faire appliquer la loi se réfèrent aux règles traditionnelles lorsqu'il s'agit pour eux d'accéder à la terre en milieu rural. Le schéma est le même et il consiste à s'adresser, directement ou par l'intermédiaire d'une tierce personne, aux `'propriétaires terriens `'. Ainsi, tous ceux qui s'intéressent au foncier, y compris les intellectuels, accèdent aux conditions à remplir, notamment les offrandes aux ancêtres pour implorer leur pardon et leur protection dans l'utilisation des terres concédées. »1

II - L'OCCUPATION OBLIGATOIRE DE L'ESPACE, UN PREALABLE A
L'ACQUISITION DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS

Les conditions d'obtention et d'exercice de tout droit sur la terre constituent de notre point de vue une seconde force de la législation foncière coutumière. En effet,

1 moussaouedraogo@hotmail.com `' Le foncier dans les politiques de développement au Burkina Faso : enjeux et stratégies» OUEDRAOGO Moussa, page 13.

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ni le droit de propriété, ni celui d'usage ne se conçoit dans le régime foncier coutumier sans une occupation effective de l'espace.

A l'heure des spéculations foncières, effets induits de l'approche règlementaire de la question foncière qui ne considère la terre que selon sa valeur économique, l'occupation effective de l'espace comme condition obligatoire de détention de tout droit sur la terre apparaît comme une véritable force de la législation foncière coutumière. Surtout pour un pays comme le Burkina qui tire l'essentiel de ses ressources de la terre exploitée. « L'appropriation, à l'origine ne se conçoit pas sans une mise en valeur, c'est-à-dire sans que les deux conditions suivantes soient remplies : vivre sur la terre et vivre de la terre occupée. Les terres cultivées et les parcours de chasse étaient donc considérés comme occupés par une collectivité et donc appropriés par elle (...) Il faut donc considérer que le `'premier coup de hache» qui confère le droit de propriété, n'était qu'un symbole à travers lequel se manifestaient toutes les formes d'activités qu'exerçait une communauté sur un territoire, et qui lui procuraient ses moyens de subsistances... »1

III - L'EXCEPTION AU PRINCIPE D'INALIENABILITE DU DROIT DE PROPRIETE

L'évolution de certains principes coutumiers tels que celui de l'inaliénabilité du droit d'usage est une force de la législation foncière coutumière. La pratique qui était peu courante à l'époque coloniale a pris de l'ampleur au fil de l'évolution des sociétés africaines. « Les donations vraies se conçoivent comme une forme de contournement de la règle de l'inaliénabilité de la terre en coutume traditionnelle. Elles se faisaient contre des paiements en nature, et plus tard en nature et en espèce. Elles ont conféré les droits de propriété aux bénéficiaires et ces droits n'étaient pas révocables, mais se transmettaient de génération en génération. »2

Cette évolution fait la preuve contraire des appréhensions du colonisateur français, en montrant que le système foncier coutumier africain, comme toute structure sociale évolue et se modèle au gré des exigences sociales et économiques du moment. La `'donation» est un mode de transmission des droits fonciers coutumiers, qui ressemble à s'y méprendre, à la vente.

1 `'Espaces disputés en Afrique noire», éditions Karthala, Paris, 1986, page 42.

2 `'Espace disputé en Afrique noire», éditions Karthala, Paris 1986, page 45.

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SECTION 3 - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE

COUTUMIERE

La législation foncière coutumière comporte entre autre, les insuffisances suivantes qu'il nous paraît important de souligner.

I - L'IMPOSSIBILITE D'ETABLISSEMENT DE LA PREUVE DE DROIT

La législation foncière coutumière repose sur l'oralité. Ni le droit de propriété, ni celui d'usage ne sont définis dans leur portée et leur consistance spatiale par un document. Les limites des espaces sur lesquels portent les droits de propriété et de jouissance des communautés et des personnes sont difficiles à établir. Les conflits intercommunautaires et entre individus vivants dans une même communauté pour la possession du droit d'usage sont inévitables, surtout avec l'accroissement démographique et la raréfaction des espaces libres.

II - LA PRECARITE DES DROITS ACCORDES AUX PARTICULIERS

Le droit d'usage qui est l'unique droit dont peuvent disposer les particuliers devient encore plus précaire avec le manque de terres disponibles. Les terres accordées aux étrangers qui sont faciles à reprendre peuvent être retirées à tout moment sans explication. La première conséquence de cette situation est le frein à l'investissement provenant de la crainte d'investir sur une terre sans avoir l'assurance de la garder longtemps.

En plus l'attribution des terres n'obéit pas toujours au besoin de la communauté mais à d'autres critères que les difficultés économiques peuvent imposer. Les différentes études menées sur la gestion du foncier par la coutume indiquent que les responsables coutumiers accordent quelques fois les terres à certaines personnes sur la base d'affinités qu'elles ont avec elles. Les membres de la communauté n'échappant pas à ce mode de partage, les terres fertiles ne sont pas toujours détenues par les bras valides.

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III - LA PLURALITE DES REGIMES COUTUMIERS, UN FACTEUR

D'EFFRITEMENT DE L'UNITE NATIONALE

Ainsi que nous le disions précédemment, il existe autant de régimes fonciers que de communautés ethniques au Burkina. Cette pluralité des régimes coutumiers est un frein à la consolidation de l'unité nationale. En effet, bien qu'elles présentent d'importantes similitudes permettant de les regrouper, les pratiques foncières coutumières sont quand même un peu différentes d'une communauté à une autre. La nature du droit d'usage ainsi que sa précarité et sa transmissibilité sont fonction de l'appartenance ou non à la communauté détentrice des terres. Les notions `'d'autochtone» et `'d'étranger» évoluent très peu. On ne change pas d'ethnie pour avoir séjourné longtemps dans une autre communauté ethnique. L'étranger selon la distinction coutumière, ce n'est pas seulement celui qui vient d'un autre pays ; c'est aussi celui qui ne vient pas du même village. Vu sous cet angle, le régime foncier coutumier, détenteur exclusif du droit de propriété coutumier, fait des burkinabè non originaires du même village, d'éternels étrangers sur une partie du sol de la patrie à laquelle ils appartiennent. Et au sein de laquelle ils doivent être tous égaux en droit1.

IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE, UNE AFFAIRE D'HOMMES

Plus de la moitié de la population burkinabè est composée de femmes. Mais cette frange de la population est défavorisée par la gestion foncière des hommes. A l'heure de l'institutionnalisation de l'égalité des sexes partout dans le monde, les règles coutumières qui sont discriminatoires à l'égard des femmes finiront par être tôt ou tard des facteurs de troubles sociaux.

Le régime foncier coutumier a géré les terres du Burkina avant la

colonisation. Pendant et après la période coloniale, les terres burkinabè ont été administrées par le régime foncier règlementaire qui a tantôt accordé une place à la législation foncière coutumière, tantôt décidé de détenir la totalité des prérogatives de gestion foncière. Après avoir présenté le régime foncier coutumier, il convient d'étudier la législation foncière réglementaire.

1 Constitution du Burkina Faso, article 1

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CHAPITRE 2 : LA LEGISLATION FONCIERE
REGLEMENTAIRE

La législation foncière règlementaire a été introduite dans les colonies d'Afrique noire par le colonisateur français. Après l'accession à l'indépendance, les législations foncières instituées par les régimes politiques post-coloniaux ont été inspirées de celle coloniale. Ensuite, la Réorganisation Agraire et Foncière (RAF) a introduit une nouvelle approche de la gestion foncière. Les différentes autorités politiques qui ont présidé aux destinées du pays, de la Haute Volta au Burkina Faso, ont ainsi institué à tour de rôle, la législation foncière qui leur semblait la mieux adaptée aux objectifs de la politique de développement qu'elles mettaient en place.

Nous présenterons l'évolution (section 1) et les caractéristiques (section 2) de la législation foncière réglementaire. Ensuite nous relèverons quelques unes de ses forces et faiblesses (section 3).

SECTION 1- L'EVOLUTION DE LA LEGISLATION FONCIERE

REGLEM ENTAI RE
I - LE REGIME FONCIER COLONIAL

Le colonisateur français a introduit dans les colonies de l'Afrique Occidentale Française (A.O.F), la notion de propriété privée des terres. Il a institué un régime foncier dont les principes proviennent du droit civil et des lois françaises et administré les terres africaines sur la base de la distinction « domaine public - domaine privé ».

I-1 - LA DISTINCTION DOMAINE PUBLIC - DOMAINE PRIVE

I-1-1- Le domaine public

C'est le décret du 23 octobre 1904 qui institue le domaine public en énumérant les biens qui en font partie.

Le domaine public comprend des biens qui, en raison de leur nature ou de leur destination, ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des personnes de droit privé.

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Ils sont donc grevés d'indisponibilité du fait de leur domanialité.1 Pour ce faire la législation leur a conféré les caractères leur permettant d'échapper aux différents modes d'appropriation privée des biens : ils sont inaliénables, imprescriptibles et insaisissables.

I- I-2 : Le domaine privé

Il est constitué de biens pouvant faire l'objet d'appropriation par des personnes physiques ou morales de droit privé. Il comprend les « terres vacantes et sans maître » 2 , mais aussi tous les autres biens pouvant faire l'objet d'appropriation privée.

L'importance de la distinction domaine public - domaine privé réside dans la nature des droits pouvant être acquis sur les biens appartenant à l'un ou l'autre domaine. En effet le colonisateur français a introduit avec ces notions, celle de propriété privée. Ainsi, à l'inverse des biens du domaine public qui ne peuvent faire l'objet d'appropriation par des particuliers, ceux du domaine privé peuvent être acquis en pleine propriété.

I-2- LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COLONIAL

Le régime foncier colonial est caractérisé par la personne habilitée à gérer les terres et par la nature des droits fonciers règlementaires.

I-2-1 - La personne habilitée à gérer les droits fonciers : le conservateur de la
propriété foncière

Les bureaux de la conservation sont gérés par des préposés qui portent le titre de « conservateur de la propriété foncière » et qui sont désignés par arrêté du Gouverneur général3. Ils sont chargés :

- de la suite à donner aux demandes d'immatriculation et de la formalité de l'immatriculation sur les livres fonciers ;

1 Décret du 23/1 0/1 904, article 1

2 Décret du 23/1 0/1 904, article 10

3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 9

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- de l'inscription, à la suite des titres fonciers et des copies de ces titres, des droits réels constitués sur les immeubles immatriculés ;

- de la conservation des actes et plans relatifs aux immeubles immatriculés et de la communication au public des renseignements contenus dans leurs archives et relatifs aux propriétés immatriculées.1

I-3 : LES DIFFERENTS DROITS DU REGIME FONCIER COLONIAL

Le régime foncier colonial reconnaît :

- a) Les droits réels immobiliers suivants : la propriété des biens immeubles, l'usufruit des mêmes biens, les droits d'usage et d'habitation, l'emphytéose, le droit de superficie, les servitudes et services fonciers, l'antichrèse, les privilèges et hypothèques ;

- b) Toutes les actions qui tendent à revendiquer ces mêmes droits. 2

I-4-LES MODES DE CONSTITUTION DES DROITS REELS IMMOBILIERS DU

REGIME FONCIER COLONIAL

Dans le but d'imposer sa conception des droits devant être exercés sur la terre, le colonisateur mettra en place le régime de l'immatriculation qui reconnaît uniquement les droits acquis selon le code civil, comme porteur d'effets juridiques et opposables aux tiers. Mais qui reconnaît cependant l'existence de prérogatives foncières aux autorités coutumières et l'existence de droits détenus en vertu de la coutume. Devant le peu d'adhésion des populations africaines à ce concept, il assouplira sa position en instituant successivement les régimes du titre foncier indigène et du livret foncier qui reconnaissaient les droits acquis selon le régime foncier coutumier comme ressemblant au droit de propriété civiliste et opposables aux tiers.

I-4-1 : Le régime de l'immatriculation

Il permet de désigner un terrain par un numéro au registre foncier. Il comporte une procédure et une formalité d'immatriculation.

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 10

2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 20

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La procédure d'immatriculation

Elle commence à l'initiative d'une personne détenant un droit réel immobilier et est conduite par le conservateur de la propriété foncière. Elle porte sur les fonds de terre bâtis ou non bâtis et se déroule selon les étapes suivantes :

1) La procédure d'immatriculation est enclenchée par une demande spéciale du propriétaire de l'immeuble. Après avoir clôturé l'immeuble, celui-ci établit une déclaration en langue française, signée et contenant :

- les informations sur son identité (nom, prénoms, qualités, domicile, état civil) et une élection de domicile dans une localité du ressort judiciaire où se trouve l'immeuble à immatriculer ; domicile auquel seront effectués, par la suite, toute notifications, significations et actes divers de procédure ...1

-la description de l'immeuble et de tous les investissements qui s'y trouvent ainsi que l'indication de sa valeur locative et vénale ;

- le détail des droits réels et des baux de plus de trois années afférents à l'immeuble avec mention de l'identité des ayants droits ;

- la réquisition au conservateur de la propriété foncière de procéder à l'immatriculation de l'immeuble décrit.2

A l'appui de sa déclaration (la réquisition), le requérrant dépose :

- tous les contrats et actes publics ou privés constitutifs des différents droits réels énumérés ou un état des transcriptions et inscriptions afférentes à l'immeuble ;

- un plan de l'immeuble à l'échelle, établi conformément aux instructions du service topographique ;

- une provision égale au montant présumé des frais de la procédure.3

2) Le conservateur vérifie la régularité de la réquisition avant de l'accepter. Il s'assure pour cela que les titres produits ou invoqués sont établis dans les formes prescrites par la législation applicable au propriétaire et à la propriété.

3) Le conservateur fait insérer un extrait de la réquisition au Journal Officiel (J.O) de la colonie. Cet avis d'insertion est affiché pendant trois (3) mois dans les

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 90

2 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 90

3 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 93

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lieux d'usage pour faire une large publicité afin de permettre aux éventuels détenteurs de droits portant sur l'immeuble à immatriculer de se faire connaître, et de préciser la nature, la valeur et l'étendue desdits droits : soit par voie d'opposition en cas de contestation sur l'existence ou l'étendue du droit de propriété du requérant ; ou par demande d'inscription en cas de prétentions à l'exercice d'un droit réel susceptible de figurer au titre à établir et non énumérés par le requérant dans sa déclaration. Ces déclarations sont faites oralement ou par écrit et reçues par le conservateur qui les transcrit dans un registre spécial.1 Elles doivent être faites pendant le délai d'affichage de l'avis d'insertion. Aucune opposition ou demande d'inscription n'est recevable après l'expiration de ce délai, sauf pour les cas de délais supplémentaires accordés spécialement aux absents.

4) Les droits fonciers coutumiers révélés sont purgés par voie amiable ou par voie d'exécution forcée. Si le registre spécial fait ressortir l'existence d'oppositions ou de demandes d'inscription, l'immatriculation de l'immeuble n'est accordée au requérant qu'après que celui-ci ait apporté la mainlevée de toutes les oppositions et demandes ou son acceptation des droits des personnes ayant formulé ces requêtes. Pendant la période d'affichage, un bornage contradictoire du terrain est fait avec établissement d'un procès-verbal qui indique exactement les limites de l'immeuble et qui est signé par le géomètre et tous les assistants lettrés.

5) A l'expiration du délai d'affichage et à la réception du procès verbal après le bornage, le conservateur vérifie encore la régularité de la réquisition et des titres, l'accomplissement de toutes les prescriptions et l'absence ou la levée de toutes les oppositions. Il procède ensuite à l'immatriculation de l'immeuble sur les livres fonciers.

La formalité d'immatriculation

Elle consiste à :

- l'inscription au registre des dépôts d'une mention constatant l'achèvement de la procédure ;

- l'établissement du titre foncier sur les livres fonciers ;

- la rédaction de bordereaux analytiques pour chacun des droits réels soumis à la publicité et reconnus au cours de la procédure ;

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 97

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- la mention sommaire de ces divers droits à la suite du titre foncier ;

- l'annulation des anciens titres de propriété remplacés par le titre foncier ;

- l'établissement d'une copie du titre foncier à remettre au propriétaire et de

certificats d'inscription à délivrer aux titulaires de droits réels susceptibles de

cession .1

La procédure et la formalité d'immatriculation aboutissent à la création du droit de propriété et des autres droits accessoires. Le droit de propriété est le plus absolu dont les personnes peuvent disposer sur un bien. Il est composé de trois éléments : l'abusus, l'usus et le fructus.

- L'abusus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'une chose, d'en `'abuser,» c'est-à-dire de disposer de la chose tel qu'il l'entend. C'est le caractère absolu du droit de propriété.

- L'usus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'user de la chose, c'est-à- dire d'en tirer utilité.

- Le fructus : c'est la faculté reconnue au propriétaire d'user de la chose et d'en tirer profit. Il englobe donc l'usus en ce sens qu'en plus d'user de la chose, la loi reconnaît au propriétaire la faculté de faire fructifier la chose.

Parmi ces trois éléments, l'usus est l'aspect contrôlé du droit de propriété, qui peut affaiblir ou anéantir ce droit. En effet la seule limite que la loi reconnaît au droit de propriété, c'est l'usage contraire à la loi.

LES CARACTERES DU DROIT DE PROPRIETE

Le droit de propriété comporte un caractère exclusif, absolu et perpétuel. - Exclusif, parce qu'il confère au propriétaire seul la faculté d'utiliser et de jouir de la chose.

- Absolu, parce qu'il confère au propriétaire la totalité de la faculté de faire de la chose ce qu'il veut.

- Perpétuel, parce que le droit reconnu au propriétaire ne s'éteint pas du fait de sa non utilisation par celui-ci. La prescription extinctive n'atteint pas le droit du propriétaire. En plus, le caractère perpétuel vient du fait que le droit de propriété peut être transmis intégralement à une autre personne.

1 Décret du 26/07/1 932, article 119.

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La législation foncière coloniale confère donc sur la terre un droit personnel, absolu et perpétuel.

I-4-2 : Le régime du titre foncier indigène

C'est un décret du 8 octobre 1925 qui instaure le régime du titre foncier indigène, encore appelé certificat administratif. Il a été mis en place pour tenir compte des raisons qui expliquaient le manque d'adhésion des populations africaines au régime de l'immatriculation afin d'inciter celles-ci à déclarer leurs droits immobiliers.

En effet, le coût élevé de l'immatriculation, la complexité et la longueur de la procédure et la méfiance des populations vis-à-vis de ces instances étrangères chargées d'administrer leur terre, ont été relevés comme raisons essentielles de l'échec du régime de l'immatriculation après près de vingt (20) ans d'application. Le colonisateur a alors institué le régime du titre foncier indigène afin de permettre aux populations africaines de faire connaître leurs droits fonciers à l'issue d'une procédure courte, simple et peu coûteuse. Pour cela :

- le détenteur de terre régie par le régime foncier coutumier qui désire faire reconnaître ses droits afin de les rendre opposables à toute autre personne, adresse une demande écrite au représentant de l'administration coloniale comportant indication de son identité complète ainsi qu'une description sommaire de son immeuble.

- à la réception de la demande, un récépissé est délivré au requérant qui peut dès lors délimiter son terrain par tout moyen de repère. Le représentant de l'administration inscrit ensuite la demande sur un registre ad hoc avec un numéro d'ordre.

- une palabre est ensuite organisée. Si dans les trois mois suivant aucune opposition n'est formulée et si l'état ne revendique pas le terrain, les pièces établies sont numérotées et réunies pour former un livret auquel un plan des lieux est joint.

- Les différentes inscriptions du livret sont transcrites sur un registre spécial dont copie est délivrée au requérant à sa demande.

Le titre ainsi obtenu par le requérant confirme celui-ci dans ses droits. Il est opposable aux tiers qui se prévalent de droits coutumiers et reste valable tant que celui-ci ou ses ayants droits occupent effectivement l'immeuble.

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I-4-3 : Le régime du livret foncier

L'un des objectifs de la politique coloniale était l'exploitation des terres fertiles pour une bonne production agricole. Le colonisateur a mis en place dans ce but, un important programme de production agricole avec l'espoir que les agriculteurs africains en y adhérant, produisent en grande quantité. Pour pérenniser ce programme en intéressant vraiment les populations africaines et après avoir constaté l'échec des régimes précédents, le colonisateur entreprit une nouvelle organisation du régime foncier afin de pouvoir introduire la notion de propriété privée dans le régime foncier coutumier. Il espérait un meilleur succès de ce nouveau régime pour les raisons suivantes :

- la profonde évolution des mentalités africaines ;

- le désir des populations africaines d'accéder à la propriété privée afin de pouvoir utiliser la terre à des fins économiques.

Il institua le livret foncier qui permettait de faire constater les droits fonciers coutumiers et de les exercer librement, dans les limites prévues par la loi. Les populations africaines avaient aussi la possibilité de convertir leurs droits fonciers coutumiers en droit de propriété, par la formalité de l'immatriculation.

Pour obtenir le livret foncier, le détenteur de droits fonciers coutumiers qui avait réalisé une mise en valeur de la terre avec emprise permanente sur le sol, devait la faire constater par l'autorité compétente. A la suite d'une procédure légère, le livret foncier lui était délivré. Il lui permettait de disposer de son droit foncier coutumier de la même manière qu'un détenteur de droits fonciers règlementaires.

Pendant la période coloniale, le colonisateur français a instauré plusieurs régimes fonciers afin de faire entrer dans les colonies d'Afrique occidentale et équatoriale, la notion de propriété privée. La législation foncière coloniale a cependant reconnu l'existence de droits fonciers coutumiers et essayé d'amener les populations africaines à convertir ces droits en celui de propriété. Le décret n°55- 580 du 20 mai 1955 qui institue le livret foncier constitue la dernière tentative coloniale de convertir les droits fonciers des populations africaines. L'accession à l'indépendance des états de l'Afrique Occidentale Française marquera la fin du

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régime foncier colonial et la mise en place, par les nouvelles autorités des pays africains de nouveaux régimes fonciers. La Haute Volta ne fera pas exception à cette nouvelle tendance et instituera aussi son régime foncier.

II- LE REGIME FONCIER POST COLONIAL

Les autorités politiques qui ont administré la Haute Volta indépendante ont reconduit l'essentiel des notions et principes introduits par le colonisateur. Il s'agit de la domanialité des terres et des différents modes de constitution ou d'acquisition des droits fonciers, à travers la procédure de l'immatriculation. Il s'agit également de la reconnaissance de prérogatives foncières aux autorités coutumières et partant, de droits fonciers coutumiers.

Les services chargés des domaines et les chefs de circonscriptions administratives ont été investis des missions de gestion des terres et des droits fonciers.

Les autorités post-coloniales ont néanmoins adapté la législation héritée du colonisateur en introduisant la concession comme mode d'acquisition des droits fonciers.

LA CONCESSION

Elle a été le mode d'aliénation des terres du domaine privé de l'Etat. Elle comporte deux étapes :

- la concession provisoire qui fixe les conditions de jouissance et d'aliénation des terres du domaine privé de l'Etat. Elle est accordée par un arrêté de concession provisoire et un cahier de charge contenant les conditions à remplir par le concessionnaire pour pouvoir demander l'aliénation définitive des terres.

