2° Le droit matériel applicable au contrat
initial à caractère international et la convention de Vienne du
11 avril 1980
En parallèle au développement du commerce
international, la convention sur la vente internationale de marchandises (CVIM)
a vu le jour, dans le but de faciliter le règlement des litiges
nés des ventes internationales, en leur apportant une solution plus
complète. Elle connaît un succès très important dont
témoigne le grand nombre de ratifications50 : près de
soixante Etats l'ont ratifiée dont les plus importants.
Si la convention de Vienne s'applique aux contrats de vente
internationale tant dans la formation de contrats, que dans leur
exécution, un sous-acquéreur peut- il directement agir, sur le
fondement contractuel, contre le vendeur initial, lorsque la vente originaire
est régie par cette convention ?
Examinant le domaine d'application de la convention de Vienne,
on trouve certaines exclusions auxquelles la convention ne s'applique pas.
Parmi celles-ci, on retrouve l'exclusion en matière de l'action
directe.
L'article 4 de la convention prévoit que ses
dispositions ne régissent que « la formation du contrat de vente et
les droits et obligations qu'un tel contrat fait naître entre le vendeur
et l'acheteur ». La CVIM ne concerne donc pas les relations juridiques qui
peuvent être réalisées à l'égard des tiers,
mais uniquement les relations inter partes. Cet article est dans le
même chemin que l'article 1165 du Code civil français. Il en
résulte donc que les tiers ne peuvent invoquer à leur profit les
dispositions de la CVIM et, inversement, que les parties ne peuvent non plus
envisager son application à des relations engagées avec des
tiers. Plus concrètement, dans notre hypothèse, le
sous-acquéreur ne peut intenter une action contractuelle
50 « Droit du commerce international », préc.
directe à l'encontre du vendeur fabricant initial si le
contrat initial est régi par la convention de Vienne.
Le problème s'est présenté devant la Cour
de cassation le 5 janvier 199951, à propos de dommages subis
par l'acheteur français d'un produit revendu par l'acquéreur
français d'un fournisseur américain. Dans cette affaire, la Haute
juridiction a explicitement refusé l'applicabilité de la
convention de Vienne à l'action intentée par le
sous-acquéreur français contre le fabricant américain sur
le fondement d'une garantie contractuelle. La décision de la Cour avait
été diversement interprétée. Selon les uns, la Cour
de cassation aurait implicitement condamné l'action directe du
sous-acquéreur contre le vendeur initial sous l'empire de la convention
de Vienne. Selon une seconde analyse, la portée de l'arrêt est
strictement limitée à l'hypothèse de la garantie
contractuelle qui, en tant que telle, ne relève pas de la convention. La
question n'aurait pas été tranchée par la Cour alors que
les autres estiment que la convention de Vienne sonne le glas de l'action
directe dans la chaîne internationale de contrats. Un autre courant
estime que l'action directe est hors du champ d'application de la convention et
que rien ne s'opposerait, dans l'hypothèse où le droit national
applicable à la vente initiale pour les questions non couvertes par la
CVIM, autorisait le sous-acquéreur à agir directement contre le
vendeur initial sur un fondement contractuel, à ce que le juge applique
la convention de Vienne à cette action.
Après avoir déterminé la loi applicable
à l'action directe dans une chaîne de contrats translative, nous
allons, ultérieurement, essayer d'en déterminer pour une
chaîne de contrats non translative.
51 Cass. 1ère civ, 5 jan. 1999 :
Contrats, conc., consom. 1999, n°53, obs. L. Leveneur ; D.1999,
383, note Cl. WITZ ; Rev. Crit. DIP 1999, p.519, note V.
Heuzé
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