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La gestion par objectifs en matière budgétaire: L'expérience tunisienne

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par Siwar Cherif
Faculté des Sciences Juridiques Politiques et Sociales de Tunis  - Mastère de recherche en droit public  2012
  

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Premier Paragraphe/- Un contrôle juridictionnel et administratif, encore perfectibles :

Le contrôle exercé en Tunisie peut être qualifié comme un contrôle de régularité visant à s'assurer du respect des règles juridiques. Toutefois, la nouvelle gestion publique est basée sur une méthode de gestion fondée non seulement sur la légalité, mais plutôt sur un logique de résultat et d'efficacité dont, de nouveaux aspects techniques et institutionnelles doivent être mises en place au niveau du contrôle administratif (A) mais également juridictionnel (B).

A- Le Contrôle administratif :

Les contrôles administratifs se présentent essentiellement comme des contrôles de régularité sont d'une double nature étant constitués d'une part, des contrôles a priori et concomitants

traditionnels de l'exécution du budget103.

Le contrôle a priori est un contrôle préventif puisqu'il s'exerce avant l'exécution des opérations budgétaires dans le but d'éviter les irrégularités et les carences.

Ce contrôle est exercé par trois organes principales à savoir ; la direction générale du contrôle des dépenses publiques, la commission des marchés et les comptables publics.

Selon le décret 89-1999 du 31 décembre 1989104 le contrôle exercé par la direction générale du contrôle des dépenses publiques (DGDP) est un contrôle préalable à l'engagement de la dépense et qui peut être qualifié d'un contrôle de régularité.

103 Bouvier (M) et Esclassan (M-Ch), Rapport précité. P.50.

104 tel que modifié et complété par le décret n° 94-431 du 14 février 1994 ainsi que le décret n°98-433 du 23 février 1998 organisant le contrôle des dépenses publiques et fixant ses attributions et ses interventions en instaurant le visa préalable sur toutes les dépenses imputables au budget de l'Etat, aux budgets des établissements publics, aux fonds spéciaux du Trésor et aux fonds de concours et aux budgets des collectivités locales.

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A cet effet l'article 3 du décret n° 2012-2878 du 19 Novembre 2012 relatif au contrôle des

dépenses publiques dispose que : « Les services du contrôle des dépenses publiques examinent la régularité de la dépense.

L'examen à effectuer porte sur les éléments suivants :

1- l'objet, l'imputation et l'exactitude d'évaluation des dépenses,

2- la disponibilité des crédits,

3- la conformité de la dépense avec les travaux préparatoires du budget,

4- la conformité de la dépense aux lois et réglementations en vigueur,

5- la conformité de la dépense au programme d'emploi des crédits ainsi qu'à la programmation annuelle prévue à l'article 11 du présent décret ».

Suite a ce contrôle de régularité, le service du contrôle des dépenses publiques peut accorder la visa d'engagement de dépense par conséquent, la dépense pourrait être exécutée comme elle pourrait être refusée par une décision motivée105.

Les marchés publics sont également soumis à un contrôle administratif obligatoire. A cet effet, l'article 4 du décret précité prévoit que : « Dans le domaine des marchés publics, le service du contrôle des dépenses publiques est chargé de vérifier la disponibilité des crédits à la rubrique budgétaire appropriée et procéder au blocage des crédits nécessaires ».

La nouveauté en matière du marché public est que le contrôleur de la dépense publique doit vérifier la conformité des projets des cahiers des charges et les projets des marchés soumis à l'avis des commissions des marchés106. Par conséquent, l'ordonnateur doit avoir l'aval du contrôle des dépenses sur projet du marché avant de le signer.

L'objectif de ce contrôle consiste essentiellement d'assurer le respect des règles juridiques relatives aux marchés publics.

Une autre nouveauté peut être constatée à l'égard des attributions du contrôleur des dépenses publiques des ministères concernés par la GBO. Il s'agit aux termes de l'article 11107 du décret

précité d'établir par les responsables des programmes « une programmation des dépenses »

105 V/ www.pm.gov.tn

106 Il y a cinq types de commissions de marché, dont, la compétence dépend du montant du marché : La

commission supérieure des marchés

- Les commissions départementales des marchés

- Les commissions régionales des marchés

- Les commissions communales des marchés

- Les commissions des entreprises publiques

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des programmes publics mettant en adéquation l'activité des services avec les crédits et les emplois du programme de manières à respecter l'autorité budgétaire108.

Par ailleurs, et en se référant aux dispositions de l'article 10 du CCP les comptables publics sont également chargé du contrôle de régularité avant de procéder au paiement de toute ordonnance émise par l'ordonnateur.

A travers ce contrôle de régularité, le comptable public doit exercer une vérification sur : « - La qualité de l'ordonnateur et l'assignation de la dépense

- La régularité de l'engagement : ce contrôle porte sur la disponibilité d'un crédit régulièrement ouvert, l'exactitude de l'imputation de la dépense et l'existence du visa préalable a l'engagement

- La validité juridique de la dépense qui consiste à faire des vérifications sur la justification du service fait »109

Certes, le contrôle administratif consiste un élément crucial pour assurer la bonne gestion des deniers publics Toutefois, il ne suffit pas de perfectionner les moyens ou même, la nature du contrôle conformément aux standards internationaux et aux normes appliquées par les administrations développées, il convient de changer la mentalité administrative vers plus de neutralité, vers plus de performance. Et s'il y avait une faille dans ces aspects là, on dirait que la bonne gouvernance fait défaut.

Quant au contrôle concomitant, ce dernier s'exerce par les inspections départementales et les corps du contrôle général

Les inspections départementales sont des structures créées au sein de la plupart des ministères afin d'aider le ministre de faire le suivi du fonctionnement des services centraux et extérieur de son ministère également, les établissements et les entreprises publiques sous sa tutelle110.

107 Article. 11 - « Les responsables de programmes au sens de l'article 11 de la loi organique du budget doivent avec l'aide des services du programme de pilotage et appui, établir une programmation des dépenses qui met en adéquation l'activité des services avec les crédits et les emplois du programme de manière à respecter l'autorisation budgétaire. Cette programmation qui sert de document de référence pour l'exécution du budget, est soumise au visa préalable du contrôleur des dépenses publiques conformément aux modalités qui seront fixées par arrêté du chef du gouvernement sur avis du ministre chargé des finances ».

108 Article intitulé « Le nouveau décret relatif au contrôle des dépenses publiques : Vers des contrôles plus ciblés et mieux organisés » disponible sur : www.gbo.tn (Page consultée le 15/09/2013).

109 AZOUZI Sana, La mutation des organes de vérification vers des organes d'évaluation dans la gestion par objectifs, Mémoire de fin d'étude, École Nationale d'Administration. Tunis.2004. P.24.

110 Ibid.

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Le corps du contrôle général se compose du corps du contrôle général des services publics111, le corps du contrôle général des finances112 et le corps du contrôle général du domaine de l'Etat et des affaires foncières113.

Une question qui s'impose à cet égard consiste de savoir comment affiner le contrôle administratif pour répondre aux exigences de la GBO ?

Actuellement, le contrôle administratif connait une mutation par le passage d'une logique de régularité au bénéfice d'une nouvelle logique dont, la finalité primordiale est l'efficacité, la performance et le développement de la gestion publique en générale et du service public en particulier.

La réussite de ce passage nécessite la présence de deux éléments essentiels à savoir l'indépendance des agents et la disponibilité de l'information financière et comptable.

D'ailleurs, une journée d'études a été organisée le 11 juin 2013 sous l'intitulé « La réforme du système du contrôle administratif et financier en Tunisie » dans l'optique d'instaurer un cadre administratif fort et indépendant du pouvoir exécutif afin de, surmonter les difficultés des contrôleurs dans l'exercice de leurs missions en garantissant leur protection et en leur facilitant l'accès aux documents administratifs.

Cette réforme du cadre administratif traduit la volonté des pouvoirs publics d'instaurer une nouvelle culture administrative fondée sur la confiance entre l'administration et l'administré mais également sur la qualité du service public rendu.

Le contrôle administratif constitue le pivot d'un système d'information budgétaire et comptable dans une gestion axée sur les résultats l'information est inéluctable, car la prise de bonne décision financière dépend de la qualité de l'information.

A cet effet, la Tunisie a amélioré le processus informatisé du circuit des opérations financières on peut citer a titre indicatif, le système d'aide à la décision budgétaire ADEB.

Le système ADEB est « un système informatique qui s'occupe de la prise en charge et du suivi des dépenses publiques, il traite tous les événements par lesquels peut passer une procédure de dépense opérée par l'Etat sur des crédits budgétisés ou à financement

extérieur »114.

« Le système ADEB assure une triple fonction de gestion, de contrôle et d'information à travers ses fonctions suivantes :

111 Décret n°82-06 du 5/01/1982 fixant le statut particulier des membres du corps général des services public (JORT n°2 du 8-12/01/1982 page55).

112 Décret n°87-07 du 05/01/1982 fixant le statut particulier aux membres du contrôle général des finances (JORT n°2 du 8-12/01/1982 page61).

113 V/ Décret n°91-842 du 31 mai 1991 fixant le statut particulier aux membres du contrôle général des domaines de l'Etat et des affaires étrangères (JORT n°43 du 14/06/1991 Page 1152).

114 Sfar (A), « Système d'aide à la décision budgétaire ADEB », Revue Tunisienne d'Administration publique Servir, n°5-1992. P.45.

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- gestion et suivi contrôlés de l'ouverture des crédits, de l'engagement, de l'ordonnancement,

de la liquidation et du paiement des dépenses

- gestion et suivi des marchés publics

- gestion et suivi des visas d'engagement

- gestion et suivi des bons de commande

- gestion et suivi des ordonnances de paiement

- suivi du rythme de traitement des dossiers d'engagement, d'ordonnancement et de paiement

par les ordonnateurs, les contrôleurs des dépenses publiques et les comptables...»115.

Asseoir une bonne gestion des finances publiques n'est pas liée seulement à l'efficacité du contrôle administratif exercé, le contrôle juridictionnel fait aussi partie.

B- Le Contrôle juridictionnel :

Le contrôle juridictionnel des finances publiques est assurée à travers deux organes à savoir ; La cour des comptes (A) qui aura à examiner les comptes établis à partir de la gestion gérée par les comptables publics de l'Etat et la cour de discipline financière (B) qui est une juridiction répressive à caractère financier, appelée à sanctionner les fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat par les ordonnateurs.

1-La Cour des comptes :

La Cour des Comptes (CC) est une juridiction financière spécialisée dans la branche financière de droit public à l'exclusion du droit fiscal, elle exerce un contrôle financier externe, donc, située en dehors de la hiérarchie administrative normale. Ce contrôle s'effectue à posteriori sur l'Etat, les collectivités locales, les EPA, les entreprises publiques ainsi que, certains organismes privés. La CC a été créée par la loi n° 68-8 du 8 mars 1968 portant organisation de la cour des comptes116.

La CC joue un rôle primordial dans l'édification d'un système de contrôle financier efficace et transparent visant la bonne gouvernance117 financière qui constitue un pilier de la démocratie à travers une bonne gestion des deniers publics.

Cependant, il est reproché aux arrêts de la Cour le fait qu'ils se limitent à fixer la ligne du comptes sans fournir des principes qui peuvent guider les comptables dans la gestion des deniers publics autrement dit, ces jugement ne constitue pas une véritable jurisprudence financière parce qu'ils ne contiennent pas des règles générales améliorant les méthodes de

115 Bouvier (M) et Esclassan (M-Ch), Rapport précité. P.76-77.

116 Telle qu'elle a été modifiée et complétée par la loi n° 70-17 du 20 avril 1970, la loi organique n° 90-82 du 29 octobre 1990, la loi organique n° 2001-75 du 17 juillet 2001 et par la loi organique n°2008-3 du 29 janvier 2008.

117 Le concept de la bonne gouvernance comporte des enjeux économiques et financiers alors que le concept de la gouvernance comporte des enjeux politiques. Pour plus de développement sur la distinction entre gouvernance et bonne gouvernance voir : KOURDA Zouhour « Gouvernance et bonne gouvernance » in. Info Juridiques n°110/111 avril 2011, P. 18-20 et n°112/113 mai 2011, P. 24-27.

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gestion publique. Par ailleurs, ce contrôle se trouve limité « ... par une contrainte objective liée à la traçabilité des conséquences du jugement des comptes »118. En effet aucune modification n'est introduite au niveau des comptes après le jugement.

La question qui se pose à cet égard est de savoir : Est-ce que la CC répond vraiment aux exigences de la nouvelle gestion publique ?

En réalité, l'institution supérieure de contrôle des finances publiques en Tunisie s'inscrit dans la logique mondiale de la bonne gouvernance financière. Toutefois, La CC souffre essentiellement de deux principaux problèmes à savoir un problème au niveau de la performance de l'institution vu l'ampleur de sa tâche (a) à coté du problème de son indépendance généré par l'hégémonie de l'exécutif (b).

a)- L'ampleur de la tâche confiée à la cour des comptes:

Il convient tout d'abord, de faire un rappel des tâches confiées à la cour des comptes s'agissant notamment, de la mission juridictionnelle, la Cour des Comptes doit juger chaque année un nombre important de comptes des comptables publics119 suivant des procédures complexes. En effet, cette juridiction financière ne juge pas seulement les comptables patents, c'est-à-dire ceux qui sont habilités par la loi, mais aussi, les comptables de fait, c'est-à-dire ceux qui sans avoir la qualité de comptables sont immiscés dans la gestion des deniers publics. Cette situation s'est aggravée avec la modification du code de comptabilité publique par la loi n°96-86 du 6 novembre 1996 qui a chargé d'autres comptables120, qui ne sont pas mentionnés dans la liste précitée, de présenter leurs comptes à la Cour afin de les apurer.

Par ailleurs, la procédure de contrôle juridictionnel au sein de la Cour se caractérise par sa lourdeur. Ainsi, une fois saisie, la Cour désigne un magistrat pour l'instruction des comptes, celui-ci prépare un rapport qui sera présenté avec un contre rapport, au ministère public puis présenté à la formation de délibération, cette dernière rend un arrêt en deux temps qui sera notifié aux parties intéressées afin d'exécution.

Une autre contrainte résulte de l'hégémonie de l'exécutif sur l'institution ce qui rend précaire son indépendance.

b)- L'hégémonie de l'exécutif :

118 Ibid.

119 Le droit tunisien ne définit pas le comptable public, la doctrine s'accorde à le définir comme étant « un agent public, nommé par le ministre des finances ou avec son agrément, pour effectuer des opérations de recettes ou de dépenses, pour le compte d'un organisme public ». Le CC distingue dans son article 13 entre les comptables principaux « qui ont la plénitude des attributions comptables et rendent directement leurs comptes aux juges des comptes » et les comptables secondaires « dont les opérations sont centralisées par un comptable principal ». Ce sont justement les comptables principaux qui sont soumis directement à la juridiction de la Cour des Comptes alors que les comptables secondaires doivent rendre leurs comptes aux comptables principaux.

120 Les trésoriers régionaux ; Les payeurs ; Les receveurs particuliers du budget annexe ; Les receveurs régionaux (la liste est abrogée) du budget annexe (la liste est abrogée) ; Les receveurs des finances.

En réalité, les dispositions imposant l'indépendance du juge financier sont insuffisantes. « La simple comparaison entre les normes internationalement reconnues par les textes régissant l'organisation et les attributions de la dite Cour témoigne que cette indépendance est limitée »121. En effet, l'Organisation Internationale des Institutions Supérieure de Contrôle des finances publiques exige dans les Déclarations de Mexico, que les membres des institutions supérieures de contrôle doivent être nommés, reconduits dans leurs fonctions ou destitués dans le cadre d'un processus qui garantit leur indépendance à l'égard de l'exécutif, pour un mandat bien définit122.

Ce qui n'est pas le cas en Tunisie, puisque « Les liens organiques et même fonctionnels paraissent ... étroits avec le pouvoir exécutif... ce qui confère moins d'indépendance à la

Cour (qui se trouve) dans une situation moins aisée pour contrôler justement l'action du pouvoir exécutif ».123

En effet, il suffit de mentionner, que le premier président est nommé par le Président de la République pour un mandat non défini, aussi bien que les présidents de chambres et les présidents de sections, que le parquet est nommé par le gouvernement afin d'assurer sa représentation auprès de la Cour, que le président du Conseil Supérieur de la Cour des Comptes est le premier ministre, que son budget est sous le contrôle du pouvoir exécutif, que le rapport ne soit pas publié que si le Président de la République autorise la publication.

Une nouveauté doit être marquée à cet égard relative la transparence de la juridiction consiste à la publication des rapports annuels124 de la cour des comptes, ce rapport est censé informer le parlement, le gouvernement et surtout l'opinion publique sur la régularité des comptes de l'État. La publicité de ce rapport sert à ancrer la culture de la recevabilité dans le pays, à développer la transparence, à améliorer la performance de la gestion des deniers publics et d'assurer au gouvernement un fonctionnement crédible, liée à la promotion des normes internationales d'audit et aux droits des citoyens à l'information « la non publication dudit rapport et des arrêts de la cour contraste de manière frappante avec la tendance actuelle ... qui vise à accorder au travail administratif le plus de transparence possible et de traiter l'administré de plus en plus comme un véritable citoyen, la démocratie administrative rejoint ainsi, la démocratie politique »125.

121 Ben Gassouma (M), « Cour des Comptes et transparence financière des comptes publics », Info Juridiques, n°112/113 Mai 2011. P.20-23.

122 Les déclarations de Mexico sur l'indépendance des institutions supérieures de contrôle des finances publiques en 2007.

123 Ben Letaif (M), L'Etat et les entreprises publiques en Tunisie : les mutations du contrôle, édition l'Harmattan. Collection. Logiques juridiques, Paris, 1998, P.272.

124 Institué par l'article 23 de la loi n°68-8 8 mars 1968 portant organisation de la cour des comptes prévoit que: prévoit que : « La cour des comptes établit chaque année un rapport général sur les résultats de ses travaux de l'année précédente. Ce rapport retrace les observations et conclusions formulées par la cour et propose, en outre, les réformes qu'elle estime utiles. Le premier président de la cour des comptes présente le rapport général annuel au Président de la République, à la Chambre des députés et à la Chambre des conseillers. »

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125 Mahbouli (A), « La cour des comptes : situation et perspectives », RTD.1985, P.140.

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Le 7 mai 2011, l'ancien conseil des ministres a adopté un projet de décret sur l'accès aux documents administratifs. Dans cette optique, l'ancien président de la République par intérim, Fouad MEBAZAA, a décidé de rendre public les cinq derniers rapports annuels de la CC en consécration du principe de transparence dans la gestion des deniers publics126.

La Cour devient donc, l'organe principalement chargé de fournir une information financière transparente, une information de qualité.

La CC avait toujours joué un rôle éminent en matière du contrôle juridictionnel des finances publiques Mais, la réforme lancée de la gestion publique a changé la donne en présentant des nouvelles exigences (efficacité et la performance) auxquelles la cour doit faire satisfaction.

Dans ce même contexte, la cour des comptes exerce actuellement, un contrôle de régularité mais aussi d'efficacité.

Selon les dispositions de l'article 19 bis de la loi n°2008-3 du 29 janvier 2008 modifiant et complétant la loi n°68-8 du 8 mars 1968 portant organisation de la cour des comptes prévoit que:

« Le contrôle de la gestion dévolu à la Cour des Comptes tend à s'assurer de la conformité à la législation et à la réglementation en vigueur des actes de gestion pris par les organismes prévus à l'article 3 de la présente loi. Il tend également à évaluer la gestion de ces organismes pour s'assurer de la mesure dans laquelle elle répond aux exigences de la bonne gouvernance, notamment en ce qui a trait au respect des principes d'économie, d'efficience et d'efficacité ainsi que des impératifs du développement durable ».

La cour des comptes contribue à l'amélioration de la gestion publique ce à travers un contrôle de gestion vise à garantir une bonne utilisation des deniers publics.

Le contrôle de gestion confié à la cour des comptes par la loi du 29 janvier 2008 sert à apprécier les organismes publics selon les principes d'économie, d'efficacité et d'efficience. Mais à vrai dire comment peut-on définir ces principes ?

« L'économie consiste à mesurer si les ressources ont été acquises et utilisées au meilleur coût, l'efficacité requiert de définir les effets obtenus par rapport aux finalités et objectifs assignés et l'efficience implique de mesurer le rapport entre les moyens mis en oeuvre et les résultats atteints. Chaque audit du bon emploi des deniers publics ne doit pas nécessairement examiner chacun de ces trois critères, qui se présentent comme des outils d'analyse à la disposition du contrôleur, à qui il appartient de faire un choix parmi eux en fonction des particularités du service audité et de la réalité de terrain.

L'examen de l'économie, déjà parfois abordé lors d'un contrôle de légalité (dans la mesure où la loi impose souvent des règles visant à réduire les coûts, par exemple, en prescrivant une mise en concurrence des fournisseurs), est sans doute le plus simple à réaliser et celui qui soulève le moins de contestations : l'exigence d'une gestion économe est largement partagée. Se prononcer sur l'efficacité d'un service ou d'une action est bien plus délicat : d'une part, cela suppose d'en identifier les résultats »127

126 Ce rapport, qui est à sa 26ème édition en 2012, n'a jamais été publié dans sa totalité. Seuls des extraits minutieusement filtrés et contrôlés ont été publiés dans le Journal officiel.

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Sur un autre plan, un projet de renforcement institutionnel et de développement des compétences de la Cour des comptes128 a eu lieu récemment, à travers un jumelage avec des homologues de l'UE, financé par la Commission européenne, et en cours de lancement.

Ledit projet prévoit notamment :

« La rationalisation du contrôle juridictionnel des comptes publics et la réduction des délais, par la dématérialisation des pièces comptables, l'introduction d'une procédure plus automatisée et efficace avec le ministère des finances et la révision du fonctionnement de la Cour de discipline financière.

Le développement des méthodes d'audit et de l'évaluation des programmes publics conformément, aux normes internationales et aux bonnes pratiques dans un contexte de gestion budgétaire basée sur la performance.

Le développement de l'audit informatique et le recours aux techniques informatisées de contrôle. Le renforcement de la gestion et de l'organisation des services de la Cour »129

Après avoir tracé, la portée de la mission assurée par la cour des comptes en matière du contrôle juridictionnel qu'en -t'il de la cour de discipline financière ?

2-La Cour de discipline financière :

Pour bien cerner la tâche confiée à la cour en matière du contrôle, il convient tout d'abord de préciser la mission (a) de la cour afin d'aborder la portée de cette mission (b).

a)-La mission de la cour de discipline financière :

La cour de discipline financière (CDF), est instituée par loi n° 85-74 du 20 juillet 1985130 qui remplace la loi du 30 avril 1970 portant définition de la responsabilité des gestionnaires des deniers publics.

La cour a pour mission de sanctionner les fautes de gestion commises par les ordonnateurs, les administrateurs et les agents chargés d'utiliser les deniers publics.

127 Dumazy (W) et Trosh (A), « La nouvelle compétence de la cour des comptes en matière de bon usage des deniers publics », Revue des centre d'études et de recherches en administration publique 1-2000. P.39-48. www.pyramides.revues.org , (Page consultée le 6/10/2013).

128 V / Fiche du jumelage du programme d'appui à la mise en oeuvre de l'accord d'association Tunisie- Union Européenne, « Renforcement des capacités institutionnelles de la cour des comptes de la république tunisienne ».

129 Rapport final de l'Union Européenne- Banque Mondiale- et Banque Africaine de développement, « Performance de la gestion des finances publiques en Tunisie » Juin 2010. P.98.

130 La loi n°85-74 du 20-07-1985 relative à la définition et à la sanction des fautes de gestion commises à l'égard de l'Etat, des EPA, des CPL et des entreprises publiques et à la création d'une CDF (JORT n°56 des 26-30.07.1985).

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La cour «... constitue une sorte de prolongement organique et fonctionnel de la cour des comptes, elle a été mise en place afin de compléter le contrôle juridictionnel de celle-ci, qui se limitait au jugement des actes des comptables, à l'exclusion des ordonnateurs à l'égard desquels ne s'exerçait qu'un contrôle administratif »131.

Selon l'article 7 de la loi précitée, la cour se compose des :

- Le premier président de la cour des comptes, président

- Un président de chambre du tribunal administratif, vice-président

- Deux conseillers de la cour des comptes

- Deux conseillers du tribunal administratif

Il convient de souligner que, les membres de la cour sont nommés sur proposition du premier ministre et présentation respective des premiers présidents de la cour des comptes et du tribunal administratif, pour une durée de 5 ans.

Le législateur tunisien a limité la saisine de la CDF aux autorités suivantes :

- Le président de la chambre des députés,

- Le 1er ministre,

- Le ministre des finances

- Les ministres pour les faits relevés à la charge des fonctionnaires, administrateurs et agents placés sous leur autorité (pouvoir hiérarchique) ou leur tutelle (contrôle de tutelle) - Le 1er président de la cour des comptes

Pour sa part, le législateur français a élargi la saisine en octroyant la possibilité pour un particulier ou une personne morale de saisir la Cour de discipline budgétaire et Financière132 pour des faits relatifs à l'inexécution de décisions de justice les concernant.

b)-La portée de la mission du contrôle de la CDF:

La responsabilité dégagée en cas de faute de gestion par la CDF est soumis à un délai de prescription de 5 ans à compter du jour ou la faute de gestion a été commise, a défaut, la CDF ne peut plus être saisie133. Néanmoins, ce délai est prolongé jusqu'à la date de la promulgation de la loi de règlement du budget ou jusqu'à la date d'approbation des comptes par l'organe délibérant de l'entreprise publique, lorsque le règlement du budget ou l'approbation des comptes auxquels se rattache la faute de gestion commise intervient après l'expiration de ce délai de 5 ans134.

En dehors de limites constatés au niveau des compétences de la cour (la saisine), il convient de souligner les limites qui entourent la publication des rapports de la CDF dont, la diffusion reste réservée dans la mesure où, seuls des extraits et des comptes-rendus de décisions sont

131 Chikhaoui (L), « Sécurité des deniers publics et contrôles juridictionnels », RTD 2004. P.299 -384.

132 La Cour de discipline budgétaire et financière a été instituée par la loi n° 48-1484 du 25 septembre 1948 désormais intégrée dans le code des juridictions financières aux articles L.311 à L.316.

133 Article 10 loi n° 85-74 du 20 juillet 1985prévoit que « la cour ne peut plus être saisie après l'expiration d'un délai de cinq années à compter du jour la faute de gestion a été commise ».

134 Conformément à l'article 10 précité.

rendus publics sans dévoiler l'identité des personnes concernées ni les organismes auxquels elles appartiennent. Du même, Les audiences de la CDF se tiennent à huis clos.

En Tunisie, la préférence à été donné à la discrétion. Une telle discrétion bien que légitime du point de vue de la protection des données personnelles rompt cependant, avec le souci d'assurer un degré de transparence et lisibilité par le contrôle de la CDF.

Le législateur a opté pour plus de transparence à ce niveau, c'est ainsi que l'identification des personnes jugées par la Cour de Discipline Budgétaire et Financière CDBF) est possible.

Dans ce même contexte, le Premier président de la Cour des comptes, Abdelkader Zgolli, a indiqué que tous les membres du gouvernement en exercice avaient déposé auprès de cette haute juridiction du Conseil d'Etat leurs déclarations sur l'honneur concernant leur patrimoine, comme conformément à la loi n°87-17 du 10 avril 1987 relative à la déclaration sur l'honneur des biens des membres du gouvernement et de certaines catégories d'agents publics135.

Cette action menée par les membres du gouvernement constitue une avancée vers la transparence souhaité mais est ce que la déclaration des biens des membres du gouvernement suffit-elle pour garantir la transparence ?

En réalité et comme l'a souligné le premier président de la cour des comptes la loi relative à la déclaration des biens du gouvernement gagnerait à être amélioré à l'avenir vu le nombre des lacunes qui se traduit notamment par son champ d'application restreint qui ne concerne ni le président de la République, ni la progéniture des responsables sans limite d'âge, ni les membres des corps élus comme la Chambre des députés, les conseils municipaux ou encore les chefs de parti. Au surplus, nous remarquons l'absence du volet coercitif ...contrairement, à d'autres pays telle que la France136 dont, toute déclaration mensongère sera punie d'une amende.

Sur un autre plan, le contrôle juridictionnel de la CDF exercé sur les ordonnateurs est limité, dans la mesure , il ne concerne pas la gestion financière de tous les ordonnateurs de l'Etat, des EP ou des CPL, c'est ainsi seuls les ordonnateurs secondaires sont concernés par le contrôle exercé par la cour, ce conformément, aux dispositions de l'article 8, alinéa 2 du CCP qui prévoit que :

« Les ordonnateurs secondaires de l'Etat, les ordonnateurs des établissements publics et des CPL autres que, les communes, ainsi que les présidents des communes désignés par décret, sont justiciables de la cour de discipline financière pour les fautes de gestion... ».

Par contre, les ordonnateurs principaux tel que, le président de la chambre des députes, les ministres et les ordonnateurs des budgets des communes n'encourant qu'en raison de leurs responsabilités.

135 (JORT n° 27 du 14 avril 1987 page 507).

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136 V/ Loi n° 88-227 du 11 mars 1988 relative à la transparence financière de la vie politique.

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Selon beaucoup d'auteurs, la responsabilité des ordonnateurs est davantage théorique que pratique, il est vrai que, cette responsabilité est assez difficile à mettre en oeuvre. Cela est dû à la nature particulière de fonction des ordonnateurs qui font jouer l'opportunité de la politique publique, car ce dernier est assez délicate à évaluer et a contrôler.

Après avoir retracé, les failles intrinsèques à la cour des comptes et à la cour de discipline financière ainsi que, les apports présentés par ceux-ci en matière d'évaluation budgétaire. Il est indispensable d'étudier également, la portée du contrôle politique.

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"Il y a des temps ou l'on doit dispenser son mépris qu'avec économie à cause du grand nombre de nécessiteux"   Chateaubriand