A. - La position de la CJCE
Nous examinerons, dans un premier temps, la qualification
(1°) opérée par les juges communautaires de l'action
directe, avant de cerner les justifications (2°) du refus de la
qualification contractuelle de l'action directe.
31 Arrêt préc.
1° Quant à la qualification
communautaire de l'action directe
La question est de savoir comment le juge communautaire qualifie
l'action du sous-acquéreur.
Une convention internationale doit, autant que possible,
être interprétée uniformément, ce qui implique que
chacun de ses termes mérite, en principe, d'être compris dans son
sens conventionnel. En effet, le texte conventionnel ne peut quant à son
interprétation, que se dégager des systèmes nationaux des
États membres.
L'objet de la convention de Bruxelles légitime
l'interprétation communautaire des règles qu'elle édicte.
La qualification ne saurait en effet être recherchée sans
illogisme à l'extérieur de l'ordre juridique auquel appartient la
règle de compétence qu'il s'agit de faire fonctionner. Les
règles de compétence n'émanant pas de l'ordre juridique
interne des États contractants, mais de celui formé par la
convention elle- même, et plus généralement par le droit
communautaire. La lex fori du juge saisi n'est plus sa loi interne,
mais la convention qui a seule vocation à lui fournir la qualification
dont il a besoin, indépendamment de toute autres données.
Ces considérations semblent être
impérieuses lorsque les droits nationaux sont divergents, ce qui est
précisément le cas à propos de la notion de la
matière contractuelle.
S'agissant plus précisément du concept de la
matière contractuelle employé par l'article 5-1° de la
convention de Bruxelles, les juges communautaires ont explicitement et à
plusieurs reprises pris position en faveur de l'élaboration d'une notion
autonome de la matière contractuelle, excluant le renvoi au droit
interne de
l'un ou l'autre des États
concernés32.
On a pu critiquer l'arrêt rendu par la première
chambre civile de la Cour de cassation le 28 octobre 198633, dans
lequel le juge, considérant l'action en responsabilité
intentée par un sous-acquéreur contre le fabricant de
marchandises défectueuses comme étant de nature
nécessairement contractuelle, approuve la Cour d'appel d'avoir
appliqué l'article 5-1° de la convention de Bruxelles à la
cause. Si la qualification contractuelle de l'action en cause est certes de
droit positif français, est- il pour autant possible d'affirmer que le
système et les objectifs de la convention impliquent
nécessairement une qualification semblable au plan de la
compétence internationale? L'hésitation et les controverses des
législations nationales incitent à la prudence et justifient sans
aucun doute, par application des articles 2 et 3 de la convention de Bruxelles,
un renvoi préjudiciel devant la CJCE.
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