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La problématique des perquisitions et saisies en ligne en Afrique de l’Ouest : état des lieux et perspectives Cas du Burkina Faso, du Mali, du Sénégal et du Togo

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par Anatole KABORE
UNIVERSITE GASTON BERGER UFR DE SCIENCES JURIDIQUE ET POLITIQUE - Master Pro 2 2009
  

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PREMIÈRE PARTIE: DE LEGE LATA, LES RÈGLES CLASSIQUES À L'ÉPREUVE DU RÉSEAU INTERNET

La qualité première d'une législation est d'exister. En matière pénale et de procédure pénale, cette assertion traduit une exigence qu'implique le besoin de protection des libertés individuelles. La société ne pourrait en effet poursuivre un de ses membres sans que celui-ci ne soit en mesure de savoir préalablement ce à quoi il a contrevenu. Les autorités en charge de la répression ne sauraient justifier leurs actions qu'à la lumière de règles techniques qui encadrent leurs compétences au double point de vue matériel et territorial.

Notre entreprise s'inscrit justement dans le souci de savoir si, en matière de perquisition et de saisie, les lois judiciaires burkinabé, maliennes, sénégalaises et togolaises encadrent adéquatement d'éventuelles actions des autorités judiciaires et policières dans la recherche des preuves d'infractions commises sur le réseau internet.

L'état des « lieux » révèle une constante : chacun de ces Etats a adopté un CPP9(*), dans lequel sont exposées des dispositions relatives à la perquisition et à la saisie. Seulement, ces règles ont été prises à une période où il n'était guère question d'infractions cybercriminelles. Aussi, ne semblent- elles pas avoir pris en considération les exigences liées au caractère immatériel d'Internet, lieu et objet et vecteur de ces infractions (Chapitre 1), ni prévu la nature transfrontalière de celui-ci (Chapitre 2).

      

Chapitre 1 : L'inadaptation des règles classiques à l'immatérialité du réseau

Le réseau Internet intéresse la procédure pénale en ce qu'il constitue, en même temps, un objet et un vecteur d'infractions pénales. Il reste qu'il diffère du monde physique et que les perquisitions et les saisies, telles que classiquement réglementées, ne peuvent appréhender correctement les éléments de la preuve pénale des infractions cybercriminelles (section 1). A cela s'ajoute, sous un autre angle, un autre élément d'ordre technique : l'inefficacité des personnes compétentes pour pratiquer ces mesures et la disponibilité de matériel adéquat (section 2).

Section 1- Le caractère obsolète des règles classiques de perquisition et de saisie

Les perquisitions et les saisies sont des notions strictement encadrées qui doivent être définies (§1). Mais ces notions, telles que prévues par les réglementations burkinabé, malien, sénégalais et togolais ne semblent pas adaptés au monde numérique (§2).

§1. La notion de perquisition et de saisie

Les perquisitions (1) et les saisies (2) sont réglementées avec un certain détail dans les CPP burkinabé10(*), malien11(*), sénégalais12(*), et togolais13(*).

1) Les perquisitions

La perquisition est classiquement définie comme la « recherche policière et judiciaire des éléments de preuve d'une infraction »14(*). Elle n'est donc pas la simple présence de l'enquêteur sur les lieux de l'infraction ; elle suppose « une intrusion, une pénétration »15(*) à l'intérieur du domicile d'une personne privée ou dans les locaux appartenant à une personne morale en vue de la recherche d'objets relatifs aux faits poursuivis.

La perquisition intervient en cas d'enquête sur infraction flagrante, d'enquête préliminaire et d'instruction préparatoire16(*).

Les autorités habilitées à procéder à cette mesure diffèrent selon que celle-ci doit intervenir dans le cadre d'une enquête préliminaire, de flagrant délit ou en cas d'une information.

Dans le cas d'enquête préliminaire ou sur infraction flagrante, les perquisitions nécessaires sont effectuées par les officiers de police judiciaire. L'officier de police judiciaire ne peut perquisitionner que chez les personnes qui « paraissent avoir participé au crime ou détenir des pièces ou objets relatifs aux faits incriminés »17(*).

Si une information est ouverte, ces actes sont réalisés par le juge d'instruction ou par les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire. Dans ce cas, elle peut bien s'exercer «  dans tous les lieux  où peuvent se trouver des objets dont la découverte serait utile à la manifestation de la vérité»18(*).

Ainsi, l'officier de police judiciaire ou le juge d'instruction procède aux recherches, pouvant ouvrir les tiroirs et les portes des meubles, sonder les cloisons et les paquets, compulser tous documents, « interroger » un ordinateur, etc.

Parce que le domicile est un lieu presque sacré19(*), dans le cadre d'une enquête préliminaire, les perquisitions et saisies des pièces à conviction ne peuvent être effectuées sans l'assentiment exprès et écrit ou oral de la personne chez qui elles ont lieu en droit burkinabé, sénégalais et togolais20(*) ; en droit malien, cela est possible lorsque la responsabilité pénale de la personne chez qui elle a lieu peut être recherchée dans l'infraction21(*). Les perquisitions doivent également être faites en présence de l'intéressé, ou de son fondé de pouvoir et, à défaut, de deux témoins.

Dans tous les cas22(*), elles ne peuvent êtres effectuées qu'entre six heures et vingt et une heures suivant les droits burkinabé et malien23(*). Cette fourchette est fixée entre cinq heures et vingt et une heures en droit sénégalais24(*). Elle se situe entre six heures et vingt heures en droit togolais25(*). Toutes ces réglementations font une exception pour les cas de réclamation faite de l'intérieur de la maison, du cadre des infractions aux bonnes moeurs26(*). L'atteinte à la sûreté de l'Etat constitue aussi un cas dans lequel, la perquisition peut être opérée à toute heure du jour ou de la nuit au Togo27(*).

La notion de domicile, en procédure pénale, renvoie à l'habitabilité. Elle ne désigne pas seulement le lieu où une personne a son principal établissement, mais encore le lieu, qu'elle y habite ou non, où elle a le droit de se dire chez elle, quelque soit le titre juridique de son occupation et l'affectation donnée aux locaux28(*). Ainsi, sont des domiciles, de ce point de vue, le bureau, la maison, le garage, etc. En revanche, le véhicule n'est pas un domicile.

Une autre règle qui régit les perquisitions est le principe de spécialité : la perquisition doit être opérée en relation avec l'infraction poursuivie.

Enfin, la liberté d'action de l'officier de police judiciaire et du juge d'instruction est définie dans l'espace par les règles de compétence territoriale : l'un et l'autre doivent opérer dans le ressort territorial auquel ils sont attachés.29(*)

* 9 V. pour le Burkina Faso, ord. 68- 7 du 21 février 1968 portant institution d'un code de procédure pénale ; pour le Mali, Loi n°62- 66 AN- RM du 06 aoùt 1962 portant code de procédure pénale, sur http://www.justicemali.org/pdf/15-procedurepenal.pdf, pour le Sénégal, Loi n° 65- 61 du 21 juillet 1965 portant code de procédure pénale, sur http://www.justice.gouv.sn/droitp/CPP.PDF, pour le Togo, Loi n°83-1 du 02 mars 1983 portant code de procédure pénale, sur http://www.togoforum.com/Societe/DS/DROIT/CPP.htm. Il faut noter que, depuis lors, ces législations ont connu des modifications en certaines de leurs dispositions

* 10 V. notamment  les :art. 53, 54, 55, 56, 57, 58, 59, 61, 65, 66, 70, 74, 91, 92, 93, 94, 95, 96, 97, 98 et 99

CPP burkinabé.

* 11 V. notamment les art. 64, 65, 66, 67, 68, 69, 70, 76, 77, 78, 79, 85, 93, 96, 97, 98, 99, 100, 101, 102, 103

CPP malien.

* 12 V. notamment les art. 46, 48, 49, 50, 51, 52, 54, 68, 72, 83, 84, 85, 86, 87, 88 CPP sénégalais

* 13 V. notamment les art. 44, 45, 46, 47, 48, 49, 51, 60, 61, 75, 76, 77, 78, 79 et 80 togolais.

* 14 V. GUILLIEN Raymond et VINCENT Jean, Lexique des termes juridiques, 2003, 14è éd, p. 429.

* 15 J. PRADEL, Manuel de Procédure pénale, CUJAS, Octobre 2002, 11ème, édition n°410 : Voir aussi R. MERLE et A. VITU, Traité de Droit Criminel, Tome II, Procédure pénale, CUJAS, 2001, 5è Edition, n°192.

* 16 L'enquête préliminaire se définit comme une procédure de caractère policier diligentée, soit d'office, soit sur instruction du parquet, par un officier de police judiciaire et dont le but est de rassembler certains renseignements permettant au parquet d'apprécier l'opportunité des poursuites sans devoir déclencher la procédure plus lourde de l'instruction. Quant à l'enquête sur crime ou délit flagrant, elle désigne les investigations menées, soit par les officiers de police judiciaire, le procureur de la République ( ou du Faso) ou le juge d'instruction sur un crime ou un délit qui se commet actuellement ou qui vient de se commettre ; ces investigations interviennent aussi dans les cas où, dans un temps voisin de l'action, l'individu soupçonné est poursuivi par la clameur du public ou est trouvé porteur d'objets, de traces ou d'indices laissant penser qu'il a participé à l'infraction. Enfin, l'instruction préparatoire est la phase du procès au cours de laquelle la juridiction d'instruction recueille les preuves de l'infraction et décide, s'il y'a lieu, de renvoyer la personne inculpée en jugement.

* 17 Art. 55 al. 1 CPP burkinabé, 45 al. 1 CPP togolais, 66 al. 1 CPP malien  et 48 al. 1 CPP sénégalais.

* 18 Art. 93 CPP burkinabé, 98 CPP malien, 85 CPP sénégalais, et 76 CPP togolais.

* 19 Art. 6 Const. Burkinabé, < http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/CAFRAD/UNPAN002916.pdf>

 art. 16 Const. Sénégalaise sur < http://www.gouv.sn/textes/constitution.html>, art. 6 Const. malienne, sur < http://unpan1.un.org/intradoc/groups/public/documents/CAFRAD/UNPAN002746.pdf>, art. 28 Const. Togolaise, sur < http://www.assemblee-nationale.tg/charpente/textfonda/constituion.pdf>.

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* 20 Art 74 CPP burkinabé, 68 Sénégalais,  61 al. 2 togolais

* 21 Art. 85 al. 2 CPP malien. Même sans cette précision dans les législations des autres pays, il va de soi que les perquisitions au domicile d'une personne poursuivie ne requièrent pas son assentiment.

* 22 C'est-à-dire tant en enquête préliminaire, en enquête de flagrance que dans le cadre de l'instruction préparatoire.

* 23 Voir art. 58 CCP burkinabé, 69 du CPP malien.

* 24 Art. 51 al. 1 CPP sénégalais.

* 25 Art. 48 al. 1 CPP togolais.

* 26 Dans ce cas, l'art. 58 al. 2 CPP burkinabé, 47 al. 2 CPP togolais prescrit que la perquisition peut s'opérer à l'intérieur de tout hôtel, maison meublée, pension, débit de boissons, club, cercle, dancing, lieu de spectacle et annexes ainsi que de tout lieu ouvert au public ou utilisé par le public lorsqu'il sera constaté que des personnes se livrant à la prostitution y sont reçues habituellement. Idem à l'art. 48 al. 2 CPP togolais. L'art. 69 CPP malien, lui, ne prévoit cette exception que dans le cas d'une réclamation faite à l'intérieur d'une maison.

* 27 Art. 48 al. 2 CPP togolais.

* 28 J. PRADEL, Manuel de Procédure pénale, op. cit., n°412, citant une définition donnée par la Chambre criminelle de la Cour de Cassation française en son arrêt du 13 octobre 1982.

* 29 Voir infra pour plus de détails.

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle