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La problématique de la gouvernance locale dans la région de l'est-Cameroun: une analyse de la perception du maire par les populations de la ville de Bertoua

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par Bertille Arlette JIOKENG NDOUNTIO
Universite Catholique d'Afrique Centrale - Master en Gouvernance et Politiques publiques 2010
  

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Section 2 : L'insatisfaction des populations : résultat d'un sentiment de non-implication

Comme nous l'avons souligné plus haut, les populations de Bertoua ne semblent pas satisfaites de l'action du maire. En réalité, en plus de ne pas « voir » des réalisations porteuses de changement social, elles estiment ne pas être impliquées dans les décisions que prend le maire. Pourtant, «  l'institutionnalisation de l'action collective correspond à un monde dans lequel la régulation ne relève plus d'une solution unique et stabilisable, et où l'intégration par le haut se fait mal ou peu alors qu'elle s'opère de plus en plus par le bas78(*)». Les revendications au sujet de la prise en compte du point de vue des populations de Bertoua sont légion (paragraphe1). Le maire se trouve ainsi plus ou moins en difficulté car il est à l'interface de l'affirmation de son autorité et des aspirations des populations locales (paragraphe 2).

Paragraphe 1. Des revendications des populations à la prise en compte de leur point de

vue.

« Comment adhérer à une décision alors qu'on ne nous a même pas demandé notre avis avant de la prendre ? » nous répondait une enquêtée. Il va sans dire qu'une partie de la population de Bertoua se sent véritablement mise à l'écart en ce qui concerne la gestion de leur cité. De cette impression, naît un sentiment de frustration, voire de colère à l'endroit de l'autorité municipale. Cette insatisfaction pourrait également se voir justifiée à l'occasion d'autres raisons mais, seulement, lors de nos enquêtes, l'absence d'implication des populations aux décisions est la raison qui nous a été le plus souvent donnée pour justifier cela. Jean-Baptiste LEGAVRE souligne à cet effet qu' « une (...) énigme concerne le rapport des élus locaux à leur électorat et la façon dont cette relation in?ue (ou non) sur l'organisation des systèmes politiques locaux et sur les prises de décision79(*) ». Trouver la solution à cette énigme exige du maire qu'il sache faire jouer chaque partition pour produire une mélodie du développement agréable à « toutes les oreilles ».

Graphique 3: Sentiment d'implication des populations

Source : Notre enquête de mars 2010 à Bertoua

Le sentiment de non implication des populations est encore renforcé par l'apparence arbitraire des décisions du chef de l'exécutif communal, qui ne semble chercher ni à construire ni à s'appuyer sur un consensus local. Il semble pourtant inimaginable, pour les maires que nous avons rencontrés, d'imposer une quelconque décision à leurs « administrés ». Ils semblent en effet bien conscients du fait que leur autorité relève de la volonté populaire et que les attentes de la population sont grandes tout autant que les incompréhensions sont faciles. A s'y tenir, l'on pourrait affirmer avec Christophe ANTHOINE que « le maire (...), par contre, veille, dans la mesure du possible, à prendre des décisions consensuelles. Cela est dû à [sa] situation, notamment à [son] profond enracinement local et au fait qu'il est issu d'un choix collectif et public relevant lui-même d'une volonté de consensus »80(*). Cela dit, les différentes plaintes enregistrées des populations au sujet de leur désolation face à leur non-implication, « nous permettent de mieux comprendre pourquoi la population place de nombreux espoirs en ses maires, qui, par leur proximité sociale, relèvent de son contrôle, et guère dans la circonscription qui lui échappe totalement »81(*).

De plus, la place prépondérante qu'occupent les maires dans la dynamique de la décentralisation pose une nécessité de responsabilité de leur part. Ils doivent en effet faire preuve d'une capacité à conceptualiser et surtout à reformuler les problèmes des populations afin de les inscrire dans leur agenda. C'est ainsi que Alain FAURE estime que : « le constat d'une démocratie qui serait plus « différentielle82(*) » avec la montée en puissance de la décentralisation revient à faire l'hypothèse que les leaders politiques locaux possèdent dorénavant une place privilégiée dans la mise sur agenda des problèmes et même dans l'énoncé des principes démocratiques qui codi?ent la production du bien commun.83(*)».

Cette situation dans laquelle se trouve le maire est en partie due à la reconfiguration de son rôle et de sa fonction. Bertrand CASSAIGNE affirme à ce propos que, nouvelles, les écharpes le sont puisqu'un nouveau mandat commence : les équipes en place ont changé, parfois totalement, parfois seulement dans leur composition et dans leur équilibre84(*). Les responsabilités sont réparties différemment. Mais, surtout, c'est à une évolution dans le rôle des élus que l'on assiste, une évolution des rapports entre les habitants et leurs mandants. Il se trouve en rapport avec des catégories d'acteurs très divers de sa commune : habitants des quartiers, associations, « communautés » étrangères, commerçants et entrepreneurs, enseignants et parents d'élèves, services municipaux, etc. Il négocie ou se concerte avec les représentants de l'Etat, les responsables économiques, ceux des communes voisines ou du département. En tout cela, il est chargé de représenter la commune, dans son unité et sa diversité. Le maire a toujours été un médiateur, proche des gens, de leurs attentes, chargé de faire remonter leurs problèmes aux échelons supérieurs. Or son rôle de gestionnaire s'accroît et il devient plus lointain. La demande insistante exprime une démocratie renouvelée, plus participative, souhaitant que les débats autour des grands projets ne soient pas réservés aux techniciens et aux experts85(*).

Il faut dire que la communauté est conçue dans le cursus politique comme le moyen de renforcer le leadership du maire86(*). Pour ce faire, il faut qu'il soit une personnalité apte à rassembler et à écouter ce que la population pense des projets « forts » porteurs de développement de la cité. Par ailleurs, l'autorité municipale peut sans doute être à l'écoute de tout le monde mais elle ne saurait donner satisfaction à toutes les revendications de ses « administrés » surtout si elle décide de faire jouer son autorité dans la prise des décisions.

* 78 P. DURAN, J.C THOENIG, « L'État et la gestion publique territoriale », in Revue française de science politique, volume 46, No 4, 1996, p. 582.

* 79 J. B. LEGAVRE, op. cit., p. 45.

* 80 C. ANTHOINE, «Pratiques et Perceptions d'un Appareil Étatique en Voie de Décentralisation : le Cas du Bénin», in Le bulletin de l'APAD, n° 16, Décentralisation, pouvoirs sociaux et réseaux sociaux, mis en ligne le 6 octobre 2006, disponible sur http://apad.revues.org/document534.html, consulté le 3 avril 2010, à 21h40 min.

* 81 Ibid.

* 82 A. FAURE, « Politiques publiques et gouvernements urbains : le temps venu de la démocratie différentielle ?», in Télescope - Revue d'analyse comparée en administration publique, ENAP, Université du Québec, N° 3, printemps 2007.

* 83 A. FAURE, op.cit., disponible sur http://halshs.archives-ouvertes.fr/docs/00/38/56/83/PDF/EElulocalAF.pdf, consulté le 22 mars 2010, à 13h.

* 84 B. CASSAIGNE, « Introduction », Ceras - in Projet n°265, Mars 2001, disponible sur http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1956, consulté le 22 mars 2010, à 14h.

* 85 Idem, disponible sur http://www.ceras-projet.com/index.php?id=1956, consulté le 22 mars 2010, à 14h.

* 86 H. PORTELLI, op.cit., pp. 35-42

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"I don't believe we shall ever have a good money again before we take the thing out of the hand of governments. We can't take it violently, out of the hands of governments, all we can do is by some sly roundabout way introduce something that they can't stop ..."   Friedrich Hayek (1899-1992) en 1984