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Le cinéma d'horreur en France : entre culture et consommation de masse

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par Laure HEMMER
EAC Paris - Master 1 Management de projets culturels 2007
  

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2.2.2. Et les films d'horreur dans tout çà ?

Dans la même logique d'absence qui caractérise le cinéma horrifique au box office français depuis la fin de la guerre, on ne compte aucun film d'horreur sur les 100 meilleures ventes de films en vidéo de 1992 à 20072. Cependant, l'analyse de ce même classement portant sur la seule année 2005 révèle la présence de trois films d'horreur dans la deuxième moitié de la liste : Resident Evil : Apocalypse d'Alexander Witt, Saw de James Wan et The Grudge de Takashi Shimizu, respectivement au 59e, 93e et 95e rang3. Il convient toutefois de relativiser fortement ces résultats, ceux-ci étant évalués sur base déclarative des éditeurs/distributeurs. En outre, de nombreux articles économiques affirment la bonne santé du secteur, dans un marché déjà déclinant, correspondant à un chiffre d'affaires de 25 millions d'euros au rayon horreur en 20074 (sur un total de 1,481 milliards d'euros, comptant le film pour plus de 750 millions d'euros, le hors-film pour plus

1 Qui a cependant toujours du mal à décoller réellement, d'autant plus que les derniers chiffres de la consommation culturelle révélaient une hausse des ventes DVD en septembre-octobre 2008

2 Bilan 2007, chapitre 10 : La vidéo, CNC

3 Avec respectivement 209 115, 112 305 et 11110 340 copies déclarées

4 Article Le film d'horreur atteint des sommets en 2006, par Emmanuel Paquette, Les Echos du 15/02/07, annexe n°6, p.20

de 650 millions d'euros et les opérations promotionnelles pour environ 40 millions d'euros1). « au rayon horreur, le DVD a connu l'an dernier une croissance de 25% en France alors que le marché du DVD broie du noir2. » En effet, comme l'explique Muriel Becker, analyste chez GFK3, 6 titres du genre horrifique ont dépassé le million d'euros de recettes, alors qu'en 2005, il n'y en avait qu'un. On peut dès lors se demander comment se caractérise ce marché qui semble profitable aux films d'horreur, offrant une visibilité aux oeuvres n'étant pas sorties en salles et valorisant nettement les oeuvres déjà exploitées.

2.2.3.1. Des éditeurs/distributeurs généralistes entreprenants

Si l'horreur ne fait pas l'objet d'une politique éditoriale spécifique de la part des gros éditeurs, non-spécialistes, ceux-ci en proposent tout de même un nombre non négligeable. Nous en avons relevé 80, dans une perspective non-exhaustive, réalisant plus de 50 unités de vente par semaine début février4, dont plus de la moitié sont commercialisés par 5 distributeurs leaders du marché, que sont TF1 Vidéo (16 films), GCTHV et USCV (15 films chacun), FPE (14 films) et Seven 7 (9 films). OEuvrant dans une logique de positionnement et de recherche de rentabilité sur tous les genres, à la manière des distributeurs cinéma, il semble néanmoins que les éditeurs vidéo prennent moins de risques, étant pratiquement au bout de la chaîne de consommation cinématographique. Comme le rappelle Philippe Lux : «Nous devons effectuer un énorme travail en amont, que la vidéo n'a ensuite qu'à adapter à moindre frais pour son exploitation5 ». En effet, si les frais d'éditions d'un DVD sont plus élevés que ceux d'une VHS, ils sont naturellement décroissants avec les effets de structure dont bénéficient les éditeurs qui ont une place importante sur le marché de la vidéo. De plus, ils peuvent reprendre tout les supports publicitaires qui ont déjà été créés auparavant, ce qui permet d'économiser sur les sorties de second plan, pour lesquelles il n'y aura qu'un packaging restreint. Par exemple, pour certains films particulièrement mis en avant, des coffrets collectors limités sont édités -comprenant plus de bonus, donc ayant fait l'objet d'un travail supplémentaire spécifique à l'édition vidéo- alors que d'autres ne bénéficieront que d'un simple fourreau. Lorsqu'un film a très bien marché en salles, les éditeurs/distributeurs ne déploient pas d'énormes moyens pour en faire la promotion lors de sa sortie en vidéo. Le titre se suffit à lui-même et est à lui seul un gage de qualité.

1 Bilan 2007, chapitre 10 : La vidéo, CNC

2 Article Le film d'horreur atteint des sommets en 2006, op. cit.

3 idem

4 Voir tableau des films relevés sur baromètre GFK, annexe n°42, p.129

5 Voir entretien, op. cit., annexe n°27, p.70

A l'inverse, des films ayant moins bien fonctionné en salles, comme Le Labyrinthe de Pan de Guillermo del Toro, doivent être valorisés sur le mode de la différenciation du produit présenté en salles. C'est notamment ce qu'a fait l'éditeur Wild Side avec ce film, en le repositionnant clairement en horreur (alors qu'il avait été présenté comme un film fantastique/merveilleux) et en développant au moins deux éditions spéciales, avec de nombreux produits dérivés à gagner lors de concours avec des partenaires média et des enseignes. On peut dès lors supposer, au regard de ces pratiques, que les firmes éditant des films de type Saw, qui ne développent que peu de matériel annexe, s'adressent avant tout à un public composé essentiellement de consommateurs, alors que d'autres éditeurs s'attellent à toucher des collectionneurs et des fans, curieux d'en savoir plus sur le film et sur son univers, en même temps que d'autres clients moins assidus.