- la concession définitive, obtenue après parfaite réalisation des obligations imposées par celle provisoire et avis favorable de la commission de constat de mise en valeur. Elle est octroyée par un arrêté de concession définitive. Le titre foncier est obtenu ensuite, après paiement du prix ainsi que des différents droits et taxes requis pour la mutation, l'immatriculation et l'inscription du terrain.

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III- LE REGIME FONCIER REVOLUTIONNAIRE ET POST- REVOLUTIONNAIRE

La Révolution Démocratique et Populaire (RDP) et les régimes politiques qui lui ont succédé ont introduit une nouvelle conception de la gestion foncière basée sur la notion de Domaine Foncier National (DFN).

Cette nouvelle approche de la gestion foncière est différente des précédentes d'abord par la suppression de la notion de domanialité des terres qui prévalait jusque-là, l'institution d'un DFN unique et par la nature des droits dont peuvent disposer les personnes de droit privé.

Elle est ensuite différente par la non reconnaissance de prérogatives de gestion foncière aux autorités coutumières et l'annulation des droits fonciers coutumiers.

III-I- LE DOMAINE FONCIER NATIONAL (DFN)

Il comprend « toutes les terres situées dans les limites du territoire national, et celles acquises par l'Etat et les collectivités publiques secondaires à l'étranger.»1 Il s'agit :

- des terres précédemment définies ou classées dans le domaine public de l'Etat et des collectivités publiques secondaires ;

- des terres du domaine privé de l'Etat et des collectivités publiques secondaires affectées ou non affectées, concédées ou non concédées ;

- des terres faisant l'objet de titres de propriété (titres fonciers) au nom des personnes physiques ou morales de droit privé ;

- des terres détenues en vertu des coutumes ;

- des terres appartenant à l'Etat et aux collectivités publiques secondaires à l'étranger.

Le DFN remplace ainsi les domaines public et privé précédemment constitués.

1 Décret n° 85-404/CNR/PRES du 04 août 1984 portant RAF, article 1

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III-1 -1- La constitution du DFN et la propriété de l'Etat

La proclamation par la loi de la création du DFN et de son appartenance à l'Etat, constitue le DFN et confère à l'Etat sa propriété de plein droit, sans une autre formalité. En effet, l'article 2 de la loi 014/96/APD du 23 mai 1996 portant RAF stipule : « il est crée un domaine foncier national du Burkina Faso. » Quand à l'article 4 il affirme que « le domaine foncier national est de plein droit propriété de l'Etat. »

La propriété proclamée de plein droit de l'Etat sur le DFN découlerait de sa souveraineté et de la volonté du législateur d'affirmer cette souveraineté sur les terres du territoire national et les biens immeubles ou assimilés acquis à l'extérieur.1

III-I-2- Les caractéristiques des biens du DFN

Elles sont différentes selon que le bien est disponible ou non.

- Les biens indisponibles : Il s'agit des biens précédemment classés dans le domaine public de l'Etat. Ils conservent leurs caractères d'inaliénabilité, d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité.

- Les biens disponibles : Il s'agit des biens précédemment classés dans le domaine privé de l'Etat, à l'exception des terres du domaine privé affecté. La détention de la propriété de ces biens a connu des évolutions qui ont déterminé des droits de natures différentes pour les personnes.

III - 2- LE DFN ET LA PROPRIETE DE L'ETAT

III-2-1- Le D.F.N est de plein droit propriété exclusive de l'Etat.2

En déclarant l'Etat propriétaire unique et exclusif des terres burkinabè, le législateur de la RAF de 1984 a conféré à l'ensemble des biens composant le DFN, les caractères de ceux précédemment classés dans le domaine public de l'Etat. Toutes les terres burkinabè sont ainsi devenues inaliénables, imprescriptibles et

1 DARGA Basile, cours de 2em année du cycle B de l'ENAREF, année scolaire 2006-2007-, page 33.

2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 3

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insaisissables.1 Pour atteindre la totalité des terres, il a annulé les titres de propriété (les titres fonciers) jusque-là détenus par les particuliers et décrété que « les terres détenues en vertu des coutumes » devenaient elles aussi propriété exclusive de l'Etat. Quand aux détenteurs de titres fonciers, il leur a offert la possibilité d'obtenir des titres de jouissance en remplacement.2

Pendant l'application de la première version de la RAF, les personnes de droit privé ne pouvaient donc obtenir qu'un droit d'usage sur les terres burkinabè. Le droit de propriété était détenu par l'Etat.

III-2-2- Le D.F.N. est de plein droit propriété de l'Etat.

En supprimant l'exclusivité de la propriété de l'Etat, les législateurs des deux autres versions de la RAF (1991 et 1996) ont enlevé à certains biens du DFN les caractères d'inaliénabilité, d'imprescriptibilité et d'insaisissabilité. En effet, la RAF de 1991 stipule à son article 3 que « les terres du Domaine Foncier National peuvent être cédées à titre de propriété privée aux personnes physiques ou morales... » Quant à celle de 1996, elle précise que « certaines terres du domaine foncier national peuvent être cédées à des particuliers à titre de propriété privée... »3

Sans revenir à la notion de domanialité, les législateurs burkinabè de la deuxième et troisième version de la RAF, ont conféré à nouveau aux biens précédemment classés dans le domaine privé de l'Etat leur caractère de biens économiques pouvant êtres possédés en pleine propriété par des particuliers.

Ils ont réintégré le titre foncier comme titre de propriété et réhabilité les titres annulés par la première version de la RAF.

III-3 - LE MODE DE CONSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE :

L'IMMATRICULATION

L'immatriculation selon la RAF consiste aussi à désigner un terrain par un numéro au livre foncier. Ce numéro permet de particulariser le terrain car à chaque

1 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 5

2 Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 août 1984 portant RAF, article 4

3 Loi 014/96/ADP du 23/05/1 996 portant RAF, article 5

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parcelle correspond un numéro unique qui n'est plus attribué à une autre. Chaque numéro correspond aussi à un feuillet du livre foncier, qui constitue le titre foncier.

Mais l'immatriculation telle que définie par la RAF revêt une portée différente de celle qu'elle avait jusque-là. En effet avant la RAF, elle permettait de révéler les droits fonciers existants sur la parcelle et de purger les droits fonciers coutumiers. Depuis l'institution de la RAF, les terres détenues en vertu des coutumes faisant partie de la propriété de l'Etat, l'immatriculation ne consiste plus à la révélation et la purge des droits fonciers coutumiers. Elle comporte néanmoins toujours deux étapes :

1) la procédure d'immatriculation qui permet de borner le terrain.

2) La formalité d'immatriculation qui consiste à inscrire l'immeuble dans le livre foncier en lui affectant un feuillet dudit livre, à inscrire les différents droits réels détenus sur l'immeuble à la suite de celui de propriété.

- La publication des droits réels. La publication des droits réels détenus sur l'immeuble permet de les rendre opposables aux tiers.1

SECTION 2 - LES CARACTERISTIQUES DE LA LEGISLATION

FONCIERE REGLEMENTAIRE

La législation foncière règlementaire actuellement en vigueur au Burkina est caractérisée par l'unicité d'autorité sur la terre, l'instance chargée de sa gestion ainsi que par la nature des droits fonciers.

I - L'UNICITE D'AUTORITE SUR LA TERRE BURKINABE

Le législateur de la RAF, en ne reconnaissant pas de prérogative de gestion foncière à l'autorité coutumière, confère à l'Etat seul l'autorité de gestion foncière.

En effet, en incluant les terres détenues en vertu des coutumes dans le DFN et en déclarant que « le domaine foncier national est de plein droit propriété de l'Etat 2», le législateur burkinabè annule toutes les prérogatives foncières de l'autorité coutumière.

1 Décret 97-054/PRES/PM/MEF portant modalité d'application de la loi sur la RAF, article 461

2 Loi n° 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF, article 4.

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Cette nouvelle approche de gestion foncière est l'une des différences fondamentales qui existent entre la RAF et les lois qui l'ont précédé. En effet, les lois foncières précédentes avaient reconnu l'existence de prérogatives foncières coutumières et partant de droits fonciers coutumiers.

La proclamation de l'unicité de l'autorité sur la terre a été dictée, selon le législateur de la RAF, par le souci de mettre en place un système agraire et foncier « qui permette une occupation et une utilisation rationnelle des terres envisagées comme des sols c'est-à-dire sous l'angle de la productivité et de la justice sociale1.

Le législateur de la RAF a donc choisi de privilégier la conception matérielle de la terre, perçue uniquement comme un outil de production.

II - LA PERSONNE QUI GERE LA TERRE : L'AUTORITE POLITIQUE

L'article 33 de la loi 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF au Burkina confie la gestion des terres au Ministre chargé des Domaines. La mise en place du cadastre et la préservation de l'environnement sont confiées par le même article aux Ministres chargés du Cadastre et de l'Environnement.

Les actes quotidiens de gestion de la terre ont été confiés à une autre autorité politique, le Maire et à défaut le Préfet. Ainsi le décret portant conditions et modalités d'application de la RAF désigne-t-il le maire et le Préfet comme Président des structures de gestion ou signataire des actes d'attribution des terres et le Ministre comme signataire de l'acte de propriété.

III - LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE

Ils sont plusieurs mais peuvent être regroupés en huit (8) objectifs principaux :

- a) assurer l'autosuffisance alimentaire. Près de 90% de la population burkinabè pratique les activités agro-pastorales mais le pays ne parvient toujours pas à assurer l'autosuffisance alimentaire ;

- b) protéger l'environnement ;

- c) promouvoir l'activité économique ;

1 Confère préambule de la RAF de 1984

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- d) résorber le problème du chômage ;

- e) gérer les effets pervers de la croissance démographique : contrôler l'immigration et éviter les conflits entre autochtones et migrants;

- f) Contrôler la transhumance des troupeaux et assurer la paix et la cohésion sociale en évitant les conflits entre agriculteurs et éleveurs ;

- g) assurer une gestion moderne des terres en tenant compte des réalités socio - culturelles, historiques et économiques ;

- h) unifier le régime juridique de la terre. 1

IV- LES MODES D'OCCUPATION DES TERRES

La RAF subordonne toutes formes d'occupation des terres du DFN à la possession préalable d'un titre d'occupation, sauf pour l'exploitation des terres rurales non aménagées dans le but de subvenir aux besoins de logement et de nourriture de l'occupant et de sa famille2. Pour ce faire elle prévoit des titres de jouissance et un titre de propriété.

IV-1- LES TITRES DE JOUISSANCE

Ils confèrent un droit de jouissance temporaire ou permanent à leurs titulaires. - Les titres de jouissance à caractère temporaire. Il s'agit :

a) du permis d'occuper délivré pour l'installation d'activités lucratives sur des terres du DFN qui ne peuvent être concédées en jouissance privative de longue durée en raison de leur nature, de leur destination ou de toute autre raison.

b) du bail délivré pour conférer aux personnes physiques ou morales un droit de jouissance de courte ou longue durée sur certaines terres du DFN.

- Les titres de jouissance à caractère permanent. Il s'agit de:

a) l'arrêté d'affection délivré au service public pour occuper des terres du DFN. Il confère à ces terres un caractère d'indisponibilité.

b) l'arrêté de mise à disposition délivré à des personnes physiques ou morales pour l'installation d'activités non lucratives sur des terres du DFN. Ce titre de

1 Préambule des lois portant RAF

2 Article 142 du décret 97-054/PRES/PM/MEF portant modalités d'application de la RAF

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jouissance qui confère à son titulaire un droit de superficie peut être converti en titre de propriété par l'acquisition en pleine propriété des terres qui en font l'objet.

c) le permis urbain d'habiter délivré pour l'occupation des terres du DFN destinées à l'habitation. Il confère à son titulaire un droit de superficie qui peut être converti en droit de propriété par l'acquisition en pleine propriété des parcelles.

d) le permis d'exploiter délivré à des personnes physiques ou morales pour l'installation d'activités lucratives sur des terres du DFN. Il confère à son titulaire un droit de superficie mais les terres qui en font l'objet peuvent être acquises en pleine propriété.

V-2- LE TITRE DE PROPRIETE

Il s'agit du titre foncier. La RAF l'a d'abord supprimé (article 4 du décret n° 84- 050/CNR/PRES du 04 août 1984), et ensuite réhabilité en instituant la possibilité de cession des terres du DFN en pleine propriété (article 3 de la zatu n° AN VIII-0039 BIS/FP/PRES du 4 juin 1991).

Le titre foncier est obtenu après respect des conditions particulières de mises en valeur prévues à l'article 229 du décret 97-054/PRES/PM DU 06 FEVRIER 1997 portant modalités d'application de la RAF, et paiement du prix du terrain.

SECTION 3 - LES FORCES ET LES FAIBLESSES DE LA

LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE

I - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE

Nous en retiendrons deux, qui nous paraissent importantes. Le premier provient de l'institution même du droit de propriété et le second de l'exercice de l'autorité reconnue à l'Etat.

I -1 -L'INSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE

L'article 149 de la loi 014/96/ADP du 23/05/1996 portant RAF au Burkina Faso qui institue le droit de propriété, accorde toute faculté au propriétaire et limite le caractère absolu du droit de propriété par une condition : que l'exercice du droit ne

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soit pas contraire aux lois et aux règlements. La RAF confère ainsi à l'Etat qui est garant du respect des lois et règlements, le pouvoir de contrôler l'exercice du droit de propriété. Cette disposition constitue une des forces de la législation foncière règ lementai re.

En effet ce qui est contraire aux lois et aux règlements est variable d'un Etat à un autre et est ainsi laissé à la souveraineté nationale. Les objectifs de préservations des droits des générations futures peuvent ainsi faire partie des priorités de l'Etat qui peut réguler l'exercice des droits accordés.

I-2- L'ANNULATION DES DROITS DES PARTICULIERS PAR L'EXERCICE DE LA

SOUVERAINETE DE L'ETAT

La législation foncière règlementaire accorde à l'Etat, le pouvoir de récupérer la terre sur laquelle porte le droit de propriété, par la procédure de l'expropriation pour cause d'utilité publique.1 Ici, ce n'est pas la limite de l'exercice du droit de propriété, définie par l'article 544 du code civil qui est appliquée. C'est l'exercice de la souveraineté de l'Etat sur les terres burkinabè. Il n'obéit à aucune conditionnalité autre que l'utilité publique. Que le propriétaire ait usé de son bien dans le respect des interdits prescrits par les lois et règlements ne suffit pas à éviter la reprise de la terre objet dudit droit, lorsque l`utilité publique, qui est définie par l'Etat l'exige.

II - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE

La législation foncière règlementaire comporte plusieurs insuffisances qui peuvent être énumérées. Nous en citerons quelques unes, qui nous paraissent importantes, et qu'il est important de combler pour pouvoir instituer une législation foncière au service de la cohésion sociale et du développement économique.

1 Loi n° 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF, article 6

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II -1- L'INADAPTATION DES REGLES DE LA LEGISLATION FONCIERE

REGLEMENTAIRE

Cette inadaptation provient de la précocité de l'institution de règles calquées sur celles conçues et appliquées par des sociétés dont le niveau d'évolution sociale et économique est supérieur au notre et le manque de mesure d'accompagnement, ou au moins d'assouplissement de ces règles.

L'histoire du droit de propriété dans les pays européens nous apprend que le concept d'appropriation privée n'est pas une invention extérieure ou l'apport de quelques esprits supérieurs qui l'ont imposé à des sociétés parce que sachant mieux que les populations ce qui est bien ou mal pour elles. Mais plutôt la conséquence de mutations socio-économiques qui ont modifié les conceptions médiévales, « qui étaient également fondées sur une appropriation comme affectation à des usages »1. L'individualisme, le capitalisme marchand, le renouveau du droit romain et d'autres mutations (politiques et religieuses) sont des facteurs qui ont favorisé l'introduction du concept de propriété privée de la terre dans ces sociétés.

Il est certes vrai qu'il n'est pas envisageable d'annuler l'héritage colonial pour retourner à des habitudes propres à nos sociétés africaines, mais l'attitude consistant à balayer d'un revers de main toutes les valeurs sociales et culturelles africaines pour adopter des principes issus de mutations naturelles d'autres sociétés, les imposer aux nôtres au nom des ambitions de progrès, ne peut pas rencontrer l'adhésion populaire qui doit lui conférer sa légitimité.

II - 2 - LES FREQUENTES MODIFICATIONS DES DISPOSITIONS DE LA

LEGISLATION FONCIERE REGLEMEMTAIRE

Tout Etat devrait avoir des règles de gestion foncière pouvant varier sensiblement d'un régime politique à un autre, mais qui soient basées sur des principes fondamentaux, adoptés, institutionnalisés et très peu immuables, pour garantir une paix sociale durable. Sans vouloir jeter l'opprobre sur qui que ce soit, ni faire les oiseaux de mauvais augures, nous pensons que tirer leçon de l'expérience de la Côte d'Ivoire peut aider à mieux faire comprendre nos assertions.

1 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire», éditions Karthala, Paris, 1991, page 16

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En effet, dans le but d'insuffler à leur pays le développement économique recherché, les autorités ivoiriennes du début des indépendances ont choisi de sécuriser uniquement l'investissement en déclarant dans une loi du 20 mars 1963 que « la terre appartient à celui qui la met en valeur, à l'exception de tout autre détenteur de droits coutumiers»1. Le but visé a peut être été atteint, mais la situation sociale qui a résulté de cette option politique a crée les conséquences que nul n'ignore. En effet, toutes les autorités politiques qui ont succédé aux premières ont adopté des attitudes différentes mais avec un objectif commun face à l'imminence de la crise qu'elles voyaient venir. Les terres acquises par des personnes non ivoiriennes avaient atteint une telle proportion, qu'une part importante de la population ivoirienne se retrouvait sans terre dans leur propre pays.

Pour protéger le bien commun et le rendre intégralement aux générations futures, les nouvelles autorités ivoiriennes ont adopté une approche politique différente de celle de leurs prédécesseurs et essayé en même temps de restituer aux responsables coutumiers la totalité de leurs droits. Il s'agissait de retirer la terre à ceux qui les avaient mises en valeur, et l'attribuer aux ivoiriens. Pour cela, les autorités politiques ont recouru à la loi pour imposer leur nouvelle conception de la gestion de la terre. Certains articles de la loi foncière ivoirienne de 1998 sont suffisamment expressifs de cette volonté et ne requièrent aucun commentaire. Nous en citerons trois à titre d'illustration.

*** Article 1er : Le domaine foncier rural est constitué par l'ensemble des terres mises en valeur ou non et quelle que soit la nature de la mise en valeur. Il constitue un patrimoine national auquel toute personne physique ou morale peut accéder. Toutefois, seuls l'Etat, les collectivités publiques et les personnes physiques ivoiriennes sont admises à en être propriétaires.

*** Article 4 : La propriété d'une terre du domaine foncier rural est établie à partir de l'immatriculation de cette terre au registre foncier ouvert à cet effet par l'administration et en ce qui concerne les terres du domaine foncier coutumier par le certificat foncier. Le détenteur du certificat foncier doit requérir l'immatriculation de la terre correspondante dans un délai de trois ans à compter de la date d'acquisition du certificat foncier.

1 Aline AKA, bulletin de liaison du Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris n°26, sept 2001, pages 130-143.

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*** Article 8 : Le constat d'existence continue et paisible de droits coutumiers donne lieu à délivrance par l'autorité d'un certificat foncier collectif ou individuel permettant d'ouvrir la procédure d'immatriculation aux clauses et conditions fixées par le décret.

Au Burkina le statut juridique de la terre a changé constamment, au gré de la volonté politique du moment. Les droits fonciers coutumiers ont ainsi été successivement considérés :

- comme non ressemblants au droit de propriété (décret du 26/07/ 1932) ;

- comme existants et convertibles en droit de propriété (régime du livret foncier indigène);

- comme inexistants (RAF de 1984)

- enfin comme officiellement inexistants mais officieusement existants (RAF de 1991 et 1996 et pratiques politiques et administratives).

La terre a ainsi appartenu :

- simultanément à l'Etat, aux personnes de droit privé, aux autorités et aux propriétaires fonciers coutumiers (avant 1984) ;

- à l'Etat seul (pendant l'application de la RAF de 1984).

- simultanément à l'Etat seul, aux personnes de droit privé officiellement et aux propriétaires fonciers coutumiers officieusement (depuis la RAF de 1991).

Cette situation pourrait d'ailleurs expliquer partiellement la légitimité du régime foncier coutumier dont la législation se présente finalement de part sa constance comme la référence juridique pour les populations burkinabè.

II- 3- LE MANQUE DE COHERENCE ENTRE PRATIQUES ADMINISTRATIVES ET

DISPOSITIONS LEGISLATIVES

Les pratiques administratives actuelles des structures et des services de gestion de la terre constituent une des faiblesses de la législation foncière réglementaire.

II-3- 1 - Au niveau des structures de gestion

La gestion des terres est effectivement assurée par le Maire ou le Préfet. C'est cette autorité politique qui fournit la part la plus importante de l'offre foncière pour

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satisfaire les demandes de tous usages. Car c'est elle qui déclenche les procédures conduisant aux différents aménagements au regard des besoins en terres, et qui procède à l'attribution des lots. Elle a été instituée par la RAF pour remplacer toutes les autres autorités foncières, et principalement l'autorité coutumière qui exerçait cette fonction dans les sociétés traditionnelles burkinabè.

Pourtant, les Maires et les Préfets accordent toujours une place importante à l'autorité coutumière qu'ils sont censés remplacer. Aucun aménagement n'est ainsi engagé sans au préalable la collecte des exigences des autorités coutumières compétentes sur l'espace concernée et sans la satisfaction de ces doléances. Aucune structure administrative ne peut contrôler ou empêcher cette pratique de l'autorité politique. En effet, le Maire ou le Préfet à qui incombe l'initiative d'aménagement agit seul au départ, au moment ou la terre est non aménagée. C'est seulement au cours de la procédure qu'il a engagé, que les responsables administratifs sont associés aux actes de gestion. Il considère donc que les structures administratives n'interviennent que lorsque la terre est administrable et ne peuvent donc comprendre l'importance des actes que lui-même a posé auparavant.

Par ailleurs, l'autorité politique acquiert le pouvoir de gestion à la suite d'un acte politique, l'élection ou la nomination à un poste politique. Sa perception de la gestion du foncier n'est pas toujours celle de l'administration qui est sous l'autorité de la loi, mais intègre des fois des considérations politiques qui vont le plus souvent à l'encontre du droit positif. Ces considérations sont celles de la plupart des burkinabè, et laissent une place importante à la coutume. Voilà pourquoi, il n'est pas rare de rencontrer dans une procédure de lotissement et d'attribution de parcelles, `'la liste des autorités coutumières», établie par elles et inscrite par l'autorité politique en bonne place parmi les besoins à satisfaire impérativement.

II 3- 2- Au niveau des services d'appui

Sans reconnaître l'existence des droits fonciers coutumiers, les usages administratifs exigent toujours la purge de ces droits avant toute procédure d'attribution. A côté des pratiques des personnes évoquées par M. OUEDRAOGO Moussa dans son écrit, il convient de souligner celles des services. La terre appartient certes à l'Etat, mais aucune procédure d'attribution n'obtient l'autorisation des services compétents sans l'accord préalable des propriétaires coutumiers.

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Ainsi pour les parcelles situées en zone rurale, lorsque le service des domaines transmet le dossier de demande d'attribution aux structures dont les avis sont requis dans le cadre de l'instruction dudit dossier (élevage, agriculture...), ces services émettent la plupart du temps, un avis défavorable lorsqu'un procès verbal de palabre n'est pas joint pour attester que les `' superficiaires » ont donné leur accord, et ce quelque soit le lieu de situation du terrain. Nous avons pu constater cela dans plusieurs localités du Burkina, entre autres à Bobo-Dioulasso, Koudougou, Ouagadougou...

La notion de `'superficiaire» employée par le législateur de la RAF manque elle-même de précisions suffisantes pour éviter d'être sujette à interprétations. Nous avons essayé de la comprendre. La première remarque que nous avons pu faire est que la RAF même ne la définit pas. Mais puisqu'elle provient du terme `'superficie», nous avons donc émis l'hypothèse qu'elle désigne les détenteurs du droit de superficie. Ce droit réel est défini par l'article 150 de la loi 014/96/ADP portant RAF au Burkina comme un droit d'usage et de jouissance. Les droits fonciers coutumiers étant supprimés nous avons déduit que la RAF désignait par ce terme, les personnes qu'elle autorisait sans la possession préalable de titre administratif, à occuper et exploiter les terres rurales non aménagées dans le but de subvenir à leurs besoins de logement et de nourriture et à ceux de leurs familles. Dans ce cas le procès verbal de palabre ne devrait pas être une formalité obligatoire pour des « terres vacantes » c'est-à-dire non exploitées, en vertu de l'exercice de la propriété de l'Etat. Finalement nous sommes arrivés à la conclusion que face aux dangers menaçant la cohésion sociale dans la perspective d'une gestion foncière n'impliquant pas les autorités coutumières, les autorités politiques ont choisi de laisser les habitudes sociales prendre le dessus sur la loi.

II - 4 - «L'IMMUNITE JURIDIQUE» DES AUTORITES COUTUMIERES

L'imprécision du rôle des autorités coutumières, qui est la conséquence de l'attitude politique que nous venons d'évoquer constitue une autre insuffisance du régime règlementaire. Celles-ci se retrouvent en effet dans une situation qui ressemble fort à une `'immunité juridique» et dont les conséquences sont encore plus graves aujourd'hui qu'avant l'institution de la RAF.

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En effet, la loi en annulant les droits fonciers coutumiers ne les considère pas comme susceptibles de produire des effets juridiques. Par conséquent les autorités coutumières exercent un droit dont elles ne répondent pas des conséquences. Ainsi, la vente des terres par les autorités coutumières n'existe pas officiellement puisqu'elles n'en détiennent pas la propriété. Nul n'étant censé ignorer la loi, celui qui recourt à l'autorité coutumière pour acquérir une terre (la quasi totalité de la population burkinabè selon M. OUEDRAOGIO Moussa) ne peut se prévaloir de sa propre turpitude selon un principe consacré du droit pour se plaindre de s'être fait grugé.

II - 5 - LE PROBLEME DES HABITATS SPONTANES

Une autre insuffisance de la RAF, liée à la liberté accordée aux autorités coutumières par celles politiques, produit d'importantes difficultés dans les procédures de lotissement, surtout pour les zones se situant à côté des centres urbains. Il s'agit des habitats spontanés (les `'non loties» dans le langage courant). En effet, les personnes qui s'installent sur les terres urbaines et rurales ne le font pas sans obtenir l'autorisation des `' propriétaires terriens coutumiers» même si les articles 52 et 53 de la loi portant RAF autorisent l'occupation des terres du DFN à des fins de logement et de nourriture sans la possession d'un titre.

L'expérience des déguerpis de Nimpouy en 2003, démontre bien l'implication des autorités coutumières dans la gestion foncière et les effets du manque de contrôle d'une telle implication sur la stabilité sociale. En effet, les populations n'ont pas requis l'autorisation de l'administration que prescrit l'article 505 du décret 97- 054/PRES/PM portant application de la RAF. Elles ont cependant requis celle de l'autorité coutumière territorialement compétente. Sur la base de son accord, environ six mille neuf cents trente sept (6937) personnes se sont installées sur le site et ont défriché de grands espaces pour y mener des activités agro-pastorales et de logements. Elles ne l'ont pas quitté malgré les diverses injonctions de l'autorité publique qui a finalement été contrainte de les déguerpir par la force, sur instruction du gouvernement1.

Cette pratique a cours sur l'ensemble du territoire et est particulièrement perceptible dans les zones périphériques non aménagées des centres lotis. Après

1 Journal le Pays n° 2881 du 22/05/2003

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l'installation autorisée par les autorités coutumières, les occupants des habitats spontanés revendiquent le statut de « demandeurs résidents 1» ou d' « autochtones résidents 2», ou s'en prévalent pour exiger d'obtenir une parcelle. Les autorités coutumières qui ont permis ces installations sont encore celles qui introduisent des listes à satisfaire par celles publiques, au moment des lotissements.

II - 6 - LA SPECULATION FONCIERE

Le phénomène des « nouveaux acteurs » que décrit M. Bonoudaba DABIRE3, Ministre Délégué Chargé de l'Agriculture dans un écrit, est une autre conséquence de cette liberté non contrôlée accordée aux responsables coutumiers. M. DABIRE explique : « depuis une dizaine d'années environ, le Burkina connaît un phénomène nouveau qualifié de phénomène des « nouveaux acteurs ». Il s'agit d'un processus d'accaparement de grandes superficies de terres dans les villages (plusieurs dizaines ou plusieurs centaines d'hectares) par des élites urbaines. Les données collectées indiquent que la plupart des « nouveaux acteurs » ne sont pas en mesure de mettre en valeur les superficies acquises et que les objectifs de spéculation foncière ne sont pas absents de leurs stratégies d'accumulation foncière. »

Il convient de préciser ici que les nouveaux acteurs acquièrent les terres auprès des responsables et propriétaires fonciers coutumiers et requièrent ensuite l'attribution auprès de l'administration. Tous les superficiaires, satisfaits de la transaction préalable, signent le procès verbal de palabre et autorisent ainsi l'administration à procéder aux formalités d'attribution.

L'exclusivité du droit de propriété sur les terres burkinabè n'a en définitive été conférée à l'Etat par la RAF que pendant sept (7) ans. Le mode de gestion du droit de propriété constitue l'élément fondamental permettant de différencier tous les régimes fonciers qui se sont succédés au Burkina de la période coloniale à nos jours. L'harmonisation de la gestion de ce droit a par ailleurs été perçue par la plupart des

1 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf, article 156

2 Loi n° 014-96/ADP du 23 mai 1996, portant Raf, article 155

3 www.icarrd.org `'Problématique de la gestion du foncier et du développement durable au Burkina faso. Quelle politique de sécurisation foncière ?», Bonoudaba DABIRE, page 3.

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législateurs comme un impératif obligatoire qui garantit la cohésion sociale et le développement économique. Pourquoi les diverses tentatives d'instaurer un régime foncier unique n'ont-elles pas abouti ? Nous essayerons de répondre à cette interrogation, par une analyse du statut juridique de la terre burkinabè.

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CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA
TERRE DU BURKINA

Le `'statut» est l'ensemble des dispositions qui fixent les règles de fonctionnement d'une matière donnée1. Quant à l'adjectif `'juridique», il désigne ce qui relève du droit2.

Le statut juridique de la terre peut donc être défini comme l'ensemble des règles de droit qui fixent les conditions d'utilisation de la terre. A qui appartient la terre du Burkina ? Qui détient le pouvoir de définir les règles de gestion du foncier au Burkina ?

L'une des ambitions de la RAF était d'unifier le statut juridique de la terre en conférant à l'Etat la propriété exclusive des terres et en devenant l'unique texte de loi qui règlemente l'ensemble des ressources foncières. Un quart de siècle après l'institution de la première version de la RAF, force est de constater que cet objectif n'a pas été atteint. En effet, face aux insuffisances de la RAF, plusieurs textes de loi ont vu le jour pour règlementer la gestion de ressources foncières relevant déjà de la RAF. On peut citer de manière non exhaustive les textes suivants à titre d'illustration.

- La loi n°006/97/ADP du 31 janvier 1997 portant Code Forestier au Burkina Faso qui règlemente le régime de l'eau, des forêts, de la faune et des pêches, alors que les dispositions des sections 1, 2, 3 et 4 du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF traitent du même domaine.

- La loi n°031-2003/AN du 8 mai 2003 portant Code Minier au Burkina Faso qui réglemente la gestion des substances des carrières et des mines en lieu et place des dispositions de la section 5 du Chapitre 3 de la loi 014/96/ADP portant RAF.

Quant à la législation foncière coutumière, elle semble avoir gardé la totalité de ses prérogatives.

Près d'un demi siècle après l'accession du Burkina Faso à l'indépendance, et plus de vingt ans après la Révolution Démocratique et Populaire (RDP) toutes les tentatives de suppression du régime foncier coutumier n'ont pas réussi à enlever à ce régime d'administration de la terre, sa légitimité aux yeux des populations. Quels

1 Définition du Dictionnaire `'le petit Larousse illustré».

2 Définition du Dictionnaire `'le petit Larousse illustré»

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sont les points de divergence et de convergence des législations foncières coutumières et règlementaires ? Quelles sont les raisons éventuelles des difficultés d'institution d'une législation foncière unique (section 1) ? Nous examinerons le statut juridique de la terre burkinabè (section 2) par une tentative de réponse à ces différentes interrogations.

SECTION 1 : LES POINTS DE DIVERGENCE ET DE CONVERGENCE

DES DIFFERENTES LEGISLATIONS FONCIERES
I - LES POINTS DE DIVERGENCE

Le principal point de divergence des deux législations est l'exercice du droit de propriété. L'ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 4 Août 1984 portant RAF au Burkina semble avoir voulu trouver une solution alternative à cette divergence. En effet, en retirant à la coutume et aux particuliers le droit de propriété pour le conférer à l'Etat, le législateur de la première version de la RAF a opéré une véritable révolution foncière qui atteint les deux régimes fonciers qui se côtoyaient jusque-là.

Les législations foncières coutumières, faibles de l'espace géographique sur lequel elles s'exercent, ne garantissent pas la cohésion de tous les burkinabè puisque chaque village dispose de règles propres.

Quant à la législation foncière règlementaire, elle offre aux particuliers un droit dont l'absolutisme et le caractère exclusif annihilent pour les non propriétaires, toutes les possibilités de jouir un jour de la chose commune.

II- LES POINTS DE CONVERGENCE

La nécessité de protéger les terres burkinabè en conférant à une autorité collective des prérogatives lui permettant d'exercer un contrôle de l'utilisation des droits accordés et d'annuler au besoin ces droits constitue, le point de convergence le plus important des deux législations. La véritable nature des droits accordés (le droit d'usage pour la législation foncière coutumière, l'usus et le fructus pour celle règlementaire) et leur ressemblance sont la preuve de cette convergence des objectifs de ces deux législations foncières.

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Selon Etienne le Roy, la propriété apparaît quand la chose qui en est l'objet devient un bien, c'est-à-dire lorsqu'elle a une valeur pécuniaire.1 La terre coutumière est sacrée. Sa vente, désignée longtemps sous l'appellation de donation, peut paraître paradoxal. C'est pourtant le processus mis en oeuvre pour rendre cette `'donation» possible qui permet d'affirmer qu'il existe un point de convergence de la législation foncière coutumière vers celle règlementaire. En effet, avant de `'donner» la terre, les responsables coutumiers la désacralisent par des rites destinés à l'extraire du champ du sacré pour l'amener dans celui ou le droit d'usage peut être monnayé.

Les points de divergence des deux législations semblent avoir trouvé un repère commun depuis l'institution de la RAF. Des difficultés d'institution d'un régime foncier unique applicable à toutes les terres burkinabè subsistent cependant. Quelles peuvent être les raisons qui expliquent une telle situation ?

III - QUELQUES RAISONS DES DIFFICULTES D'INSTITUTION D'UNE

LEGISLATION FONCIERE UNIQUE

L'institution d'une législation foncière est un acte d'abord politique car la législation constitue le support juridique de la politique. Quant à la politique foncière, son choix est déterminé par le projet de société que le politique veut mettre en oeuvre.2

La décision d'institution d'une législation foncière unique a été prise au Burkina, par les autorités politiques qui ont institué la RAF. Les raisons qui semblent avoir rendu cette initiative quasiment impossible pourraient provenir à notre avis, de l'approche de la question foncière par le pouvoir politique. Pour étayer nos assertions, nous rappellerons l'approche des autorités coloniales afin d'établir un parallèle entre elle et l'attitude de l'autorité politique qui a institué la RAF.

a) - L'autorité politique coloniale. Les premiers actes règlementaires institués par l'autorité politique coloniale avaient pour conséquence juridique, la non reconnaissance de droits fonciers détenus par la coutume, comme ressemblant au droit de propriété français. Pour ce faire, elle a commencé par instituer

1 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire», Editions karthala, Paris, 1991, page 30.

2 `'L'appropriation de la terre en Afrique noire», éditions Karthala, Paris, 1991, page 19.

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l'immatriculation et la publicité comme seules procédures permettant la naissance et la conservation des droits détenus sur les immeubles et opposables aux tiers.1

L'anthropologue américain Paul BOHANNAN,2 abonde dans ce sens lorsqu'il explique que le colonisateur a approché le droit foncier coutumier avec, a priori, les trois jugements suivants :

1) - le type de carte occidental peut être introduit dans les régions africaines, où il existe d'ailleurs déjà, même s'il est inconnu des peuples africains ;

2) - le concept de propriété est suffisant pour exprimer tous les types d'unités homme - chose ;

3) - le contrat et la loi successorale sont des modes normaux pour organiser les rapports sociaux dans un contexte spatial.

Pour rappel, après avoir constaté le manque d'adhésion des populations africaines à ce concept, des procédures intermédiaires ont été instituées pour leur permettre de faire constater, exercer, conserver et convertir au besoin leurs droits fonciers coutumiers.

b) - L'autorité politique de la RAF : Son attitude semble être une reprise de celle de l'autorité politique coloniale. Elle annule les droits fonciers coutumiers en faisant entrer les terres détenues en vertu des coutumes dans le DFN. Elle annule l'existence de ces droits en supprimant la procédure prévue par le régime foncier colonial et reprise par celui post colonial pour les purger.

Elle laisse cependant les populations `'se débrouiller» avec les responsables coutumiers pour obtenir les terres et n'intervient pour les gérer qu'après que ceux-ci aient donné leur quitus.

Les régimes politiques de la Haute Volta colonie française au Burkina Faso ont eu une approche similaire des droits fonciers coutumiers dont la conséquence est la dualité des législations, toute chose qu'ils ont voulu éviter. De notre point de vue, deux raisons expliquent cela :

- Le choix politique. Les différentes autorités politiques du Burkina ont fait le choix d'instituer une législation foncière unique. Pour ce faire, la législation foncière coutumière devait disparaître. Ce choix a été opéré dans le but de disposer d'une législation foncière efficace et véritablement au service « du développement et du

1 Décret du 26/07/1 932 modifiant le décret du 24/07/1 906, article 21.

2 « Land, Tenure and Land-Tenure », African Agrarian systems, oxford, 1963, page 106.

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progrès1 ». Le choix alternatif aurait pu être celui d'une législation foncière unifiée qui rassemblerait les forces de celles qui étaient en présence en s'appuyant sur leurs points convergents et en résolvant les divergences par une action politique continue.

- La procédure mise en oeuvre pour instituer la législation foncière unique. Elle a consisté à user de la légalité législative pour annuler la législation foncière coutumière. Une telle approche traite le régime foncier coutumier en ignorant une partie de sa composante : l'aspect religieux. En effet, en réfutant toute prérogatives au régime coutumier, les autorités politiques essaient de combattre le religieux avec le légal. L'histoire du Burkina démontre éloquemment les faiblesses d'une telle approche, que M. OUEDRAOGO Moussa, confirme dans son écrit décrivant l'attitude de ces mêmes autorités lorsqu'elles doivent acquérir la terre rurale2.

La mise en place d'une législation foncière unifiée qui accorde à tous les acteurs une part de pouvoir et partant de responsabilité aurait pu être une solution alternative qui aurait permis d'opérer sur l'aspect juridique du régime foncier coutumier, les modifications nécessaires en évitant les contraintes de l'aspect religieux.

SECTION 2 : LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE

Le DFN comprend toutes les terres situées dans les limites du territoire national. Il est de plein droit propriété de l'Etat3. La propriété de l'Etat sur les terres du DFN est-elle une réalité ?

I - LA PROPRIETE ABSOLUE DE L'ETAT

Au regard de l'attitude des dirigeants et de la population vivant au Burkina évoquée par M. OUEDRAOGO Moussa, l'on peut répondre par la négative à cette question. Si la terre appartenait uniquement à l'Etat, il constituerait l'unique interlocuteur pour son acquisition.

1 Préambule de la loi 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant RAF au BURKINA

2 moussaouedraogo@hotmail.com: `'Le Foncier dans les politiques de développement au Burkina», OUEDRAOGO Moussa, page 13

3 Loi 014/96/ADP du 23 mai 1996, articles 3 et 4

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En plus des détenteurs de titres fonciers, propriétaires de la superficie et du sous-sol ne contenant pas de richesses, les autorités coutumières exercent toujours de fait, un droit de propriété sur les terres qui sont dans leurs espaces de compétence. C'est la reconnaissance de ce droit qui conduit l'ensemble de la population burkinabè à recourir à elles pour acquérir la terre.

Le système foncier coutumier étant uniquement basé sur l'oralité, la sécurité de la transaction foncière y est précaire. Pour illustration, ce sont les autorités coutumières ivoiriennes qui ont octroyé les terres aux ressortissants étrangers, qui les ont réclamées ensuite1. La terre coutumière, sacrée au départ, acquiert une valeur économique et entre dans le commerce dès que l'autorité coutumière la désacralise. A partir de ce moment, la législation foncière coutumière devient en principe inopérante.

Quelque soit la personne physique ou morale qui acquiert la terre coutumière, elle procède après l'acquisition aux différentes formalités administratives requises par la législation foncière règlementaire. Ce comportement résume en partie la difficulté qui subsiste dans la définition du statut juridique de la terre au Burkina. En effet, les actes sociaux étant sujets à conflits, qui de l'autorité coutumière et règlementaire détient la pleine compétence pour connaître des conflits fonciers ?

L'une des raisons qui rendent impérative l'institution d'une législation foncière acceptée par l'ensemble de la population et constituant de ce fait un gage de cohésion sociale est la difficulté de trouver un interlocuteur unique qui détient toutes les compétences pour connaître des conflits fonciers. Car à la dualité de la législation foncière, correspond une dualité des instances de règlement des conflits fonciers.

II - LA DUALITE DES INSTANCES DE REGLEMENT DES CONFLITS

La difficulté suscitée par la dualité des instances de règlement des conflits réside dans le fait que la terre coutumière désacralisée sort du régime foncier coutumier, ne serait-ce que par la volonté de celui qui l'a acquise.

L'immunité juridique conférée par les autorités politiques à celles coutumières revêt ici, son aspect le plus expressif et permet de percevoir le danger qui subsiste dans une politique foncière ne clarifiant pas les responsabilités de tous les acteurs.

1 Aline AKA, bulletin de liaison du Laboratoire d'Anthropologie Juridique de Paris n°26, sept 2001, pages 130-143

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M. OUEDRAGO Moussa évoque d'ailleurs cette situation dans son écrit en ces termes : «cependant, si les règles traditionnelles constituent la référence pour accéder au foncier, il n'est pas toujours le cas dans la gestion des conflits entre acteurs. En effet, en cas de conflit lorsqu `une partie des protagonistes n'est pas satisfaite de la manière dont le différend est réglé, elle fait recours aux juridictions modernes. A ce niveau les instruments sur lesquels se basent les juges pour dire le droit sont essentiellement constitués par les textes portant réorganisation agraire et foncière. Or, n'ayant pas été la référence au moment des transactions, la loi apparaît naturellement `'illégale `' pour légiférer sur la question suivant la perception des communautés rurales, notamment les sphères de décision sur le foncier. »

Evoquant les limites de la justice à rendre des jugements susceptibles d'apaisement ou de résolution de crises sociales créées par la gestion foncière des autorités coutumières dans certaines régions du Burkina, M. OUEDRAGO Moussa rapporte dans son écrit les propos d'un juge qui affirme que « les conflits fonciers tranchés selon la loi moderne et rien que selon elle ne s'éteignent jamais... dans tous les cas, en matière foncière, la raison en justice s'arrête généralement à la porte du palais et tout le monde en est conscient. »

III - LES EFFETS DE LA DECENTRALISATION INTEGRALE

Le danger qui menace la cohésion sociale du fait de la dualité de la législation foncière deviendra encore plus perceptible avec la mise en place d'instances administratives décentralisées au niveau local. La communalisation intégrale du territoire ajoute un nouvel acteur à la scène foncière ou les rôles ne sont toujours pas clairement définis. Il s'agit de l'autorité communale. Selon l'article 38 de la loi n°055- 2004/AN du 21 décembre 2004 portant Code Général des Collectivités Territoriales au Burkina Faso, « les ressources financières des collectivités territoriales sont constituées de recettes propres, de dotations budgétaires de l'Etat et de toutes autres contributions. »

Les collectivités territoriales décentralisées doivent donc générer elles-mêmes une partie de leurs ressources de fonctionnement. Les taxes foncières constituent actuellement une part importante des ressources communales Si les communes urbaines peuvent compter sur l'abondance des ressources provenant de l'imposition fiscale de l'activité économique qui a lieu sur leur territoire pour assurer une part

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importante de leur budget, celles rurales doivent trouver d'autres sources de revenus pour compenser la faiblesse des recettes de ce secteur. La terre jusque-là gérée par les autorités coutumières, loin de celles règlementaires, constitue la ressource la plus importante en milieu rural et celle sur laquelle les autorités communales peuvent imposer des taxes substantielles. C'est ainsi que la quasi-totalité des communes rurales de la province du Kadiogo a institué la perception d'un droit sur les procès verbaux de palabre destinés à constater l'accord des superficiaires pour l'occupation des terrains en zone rurale.

L'examen du statut juridique de la terre permet de relever la complexité de la situation foncière du Burkina. Les deux législations foncières qui ont administré les terres jusque-là, comportent toutes des insuffisances. Mais ce qui peut paraître comme de véritables divergences entre elles peut trouver des points de convergence, si le politique à qui incombe la destinée du pays, la cohésion et la stabilité sociale ainsi que le développement économique décide de poser les actes nécessaires pour unifier le régime juridique de la terre. Sans une définition claire de ce statut, il n'est pas possible de déterminer et sécuriser les droits des différents acteurs, et donc d'assurer un développement socio-économique durable.

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CONCLUSION PARTIELLE

La précarité de la cohésion sociale qui résulte de la dualité du système foncier et de l'absence de coordination des actions et des responsabilités des différents acteurs est un facteur d'insécurité des droits fonciers qui freine le développement économique. Conscientes de cette situation, les autorités politiques ont entrepris d'instituer une législation foncière unique afin d'offrir aux différents investisseurs, la sécurité juridique nécessaire pour que la terre, ressource principale de l'économie du Burkina, soit son levier de développement. La faiblesse de la législation foncière règlementaire réside dans l'approche de la question foncière par l'autorité politique qui n'a pas suffisamment modelé les règles reçues du colonisateur pour intégrer les paramètres socio-culturels du Burkina.

Trois textes de loi portant RAF ont été successivement adoptés pour corriger les insuffisances de la loi. D'autres encore pourraient être institués, mais risqueraient de produire les mêmes effets si l'approche politique n'intègre pas la légitimité de l'autorité coutumière. Les plus hautes autorités burkinabè reconnaissent d'ailleurs les insuffisances de la RAF et admettent qu'elles sont la source de nombreux problèmes fonciers tels que le changement de destination des terres (de cultures en parcelles d'habitation ou des terres aménagées pour des usages auxquels ils n'ont pas été destinés). En mai 2004, M. Adama FOFANA alors Ministre chargé des relations avec le parlement et porte parole du Gouvernement a évoqué lors d'un point de presse les problèmes des habitats spontanés en faisant référence aux conclusions d'un rapport inter - ministériel qui lie ces problèmes à des insuffisances de la RAF. « Les raisons des problèmes nés de l'occupation ou de l'affectation des terres, selon les conclusions du rapport, sont : textes de la Réforme Agraire et Foncière (RAF) incohérents, incomplets ou dépassés ; schémas d'aménagement du territoire non élaborés selon la vocation des terrains ; conflits de compétence dans l'administration et parfois même confusion de rôle ; irrégularités impunies.1 »

1 Journal « l'Observateur paalga » n° 7024 du 03 décembre 2007

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L'anthropologue américain Paul BOHANNAN suggère de remplacer les trois préjugés de l'approche coloniale, dont la conséquence est la dualité du régime foncier des pays d'Afrique noire, par les trois propositions que voici :

1) - les peuples ont une représentation propre du pays dans lequel ils vivent ;

2) - ils disposent d'une série de concepts pour parler et traiter des rapports entre eux et les choses ;

3)- l'aspect spatial de leur organisation sociale trouve, d'une façon ou d'une autre, une expression ouverte en paroles et en actes1.

Nous pensons, comme le suggère M. BOHANNAN, qu'en tenant compte de la représentation que se font les populations du Burkina de leur pays, la volonté politique pourrait mettre en place une législation foncière qui intègre cette représentation et acquiert par ce fait, la légitimité provenant de l'adhésion populaire à la loi. Car, comme l'indique Michel CREZIER, « si le modèle administratif français est aussi un `'modèle culturel», on comprend dès lors que l'imposition d'un appareil administratif ou étatique initialement conçu et progressivement révisé dans des sociétés non africaines ne peut que participer d'un mimétisme dont on mesure mieux l'inadaptation des instruments choisis. Une telle greffe débouche sur une crise, celle de l'Etat et de la légitimité de son pouvoir. »2

Les insuffisances des textes portant RAF au Burkina ont été relevées par plusieurs institutions ; certaines ont essayé de les corriger en proposant à la sanction législative, des textes destinés à règlementer certains domaines relevant de la RAF.

Dans le but de proposer une reforme foncière adéquate, nous procéderons à un examen des textes en projet d'adoption afin de les intégrer dans nos propositions s'ils satisfont à toutes les exigences de cohésion sociale et de développement économique.

1 « Land, Tenure and Land-Tenure », African Agrarian Systems, P. BOHANNAN, Oxford, 1963, page 106

2 « Le pouvoir fiscal en Afrique » Jean-Baptiste FOTSING, éditions LGDJ, paris, 1995, page 159.

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DEUXIEME PARTIE :

PROPOSITION DE REFORME

Depuis l'accession du Burkina Faso à l'indépendance, les régimes politiques qui ont présidé aux destinées du pays ont eu à coeur de disposer d'un outil juridique efficace pour mener à bien leur politique de développement. La loi étant le support de la politique, elles ont estimé que le préalable à tout dispositif juridique était la mise en place d'une politique globale et cohérente du secteur concerné afin que la loi accompagne la réalisation des objectifs de l'action politique.

Pour ce faire, et au regard des insuffisances de la RAF, le gouvernement du Burkina a entrepris, à travers le Ministère de l'Agriculture, de l'Hydraulique et des Ressources Halieutiques (MAHRH), de mettre en place une Politique Nationale de Sécurisation Foncière en Milieu Rural (PNSFMR).

Dans le but de proposer une reforme actuelle et réalisable (chapitre 2 et 3), nous examinerons la PNSFMR afin d'en tenir compte si ses dispositions satisfont aux impératifs de cohésion socio - culturelle et de développement social et économique (chapitre 1).

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CHAPITRE 1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE
REFORME EN COURS : LA POLITIQUE NATIONALE DE
SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL

La politique de sécurisation foncière est l'ensemble des processus, actions, et mesures de toute nature, visant à permettre à l'utilisateur et au détenteur de terres rurales de mener effectivement ses activités productives, en le protégeant contre toute contestation ou trouble de jouissance de ses droits1.

Selon le Ministre Salif DIALLO, Ministre d'Etat, Ministre de l'Agriculture, de l'Hydraulique et des Ressources Halieutiques, la question foncière ne se pose pas au Burkina (9 millions d'hectares dont 3,5 millions d'hectares emblavés actuellement) en terme de redistribution des terres mais essentiellement en terme de sécurité juridique sur les propriétés actuelles et à venir, aussi bien des particuliers que des collectivités territoriales constituées que sont l'Etat et les communes.

Pour sécuriser davantage les droits fonciers des acteurs ruraux, les autorités politiques du Burkina Faso ont entrepris l'élaboration d'une PNSFMR. Nous la présenterons (section 1) avant de relever ses forces (section 2) et ses insuffisances (section 3).

SECTION 1 : PRESENTATION DE LA POLITIQUE NATIONALE DE

SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL

La mise en oeuvre de la politique de sécurisation foncière en milieu rural se fera à travers un document portant PNSFMR qui contient l'ensemble des actions et des dispositions à mettre en oeuvre et une loi de mise en application de ces directives.

Ces documents (celui de PNSFMR et l'avant-projet de loi) ont été soumis à l'analyse des différents acteurs du milieu rural sur l'ensemble du territoire national.

1 Définition contenue dans le document de PNSFMR

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Nous présenterons le document portant PNSFMR (I), les conclusions des ateliers de concertations des acteurs du milieu rural (II) ainsi que l'avant-projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural (III).

I - PRESENTATION DU DOCUMENT DE PNSFMR

La PNSFMR vise à « assurer à l'ensemble des acteurs ruraux, l'accès équitable au foncier, la garantie de leurs investissements, la gestion efficace des différends fonciers afin de contribuer à la réduction de la pauvreté, à la consolidation de la paix sociale et à la réalisation d'un développement durable. 1»

Pour atteindre cet objectif global, la PNSFMR s'articule autour de six orientations principales qui comportent chacune des objectifs spécifiques qui constituent des axes à réaliser.

I-1- PREMIERE ORIENTATION : RECONNNAITRE ET PROTEGER LES DROITS
LEGITIMES DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS RURAUX SUR LA TERRE ET LES
RESSOURCES NATURELLES

Il s'agira de reconnaître les droits fonciers des productrices et producteurs ruraux, de l'Etat, des collectivités territoriales et des particuliers ; ainsi que la maîtrise locale des communautés villageoises et inter - villageoises sur les ressources communes de leur terroir.

1-2 - DEUXIEME ORIENTATION : PROMOUVOIR ET ACCOMPAGNER LE
DEVELOPPEMENT D'INSTITUTIONS LEGITIMES A LA BASE

Cette orientation se fera à travers les axes suivants :

- le renforcement de la participation des institutions locales à la gestion foncière ;

- l'implication des autorités coutumières dans la gestion foncière locale ; - la clarification des règles locales de gestion foncière rurale ;

1 Salif DIALLO, note introductive du document de PNSFMR.

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- la promotion de nouvelles approches d'appui et d'accompagnement de la constitution d'institutions villageoises et inter - villageoises légitimes.

1-3 TROISIEME ORIENTATION : CLARIFIER LE CADRE INSTITUTIONNEL DE
GESTION DES CONFLITS AU NIVEAU LOCAL ET AMELIORER L'EFFICACITE
DES INSTANCES LOCALES DE RESOLUTION DES CONFLITS

Pour y arriver la PNSFMR prévoit de reconnaître les prérogatives locales des institutions villageoises et inter- villageoises dans le règlement alternatif des conflits et renforcer leurs capacités.

1-4 - QUATRIEME ORIENTATION : AMELIORER LA GESTION DE

L'ESPACE RURAL

- Clarifier et définir les types de domaine foncier ;

- Délimiter les terres relevant du Domaine Foncier de l'Etat (D.F.E) et élaborer de manière participative des plans et schémas d'aménagements locaux ;

-Mettre en oeuvre des mesures spécifiques relatives à l'amélioration de la gestion des périmètres aménagés.

- améliorer la gestion des aires de préservation des ressources naturelles.

- mettre en oeuvre les mesures spécifiques suivantes relatives aux espaces ruraux : clarifier le statut des espaces ruraux : les immatriculer, leur attribuer des titres de jouissance, entreprendre des actions d'aménagement avec les acteurs concernés...

I-5- CINQUIEME ORIENTATION : METTRE EN PLACE UN CADRE
INSTITUTIONNEL COHERENT DE GESTION DU FONCIER RURAL

La gestion du foncier rural se fera par la mise en place d'institutions de gestion foncière :

- au niveau de la base ;

- au niveau intermédiaire ;

- et au niveau central.

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I-6- SIXIEME ORIENTATION : RENFORCER LES CAPACITES DES SERVICES DE
L'ETAT, DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE LA SOCIETE CIVILE EN
MATIERE FONCIERE

- Par le renforcement de l'efficacité des services techniques de l'Etat, des collectivités territoriales et de la société civile ;

- Et par la promotion et le renforcement des fonctions de suivi et d'évaluation de la sécurisation foncière.

II - CONCLUSIONS DES ATELIERS DE CONCERTATION SUR LA PNSFMR

Le document de PNSFMR a été soumis à l'appréciation des différents acteurs du milieu rural au cours de quatre ateliers organisés à cet effet à Kaya, Tenkodogo, Koudougou et Bobo-Dioulasso. Deux autres ateliers ont été organisés à Kaya et à Bobo-Dioulasso pour les élus locaux.

Les acteurs qui ont participé à ces ateliers ont eu entre autre à se prononcer sur l'implication ou non des autorités coutumières dans la gestion du foncier et sur la détention par l'Etat seul, de la propriété des terres. La majorité des participants a estimé qu'il était impératif d'impliquer les autorités coutumières dans la gestion des terres. Beaucoup d'entre eux ont trouvé que l'Etat ne devait pas être l'unique propriétaire des terres. Certains acteurs ont néanmoins émis des réserves ou fait des observations :

- Kaya : Les services techniques ont émis des réserves quant au désengagement de l'Etat qui selon eux, doit contrôler la régularité des aménagements.

-Tenkodogo : La question de l'implication des autorités coutumières a été diversement appréciée. Certaines personnes estiment que la PNSFMR les écartent tandis que d'autres pensent qu'elle les implique.

III - CARACTERISTIQUES DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE SECURISATION

FONCIERE EN MILIEU RURAL

L'avant-projet de loi de sécurisation foncière en milieu rural prévoit une instance de gestion des terres et précise la nature des droits fonciers ruraux.

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III-1- LE SERVICE CHARGE DE LA GESTION DE LA TERRE RURALE

Au niveau de chaque commune rurale, l'article 39 de l'avant-projet de loi crée un Service Foncier Rural (S.F.R) chargé de la gestion du foncier. Il effectue cette tâche « en collaboration étroite avec les services techniques compétents déconcentrés de l'Etat 1».

Il est appuyé dans sa tâche par une Commission Foncière Rurale (C.F.R) créée par l'article 41 au sein du Comité Villageois de Développement (C.V.D) de chaque village constitué.

III-2- LA NATURE DES DROITS SUR LA TERRE RURALE

L'avant-projet de loi stipule que les terres rurales constituent un patrimoine commun à la nation mais que l'Etat ne dispose pas d'une propriété de plein droit sur l'ensemble. Il institue des droits de propriété et d'usage sur la terre rurale. Pour ce faire il instaure deux domaines fonciers :

- le Domaine Foncier de l'Etat (D.F.E)

- le Domaine Foncier des Collectivités Territoriales (D.F.C.T)

La propriété foncière des personnes de droit privé est reconnue. L'avant-projet de loi classe la terre en deux catégories : d'une part, les terres susceptibles de cession et d'autre part, celles qui ne sont pas cessibles. Il confie l'élaboration de la PNSFMR au Ministère chargé de l'Agriculture, en collaboration avec les ministères concernés2.

III-2-1 Le droit de propriété

1) Les terres pouvant être cédées. Les terres rurales appartiennent aux personnes physiques ou morales suivantes qui disposent du droit de propriété à la suite des procédures d'immatriculation en leur nom :

- l'Etat, pour les terres rurales aménagées et celles qu'il acquiert à la suite

de négociations amiables avec les possesseurs fonciers ruraux. Ces terres entrent dans le DFE;

- les collectivités territoriales pour les portions du DFE qui leur sont cédées

1 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 40.

2 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, articles 3, 4 et 5.

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à titre définitif par l'Etat et celles qu'elles acquièrent à la suite de négociations amiables avec les possesseurs fonciers ruraux. Ces terres font partie du DFCT.

- Les possesseurs fonciers ruraux qui possèdent les terres rurales à titre individuel ou collectif (personne physique ou morale de droit privé, famille ou groupement de familles). Ils peuvent convertir leur possession foncière en droit de jouissance ou de propriété définitive par la procédure de l'immatriculation1.

2) Les terres ne pouvant pas être cédées. Il s'agit des terres n'appartenant pas en propre à des particuliers. Les communes rurales sont tenues de les recenser, les délimiter et les immatriculer en leur nom.

Ces terres acquièrent dès lors, les caractères de la domanialité publique et sont de ce fait inaliénables, imprescriptibles et insaisissables2.

III-2-2- les droits d'usage

Il s'agit des droits d'exploitation accordés par les possesseurs fonciers ruraux ou les maires à de tierces personnes à titre personnel et temporaire.

Constituent des droits d'usage fonciers ruraux :

- les prêts de terres rurales à caractère temporaire ou pour une durée indéterminée ;

- les locations de terres rurales, à l'exclusion des baux emphytéotiques ; - les autorisations temporaires de cultures ;

Le cas du bail emphytéotique. A la différence des autres droits d'usage, l'emphytéose constitue un droit réel immobilier que seul l'Etat peut accorder sur les terres qu'il a aménagé. Il est susceptible d'hypothèque et est consenti pour une période de 35 ans renouvelable3.

SECTION 2 : LES FORCES DE LA PNSFMR

I - L'APPROCHE POLITIQUE

L'approche de la question foncière par l'autorité politique traduit la volonté de celle-ci d'adapter la loi aux réalités sociales du Burkina et renforcer ainsi la cohésion

1 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 12

2 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 32

3 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, articles 34 et 35

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sociale. En témoigne la démarche consistant d'abord à élaborer un document cadre de politique nationale en matière foncière, qui a l'avantage de pouvoir intégrer tous les aspects socio - culturels de la société burkinabè avant de prendre une loi. Car la loi dont la portée est par essence générale ne peut intégrer de manière explicite, les préoccupations spécifiques de toutes les composantes de la société.

Cette approche constitue aussi une force de la PNSFMR au regard du fait qu'elle a permis aux différents acteurs ruraux de discuter de l'ensemble de la politique gouvernementale et d'émettre leurs observations avant que l'autorité politique n'adopte la loi.

II - LA PRISE EN COMPTE DES DROITS ACQUIS EN DEHORS DE LA LOI

REGLEMENTAIRE

La PNSFMR reconnaît l'existence de droits fonciers ne découlant pas systématiquement de la loi réglementaire. Près de vingt cinq ans après la suppression officielle des droits conférés par la coutume, l'autorité politique revient sur sa position en reconnaissant qu'une partie de la société burkinabè dispose de droits fonciers acquis sans l'autorisation de la loi et essaie de mettre en place un processus de publication de ces droits en vue de leur conférer les prérogatives du droit civiliste.

Pour ce faire, la PNSFMR reconnaît l'existence de deux concepts en matière de sécurisation foncière :

- le concept de légalité foncière qui permet à toute personne de défendre ses droits fonciers en les rendant opposables aux tiers ;

- le concept de légitimité foncière qui suscite la reconnaissance et le respect spontanés des droits de l'exploitant par toute la communauté.

La PNSFMR reconnaît enfin que la légitimité foncière permet de faire l'économie de nombreux conflits fonciers, ce qui nous semble important au regard du fait que c'est justement cette légitimité des autorités coutumières qui ne leur est toujours pas entièrement reconnue.

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SECTION 3 : LES INSUFFISANCES DE LA PNSFMR

La PNSFMR comporte de notre point de vue, certaines insuffisances. Nous en énumérerons quelques unes, qui nous semblent les plus importantes.

I - L'INADEQUATION ENTRE LA VOLONTE POLITIQUE ET LA PORTEE

DE LA PNSFMR

Ainsi que nous le précisions tantôt, l'objectif global de la PNSFMR est « d'assurer à l'ensemble des acteurs ruraux, l'accès équitable au foncier et la garantie de leurs investissements 1». La PNSFMR vise donc à protéger tous les acteurs du milieu rural contre tout trouble de jouissance de leur droit. La première insuffisance réside dans la spécificité du secteur que la volonté politique voudrait règlementer au regard de la portée de la PNSFMR et apparaît dans les notions d'acteurs et de milieux ruraux.

En effet, la notion `'d'acteurs ruraux» peut être comprise comme désignant tous les acteurs intervenant dans le milieu rural. Les acteurs intervenant dans le milieu rural sont d'abord des hommes et des femmes, des jeunes et des personnes adultes avant d'être des acteurs ruraux. L'action politique devait donc faire intervenir toutes les structures responsables du milieu rural, au lieu d'être l'apanage de quelques unes seulement. Ainsi, des ministères comme celui chargé de la jeunesse et celui chargé de la promotion de la femme, devaient être impliqués car ces structures maîtrisent mieux les préoccupations des couches les plus vulnérables de la population que sont les jeunes et les femmes.

Quant au `'milieu rural», il ne constitue pas une entité distincte et différente mais bien une partie de l'ensemble de la terre formant le territoire national. C'est peut être la raison pour laquelle des structures du Ministère chargé des Domaines, qui ne sont pas spécialisés pour gérer des zones spécifiques tels que le milieu rural, par opposition à celui urbain, ou le milieu d'habitation par opposition à celui commercial par exemple se sont toujours vues confier des missions de gestion du foncier. L'agriculture et l'élevage constituent certes des activités qui doivent disposer d'une

1 Note introductive de la PNSFMR.

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réglementation spécifique mais l'espace terrestre constitue un ensemble indissociable que la volonté politique doit atteindre dans son ensemble.

C'est de notre point de vue, une des raisons qui expliquent que depuis la constitution du territoire qui forme le Burkina, tous les régimes politiques, de la période coloniale à nos jours aient règlementé la terre par un dispositif juridique qui traite de la question foncière dans son ensemble. Les terres de Ouagadougou et de Bobo-Dioulasso sont différentes du point de vue des richesses qu'elles contiennent, et même des hommes qui y vivent car le Burkina est une diversité écologique et sociale. Mais la nation est unique et le dispositif juridique doit y être le même. Quelle différence y a-t-il entre les terres rurales et urbaines ? Les terres rurales ne peuvent- elles pas avoir vocation à devenir des terres urbaines un jour ? Surtout au Burkina, un pays en construction dont les terres urbaines continuent toujours de s'étendre sur celles rurales ?

II - LA REDEFINITION DU STATUT DE LA TERRE

La PNSFMR est, ainsi qu'elle se dénomme, une politique c'est à dire un ensemble de prévisions et d'actions. Les terres du Burkina ont toujours été administrées par une loi unique qui fixe les dispositions globales qui servent de référence à l'ensemble des acteurs et sur la base duquel chaque secteur élabore des documents spécifiques pour compléter les dispositions globales. Les droits pouvant être acquis sur la terre sont ainsi de mêmes natures quelque soit le type de terre concerné (rural ou urbain). Pour exemple, des secteurs comme celui des mines ont élaboré des lois spécifiques mais sans remettre en cause les principes fondamentaux de la propriété telle que définie par la loi globale que constitue la RAF.

La PNSFMR intervient sans abroger la RAF mais redéfinit sa notion fondamentale qui détermine le statut de la terre, c'est à dire celle de DFN. Le DFN n'étant pas constitué uniquement de `'terres rurales», nous pensons que l'action politique devait intégrer tous ses aspects et partant tous les secteurs de la vie nationale concernée par le foncier, dans un document de politique unique ne serait- ce que pour mettre en oeuvre en remplacement ou en complément de la RAF, un texte de dimension similaire. Ou alors, procéder d'abord aux modifications de la RAF avant de prendre des textes qui traitent du milieu rural, si elle désire revenir sur la composition du DFN et la nature des droits telles que définies par la RAF.

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La loi relative à la PNSFMR n'est certes pas encore en vigueur même si elle a été adoptée en Conseil des Ministres1, mais si elle le devenait un jour dans ses dispositions actuelles, les usagers se retrouveraient avec un texte définissant un DFN unique et un autre instituant différents domaines fonciers. Cette situation serait d'autant plus complexe que la première loi dispose pour l'ensemble des terres du Burkina et fixe pour cet ensemble, des droits différents de ceux que la seconde institue pour le secteur rural uniquement. Ainsi la RAF définit le DFN comme constitué de l'ensemble des terres du Burkina tandis que la loi de PNSFMR détermine un DFE, un DFCT et un patrimoine foncier des particuliers, dont la composition et la nature des droits sont différentes de celles du DFN.

III - LE STATUT CONFUS DE L'INSTANCE QUI GERE LA TERRE RURALE

La PNSFMR définit deux domaines fonciers appartenant à deux personnes morales, l'Etat et la collectivité territoriale décentralisée. La loi relative à la sécurisation foncière en milieu rural « crée 2» au niveau de la commune rurale le Service Foncier Rural (S.F.R) chargé d'administrer la terre rurale. La commune rurale étant une structure décentralisée dotée de la personnalité juridique et de prérogatives spécifiques, quel rapport existe entre elle et le S.F.R qui ressemble à une structure déconcentrée créée par une loi nationale ? Car la loi `'crée» le Service Foncier Rural au lieu de donner aux communes rurales le pouvoir de l'instituer par arrêté communal par exemple.

Cette situation nous paraît confuse au regard du fait que la PNSFMR confère la propriété de la terre aux communes rurales en créant leur domaine foncier propre. La propriété conférant un droit absolu, nous pensons que le législateur de la loi de sécurisation foncière en milieu rural devait aller au bout de sa logique et laisser aux collectivités, la latitude de disposer de leurs biens comme elles l'entendent, ou prendre la juste mesure des risques d'une telle disposition et reconduire la notion et la portée juridique du DFN telles que définies par la RAF.

1 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 61

2 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 39

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IV - LA NATURE INADAPTEE DES TERRES REVETUES DU CARACTERE DE

DOMANIALITE PUBLIQUE

L'avant projet de loi réintroduit la notion de terres vacantes et confère aux « espaces communautaires » les caractères des biens précédemment classés dans le domaine public de l'Etat.1

Ce n'est pas ici la nature du bien et le fait qu'il soit destiné à l'usage communautaire qui le rend inaliénable, insaisissable et imprescriptible mais le simple fait que la terre soit libre. L'article 32 de l'avant projet de loi instruit les communes rurales d'immatriculer « les terres n'appartenant pas en propre à des particuliers » en leur nom et confère à ces terres le caractère de domanialité. Cette disposition a suscité en nous les interrogations suivantes pour lesquelles le projet de loi reste muet :

- De quel délai dispose le possesseur pour faire reconnaître son droit vu que la possession n'est valable que s'il la déclare auprès des autorités communales et reçoit le document de possession délivré par le juge2 ?

En nous inspirant de l'échec des diverses initiatives passées tendant à obliger les personnes disposant de terres en vertu des coutumes à faire valoir leur droit par une déclaration administrative, nous pouvons affirmer qu'un risque subsiste qu'une partie des populations rurales ne satisfasse pas rapidement à cette exigence pour se faire reconnaître un droit qu'elle ne tient de toute façon pas de l'administration. Que deviendront alors les terres non déclarées ?

- Qui sont les possesseurs ruraux désignés par l'avant-projet de loi et pouvant faire valoir leurs droits sur la terre rurale ?

-Quelles sont « les terres n'appartenant pas en propre à des particuliers » ?

Les dispositions du projet de loi nous permettent d'affirmer qu'il ne s'agit ni des autorités coutumières, ni de la terre qu'elles régissent. En effet, l'article 14 précise que la possession de fait est constituée par l'utilisation effective de la terre par son exploitation régulière, son entretien, son aménagement et sa mise en valeur.

L'exercice du droit de propriété foncier coutumier ne se limitant pas aux espaces aménagés mais portant sur l'ensemble de l'espace de la communauté, le possesseur foncier n'est donc pas l'autorité coutumière. Celui-ci peut d'ailleurs faire

1 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 32

2 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 13

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valoir ses droits au même titre que les autres acteurs ruraux et dans les mêmes conditions, c'est-à-dire pour l'espace qu'il a effectivement aménagé. Cette situation qui ne résout pas le problème de la dualité des régimes fonciers, l'accentue par l'institution de nouveaux domaines fonciers.

Par ailleurs, le projet de loi ne dispose pas pour les biens énumérés à l'article 34 de la RAF et revêtu du caractère de domanialité publique. Quel est par exemple le statut des sous-sols contenant des minerais ?

V- LA PERSISTANCE DE LA DUALITE DES REGIMES FONCIERS

La PNSFMR reconnaît que les autorités coutumières constituent des acteurs incontournables en milieu rural mais les implique très peu dans la gestion foncière.

En effet, l'avant-projet de loi stipule que les autorités coutumières sont membres de plein droit des commissions foncières rurales1 mais l'examen des compétences de cette commission indique qu'elle constitue une structure d'appui et non de gestion du foncier. La PNSFMR prévoit certes l'implication des autorités coutumières dans la gestion foncière locale mais leur confère un rôle d'appui - consei l2.

La difficulté du respect d'une telle disposition réside dans le fait que les autorités coutumières pensent elles aussi être incontournables dans la gestion du foncier et disposer de droits qu'aucun dispositif juridique n'a réussi à leur enlever. Pourquoi se contenteraient-elles de rôles consultatifs quand elles disposent d'un véritable droit de propriété qui n'a jamais pu leur être contesté ? L'écart qui existe entre la perception que les autorités coutumières ont du rôle qu'elles pensent devoir jouer et celui qui leur est accordé par la PNSFMR est très perceptible dans les rapports des ateliers ou les groupes des autorités coutumières n'ont pas hésité à demander par moment la suppression de certains passages du document de PNSFMTR et leur remplacement par des dispositions qui disent clairement qu'elles doivent être membres de toutes les institutions qui gèrent le foncier3.

1 Avant projet de loi relatif à la sécurisation foncière en milieu rural, article 41

2 Confère axe 2 de la 2eme orientation de la PNSFMR

3 Se conférer à titre d'exemple aux recommandations des autorités coutumières relatives à l'axe 2 de la 2ème orientation à Kaya.

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L'anthropologie et la sociologie juridique démontrent que les dispositions législatives et institutionnelles ne doivent pas être conçues comme une somme de propositions techniques pour résoudre un problème donné mais comme un « phénomène social » dans lequel des groupes sociaux peuvent se saisir des propositions de développement que la loi leur fait, tout en s'efforçant de les infléchir pour mieux servir leurs propres intérêts1. Quelles que soient les formules utilisées par le législateur, seul l'intérêt de l'autorité coutumière déterminera sa bonne collaboration. La PNSFMR lui offre certes un rôle mais ses véritables prérogatives ne sont toujours pas reconnues. La propriété foncière coutumière n'étant pas formellement reconnue, la responsabilisation des autorités coutumières demeure insuffisante.

La dualité du système foncier n'étant pas résolue, toutes les difficultés de ce double mode d'administration de la terre subsistent et seront sources de conflits, surtout que le nombre de « propriétaire » de la terre augmente. Car nul n'ignore l'impact de la gestion du foncier par les communes urbaines sur la cohésion et la paix sociale. Si ces communes qui disposent de ressources alternatives plus importantes n'ont pu gérer convenablement la terre qui ne leur appartenait pas, celles rurales qui auront besoin de ressources financières qu'elles ne peuvent obtenir ailleurs risquent de constituer de sérieux concurrents aux autorités coutumières, surtout que la terre leur appartient. La paix et la cohésion sociale n'en seront que plus menacées.

VI - L'OUBLI DES COUCHES VULNERABLES

Le document de PNSFMR prévoit d'aider les couches les plus vulnérables, c'est-à-dire les femmes et les jeunes, à accéder à la terre rurale. Les différents acteurs ruraux ont d'ailleurs débattu de cette question pendant les ateliers de concertation.

Nous n'avons relevé aucune disposition dans l'avant projet de loi tendant à faciliter l'accès de la terre à ses couches de la société burkinabé, alors que tous reconnaissent l'impérieuse nécessité de les y aider.

1 « Opérations de développement et droits fonciers en Afrique - la lutte antiérosive au centre -ouest du Burkina Faso », Délise Y et Jacob J-P, dans la revue `'sécheresse», vol 3.

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La nouvelle approche de l'autorité politique, qui tient compte des droits acquis en dehors de la loi nationale dans la PNSFMR constitue une avancée dans le processus de mise en place d'une législation foncière qui constitue un outil de développement économique et qui intègre en même temps les réalités socio - culturelles du Burkina.

Cependant, la mise en place d'une politique foncière du milieu rural uniquement constitue une importante insuffisance car la terre burkinabè se retrouve subdivisée en deux entités régies par deux dispositifs juridiques différents. En plus, la dualité des régimes fonciers reste une entrave non levée à la mise en place d'une législation foncière légale et légitime, car l'implication des autorités coutumières est toujours insuffisante.

La terre burkinabè est disponible selon le Ministre Salif DIALLO. C'est justement cette disponibilité qui doit permettre de définir actuellement des droits adaptés à notre configuration sociale et prévenir ainsi tous conflits sociaux majeurs dans le futur. Car quoi que l'on dise, la patrie c'est d'abord la terre. Si la population burkinabè, dont la moitié a moins de quinze (15) ans aujourd'hui se retrouve un jour en voie de devenir `'étrangère» dans son propre pays, l'objectif de développement pourrait être atteint mais la paix sociale s'en trouverait sérieusement compromise. Nous proposerons dans les chapitres à venir, d'autres aspects d'une législation foncière au service de la cohésion sociale et du développement économique.

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CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL
DE COHESION SOCIO - CULTURELLE ?

L'histoire du Burkina Faso, aussi bien avant, pendant qu'après la colonisation montre à quel point il est difficile de définir une législation qui prend en compte les différents aspects de la corrélation entre la gestion du foncier et la consolidation de la cohésion et de la paix sociale. La situation foncière burkinabè est d'une telle complexité que toute proposition de solution semble relever de la gageure. Avoir donc la prétention de proposer une solution complète dans le cadre d'une réflexion individuelle est ainsi quasiment inimaginable. Nous nous intéresserons pour ce faire à quelques aspects spécifiques qui nous paraissent déterminants pour la cohésion sociale.

Selon Etienne le Roy, « le rapport foncier est un rapport social déterminé par l'appropriation de l'espace»1. Cette assertion résume toute la complexité de la situation foncière burkinabè. En effet, et ainsi que nous l'avons expliqué dans la première partie de cette étude, l'appropriation de la terre revêt au Burkina au moins deux significations : d'une part, il consiste à rendre propre à un usage et ne renferme dans ce cas qu'un droit d'usage ; d'autre part et selon la volonté politique du moment et les exigences économiques, il concerne l'action de s'attribuer la propriété de quelque chose et véhicule dans ce cas une conception ressemblant à celle civiliste de la propriété. Mais qui en diffère en ce sens que le droit de propriété tel que défini par la législation burkinabè n'accorde pas indéfiniment l'abusus au propriétaire. La terre burkinabè étant unique et non proliférante, l'élément fondamental de la cohésion socio - culturelle réside dans la définition de son statut, qui doit obligatoirement prendre en compte ces deux significations de l'appropriation. Pour y parvenir, il convient de faire l'état des éléments qui déterminent la cohésion socio - culturelle (section 1) afin de pouvoir en tenir compte dans la définition du statut juridique de la terre (section 2).

1 « L'appropriation de la terre en Afrique noire », éditions KHARTALA, Paris, 1991, page 11.

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SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LA COHESION
SOCIO - CULTURELLE

I - LES REALITES CULTURELLES DU BURKINA
I - 1 LA LOI ET LA COUTUME

La société burkinabè est caractérisée par la place prépondérante qu'elle accorde à la tradition dans ses différents aspects. Ainsi, les burkinabè sont dans leur grande majorité respectueux des exigences coutumières de leur village, des fois en dépit des dispositions règlementaires contraires. La loi conçue en ville définit les rapports de l'homme à la terre mais l'application au village respecte d'abord les rapports de la société à la terre avant d'introduire la loi. Le problème qui subsiste ici provient de l'inadaptation de la loi aux comportements des burkinabè et des insuffisances des coutumes :

- la loi est inadaptée car elle n'intègre pas les habitudes culturelles des burkinabè.

- la coutume est insuffisante car elle ne satisfait pas à toutes les exigences de cohésion socio - culturelle.

I - 2 - LA LEGISLATION FONCIERE UNIFIEE

La législation foncière doit tenir compte des habitudes culturelles de la société burkinabè. Elle doit donc reconnaître les compétences des autorités coutumières en matière foncière et l'existence des droits fonciers coutumiers. Mais elle doit réguler l'exercice de cette compétence afin de ne pas reconduire la coutume intégralement car une telle attitude contribuerait à renforcer la dualité du régime juridique et éprouverait sérieusement la cohésion et la paix sociale.

En effet, un demi-siècle s'est écoulé depuis l'accession du Burkina à l'indépendance. Au cours de cette période, les coutumes burkinabè ont connu des mutations à l'instar de toutes structures sociales humaines. La législation foncière doit tenir compte de cette évolution. Selon l'anthropologue ivoirienne Aline AKA1,

1 « Analyse de la nouvelle loi de 1998 au regard de la réalité foncière et de la crise socio-politique en Côte d'Ivoire », Aline AKA, bulletin de liaison du l'AJP n° 26, septembre 2001

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pour qu'une coutume reproduise fidèlement les effets qu'on lui a connus à une certaine époque, il faut que la situation sociale et la logique fondant cette coutume existent toujours au moment où on la reconduit. C'est dire que reconduire la coutume peut contribuer à fragiliser la paix et la cohésion sociale car elle aussi est inadaptée aux réalités sociales actuelles.

Une législation foncière qui ne tient pas non plus compte de la coutume ne peut résoudre la dualité des régimes fonciers et se révèlera inefficace à long terme.

Au Burkina les mutations sociales de la coutume ont aussi été influencées par les différentes décisions politiques en matière foncière. Les autorités coutumières du Burkina ont toutes conscience aujourd'hui de ne pas disposer d'un droit absolu et au dessus de la loi nationale. Cette situation constitue de notre point de vue un élément que la volonté politique peut exploiter pour exercer aisément un contrôle de l'action coutumière sans trop de difficultés. Car reconnaître aujourd'hui l'existence de compétence foncière coutumière, c'est achever de réintégrer les autorités coutumières dans la vie communautaire dont ils avaient été quelque peu en marge depuis l'avènement de la première version de la RAF, en droits mais aussi en devoirs.

La législation foncière doit donc reconnaître la compétence des autorités coutumières en tant qu'acteurs fonciers et les impliquer dans toutes les étapes de la gestion du foncier. Pour ce faire il convient de:

1)- reconnaître la terre coutumière comme existante bien que faisant partie des terres du Domaine Foncier National du Burkina.

2) - reconnaître à l'autorité coutumière la compétence de la gestion de ces terres.

3) -reconnaître l'existence de deux types de droits fonciers coutumiers :

a- un droit de propriété collectif et non individuel.

b- des droits d'usage collectif et individuel.

4)- réglementer la transmission des droits fonciers coutumiers. Pour ce faire :

a - Pour ce qui est du droit de propriété. Au regard de son caractère collectif et non individuel, le déclarer non transmissible par des personnes agissant pour leur propre compte et non transmissible à des personnes autres que l'Etat. Pour la transmission du droit de propriété à l'Etat, instituer une cellule à mesure de poser les actes de transmissions et composée des autorités foncières coutumières et des représentants des différentes composantes du village.

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Exemple de cellule : Les personnes suivantes pourraient faire partie de la cellule, dans les régions où la configuration des villages est ainsi : le chef de village, le chef de terre, un représentant des femmes, un représentant des jeunes, un représentant des personnes qui exercent les activités menées dans le village (agriculture, élevage...).

La composition de la cellule pourrait être arrêtée par région. Confier aux autorités coutumières l'initiative des actions de transfert du droit de propriété mais déclarer délictuel et de nul effet tout transfert non cautionnée par la cellule de transfert.

Pour que la propriété foncière coutumière profite à l'ensemble de la communauté, et pour soumettre les actions des autorités coutumières à la sanction populaire, arrêter une grille de valeurs des terres coutumières qui fixe, en fonction des pratiques actuelles, la valeur minimum des terres coutumières par région. Elle aura deux avantages majeurs :

Pour les transactions du droit de propriété, elle servira de base au dédommagement de l'Etat. Prévoir qu'une partie des sommes issues de ces dédommagements soit obligatoirement reversée dans un compte collectif et serve à financer des activités de développement du village.

Elle servira aussi de base pour définir la valeur monétaire de la terre et permettra aux détenteurs de droits d'usage fonciers coutumiers de les transmettre, les prêter ou même les donner en garantie par exemple pour obtenir des financements au niveau des institutions qui accompagnent les activités rurales.

b- Pour ce qui est des droits d'usage coutumiers. Leur reconnaître des effets similaires mais de moindre portée que ceux des droits démembrés du droit de propriété. Pour ce faire circonscrire leurs effets en les limitant à des activités spécifiques, à un espace et à des investissements maximaux.

Par exemple le possesseur de droit d'usage coutumier pourrait se servir du document constatant la possession de ces droits pour les transmettre, les prêter, les gager... aux conditions cumulatives suivantes :

- Activités : si la terre objet du droit d'usage coutumier est destinée uniquement aux activités suivantes: l'agriculture, l'élevage et la pêche.

- Espace : si l'espace concerné ne dépasse pas une certaine superficie. -Investissement : si les investissements réalisés ou requis pour mener l'activité ne dépassent pas un certain montant. Ce montant pourrait être la limite

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maximale du financement dont le document de constatation des droits d'usages coutumiers peut servir de garantie par exemple.

On pourrait même aller plus loin en désignant les structures habilitées à octroyer des financements ou à constater la transmission ou le prêt des droits d'usage coutumiers. Les structures qui financent habituellement les activités agricoles, pastorales ou piscicoles pourraient être autorisées à recevoir ces documents en garantie des financements qu'elles octroient tandis que les services financiers des communes du lieu de situation de l'espace concerné pourraient être compétente pour connaître des actes de transmission ou de prêts des terres sur la base du document.

Mais dès que l'une des conditions énumérées n'est plus remplie, le document de constatation du droit d'usage coutumier devra être insuffisant pour sécuriser le droit concerné et pour l'utiliser. La gestion de la terre concernée n'étant plus de la compétence de l'autorité coutumière, celle réglementaire pourrait alors prendre la relève.

II - LES REALITES SOCIALES DU BURKINA

II - 1- PRESENTATION DE LA CARTE SOCIALE DU BURKINA

Dans le cadre de notre étude, nous avons choisi de relever quelques aspects de la société burkinabé qui peuvent avoir une influence sur la cohésion sociale.

II-1-1 - Présentation de la structure de la population du Burkina1
COMPOSITION DE LA POPULATION RESIDENTE

- Population totale résidente (selon le recensement de 2006) = 13.730.258 - Composée de : - Hommes : 6.635.318 soit 48,3% de la population totale

- Femmes : 7.094.940 soit 51,7% de la population totale

1 Source : Institut National de la Statistique et de la Démographie du Burkina

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REPARTITION DE LA POPULATION RESIDENTE PAR SEXE SELON LE MILIEU

DE RESIDENCE *

MILIEU DE
RESIDENCE

SEXE

MASCULIN

FEMININ

TOTAL

URBAIN

1.380.320

1.386.063

2.766.383

RURAL

5.254.998

5.708.877

10.963.875

TOTAL

6.635.318

7.094.940

13.730.258

*Source : Institut National de la Statistique et de la Démographie du Burkina

INFORMATIONS COMPLEMENTAIRES

Structure de la population par âge

- Population âgée de 0 à 14 ans : 46,8% de la population totale.

- Population âgée de plus de 14 ans : 53,2% de la population totale. Population vivant hors du Burkina : Nous n'avons pas pu obtenir de statistiques récentes mais en 2000, la population résidente qui avait séjourné au moins une fois et pendant plusieurs années hors du Burkina mais était revenue pouvait être estimée à environ 29% de la population totale ; Quant à celle qui vit actuellement hors du Burkina, elle avoisinerait 20% de la population résidente. Ce taux serait plus élevé avant la crise ivoirienne.

Taux d'alphabétisation : 25,7% de la population totale en 2005 selon les statistiques INSD.

Langues : Environ 60 groupes ethnolinguistiques.

Activités : -Agriculture, élevage, pêche : environ 86% de la population active

-Autres activités (commerce, activités salariées...) environ 14% de la population active.

II-1-2- Quelques observations sur la carte sociale du Burkina

Les informations de la carte sociale du Burkina nous permettent de faire six remarques sur la population burkinabé. Ces six observations constituent des facteurs qui influent à court et long terme sur la paix et la cohésion sociale

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1) - Le Burkina Faso compte une soixantaine de groupes ethnolinguistiques et donc au moins autant de diversités coutumières, établies dans plusieurs centaines de villages. Si l'Etat du Burkina Faso n'était pas constitué, l'espace qui le compose serait administré par au moins autant de lois foncières coutumières et chaque burkinabè serait toujours étranger quelque part dans cet espace.

2) - 46,8% de la population totale, soit environ six millions quatre cent vingt cinq mille sept cent soixante (6.425.760) personnes ont tout au plus quatorze (14) ans et n'ont donc pas l'âge minimum requis pour postuler à la possession d'un terrain. En effet, l'âge minimum requis par la RAF pour être attributaire d'une parcelle est de quinze ans1. Cette portion passe à plus de la moitié de la population totale si l'on considère l'âge de la majorité juridique c'est-à-dire dix-huit (18) ans.

3) - Sur environ quatorze millions de personnes que compte le Burkina, près de onze millions vivent en milieu rural. Selon les informations recueillies à l'INSD, sur cinq (5) burkinabé, quatre (4) vivent en milieu rural.

4) - L'immense majorité de la population active tire ses revenus de la terre.

5) - Plus de la moitié de la population est composée de personnes vulnérables et défavorisées par la gestion foncière de l'autorité coutumière : il s'agit des femmes et des enfants.

6)- Une forte portion de la population burkinabé est immigrante et participe faiblement à la demande en terre au niveau national. Mais y a néanmoins droit, au même titre que la population résidente.

II - 2 - ELEMENTS CONCEPTUELS D'UNE LA LEGISLATION FONCIERE,

OUTIL DE COHESION SOCIALE

Ainsi que nous le rappelions dans le premier chapitre de cette partie, la loi doit être un phénomène social afin que les populations se l'approprient. C'est la condition sine qua non pour la rendre légitime. C'est la condition primaire pour rendre la loi vraiment applicable. C'est enfin de cette condition que découlent la légitimité et la sécurité des droits des individus. Nous reviendrons sur ce dernier point dans le troisième chapitre de cette partie.

1 Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF portant application de la RAF, Article 155.

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La législation foncière ne peut être vraiment au service de la cohésion sociale si la population dépendante de la terre qu'elle régit ne se sent pas protégée et prise en compte dans ses dispositions. La législation foncière burkinabè doit donc tenir compte de la configuration sociale du pays. Elle doit permettre l'égal accès à la terre, en vertu de l'article 1 de la Constitution du Burkina qui garantit à tous, l'égalité des droits devant la loi. Pour ce faire elle doit répondre à huit (8) aspirations qui nous paraissent essentielles :

1) - Au regard de la diversité de la configuration ethnolinguistique du Burkina, la législation foncière doit tenir compte des règles foncières coutumières mais ne doit jamais leur laisser la prédominance sur la loi nationale. A défaut, la cohésion sociale serait fracturée. Force doit donc rester à la loi nationale et à l'Etat qui constitue le garant de l'unité de la nation. La reconnaissance de la nature collective et non individuelle du droit de propriété coutumier et son mode de transmission permettrait de maintenir la cohésion sociale de la nation dont l'Etat constitue le garant.

2) - La population burkinabè est essentiellement jeune. La législation foncière doit protéger les droits de cette frange de la société. Elle doit donc préserver la terre pour cette population jeune ainsi que pour les générations futures. La loi et la coutume accordent au Burkina des droits similaires sur la terre. La législation foncière doit donc être l'expression de cette réalité. Le caractère absolu du droit de propriété qui pouvait constituer le point de divergence entre les deux législations foncières n'en constitue pas puisque la propriété selon la loi burkinabè ne confère pas l'abusus indéfiniment. La détention du droit de propriété par l'Etat constitue la meilleure garantie de la préservation des droits des générations futures.

3)- L'article 155 du décret 97-054/PRES/PM portant modalités d'application de la RAF permet aux autochtones âgés de quinze (15) ans et résidant dans les villages englobés par les lotissements de postuler à l'attribution d'une parcelle. Le délai de mise en valeur étant de cinq (5) ans (article 159 du décret précité), l'administration est fondée à retirer ces parcelles lorsque les autochtones ayant bénéficié de cette disposition dépasseront l'âge de vingt (20) ans. Combien de jeunes burkinabè sont à mesure de mettre une parcelle en valeur à cet âge ? Cette disposition, au lieu de préserver le droit de la jeunesse d'accéder à la terre, la fragilise au contraire et fait de ces jeunes des instruments de spéculation foncière aux mains des adultes qui utilisent leurs noms pour les attributions des parcelles destinées à être revendues

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plus tard. Pour éviter cela, l'âge requis pour postuler à une attribution doit être de vingt (20) ans pour tous.

