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Le rôle de l'Eglise dans le processus de démocratisation en République Démocratique du Congo (1990-2006) Nécessité et Perspectives

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par Jimmy MUNGALA FETA
Abomey-Calavi/ Chaire Unesco pour les droits de la personne et de la démocratie - Diplôme d'Etudes Appronfondies (DEA) 2009
  

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B. La grande marche pacifique du 16 février 1992

Autant la suspension de la CNS était un affront pour le peuple congolais qui y plaçait tout son espoir, autant la marche du 16 février 1992 l'était pour le Maréchal-président MOBUTU. En effet, bon nombre d'observateurs soutiennent qu'au moins pour la première fois, le Maréchal-président trouvait sur son chemin un peuple qui ne lui devait rien, un peuple libéré de la peur et déterminé à sortir de l'esclavage dictatorial.

En outre, le chef de l'Etat, dans son refus de s'impliquer dans le processus de la remise en question de sa gestion catastrophique, voyant la tournure que prenait la CNS, et surtout la détermination du peuple réuni en conférence, instruisit le gouvernement à prendre l'indélicate décision le 19 janvier 1992 de suspendre les travaux de la CNS.

Certes, la démocratisation n'était qu'à un stade embryonnaire, mais le peuple a vite compris qu'il s'agissait purement et simplement d'un autre coup de force tendant à retarder la bonne marche dudit processus. Qui plus est, cette suspension, jusqu'à nouvel ordre, n'avait aucun fondement avec son financement tel qu'officiellement déclaré. En réalité, des prétextes avancés à savoir le coût exorbitant des assises, la question de la géopolitique, la prise en charge des délégués à la conférence couvaient une remise en cause de certaines décisions prises par les délégués du peuple réunis en Conférence.

Dans la lutte du peuple congolais en quête du changement, cette circonstance demeure l'un des moments historiques et mémoriaux. C'est pourquoi, comme un seul homme, sur toute l'étendue du pays, spécialement à Kinshasa, où se tenaient les travaux, le peuple descendit dans la rue pour exiger la réouverture de la CNS. Ce 16 Février 1992, à l'appel du Comité laïc de Coordination de l'Eglise catholique, le peuple de Dieu par centaines de milliers de fidèles catholiques, protestants, kimbanguistes, orthodoxes, adeptes des Assemblées de Réveil et tous les congolais épris de paix, des milliers de manifestants encadrés par les organisateurs descendirent envahir massivement les artères avec des chants, cantiques et danses, tenant en mains qui images religieuses, rameaux, qui croix, chapelets et tous avec des bandelettes noires autour de la tête comme seules armes.

En optant de descendre dans la rue, le peuple a payé donc le lourd tribut, car, pour braver la dictature, cette marche des chrétiens dite grande marche d'espoir fut sauvagement réprimée dans le sang par le pouvoir qui démontra une fois encore sa dangerosité. Cependant, cette grande manifestation a eu le mérite de mettre à nu surtout la désapprobation générale du système et de ses gouvernants, les méthodes d'oppression et ses effets néfastes causés par la brutalité du régime contre les contestataires sans armes. Par leur grande mobilisation, les congolais ont démontré aux yeux du monde et du pouvoir la force que revêtent la non-violence évangélique et le prix qu'ils attachaient à la CNS. Comme toujours, l'Eglise, par la bouche des Evêques catholiques, a vite perçu cette «  tentative d'annihilation de l'espérance des fils et filles de la RDC (ex-Zaïre) »56(*).

Elle a dénoncé ces manoeuvres dilatoires tendant à rompre l'élan vers la démocratie tout en dénotant l'inutilité des moyens disproportionnés de violence et l'importance de la réconciliation manquée des filles et fils congolais réunis en conférence. Par ailleurs, elle annonçait le chemin de la vérité en réprouvant la classe politique irresponsable et les diverses institutions corrompues de la République.

Nonobstant la reprise des travaux le 06 avril 1992 annoncée par une allocution du Chef de l'Etat le 27 Mars 1992 et quelques acquis comme l'élection démocratique du premier Ministre et chef du gouvernement, Etienne TSHISEKEDI WA MULUMBA, le 15 Août 1992, l'absence de volonté politique réelle d'engager l'Etat sur le chemin de profondes réformes attendues avait sensiblement réduit la marge des manoeuvres de la CNS. Ainsi, elle n'a pu épuiser toutes les matières ni présenter les rapports d'audition et débats sur certains dossiers très sensibles parmi lesquels les biens mal acquis, assassinats politiques, détournement de fonds, enrichissement illicite et frauduleux, et autres jusqu'à la clôture précipitée des travaux le 06 décembre 1992 dans une ambiance électrique augurant des lendemains incertains.