Afin d'étudier la démarche des éditeurs/distributeurs importants, prenons l'exemple de TF1 Vidéo dont le catalogue horreur comprend des titres importants comme Evil Dead, Détour Mortel, Wolf Creek, Isolation et d'autres. Si ces sorties DVD ne font pas l'objet d'une volonté particulièrement tournée vers le genre qui nous intéresse, c'est parce qu'elles sont principalement distribuées par TF1 pour le compte d'autres éditeurs. Ces films proviennent principalement de deux éditeurs américains que sont The Wienstein Company et Metropolitan Film Export Home, dont TF1 assure la distribution du catalogue (ou bien une partie, cela est mentionné dans le contrat) pour la France. La présence, plus ou moins importante de films d'horreur dans beaucoup de catalogues d'éditeurs/distributeurs généralistes, qui assurent une distribution étendue à tout le territoire français, des boutiques spécialisées et tous azimuts aux GSS (Grandes Surfaces Spécialisées -type Fnac/Virgin- concentrant près de 37% des achats de DVD à l'unité) et GSA (Grandes Surfaces Alimentaires -type Leclerc/Auchan- qui captent 46% de part de marché), atteste de l'importance marketing de ces produits. En effet, l'horreur fait vendre et cela ne fait aucun doute au regard des chiffres et du nombre d'opérations menées1. En mars 2008, TF1 a également proposé plusieurs opérations mettant en jeu des films d'horreur. D'une part, une importante « opération horreur », qui signait les deuxième et troisième vies sur une liste de 28 titres2. Parmi ceux-ci figuraient les trois premiers volets de la saga Saw, qui totalisaient plus de 350 000 DVD vendus fin févier. Ainsi au sein des titres qui se vendent à plus de 50 exemplaires au début de l'année 2008, la plupart des titres récents atteignent des scores tout à fait satisfaisant au regard des exigences de rentabilité des distributeurs. Le turn-over étant très rapide et la valorisation du produit déclinant promptement, un nombre important d'opérations

1 Voir chiffres de ventes des films relevés, annexe n°42, p.133

2 Voir lifelet promotionnel fourni par Jean-Emmanuel Papagno, annexe n°31, p.86

promotionnelles voient le jour (avec plus de 7,3 millions d'unité vendues en 2007, pour un chiffre d'affaires de près de 41 millions d'euros, ne représentant cependant que 2,8% de part de marché1). Toujours chez TF1 Vidéo, à l'occasion de la sortie de Planet Terreur de Robert Rodriguez, une opération de trade-marketing a été lancée dans les GSA Leclerc : pour l'achat d'un DVD acheté, des réductions étaient pratiquées sur une sélection d'autres oeuvres du catalogue du distributeur. Ces pratiques, qui couplent nouveauté et produits en seconde vie est très pratiquée depuis quelques années au sein d'un marché DVD en phase de maturité. La réactualisation des titres déjà édités ou distribués est à la fois une nécessité économique d'écoulement des stocks par une nouvelle exploitation et constitue une aubaine pour les consommateurs qui souhaitent se procurer des produits plus anciens à prix réduits. Les soldes sont également l'occasion de réduire les prix des DVD en les rendant plus attractifs, c'est ce qu'a réalisé Studio Canal, enseigne du groupe Canal+ qui s'investit durablement sur ce créneau comme nous l'avons vu en ce qui concerne la production française. En tant que distributeur vidéo, une collection intitulée Midnight Movies tient sa place à l'intérieur de son catalogue, qui réunit 44 titres aussi variés que Deallmorte Dellamore de Michele Soavi ou Hurlements de Joe Dante. Parmi ces films, déjà édités par la société, 20 ont fait l'objet d'une vente à 6,99 euros, ce que l'on peut considérer comme une 3e exploitation.2 Néanmoins, ces opérations et leur réussite, ainsi que les ventes quotidiennes sont soumises à la bonne volonté et à la politique des points de ventes. Si au sein des GSS le genre de l'horreur, toujours assimilé au fantastique et à la science-fiction dans la dénomination des rayons (Fnac et Virgin), a toujours été plus ou moins bien représenté, l'offre en GSA était pendant longtemps restreinte. Le développement récent du marché du DVD au sein des hypermarchés a forcé sa diversité, mais de nombreuses enseignes restent réticentes à ce type de films, notamment Auchan, qui fait preuve d'une politique très conservatrice. Mais Olivier Scamps, directeur de Neo Publishing, pourtant petit éditeur, nous assure de la présence de ses produits dans les rayons des GSA. L'intérêt pour les « director's cut3 » et autres bonus, qui font la valeur ajoutée et permettent la différenciation des produits, a dopé le marché, qui se porte désormais sur l'atout de mobilité avec la Vidéo à la Demande (VOD) et la Télévision Mobile Personnelle (TMP), dans lesquelles s'engouffrent tous les éditeurs vidéo, du groupe Canal + (avec la plate-forme Canal Play) à Neo Publishing.

1 Le marché de la vidéo en 2007, étude CNC, mars 2008

2 D'autre part, mentionnons tout de même la présence au sein de collections spécialisées dans les réalisateurs et acteurs cultes d'une série dédiée à John Carpenter (comprenant 4 films : Fog, New York 1997, Le Prince des Ténèbres et Invasion Los Angeles), aux côtés d'autres « grands du cinéma » comme Jean-Luc Godard ou Jean-Paul Belmondo. Le fantastique au même rang que la Nouvelle Vague ? Intéressant...

3 Version du film établie par le réalisateur lui-même, les producteurs ayant le dernier mot en ce qui concerne le montage final dans les pratiques anglo-saxonnes (ce qui donne lieu à des conflits récurrents)

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