4)- Quatre burkinabé sur cinq, vit en milieu rural. La loi doit disposer pour cette frange de la société en l'aidant à accéder à la terre. La reconnaissance de l'existence des droits fonciers coutumiers permettrait de sécuriser les droits déjà existants de cette frange de la population.

5)- L'immense majorité des burkinabé tire ses revenus de la terre. La loi doit sécuriser les droits de cette frange de la société. La reconnaissance des droits d'usage coutumiers et le fait de leur conférer des effets similaires à ceux des droits démembrés du droit de propriété civiliste contribueraient à sécuriser les droits des populations rurales.

6)- Plus de la moitié de la population est constituée de femmes et de jeunes qui sont considérés comme vulnérables au regard de la précarité de leurs conditions de vie. La loi doit protéger cette frange de la société et résoudre sa vulnérabilité en l'aidant à accéder à la terre au même titre que les couches non vulnérables. La législation foncière pourrait s'appuyer au départ, sur l'existant en milieu rural. Dans ce cas, elle pourrait commencer par favoriser l'accès des jeunes et des femmes organisés en association car des milliers d'associations existent en ville et en campagne et sont pleinement intégrées à la vie communautaire. Ensuite les attributions individuelles pourraient suivre.

7)- Une importante portion de burkinabé vit hors du pays. Selon l'article 13 de la déclaration universelle des droits de l'homme « toute personne a le droit de quitter tout pays, y compris le sien, et de revenir dans son pays. » La législation foncière doit donc tenir compte de la frange importante de burkinabè vivant hors du pays. Elle doit pour ce faire veiller à décourager la spéculation foncière et accorder des droits ne remettant pas en cause l'accès à la terre des burkinabé vivant à l'étranger, en conformité avec les dispositions de l'article précité.

8)- La majorité de la population burkinabè n'a pas un niveau d'éducation lui permettant de lire et comprendre les dispositions législatives. Selon les statistiques de l'INSD, 74,3% de la population n'est pas alphabétisée. Cette portion passe à plus de 85% si l'on considère les personnes qui n'ont pas le niveau 3° de l'enseignement scolaire. C'est cette population qui tire le plus sa subsistance d'activités liées à la terre et qui a besoin de comprendre ses droits et devoirs tels que définis par la loi. La législation foncière gagnerait a être élaborée (ne serait-ce qu'en ses dispositions les

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plus usuelles) en langues nationales afin que cette population se l'approprie et soit à mesure de défendre ses droits face à ceux qui voudraient les spolier. Car si elle n'occupe pas la place qui peut lui revenir dans les esprits de l'ensemble de la population, la législation foncière règlementaire laissera à la coutume cet espace qui est pourtant celui qu'il convient de conquérir en premier.

Sur la base de la carte sociale du Burkina que nous venons de dresser et en fonction des facteurs déterminants de la paix et de la cohésion sociale, nous essayerons de définir le statut juridique de la terre.

SECTION 2 : DEFINITION DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE

Il s'agira ici de voir qui doit disposer du droit de propriété et définir le rôle des différentes autorités politiques qui sont impliquées dans la gestion de la terre jusque- là.

I - LES PERSONNES CHARGEES DE LA GESTION DE LA TERRE

L'histoire foncière du Burkina a été marquée par la présence de deux législations foncières qui se sont toujours disputées la gestion de la terre, l'une essayant de s'imposer et faire disparaître l'autre. Ces deux législations foncières sont les instruments de deux autorités politiques différentes, l'autorité politique investie du pouvoir d'Etat et celle coutumière.

La loi peut être efficace, applicable, juste et équitable dans ses dispositions, mais produire des effets pervers pendant son application. Car la loi est toujours l'instrument des hommes. Avant d'apprécier l'efficacité de la loi, il convient d'abord d`évaluer la rigueur avec laquelle les personnes qui la mettent en pratique ou qui veillent à son application travaillent. Au Burkina, c'est aux maires qu'incombe la gestion de la terre. Les services des impôts accompagnent l'autorité communale dans cette gestion et veillent à ce qu'elle se fasse dans le respect des lois en vigueur.

Quant à la terre coutumière elle a toujours été gérée par les autorités coutumières à savoir les chefs de terre et de village et toutes autres autorités coutumières investies de cette mission, selon le groupe ethnolinguistique.

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Plus d'un demi-siècle après l'accession du Burkina à l'indépendance le constat qui découle de la gestion du foncier par ces deux autorités permet de conclure que les personnes finissent toujours par agir au gré de leurs intérêts en appliquant la loi et non selon celui de la communauté :

- la gestion foncière des autorités communales n'a pas toujours servi l'intérêt de la majorité. Les problèmes sociaux et fonciers occasionnés par cette gestion sont toujours en attente de solutions.

- la gestion foncière des autorités coutumières a montré ses limites depuis que la terre a une importante valeur monétaire. Beaucoup d'autorités coutumières ont tout simplement bradé les biens de leur communauté sans vraiment associer la majorité de la population à cette gestion et sans se soucier des risques de fracture sociale qu'une telle attitude favorise.

Au regard de tout ce qui précède, la solution de conférer la propriété de la terre aux communes et donc de confier la gestion de cette propriété aux autorités politiques communales ou même à celles coutumières semble de notre point de vue, desservir la paix et la cohésion sociale. La législation foncière ne peut vraiment servir la paix et la cohésion sociale tant que des personnes disposeront du droit de propriété perçu au sens civiliste du terme.

La gestion de la terre non coutumière peut rester dans la compétence de l'autorité communale ; la reconnaissance de compétence de gestion à celles coutumières, et de droits transmissibles issus de cette reconnaissance permet de l'impliquer. L'autorité coutumière doit être membre des différentes instances de gestion foncières au niveau local pour apporter sa contribution et aussi prendre conscience des effets d'une gestion incontrôlée de la terre.

Mais le droit de propriété doit être détenu par une personne qui peut la protéger contre toute tentation, et qu'aucun facteur social ne peu corrompre.

II - LE DROIT DE PROPRIETE

Les législations foncières qui ont administré les terres du Burkina jusque-là ont conféré à des personnes non physiques le pouvoir de contrôle et de sanction de l'action humaine et ont limité les effets de tous les droits fonciers des personnes de droit privé:

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-la législation foncière réglementaire confère à l'Etat qui est une personne morale de droit public le pouvoir de contrôler les usages auxquels sont destinés les terres de toutes les personnes détentrices de droits fonciers précaires, permanents ou définitifs. Le droit de propriété est certes définitif et inattaquable, mais il ne porte en réalité que sur le sol et l'espace au dessus. En effet, même pour les terres appartenant en pleine propriété à des particuliers, la découverte par exemple de gisements dans le sous-sol, permet à l'Etat de reprendre la terre au propriétaire, certes contre juste dédommagement, mais sans aucune possibilité pour ce dernier de refuser de céder la terre qui lui appartient ou de demander par exemple une partie du gisement. Car les richesses du sous-sol sont exclues du droit du propriétaire.

- la législation foncière coutumière confère quant à elle, le droit de propriété aux forces surnaturelles qui ne sont pas des personnes physiques vivantes.

Etienne le Roy confirme cette assertion lorsqu'il affirme que « l'appropriation en Afrique se présente comme une affectation à un usage, avant d'être une attribution exclusive et absolue d'un bien1 ».

Par ailleurs le caractère absolu de l'appropriation telle que définie par le code civil menace la paix et la cohésion sociale car comme l'affirme SAHLINS2, «...l'appropriation au regard de la nature est proportionnelle à l'expropriation au regard de l'homme,» ce qui a pour conséquence de condamner une partie de la population à ne jamais disposer du bien commun.

En outre, les communes présentent des faiblesses similaires à celles de la coutume car les autorités communales appartiennent toujours à un parti politique, à un village, à une ethnie... par opposition aux autres partis politiques, aux autres villages, aux autres ethnies... Leur gestion sera toujours influencée par cette appartenance qui peut avoir un impact sur la paix et la cohésion sociale.

Au regard de tout ce qui précède, l'Etat apparaît comme la seule personne morale à mesure de détenir et préserver le droit de propriété car lui seul peut exiger et obtenir des comptes de la gestion des autres personnes (physiques et morales). C'est encore une raison pour laquelle, nous estimons qu'il doit être l'unique interlocuteur de l'autorité coutumière, pour la transmission du droit de propriété coutumier.

1

« L'appropriation de la terre en Afrique noire », éditions KHARTALA, Paris, 1990, page 14

2 SAH LINS citée par un article du FAO. Confère www.fao.com/

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Pour garantir la paix et la cohésion sociale, et obtenir la légitimité populaire, la législation foncière doit s'identifier à la société burkinabé et impliquer tous les acteurs. La législation foncière qui est adaptée aux réalités socio - culturelles du Burkina pourra constituer un véritable outil de cohésion sociale. Mais la paix et la cohésion sociale sont aussi tributaires du développement économique. Quelle législation foncière peut donc satisfaire aux impératifs de développement économique du Burkina ?

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CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL
DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?

Les ambitions de développement économique du Burkina semblent être l'une, sinon la principale cause de la difficulté d'institution d'une législation foncière unifiée. La prise en compte de la corrélation entre gestion foncière, paix et cohésion sociale apparaît presque comme impossible tant les exigences de développement économique semblent éloignées de celles de cohésion et de paix sociale.

Pourtant la sécurité foncière, outil fondamental du développement économique, ne peut se réaliser sans la prise en compte des exigences de cohésion sociale et de paix. La prise en compte de cette seconde corrélation entre la sécurité des droits fonciers, la paix et la cohésion sociale est la condition sine qua non de l'institution d'une législation foncière au service du développement économique.

Notre proposition d'une législation foncière qui satisfait aux exigences de développement économique commencera donc par la définition des éléments déterminants du développement économique (section 1) sur la base desquels nous essayerons de déterminer le type de législation dont les droits peuvent être sécurisés parce que adaptés à nos réalités socio - culturelles (section 2).

SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DU

DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

Pour les cerner, nous définirons d'abord le rôle de la loi dans le développement économique. Ensuite nous rechercherons les acteurs du développement afin d'identifier les droits adaptés à leurs ambitions.

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I - LE ROLE DE LA LEGISLATION DANS LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

I- 1- LA LOI ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

Le développement économique peut être défini comme l'amélioration qualitative durable d'une économie et de son fonctionnement1.

Les autorités burkinabè associent cette définition tantôt avec l'adjectif `'durable» ou `'social».

Le développement économique durable peut être défini comme une amélioration qualitative et pérenne d'une économie.

Quant au développement économique et social, il consiste à l'amélioration des conditions de vie de la société, issue de celle de l'économie.

C'est dire qu'il existe un lien étroit entre `'développement économique» et `'développement social». C'est de notre point de vue cette corrélation qui détermine le rôle de la loi. En effet, toute économie a besoin de s'appuyer sur un dispositif juridique efficace pour s'améliorer et se pérenniser.

Quant à la loi, elle ne peut offrir l'efficacité requise à l'économie que si elle constitue un phénomène social dont les individus se sont appropriés. L'efficacité de la loi exige et impose même qu'elle soit le reflet de la société. Les lois foncières burkinabè d'aujourd'hui présentent quelques insuffisances car elles intègrent insuffisamment les réalités socio - culturelles du Burkina. La solution d'abroger des règles (coutumières ou règlementaires) appliquées pendant une période, et instituer de nouvelles règles n'est pas non plus la bonne. Une telle attitude réduit davantage les chances d'applicabilité de la loi. « L'abrogation juridique n'implique pas une abrogation dans la conscience collective, car la règle connue demeure vivante dans la conscience de l'individu2 ».

La loi doit donc consister en une construction juridique qui part de l'existant, le modèle pour l'adapter à la société. La législation foncière modelée obtiendra la légitimité nécessaire lui permettant de sécuriser vraiment les droits des individus. Quand peut-on donc considérer que les droits fonciers sont sécurisés ?

1 Définition du dictionnaire « le dictionnaire le petit Larousse illustré"

2 www.FAO.com/ Archives de la FAO : « les besoins d'un droit pour une coviabilité à long terme des écosystèmes et des modes d'exploitation », page 23

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I-2- LA SECURISATION FONCIERE

Plusieurs études soutiennent la nécessité de sécuriser les droits fonciers et font de cela un préalable à tout développement économique durable. Nous paraphraserons le document de PNSFMR pour donner une définition de la sécurisation foncière.

I-2-1 - Définition

La sécurisation foncière peut être définie comme l'ensemble des processus, actions et mesures de toute nature, visant à permettre à l'utilisateur de terre de mener efficacement ses activités productives, en le protégeant contre toute contestation ou trouble de jouissance.

Cette définition semble de notre point de vue, contenir les différents éléments qui conditionnent la sécurité des droits. Ces éléments proviennent des termes processus, action, mesure, utilisateur, activité et contestation.

I-2-2- Les éléments déterminants de la sécurisation foncière

-1) Les processus. Pour qu'il y ait sécurisation foncière, la législation doit s'inscrire dans le cadre d'un processus. Ce processus doit concerner les textes qui doivent être modifiés au fur et à mesure pour être adaptés à la réalité socio - culturelle du Burkina. Il doit aussi concerner les populations que la sensibilisation peut convaincre de la nécessité de la loi et dont la loi doit intégrer les préoccupations.

-2) Les actions. Des actions doivent être entreprises par tous les acteurs du foncier. Les acteurs politiques doivent rendre la loi effective en veillant à ce qu'elle soit respectée. Ils doivent donner aux gestionnaires du foncier les compétences nécessaires et les appuyer dans l'exercice de ces compétences. Des actions continuelles et quotidiennes doivent être menées sur une période suffisamment longue pour que la loi soit effective dans son application. Elles permettront aux détenteurs des droits de pouvoir en jouir mais contrôleront aussi les abus.

-3) Les mesures. La législation foncière doit prévoir les conséquences des actes des individus. Les mesures doivent, par leur mise en oeuvre, encourager ou

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décourager certains comportements. Des dispositions spécifiques doivent être prises pour faire respecter les droits des couches spécifiques telles que les plus défavorisées qui constituent la majorité de la population. Elles rendront la loi pérenne et garantiront les droits acquis dans la durée, en les protégeant des contestations futures.

-4) Les utilisateurs. La législation doit protéger et encourager l'utilisateur de la terre à mener ses activités productives. La notion d'utilisateur revêt une importance capitale et doit être précisée. Car l'utilisation constitue le seul aspect contrôlé de la propriété civiliste. La non utilisation, la spéculation et l'utilisation contraire à la loi doivent être interdites et sanctionnées par des mesures vraiment appliquées.

-5) Les activités. La législation doit disposer pour les activités et protéger leur exercice. Les droits octroyés doivent correspondre aux activités entreprises. Leur consistance doit tenir compte de la nature de l'activité et des investissements réalisés par les utilisateurs. Les populations burkinabè exercent principalement l'agriculture, l'élevage et la pêche. L'agriculture est saisonnière tandis que l'élevage est transhumant. Ces trois activités s'exercent sur les mêmes espaces. L'agriculture occupe le sol surtout pendant la saison pluvieuse. Ensuite, l'élevage occupe le même espace en saison sèche. Agriculteurs, éleveurs et pêcheurs utilisent ensemble les cours d'eau en toutes saisons, mais surtout en saison sèche. Si les terres octroyées à l'agriculteur sont revêtues d'un droit absolu qui interdit à l'éleveur d'y accéder en saison sèche, la loi sera toujours source de conflits et donc d'insécurité foncière. De même que si le pêcheur dispose d'un droit absolu sur les abords des cours d'eau, empêchant agriculteurs et éleveurs d'y accéder.

-6) Les contestations. Elles constituent le principal facteur qui menace la sécurité foncière. C'est contre les contestations que la loi doit protéger l'utilisateur de la terre. Les contestations sont de deux ordres qui sont de notre point de vue, la résultante des deux composantes de la sécurité foncière. Il s'agit de la contestation légale et de celle légitime.

*La contestation légale : il s'agit de la remise en cause des droits par la loi. Elle est la plus facile à prévenir et à résoudre. Il suffit d'être en conformité avec la législation en vigueur pour protéger ses droits contre la contestation légale. Le respect de la législation confère la légalité des droits et protège l'utilisateur contre la contestation légale.

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* La contestation légitime : Il s'agit de la remise en cause des droits par la société. L'insuffisance de la prise en compte de cette forme de contestation constitue la raison fondamentale de l'insécurité foncière. Cette raison nous paraît si importante que nous pensons qu'elle explique les échecs de toutes les tentatives de résolution de la dualité des régimes fonciers et de sécurisation des droits des acteurs fonciers. Nous pensons qu'aucune sécurité foncière n'est réellement envisageable tant que les droits des utilisateurs ne seront pas protégés contre elle. Car la contestation légitime détruit la légitimité de la loi qui constitue la source des droits légaux et finit toujours par atteindre les droits acquis. La sécurité foncière issue de la légalité juridique ne peut être pérenne si elle ne provient pas aussi de la légitimité sociale. Une législation foncière qui octroie aux utilisateurs des droits légaux et légitimes parce que adaptés aux réalités socio - culturelles du Burkina leur offrira vraiment la sécurité foncière.

II - LES DIFFERENTS ACTEURS DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

Au regard de l'histoire foncière et des réalités socio - culturelles du Burkina, on peut regrouper les acteurs du développement économique en deux groupes : les acteurs politiques et les utilisateurs de la terre. Nous avons choisi de déterminer les acteurs avant de définir les droits afin que la loi reflète le rôle, les devoirs et les droits des personnes dont elle constitue l'instrument.

II-1- LES ACTEURS POLITIQUES

Il s'agit de l'Etat, du Ministre chargé des domaines, des maires et des autorités coutumières.

- L'Etat : Il instaure la législation foncière. Il est le garant du respect de la loi et constitue de ce fait la seule autorité à mesure de sécuriser les droits exercés par les personnes

-Le Ministre chargé des domaines : il l'exerce en pratique la propriété de l'Etat et contrôle le respect de la loi. Il est chargé d'octroyer le droit de propriété tel que défini par la loi, aux personnes.

-Les maires : ils gèrent la terre et octroient les droits de jouissance.

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-Les autorités coutumières : elles gèrent la terre et octroient les droits d'usage prévus par la coutume.

II-2- LES UTILISATEURS DE LA TERRE

Il s'agit de l'Etat pour le compte des structures publiques et para - publiques centrales et déconcentrées, des services publics décentralisés, des personnes physiques et morales de droit privé, qui mènent des activités productives à savoir les agriculteurs, les éleveurs, les pêcheurs, les artisans, les industriels, les commerçants... et les personnes qui utilisent la terre pour y bâtir des maisons d'habitation ou pour y mener des activités non lucratives (associatives, religieuses...) ...

II-3 - LES AUTRES PERSONNES PHYSIQUES ET MORALES

Il s'agit de toutes les personnes physiques et morales qui accompagnent les différents acteurs de développement et qui conditionnent l'octroi de leurs services par des garanties constituées de droits fonciers sécurisés. On peut citer de manière non exhaustive les institutions financières nationales et internationales...

III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES ROLES DES ACTEURS DE

DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

Les observations suivantes peuvent être faites sur les rôles des différents acteurs de développement économique, par rapport à la nature et à la gestion des droits fonciers.

III-1- LES INSTANCES CHARGEES DE LA GESTION DES TERRES

La gestion du foncier est assurée par des autorités politiques :

- l'Etat représenté par le Ministre chargé des domaines (actuellement le Ministre des finances) pour l'exercice du droit de propriété ;

- les autorités communales et coutumières pour la gestion des terres et l'octroi des droits de jouissance.

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III-2- L'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIETE

Le droit de propriété est détenu par l'Etat, mais son exercice est confié au Ministre des finances. L'une des raisons de la difficulté de la mise en oeuvre de la RAF provient de ces dispositions.

En effet, la propriété de l'Etat a été très peu perçue dans la réalité en raison du fait qu'elle est confiée à une autorité concentrée alors que celui-ci ne dispose pas de moyens humains adaptés (c'est-à-dire revêtu de pouvoir politique) , pour l'exercer effectivement sur le terrain. Parallèlement la loi confère aux autorités communales qui sont des structures décentralisées (et des autorités politiques), la gestion des droits d'usage, issus du droit de propriété. On pourrait caricaturer cette situation en disant que le droit de propriété est à Ouagadougou (lieu de situation du Ministère des finances) tandis que le droit d'usage est partout au Burkina (dans les lieux où sont situées les autorités communales et coutumières).

La gestion du foncier étant de la compétence des autorités politiques, les services déconcentrés du Ministère des finances ne peuvent exercer un contrôle efficace de leur gestion. Ces autorités étant de fait, hors du contrôle des structures déconcentrées de l'Etat qui les accompagnent dans leur gestion, le contrôle du respect des dispositions législatives devient difficile.

En fonction des éléments déterminants du développement économique que nous venons d'énumérer, nous essayerons à présent de proposer les éléments d'une législation foncière à mesure de les satisfaire et de respecter les impératifs de paix et de cohésion sociale.

SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE
DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ?

Pour pouvoir prendre en compte les préoccupations des différents acteurs du développement dans la proposition d'une législation foncière unifiée à mesure de résoudre les effets pervers de la dualité des régimes fonciers appliqués jusque-là, nous ferons dans un premier temps, une présentation sommaire de la situation socio- économique du Burkina. Ensuite nous procéderons à la définition du statut

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juridique de la terre et du rôle que pourraient jouer les différentes autorités politiques. Enfin nous définirons les droits des différents acteurs en tenant compte des exigences de sécurité foncière.

I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU BURKINA

Les statistiques de l'INSD fournissent les informations suivantes sur la population burkinabè.

- Population vivant avec moins de 1 $ US/jour : 27,2% de la population totale ;

- Population vivant avec moins de 2 $ US/jour : 71,8% de la population totale ;

- Population vivant en dessous du seuil de pauvreté (c'est-à-dire disposant d'un revenu annuel ne dépassant pas 82.672 francs CFA) : 46,4% de la population.

Selon ces informations, la majorité des pauvres se trouve en milieu rural et mène les activités agricoles ou pastorales. Les couches vulnérables de la population (les femmes, les jeunes et les enfants) sont les plus exposées à la pauvreté.

II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE

Les différents acteurs du milieu rural qui ont participé aux ateliers de concertations sur la PNSFMR ont tous soutenu l'idée que l'Etat ne soit plus l'unique propriétaire de la terre.

Mais nous avons expliqué dans cette étude que la loi étant l'instrument des hommes, toutes les personnes physiques qui ont administré la terre jusque-là, ont fini par agir dans leur intérêt (personnel ou politique). Une telle attitude porte atteinte à la cohésion sociale sans laquelle aucune sécurité réelle des droits n'est possible.

La difficulté d'accorder le droit de propriété à des structures pilotées par des personnes physiques est encore plus perceptible lorsque l'on considère les exigences de sécurité foncière. De notre point de vue, un lien doit être établi entre la durée de gestion du droit de propriété (par les personnes habilitées à le faire et pour la période pendant laquelle elles répondent vraiment de leur gestion) et celle de l'effectivité du droit accordé aux utilisateurs du foncier. Car la gestion des hommes peut être sujette à conflits, alors que les conflits sociaux peuvent fragiliser la sécurité foncière. En effet, la durée de gestion foncière des hommes est nettement inférieure à celle des besoins de sécurité foncière. Les autorités politiques exercent dans le

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meilleur des cas, leur fonction le temps d'une vie humaine, mais dans la plupart des cas, sur une période d'une quinzaine d'années tout au plus. La plupart d'entre elles se soucient beaucoup plus de leur propre bien-être pendant cette période, que des conséquences des actes qu'elles posent, dans le futur. La durée légale des entreprises peut quant à elle, aller jusqu'à quatre-vingt dix neuf (99) ans. Certaines entreprises exercent bien au delà de cette durée. La véritable sécurité foncière doit protéger les investissements de ces entreprises tant que durent leurs activités, et donc beaucoup plus longtemps après la période de gestion des autorités politiques, et même au-delà des régimes politiques qui ont institué la loi.

Pour ce faire, le droit de propriété doit être détenu par l'Etat en dépit des positions de certains acteurs du foncier. Nous pensons que la faculté de l`Etat à exercer un contrôle de la gestion des droits secondaires par les autres personnes, doit aussi venir de sa détention du droit de propriété.

Pour sécuriser les investissements, l'Etat doit octroyer des droits d'usage incontestables sur des périodes suffisamment longues pour rassurer l'investisseur.

III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES POLITIQUES
III-1- DANS L'EXERCICE DE LA PROPRIETE DE L'ETAT ET LE CONTROLE DE

LA GESTION DES TERRES

Le Ministre des finances doit être maintenu dans son rôle actuel et doit être compétent sur l'ensemble des terres du Burkina, quelques soient les usages auxquels elles sont destinées. L'unicité juridique de la terre burkinabè, qui résulte de l'unicité d'autorité, en sera préservée ainsi.

Mais il devra être appuyé dans l'exercice de ses fonctions par des structures politiques afin que le contrôle de la gestion des structures coutumières et administratives décentralisées soit effectué en temps réel par des structures de même nature. L'exercice du droit de propriété de l'Etat sera ainsi beaucoup plus perceptible. La mise en oeuvre du contrôle que l'Etat doit exercer sur la gestion des structures décentralisées sera ainsi beaucoup plus efficace.

La mise en oeuvre de telles dispositions pourrait se faire de manière progressive. Les Gouverneurs pourraient par exemple assumer cette fonction au niveau régional dans un premier temps. Ensuite une partie de leur responsabilité

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pourrait être conférée à des structures politiques beaucoup plus déconcentrées au fur et à mesure.

III-2-DANS LA GESTION DES TERRES

C'est au niveau de la gestion des terres que la dualité du régime foncier est la plus perceptible. La mise en place d'institutions locales de manière participative et consensuelle constitue de notre point de vue la voie d'institution d'une législation foncière unifiée. La gestion des droits fonciers doit se faire par stade.

- Le premier stade doit être du ressort des autorités coutumières. Pour ce faire une loi nationale doit être prise pour réglementer la constatation et l`exercice des droits fonciers coutumiers.

Des chartes locales doivent être élaborées au niveau de chaque commune, entre les détenteurs des droits fonciers coutumiers et les autorités communales, sur la base de la loi nationale et en tenant compte de la spécificité des villages, pour impliquer tous les acteurs dans l'exercice des droits octroyés par la coutume.

Les autorités communales pourraient intervenir à ce stade pour constater les différentes occupations et transactions foncières.

- Le second stade doit être du ressort des autorités communales. La gestion foncière des autorités communales doit commencer lorsque la terre a quitté la compétence de l'autorité coutumière. Le document de constat de l'occupation ou de la transaction foncière (entre l'autorité coutumière ou le détenteur de terres coutumières et l'acquéreur) peut constituer l'acte qui met un terme à la compétence de l'autorité coutumière. Il doit être dressé sous la supervision de l'autorité communale et impliquer la cellule foncière locale du village ainsi que les représentants du ministre chargé des domaines et des services concernés par l'activité qui est exercée sur la terre objet de l'acte.

Les différentes actions de gestion de l'autorité communale ne doivent commencer qu'après l'élaboration du document de constat d'occupation ou de transaction foncière.

- Lorsque la transaction est au bénéfice de l'Etat, d'un de ses services déconcentrés ou d'une structure que l'Etat appuie, l'interlocuteur de l'autorité coutumière pourrait être le Gouverneur qui agirait sous le couvert du Ministre des Finances et par le biais du Service des Domaines.

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- Par souci d'efficacité, la loi doit définir des délais pour les différentes transactions. L'autorité coutumière pourrait disposer pour ce faire, d'un délai maximal pour réagir à toutes sollicitations de l'autorité politique (centrale ou décentralisée) qui courra à compter de la date à laquelle la demande de terre est formulée à son niveau et qui est matérialisée par un document écrit.

IV- LES DROITS DES DIFFERENTS ACTEURS FONCIERS

Les différents acteurs du développement économique du Burkina recourent très souvent aux services des institutions financières nationales et internationales et à d'autres structures dans le cadre de leurs activités. Celles-ci exigent que les droits fonciers, donnés en guarantie de leurs différentes prestations soient sécurisés afin d'offrir une contrepartie sûre aux ressources qu'elles mettent à leurs dispositions.

Nous essayerons de définir les éléments qui conditionnent la sécurisation juridique des droits des utilisateurs et déterminent le degré de sécurité des investissements. Mais avant, nous proposerons des mesures qui nous paraissent déterminantes dans la lutte contre la pauvreté et la mise en oeuvre d'un véritable développement socio-économique. Car le développement économique de l'ensemble de la société Burkinabé constitue de notre point de vue, l'une des plus importantes garanties des droits fonciers.

IV-I QUELQUES MESURES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

Le développement économique s'entend ici, d'une progression de la situation économique de l'ensemble des couches composant la société burkinabè. Les conclusions des enquêtes menées par l'INSD, révèlent qu'une importante portion de la société burkinabé vit dans une situation économique relativement précaire et tire l'essentiel de ses ressources d'activités liées au foncier. On peut subdiviser la population burkinabè en trois groupes socio-économiques : les pauvres (environ 40% de la population), les moins pauvres (environ 40% de la population) et les riches qui constituent à peu près 20% de la population.

La portion des riches est celle qui dispose de la majeure partie des terres faisant l'objet de titres de possession.

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Quant à la plus grande portion de la population, (80% environ), elle vit dans une situation économique difficile, qui résulte en partie de la précarité de sa situation foncière. En effet, selon la Banque Mondiale, il existe un lien étroit entre la possession foncière, la sécurité des droits et la lutte contre la pauvreté. Elle a publié un rapport qui abonde dans ce sens et affirme qu' « une propriété foncière garantie et l'allègement des contraintes liées à la cession des terres permettent aux pauvres de mieux se prendre en charge, améliorent la gouvernance et produisent des avantages économiques pour tous. 1»

Sur la base des recommandations de ce rapport, nous proposons que la législation foncière favorise l'accès des pauvres et des moins pauvres du Burkina à la terre et facilite les modalités d'acquisition des droits fonciers.

1) Pour ce qui est de l'accès des pauvres à la terre, les mesures tendant d'abord à privilégier les associations paysannes, que nous proposions pour les couches vulnérables pourraient s'étendre à l'ensemble des pauvres et des moins pauvres, pour les terres destinées aux activités agricoles, pastorales et piscicoles. En plus de résoudre le problème de l'accès à la terre, elles pourraient insuffler une nouvelle dynamique de développement économique en résorbant le problème d'emploi des pauvres. Car selon des enquêtes menées par la Direction des Etudes et Programmes du Ministère de l'Agriculture en 1988 et interprétées par Monsieur Djibril TRAORE alors Directeur Général de l'ERPAD (Études et Réalisation de Projets d'Aménagement et de Développement), la propriété collective est plus créative d'emplois que la propriété privée2.

2) La réduction des droits de mutations aura l'avantage de permettre à une part importante de la population de satisfaire aux conditions d'acquisition des titres de possession. Ces mesures pourraient concerner les terres destinées à tous les usages, et principalement celles destinées aux activités précédemment énumérées ainsi qu'à l'habitation et aux activités commerciales dans les zones ordinaires. Puisque ces différents domaines sont ceux où s'investit la majorité de la population. Pour le cas spécifique des mutations des parcelles destinées à l'habitation dans les zones d'habitats ordinaires ainsi que celles destinées aux activités agricoles, pastorales et piscicoles, le droit pourrait être indexé sur la superficie (comme la taxe

1 http://qo.worldbank.org/VYMIQ2R350

2 www.fao.com/ Archives de la FAO. « L'Etat, la tenure communautaire et la participation populaire au Burkina Faso »

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de jouissance), au lieu de porter sur le montant de la transaction (qui inclut la valeur de la parcelle ou celle des investissements réalisés et qui décourage ainsi l'investissement).

La situation foncière du Burkina montre aujourd'hui qu'il y a beaucoup d'utilisateurs qui acquièrent les terres et n'engagent pas ou ne vont pas au bout des formalités de mutation à cause de leurs coûts élevés. Cette portion étant plus importante que la première qui est à mesure de satisfaire aux exigences financières de mutation, l'insuffisance de recettes qui pourrait résulter de la baisse des tarifs sera compensée par les sommes provenant des formalités que cette portion de la population accomplira pour sécuriser ses investissements.

IV- 2 -PROPOSITIONS DE RESOLUTION DE QUELQUES PROBLEMES
IV - 2 -1- Les problèmes des habitats spontanés

Les habitats spontanés constituent de véritables obstacles à la mise en oeuvre des opérations de lotissement et le contrôle de leur installation ainsi que la précision des conditions de leur prise en compte pour les attributions doivent être clarifiés.

Les difficultés causées par les habitats spontanés proviennent aussi bien des dispositions législatives que des pratiques des propriétaires fonciers.

En effet, l'article 155 du décret 97-054/PRES/PM portant modalités d'application de la RAF, permet d'attribuer des parcelles aux autochtones résidant dans les villages englobés par les opérations de lotissement. Quant à l'article 156 il donne la priorité d'attribution aux demandeurs résidents déguerpis. Le manque de précisions de ces deux (2) dispositions et les pratiques des propriétaires fonciers coutumiers créent des difficultés dans les opérations d'attribution des parcelles des zones nouvellement loties. En effet, que renferment exactement les notions de déguerpissement, d'autochtones et de résidence ?

- Les résidents déguerpis. Le droit de la personne déguerpie est-il lié à sa possession d'une maison duquel il est déguerpi ou au fait qu'elle résidait sur les lieux du lotissement ? Car plusieurs personnes peuvent occuper la même maison, avoir l'âge minimum requis pour postuler à la possession d'une parcelle. Par exemple trois (3) personnes adultes peuvent habiter une maison de trois pièces (3 chambres), appartenant à l'une d'entre elles ou même à une tierce personne.

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Chacune d'elles peut occuper une des pièces avec sa femme et même ses enfants. Si ces personnes sont contraintes de quitter la maison à cause de l'opération de lotissement, chaque famille subira le préjudice du déguerpissement. L'article 156 stipule que le demandeur résident déguerpi est prioritaire. Ces trois personnes ne sont-elles pas fondées à demander une parcelle puisqu'elles résidaient toutes sur les lieux avant le lotissement ?

- Les autochtones Comment déterminer l'autochtone ? Car la notion d'autochtone exige des précisions sur les origines des populations qui habitent les villages que les autorités communales ne peuvent définir seules. Face à cette difficulté, les maires et les préfets associent les autorités coutumières, ou laissent cette tâche à leur diligence. Alors que depuis 1984 (date de la première RAF), elles ne sont plus censées participer aux activités foncières. Comment contrôler alors la véracité des listes que celles-ci établissent ?

- La condition de n'avoir jamais été attributaire d'une parcelle dans la même ville. La gestion des attributions est laissée à la seule diligence des autorités communales qui ne disposent pas de moyens logistiques suffisants pour contrôler les attributions (informatisation systématique des listes d'attribution, établissement de banques de données sur les attributions par commune et mise en réseau de ces informations...). En plus, celles-ci n'ont pas ou ne perçoivent pas forcement l'intérêt de mener des contrôles sur les attributions, de nature à rendre effectif le respect de cette condition pour postuler à une parcelle. En effet, pendant les activités de lotissements, certaines autorités communales inscrivent dans leurs priorités, d'attribuer des parcelles à leurs proches (parents et amis politiques qui ne remplissent pas forcement cette condition) ou d'en vendre tout simplement quelques unes, soit pour assurer les frais de lotissement, soit pour se faire un peu d'argent. La règle de l'offre et de la demande, qui détermine les coûts des biens enseigne que plus la demande est importante par rapport à l'offre, plus les prix montent. Le respect de cette condition pour prétendre à une attribution permettrait d'écarter bien de postulants, ce qui diminuerait la demande et partant, amoindrirait les prix auxquels les parcelles peuvent être vendues. Devant un tel calcul, qui s'obligerait à dépenser pour contrôler le respect de cette condition et agir en même temps contre ses propres intérêts ?

Au regard de toutes ces difficultés, il convient de contrôler les installations dans les zones non loties. Pour y parvenir la mise à contribution des autorités

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coutumières et leurs désintéressements conséquents, établis en fonction des espaces à lotir qui leur appartiennent pourraient les amener à conserver leurs terres au lieu de les vendre à moindre prix aux personnes qui construisent les habitats spontanés.

Par ailleurs, les opérations de recensements révèlent de forte densité d'habitants sur les espaces avant les lotissements. Il n'est pas rare par exemple de recenser trois (3), quatre (4) ou même plus de logements sur un espace de deux cents cinquante mètres carrés (250 m2) par exemple; lequel espace correspond tout au plus à une parcelle dans certains lotissements. Cette situation (qui est très fréquente) aboutit des fois à l'établissement de listes de résidents comportant plus de personnes que de parcelles disponibles sur l'ensemble du lotissement. Comment satisfaire toutes ces personnes, ainsi que toutes celles qui ont le droit de postuler, même si elles ne résident pas dans les zones en voie de lotissement ? Face à cette situation, les autorités communales fixent des conditions spécifiques d'attributions pour chaque lotissement. Ces conditions peuvent aussi être subjectives ou servir des intérêts autres que ceux des populations. Face à ces difficultés, il convient :

1) de subordonner la prise en compte des personnes occupant les habitats spontanés par le respect par elles, de conditions d'occupations des zones non loties, qui soient harmonisées sur l'ensemble du territoire.

2) de définir des superficies minimales dont l'occupation peut permettre de recenser une personne comme résidente. La prise en compte du résident pourrait ainsi être indexée à la superficie de l'espace sur lequel il a investi au lieu d'être subordonnée à la seule condition de résidence. Considérons par exemple une zone où les parcelles loties ont des superficies de deux cents cinquante (250) mètres carrés. Si dans cette zone l'on établit que l'occupation de quatre cent (400) ou cinq cents (500) mètres carrés de zone non lotie donne droit à l'inscription d'un nom sur la liste des résidents, les personnes qui installent des maisons sur des superficies de moindre grandeur seront contraintes de s'associer pour pouvoir postuler à une parcelle au risque de perdre. L'espace que chacun doit occuper pour espérer obtenir une parcelle étant supérieure à la superficie d'une parcelle lotie , le risque d'avoir plus de résidents que de parcelles pourrait être quelque peu résorbé.

3) d'impliquer les autorités coutumières et les populations autochtones dans le contrôle des habitats spontanés. Pour y parvenir, il convient d'instituer un titre d'occupation foncière coutumière que celles-ci délivreront aux personnes à qui elles

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cèdent des terres. La délivrance de ce titre ne devra être possible que pour une superficie au moins égale à la superficie minimale dont l'occupation peut permettre de se faire recenser comme résidant dans la zone non lotie. Ainsi, pour la périphérie des villes telles que Ouagadougou et Bobo-Dioulasso où la superficie des parcelles des zones d'habitation traditionnelle peut atteindre 300 ou 400 mètres carrés, les propriétaires fonciers coutumiers ne doivent pouvoir délivrer de titre d'occupation foncière coutumière que pour les terres dont les superficies sont supérieures d'au moins 100 mètres carrés à celles des parcelles loties. La liste des personnes vivant dans les zones non loties et pouvant prétendre à une attribution de parcelle doit être conforme à la situation des personnes détenant les titres d'occupation foncière coutumière. Cela permettra de connaître à tout moment la situation exacte de l'occupation des zones non loties et d'éviter aussi tous les abus qui ont cours dans les opérations de recensement avant les lotissements.

4) d'appliquer le principe de l'égalité de tous devant la loi et de réguler les appétits des autorités coutumières. Celles-ci n'hésitent pas des fois à exiger des centaines de parcelles ou à prétexter l'existence de sites de cultes fictifs sur de grands espaces (de plusieurs hectares) pour en demander l'attribution. La reconnaissance de prérogatives foncières à l'autorité coutumières peut se traduire par l'attribution de quelques parcelles supplémentaires mais doit être régulée pour éviter les abus.

IV-2-2- Le problème des parcelles non mises ou insuffisamment mises en valeur

Une importante portion des parcelles attribuées aussi bien en zone urbaine que rurale ne sont pas mises en valeur ou le sont insuffisamment. Pendant que la satisfaction des demandes de parcelles est de plus en plus difficile, certains attributaires ne réalisent aucun investissement sur les espaces attribués, ne respectent pas les délais impartis pour s'acquitter des droits et taxes ou pour la mise en valeur des parcelles. Les délais de mise en valeur et de paiement des droits et taxes sont pourtant clairement définis par la RAF et sont connus de la quasi-totalité des acteurs fonciers.

Il convient de veiller au respect strict desdites conditions et de sanctionner les manquements par des retraits. Car les objectifs de spéculations foncières ne sont pas toujours étrangers à ce genre de pratiques. Surtout que les parcelles acquièrent

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toujours de la valeur au Burkina, par le simple fait du temps qui passe, même si elles ne sont pas mises en valeur. Sinon, comment expliquer que les populations s'organisent pour mener diverses actions revendicatives, quelques fois violentes afin d'obtenir des parcelles, au motif qu'elles n'ont pas de logement ; mais dès qu'elles sont satisfaites, les rythmes des investissement qui étaient si élevés au moment où les zones n'étaient pas loties, diminuent ? L'application des mesures de retrait empêchera une minorité de se faire attribuer des parcelles qu'elle ne peut mettre en valeur, juste dans le but de spéculer et de les revendre à prix d'or quelques années plus tard. Ces mesures doivent être appliquées à toutes les zones car la spéculation est plus importante dans les zones où les parcelles sont les plus coûteuses (zones commerciales, industrielles, résidentielles...)

IV-3- LES DROITS FONCIERS DES UTILISATEURS ET LES ELEMENTS

DETERMINANTS DE LEUR SECURISATION

La sécurisation des droits détenus sur la terre est un facteur déterminant du développement économique car elle constitue l'une des principales exigences du financement de l`activité économique. Ainsi que nous l'avons expliqué précédemment, la véritable sécurité provient beaucoup plus de la non contestation des droits par la société, que de la nature des droits détenus. Un titre de propriété ne vaut propriété que si la société reconnaît le droit du détenteur et le respecte. Il peut être valable quelques années ou le temps d'un régime politique, mais les changements à la tête de l'Etat et les exigences sociales qui les insufflent peuvent fragiliser la sécurité offerte par le titre si la société l'exige.

Mais les exigences sociales sont plus lentes à s'exprimer que celles économiques. Pour satisfaire aux impératifs économiques qui sont actuels, il convient d'offrir aux différents utilisateurs de la terre, des droits qui protègent effectivement les investissements réalisés.

Les différents droits démembrés du droit de propriété prévus par le code civil peuvent être détenus par les utilisateurs et peuvent sécuriser les investissements. Il s'agit principalement:

- de l'usufruit des biens immeubles ;

- du droit d'usage et d'habitation ;

- de l'emphytéose ou bail emphytéotique ;

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- du droit de superficie.

Ces droits sont à même de sécuriser les investissements et les titres permettant de les constater peuvent offrir la guarantie exigée par les investisseurs et les institutions financières, si les droits constatés ne sont pas susceptibles de contestations incontrôlées et s'ils sont acquis pour une période suffisamment longue (de la même durée que celle des entreprises par exemple).

C'est une législation foncière au service du développement et du bien être de l'ensemble de la population qui peut offrir aux différents acteurs de la vie économique du Burkina, la sécurité pérenne des droits fonciers. Elle doit donc être le reflet de la société dont elle veut servir les ambitions de développement économique, en intégrant le pluralisme culturel et juridique car « aucune société n'étant totalement homogène, le pluralisme juridique est la conséquence du pluralisme culturel.1 »

1 Confère Archives de la FAO au www.fao.com/ Titre : « le foncier -environnement : fondements juridico - institutionnels », page 3

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CONCLUSION GENERALE

Les Etats africains ont tous cru à leur accession à l'indépendance, à l'universalité du régime civiliste du droit de propriété et de la domanialité publique. « Le pouvoir de l'exclusivité individuelle qui transforme la terre ou le fonds en bien, constitue a-t-on pensé, un cadre de référence inévitable pour une société moderne. Mais lorsque le droit privilégie la dualité de l'appropriation privée/publique, il fait abstraction du rapport traditionnel entre les hommes et semble préférer un rapport économique homme/bien. Par conséquent la terre-fonds n'est pas considérée comme un patrimoine mais comme un bien, une chose monétarisée et appropriée. Cette conception propriétariste de la terre est antinomique avec la conception patrimoniale traditionnelle et actuelle des populations locales.1 »

L'inadaptation de la conception civiliste de la propriété avec celle locale des droits exercés sur la terre, est à la base de la dualité des régimes fonciers qui ont administré la terre au Burkina. La difficulté de se départir de l'héritage colonial, ou de le modeler profondément pour l'adapter aux réalités socio - culturelles du Burkina a entretenu cette dualité, éloignant ainsi la loi de la société burkinabè. Le droit ne doit pas être une abstraction, mais une réponse à un besoin d'organisation formelle de la société. Il doit partir de schèmes élaborés sur la base de données culturelles pour aboutir à la règle juridique. C'est à ce niveau que doit s'effectuer la synchronisation entre les normes juridiques et sociales. Quelque soit la règle codifiée, elle doit provenir du fond culturel.

Le droit peut-il être cet instrument qui transforme ou bouleverse les comportements sociaux ? Comment une loi peut-elle s'appliquer sans tenir compte des réalités et des diversités locales ? « Selon CARBONNIER, la norme juridique émane de la norme sociale dont elle constitue la codification des pratiques. C'est pourquoi la réalité culturelle est une donnée que le droit ne peut occulter puisqu'il la recouvre. La sociologie du droit souligne, à ce propos que le droit émane bien des hommes qui le plient à leurs intérêts mais aussi à leur prudence. La législation est flexible car soumise à la volonté des hommes, sans quoi le vent continuel de la

1 Archives de document de la FAO, www.fao.com/ « un droit étatique reposant sur la propriété foncière ».

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dynamique sociale ne cesserait de le briser en remettant perpétuellement en cause l'armistice social1. » La législation foncière du Burkina ne peut obtenir la légitimité sociale qui la rendra applicable et garantira par ce fait, les droits fonciers que si elle reflète la société burkinabè.