Certes, la CNS, comme toute oeuvre humaine n'a pas été parfaite; qui plus est; l'usure du temps, la persistance de la crise ont entrainé la désintégration de la résistance. Toutefois, il sied de rappeler, tout spécialement, le thème de la réconciliation nationale par rapport à la conflictualité ayant marqué en profondeur l'histoire de la RD Congo depuis l'indépendance. Dans une certaine mesure, le peuple a mis en profit les messages de la non-violence active des confessions religieuses relayés grâce à l'émergence de la presse libéralisée pour parvenir à refuser la division et la guerre civile.

A la lumière des événements, il apparaissait que la fin en catastrophe de la CNS révélait les intentions malsaines et nuisibles du pouvoir qui avait boycotté et avait saboté la cérémonie de réconciliation prévue à la clôture du forum national. Aussi, nous restons d'avis que s'il y a eu échec de la CNS qui a offert au peuple une merveilleuse occasion de restauration nationale, il est à situer du côté des leaders véreux et alimentaires qui avaient des comptes à rendre au peuple pour leur mauvaise gestion de la chose publique.

Emanation directe de la CNS, le Haut Conseil de la République (HCR) n'a pas pu non plus examiner ces dossiers, alors qu'il avait pour tâche de poursuivre le travail inachevé de cette dernière et d'en exécuter les décisions sur la base des orientations déjà tracées. Par la suite, la même mission sera dévolue à la nouvelle institution, Haut Conseil de la République/Parlement de Transition (HCR/PT) qui, à la différence du HCR, était le fruit d'un consensus politique général. A l'issue des négociations politiques intervenues, une consensus permit une fusion des parlementaires issus de la CNS qui exerçait également les prérogatives législatives en tant qu'instance extra institutionnelle, avec les anciens députés de la défunte législature.

Fort malheureusement, au lieu de se préoccuper de l'avancement du travail amorcé par la défunte CNS pour sortir l'Etat de la crise multiforme et le peuple de l'angoisse, au niveau du Haut Conseil de la République, les politiques et parlementaires, toutes catégories socioprofessionnelles et tendances représentées, avaient tout simplement choisi de se battre pour « leurs intérêts égoïstes »57(*) au point d'appliquer la théorie de prédation, comme l'a si bien fait remarquer TSHIMBOMBO MUKUNA dans la livraison du journal le Soft du 3 juin1996.

Quoique des appels incessants des confessions religieuses sur la justice distributive aient été adressés aux gouvernants pendant la Transition, ces derniers ont donné l'impression d'être frappés de surdité et de cécité politiques au profit de leurs intérêts égoïstes. Ce comportement colle à la peau de la plupart des dirigeants congolais et guide pour l'essentiel leurs velléités de rébellion, de trahison, de corruption, de mauvaise gestion et parfois d'impunité. Ces déboires qui rongent la gouvernance en RD Congo accentuent davantage la pauvreté de la population. Ce souci permanent de partager des postes et par le pouvoir et par l'opposition avait débouché sur une « 3ème voie »58(*). Pour n'avoir pas empêché la réalisation de cette "3ème voie", le prélat sera désavoué par ses pairs du HCR-PT et destitué de ses fonctions de président de l'instance législative de la Transition. Ceci créa une septicémie politique définie par de nouveaux rapports de force qui mirent en branle l'excellent héritage de la CNS légué au HCR, devenu à son tour HCR-PT (Haut Conseil de la République- Parlement de transition).

Comme il fallait s'y attendre, le régime mobutiste a recouvré à la fin l'essentiel du contrôle de la situation après avoir paralysé le Parlement et le Gouvernement de transition. Il importe donc d'évoquer le poids de la personne du Maréchal-président MOBUTU dans les cartes brouillées de ce processus de démocratisation.

* 56 in Secrétariat Général de la Conférence épiscopale du Zaïre, op.cit n° 7, p.3

* 57 La classe politique fut en ébullition étant donné que le partage équitable et équilibré'' des postes de responsabilité était imminent. Ce terme qui venait enrichir le vocabulaire politique congolais concerne essentiellement les entreprises publiques, les portefeuilles  ministériels, la territoriale et la diplomatie. Prélude de la base de l'Accord de Sun City et Pretoria en 2003, cette pratique caractérielle de la clase politique congolaise engendrera pendant la nouvelle période de transition une autre formule toute aussi originale, celle de 1+4 au sommet de l'Etat.

* 58La mise en place d'un gouvernement constitué de toutes les tendances politiques, dirigé par Léon KENGO WA DONDO, en remplacement de celui issu de la CNS.

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"Les esprits médiocres condamnent d'ordinaire tout ce qui passe leur portée"   François de la Rochefoucauld