La législation foncière qui veut refléter la société burkinabè et prévenir les conflits sociaux, doit protéger la propriété des terres afin de la préserver pour la majorité de la population, les jeunes qui n'ont pas de droit foncier aujourd'hui ainsi que les générations futures. Elle doit éviter de favoriser les risques de fractures sociales en régulant le pouvoir (politique et coutumier) des hommes qui gèrent la terre. Pour cela, les faveurs de la loi doivent être au dessus de l'appartenance ethnique ou politique. Le droit de propriété, droit absolu sur la terre, ne doit pas constituer de ce fait un instrument aux mains de quelques privilégiés mais un outil de cohésion sociale, d'une communauté partageant un destin commun.

Mais la législation foncière doit être réaliste en reconnaissant l'existence de prérogatives foncières aux autorités coutumières. Les autorités politiques doivent prendre la juste mesure des conséquences de l'institution de textes fonciers irréalistes et accepter d'impliquer toutes les composantes de la société dans la gestion du foncier.

C'est seulement à ce prix qu'elles pourront garantir et pérenniser la paix et la stabilité sociale. Le bimensuel l'Evènement consacre trois (3) articles de sa seule publication du 10 janvier 2008, aux problèmes fonciers. Ces trois articles traitent de problèmes fonciers impliquant les autorités et les propriétaires fonciers coutumiers dans deux opérations de lotissement, l'une à Ouagadougou et l'autre dans le village de Bassinko. Quant au troisième article intitulé `'le foncier rural, une poudrière meurtrière», il traite de problèmes fonciers survenus sur des terres rurales et est assez révélateur du climat qui prévaut actuellement dans plusieurs localités du Burkina. « Le foncier rural est le théâtre de conflits itératifs qui finissent souvent par des voies de fait et des massacres. La zone de l'Est connaît ces derniers temps une effervescence dont les causes tiennent à des revendications foncières. On se souvient encore des jacqueries de Baléré où neuf personnes avaient perdu la vie. Plus près de la capitale, Nakamtenga sise dans la commune de Koubri a connu des oppositions qui ont failli tourner au drame, n'eût été l'intervention des sages de la

1 Archives de document de la FAO, www.fao.com/ « un droit étatique reposant sur la propriété foncière ».

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zone (...). Le foncier rural est aujourd'hui une poudrière qui risque d'hypothéquer le processus de décentralisation, si rien n'est fait pour délimiter les territoires communaux et clarifier les rôles et les compétences des acteurs. La RAF dont tout le monde semble stigmatiser les limites, continue pourtant de régir le foncier rural. Et l'on ne semble pas pressé d'en sortir comme s'il n'y a pas d'autres solutions à l'horizon. Pendant ce temps, c'est la pagaille qui s'installe sur le terrain avec les drames humains que l'on ne finit pas de déplorer. .. 1» Avoir la volonté politique et le courage de partager le pouvoir de gestion du foncier avec les autorités et les propriétaires fonciers coutumiers et les associer à toutes les étapes de cette gestion est la meilleure alternative pour assainir le climat social et faire face aux conflits qui sont de plus en plus récurrents.

La société burkinabè, à l'instar de toute organisation humaine, aspire au bien- être. Pour y parvenir, le préserver et l'améliorer continuellement, elle a besoin de se développer économiquement. Les ambitions de progrès économique rendent impérative la sécurité des droits fonciers des acteurs de développement. L'objectif de la sécurisation foncière est de garantir l'accès et la gestion d'un espace à une personne ou à un groupe social. Cette garantie de maîtrise spatio-temporelle ne peut être assurée que par un droit qui responsabilise à l'égard des ressources, stabilise les rapports sociaux, conforte et mobilise les investissements. La sécurité foncière doit avoir pour fonction, d'harmoniser les rapports entre les différents systèmes d'exploitation (moderne et traditionnel) et entre les usagers. Pour cela, et pour qu'elle soit effective à moyen et long terme, la gestion foncière doit être envisagée sur trois axes : institutionnel, règlementaire et décisionnel. Ce dernier est la pierre angulaire de toute stratégie de gestion.

La difficulté consiste surtout à trouver une législation foncière suffisamment opérationnelle. L'appropriation privative ne peut se conforter dans la société burkinabè où les rapports sociaux et fonciers, s'organisent davantage au sein du groupe avant de se définir au niveau de l'individu. En partant du modèle social burkinabè pour asseoir la loi, les droits fonciers qui en découleront pourront offrir la sécurité nécessaire à l'investissement et au développement économique.

Pour ce faire, la politique foncière doit être une politique des habitudes socio - culturelles du Burkina. Suite aux études qu'elle a diligenté sur la gestion de la terre et

1 Journal l'Evènement n° 131 du 10 janvier 2008.

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la lutte contre la pauvreté et après consultation de près de huit cents (800) spécialistes de la question foncière sur l'ensemble de la planète, la Banque Mondiale est arrivée à la conclusion que « la politique foncière est l'unique problématique du développement durable susceptible d'aider à préserver la paix et la stabilité, favoriser la croissance économique et un développement social juste et éclairer une gestion rationnelle des ressources.1 »

C'est dire que la gestion foncière est à la base de tout développement social et économique durable. Elle est d'une telle importance qu'elle doit être l'affaire de toute la société burkinabè. Nous l'avons réalisé au fil de nos recherches et tout au long des travaux d'élaboration de cette étude. Nous avons aussi réalisé l'impossibilité de traiter de tous les aspects d'un tel sujet par une seule personne, et surtout dans un document unique. Voilà pourquoi, nous espérons que cette étude constituera une contribution, si modeste soit-elle, à la longue et difficile quête d'une législation foncière qui reflète tous les aspects de la société burkinabè. Nous espérons enfin, qu'elle sera une approche quelque peu différente, de la question du foncier et constituera de ce fait, le début ou la suite de nouvelles perspectives de recherches et de discussions en vue de l'élaboration d'une législation foncière, au service de la cohésion sociale et du développement économique.

1 http://qo.worldbank.org/VYMIQ2R350. Confère rapport Banque mondiale sur la pauvreté et la gestion foncière.

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TABLE DES MATIERES

PREMIERE PARTIE : ETUDE SOMMAIRE DES LEGISLATIONS FONCIERES APPLIQUEES AU BURKINA FASO 9

CHAPITRE 1 : LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 10

SECTION 1 : LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COUTUMIER 10

I - LA PERSONNE HABILITEE A GERER LA TERRE COUTUMIERE : LE CHEF DE TERRE 10

II - LA NATURE DES DROITS FONCIERS COUTUMIERS 10

II-1:LE DROIT DE PROPRIETE 11

II-1-1 : Le mode d'appropriation de la terre 11

II-1-2 - La constitution du droit de propriété 11

II-1-3- La nature du droit de propriété 12

II-2 : LE DROIT D'USAGE INDIVIDUEL 12

III - LES COMPOSANTES DU REGIME FONCIER COUTUMIER 12

IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 13

IV-1- LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 13

IV-2- LE CONCEPT D'APPROPRIATION 13

SECTION 2 - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 16

I - LE RESPECT DES PRINCIPES FONCIERS COUTUMIERS 16

II - L'OCCUPATION OBLIGATOIRE DE L'ESPACE, UN PREALABLE A L'ACQUISITION DES DROITS

FONCIERS COUTUMIERS 16

III - L'EXCEPTION AU PRINCIPE D'INALIENABILITE DU DROIT DE PROPRIETE 17

SECTION 3 - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE 18

I - L'IMPOSSIBILITE D'ETABLISSEMENT DE LA PREUVE DE DROIT 18

II - LA PRECARITE DES DROITS ACCORDES AUX PARTICULIERS 18

III - LA PLURALITE DES REGIMES COUTUMIERS, UN FACTEUR D'EFFRITEMENT DE L'UNITE

NATIONALE 19

IV - LA LEGISLATION FONCIERE COUTUMIERE, UNE AFFAIRE D'HOMMES 19

CHAPITRE 2 : LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 20

SECTION 1- L'EVOLUTION DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 20

I - LE REGIME FONCIER COLONIAL 20

I-1 - LA DISTINCTION DOMAINE PUBLIC - DOMAINE PRIVE 20

I-1-1- Le domaine public 20

I- I-2 : Le domaine privé 21

I-2- LES CARACTERISTIQUES DU REGIME FONCIER COLONIAL 21

I-2-1- La personne habilitée à gérer les droits fonciers : le conservateur de la propriété

foncière 21

I-3 : LES DIFFERENTS DROITS DU REGIME FONCIER COLONIAL 22

I-4-LES MODES DE CONSTITUTION DES DROITS REELS IMMOBILIERS DU REGIME

FONCIER COLONIAL 22

I-4-1 : Le régime de l'immatriculation 22

I-4-2 : Le régime du titre foncier indigène 26

I-4-3 : Le régime du livret foncier 27

II- LE REGIME FONCIER POST COLONIAL 28

III- LE REGIME FONCIER REVOLUTIONNAIRE ET POST- REVOLUTIONNAIRE 29

III-I- LE DOMAINE FONCIER NATIONAL (DFN) 29

III-1-1- La constitution du DFN et la propriété de l'Etat 30

III-I-2- Les caractéristiques des biens du DFN 30

III - 2- LE DFN ET LA PROPRIETE DE L'ETAT 30

III-2-2- Le D.F.N. est de plein droit propriété de l'Etat. 31

III-3 - LE MODE DE CONSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE : L'IMMATRICULATION 31

SECTION 2 - LES CARACTERISTIQUES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 32

I - L'UNICITE D'AUTORITE SUR LA TERRE BURKINABE 32

II - LA PERSONNE QUI GERE LA TERRE : L'AUTORITE POLITIQUE 33

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III - LES OBJECTIFS DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 33

IV- LES MODES D'OCCUPATION DES TERRES 34

IV-1- LES TITRES DE JOUISSANCE 34

V-2- LE TITRE DE PROPRIETE 35

SECTION 3 - LES FORCES ET LES FAIBLESSES DE LA LEGISLATION FONCIERE

REGLEMENTAIRE 35

I - LES FORCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 35

I -1 -L'INSTITUTION DU DROIT DE PROPRIETE 35

I-2- L'ANNULATION DES DROITS DES PARTICULIERS PAR L'EXERCICE DE LA

SOUVERAINETE DE L'ETAT 36

II - LES INSUFFISANCES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 36

II -1- L'INADAPTATION DES REGLES DE LA LEGISLATION FONCIERE REGLEMENTAIRE 37
II - 2 - LES FREQUENTES MODIFICATIONS DES DISPOSITIONS DE LA LEGISLATION

FONCIERE REG LEMEMTAIRE 37
II- 3- LE MANQUE DE COHERENCE ENTRE PRATIQUES ADMINISTRATIVES ET

DISPOSITIONS LEGISLATIVES 39

II-3- 1 - Au niveau des structures de gestion 39

II 3- 2- Au niveau des services d'appui 40

II - 4 - «L'IMMUNITE JURIDIQUE» DES AUTORITES COUTUMIERES 41

II - 5 - LE PROBLEME DES HABITATS SPONTANES 42

II - 6 - LA SPECULATION FONCIERE 43

CHAPITRE 3 : ANALYSE DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE DU BURKINA 45

SECTION 1 : LES POINTS DE DIVERGENCE ET DE CONVERGENCE DES DIFFERENTES LEGISLATIONS FONCIERES 46

I - LES POINTS DE DIVERGENCE 46

II- LES POINTS DE CONVERGENCE 46

III - QUELQUES RAISONS DES DIFFICULTES D'INSTITUTION D'UNE LEGISLATION FONCIERE

UNIQUE 47

SECTION 2 : LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE 49

I - LA PROPRIETE ABSOLUE DE L'ETAT 49

II - LA DUALITE DES INSTANCES DE REGLEMENT DES CONFLITS 50

III - LES EFFETS DE LA DECENTRALISATION INTEGRALE 51

CONCLUSION PARTIELLE 53

DEUXIEME PARTIE : PROPOSITION DE REFORME 55

CHAPITRE 1 : ETAT DES LIEUX DES PROJETS DE REFORME EN COURS : LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL 56

SECTION 1 : PRESENTATION DE LA POLITIQUE NATIONALE DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU RURAL 56

I - PRESENTATION DU DOCUMENT DE PNSFMR 57

I-1- PREMIERE ORIENTATION : RECONNNAITRE ET PROTEGER LES DROITS LEGITIMES DE L'ENSEMBLE DES ACTEURS RURAUX SUR LA TERRE ET LES RESSOURCES NATURELLES 57 1-2 - DEUXIEME ORIENTATION : PROMOUVOIR ET ACCOMPAGNER LE DEVELOPPEMENT D'INSTITUTIONS LEGITIMES A LA BASE 57
1-3 TROISIEME ORIENTATION : CLARIFIER LE CADRE INSTITUTIONNEL DE GESTION DES CONFLITS AU NIVEAU LOCAL ET AMELIORER L'EFFICACITE DES INSTANCES LOCALES DE

RESOLUTION DES CONFLITS 58

1-4 - QUATRIEME ORIENTATION : AMELIORER LA GESTION DE L'ESPACE RURAL 58

I-5- CINQUIEME ORIENTATION : METTRE EN PLACE UN CADRE INSTITUTIONNEL COHERENT DE GESTION DU FONCIER RURAL 58

I-6- SIXIEME ORIENTATION : RENFORCER LES CAPACITES DES SERVICES DE L'ETAT, DES

COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DE LA SOCIETE CIVILE EN MATIERE FONCIERE 59

II - CONCLUSIONS DES ATELIERS DE CONCERTATION SUR LA PNSFMR 59

III - CARACTERISTIQUES DE L'AVANT-PROJET DE LOI DE SECURISATION FONCIERE EN MILIEU

RURAL 59

III-1- LE SERVICE CHARGE DE LA GESTION DE LA TERRE RURALE 60

III-2- LA NATURE DES DROITS SUR LA TERRE RURALE 60

Quelle législation foncière comme outil de cohésion sociale et de développement économique, adaptée aux réalités socio -
culturelles du Burkina ? Vos commentaires à l'auteur à l'adresse email suivante :
widap7@yahoo.fr

III-2-1 Le droit de propriété 60

III-2-2- les droits d'usage 61

SECTION 2 : LES FORCES DE LA PNSFMR 61

I - L'APPROCHE POLITIQUE 61

II - LA PRISE EN COMPTE DES DROITS ACQUIS EN DEHORS DE LA LOI REGLEMENTAIRE 62

SECTION 3 : LES INSUFFISANCES DE LA PNSFMR 63

I - L'INADEQUATION ENTRE LA VOLONTE POLITIQUE ET LA PORTEE DE LA PNSFMR 63

II - LA REDEFINITION DU STATUT DE LA TERRE 64

III - LE STATUT CONFUS DE L'INSTANCE QUI GERE LA TERRE RURALE 65

IV - LA NATURE INADAPTEE DES TERRES REVETUES DU CARACTERE DE DOMANIALITE

PUBLIQUE 66

V- LA PERSISTANCE DE LA DUALITE DES REGIMES FONCIERS 67

VI - L'OUBLI DES COUCHES VULNERABLES 68

CHAPITRE 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE COHESION SOCIO - CULTURELLE ? 70

SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LA COHESION SOCIO - CULTURELLE 71

I - LES REALITES CULTURELLES DU BURKINA 71

I - 1 LA LOI ET LA COUTUME 71

I - 2 - LA LEGISLATION FONCIERE UNIFIEE 71

II - LES REALITES SOCIALES DU BURKINA 74

II - 1- PRESENTATION DE LA CARTE SOCIALE DU BURKINA 74

II-1-1 - Présentation de la structure de la population du Burkina 74

II-1-2- Quelques observations sur la carte sociale du Burkina 75

II - 2 - ELEMENTS CONCEPTUELS D'UNE LA LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE

COHESION SOCIALE 76

SECTION 2 : DEFINITION DU STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE 79

I - LES PERSONNES CHARGEES DE LA GESTION DE LA TERRE 79

II - LE DROIT DE PROPRIETE 80

CHAPITRE 3 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, OUTIL DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE ? 83

SECTION 1 : LES ELEMENTS DETERMINANTS DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 83

I - LE ROLE DE LA LEGISLATION DANS LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 84

I- 1- LA LOI ET LE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 84

I-2- LA SECURISATION FONCIERE 85

I-2-1 - Définition 85

I-2-2- Les éléments déterminants de la sécurisation foncière 85

II - LES DIFFERENTS ACTEURS DU DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 87

II-1- LES ACTEURS POLITIQUES 87

II-2- LES UTILISATEURS DE LA TERRE 88

II-3 - LES AUTRES PERSONNES PHYSIQUES ET MORALES 88

III - QUELQUES OBSERVATIONS SUR LES ROLES DES ACTEURS DE DEVELOPPEMENT

ECONOMIQUE 88

III-1- LES INSTANCES CHARGEES DE LA GESTION DES TERRES 88

III-2- L'EXERCICE DU DROIT DE PROPRIETE 89

SECTION 2 : QUELLE LEGISLATION FONCIERE, COMME OUTIL DE DEVELOPPEMENT

ECONOMIQUE ? 89

I - PRESENTATION DE LA SITUATION DE LA PAUVRETE AU BURKINA 90

II - LE STATUT JURIDIQUE DE LA TERRE 90

III- LES ROLES DES DIFFERENTES AUTORITES POLITIQUES 91
III-1- DANS L'EXERCICE DE LA PROPRIETE DE L'ETAT ET LE CONTROLE DE LA

GESTION DES TERRES 91

III-2-DANS LA GESTION DES TERRES 92

IV- LES DROITS DES DIFFERENTS ACTEURS FONCIERS 93

IV-I QUELQUES MESURES DE DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE 93

IV- 2 -PROPOSITIONS DE RESOLUTION DE QUELQUES PROBLEMES 95

IV - 2 -1- Les problèmes des habitats spontanés 95

IV-2-2- Le problème des parcelles non mises ou insuffisamment mises en valeur 98

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IV-3- LES DROITS FONCIERS DES UTILISATEURS ET LES ELEMENTS DETERMINANTS DE LEUR SECURISATION 99

CONCLUSION GENERALE 101

TABLE DES MATIERES 105

BIBLIOGRAPHIE 109

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BIBLIOGRAPHIE

OUVRAGES GENERAUX

B. CROUSSE ; E. LE BRIS : L'appropriation de la terre en Afrique noire. P. MAHIEU Manuel d'analyse, de décision et de gestion

foncière ; éditions KARTHALA, Paris, Décembre 1991

P. BOHANNAN : Land, Tenure and Land-Tenure. African agrarian systèms

Oxford, 1963

J.B FOTSING : Le pouvoir fiscal en Afrique Noire

Editions LGDJ, Paris, 1995

B. CROUSSE ; E. LE BRIS : Espaces disputés en Afrique Noire E. LE ROY Pratiques foncières locales

éditions KARTHALA, Paris 1986

MEMOIRES ET COURS

V. Marcellin DAKUYO : Cours de Législation Domaniale et Foncière du cycle A de

l'ENAREF, année scolaire 2003-2004

Basile DARGA : La problématique de la sécurité foncière au Burkina Faso :

constats et perspectives.

Mémoire de fin d'études, ENAREF, mars 1998

Basile DARGA : Cours de Législation Domaniale et Foncière du cycle B de

l'ENAREF, année scolaire 2006-2007

Moussa TRAORE : Cours de Législation Domaniale et Foncière du cycle A de

l'ENAREF, année scolaire 2006-2007

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ETUDES

Moussa OUEDRAOGO : Le foncier dans les politiques de développement au

Burkina faso : enjeux et stratégies.

moussaouedraogo@yahoo.fr

Aline AKA : Analyse de la nouvelle loi de 1998 au regard de la réalité

foncière et de la crise socio -politique en Côte d'Ivoire. Texte paru dans : bulletin de liaison du LAJP, n°26 Septembre 2001

Bonoudaba DABIRE :Problématique de la gestion du foncier et du développement

durable au Burkina Faso. Quelle politique de sécurisation foncière ?

www.icarrd.org

Y. DELISE ; J.P JACOB : Opérations de développement et droits fonciers en Afrique :

Lutte antiérosive au centre ouest du Burkina Faso

Revue `' RECHERCHE» volume 3

Françoise KI ZERBO : Sécurisation des droits fonciers des femmes rurales : à

Georgette KONATE l'écoute de la loi et des coutumes

Souleymane OUATTARA GRAF OXFAM SOLIDARITE, BURKINA FASO, 2006

GRAF : Décentralisation rurale et responsabilisation des acteurs

locaux dans la gestion du foncier

Actes des journées nationales du foncier

OUAGADOUGOU, 24-25 Octobre 2003

GRAF : Politiques foncières et développement durable : les voies

de l'élargissement du débat

Actes des journées nationales du foncier

OUAGADOUGOU, 30 Novembre - 1er Décembre 2001

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TEXTES DE LOI, CODES ET DOCUMENTS DIVERS

- Constitution du Burkina Faso

- Code civil

- Déclaration universelle des droits de l'Homme

- Décret du 26 Juillet 1932 réorganisant le régime de la propriété foncière en Afrique Occidentale Française

- Décret du 8 Octobre 1925 instituant un mode de constatation des droits fonciers des indigènes

- Décret 55-580 du 20 Mai 1955 portant réorganisation foncière et domaniale en Afrique Occidentale française

- Loi 77-60/AN du 12 juillet 1960 portant règlementation des terres du domaine privé de la Haute Volta

- Ordonnance n° 84-050/CNR/PRES du 04 Août 1984 portant RAF au Burkina Faso

- Décret n° 85-404/CNR/PRES du 04 Août 1985 portant application de la RAF au Burkina Faso

- ZATU n° AN-VIII-0039 Bis/FP/PRES du 04 juin 1991 portant RAF au Burkina Faso

- KITI n° AN-VIII-0328 TER/FP/PRES/PLAN-COOP du 04 juin 1991 portant application de la RAF au Burkina Faso

- Loi 014/96/ADP du 23 mai 1996 portant application de la RAF au Burkina Faso

- Décret n° 97-054/PRES/PM/MEF du 06 Février 1997 portant conditions et modalités d'application de la RAF au Burkina Faso

- Loi n° 006/97/ADP du 31/01/1 997 portant Code Forestier au Burkina Faso - Loi n° 03-2003/AN du 08/05/2003 portant Code Minier au Burkina Faso

- Loi n° 055-2004/AN du 21/12/2004 portant Code Général des Collectivités

Territoriales au Burkina Faso

- MAHRH : Documents portant Politique Nationale de Sécurisation Foncière en Milieu Rural, Burkina Faso, Août 2007

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- Journal « L'observateur paalga » n° 7024 du 3-12-2007 - Journal « Le Pays » n° 2881 du 22-05-2003

- Journal « Le Pays » n° 3956 du 18-09-2007

- Journal bimensuel « L'évènement » n° 131 du 10-06-2008

- Archives FAO

- Dictionnaire « Le petit Larousse illustré »

- Code des Impôts Directs et Indirects du Burkina Faso






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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein