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La problématique du contrôle de l'Etat sur les collectivités territoriales décentralisées au regard de la loi constitutionnelle du 18 janvier 1996

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par John Richard KEUDJEU DE KEUDJEU
Université de Douala Cameroun - DEA 2008
  

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Paragraphe 2 : L'émergence d'un contrôle budgétaire et financier

Les collectivités territoriales décentralisées vivent en majeure partie des subventions étatiques167(*). Ce qui justifie le contrôle budgétaire et financier que l'Etat exerce sur ces dernières.

Jadis exercé par les préfets, les agents locaux du trésor, ce contrôle est désormais confié à la chambre des comptes auprès de la Cour suprême168(*). Avec l'émergence de ce contrôle budgétaire et financier, l'on assiste à la manifestation d'une effectivité progressive dans la libre administration des collectivités locales dans le cadre du contrôle de l'Etat ; car malgré le maintien de l'approbation pour l'établissement du budget, l'on assiste à une juridictionnalisation du contrôle budgétaire. Ce d'autant plus que ce contrôle est a priori, d'où plus garant de l'initiative locale.

L'essentiel de l'analyse de ce contrôle portera non seulement sur les mécanismes de contrôle budgétaire d'une part (A) et d'autre part sur le contrôle budgétaire proprement dit (B). L'on s'inspirera de la loi communale de 1974, de son décret de 1977169(*) et de ce qui se fait dans le contexte français.

A) Les mécanismes de contrôle budgétaire

Le budget des collectivités peut être défini comme l'acte par lequel sont prévues et autorisées par le collège délibérant de ces personnes juridiques, les recettes et les dépenses de celles-ci pour l'année à venir170(*). Il se dégage de cette définition que le budget local est un acte de prévision et d'autorisation, ce qui implique le vote (1) et justifie l'approbation dont il fait l'objet (2). De même, le budget a un caractère annuel et doit être équilibré en recettes et dépenses.

1) Le vote du budget

Le conseil local est souverain en ce qui concerne le vote du budget. Il a de ce fait, le pouvoir d'accepter, de modifier ou de rejeter en partie ou en totalité les propositions du maire. Le conseil est lui-même tenu au respect des prescriptions légales.

S'agissant des délais pour le vote du budget, le 15 mars était considéré comme date-butoire. Si le conseil ne se réunissait pas dans ces délais pour voter le budget, le préfet pouvait l'établir d'office et le soumettre à l'approbation du gouverneur. De plus, le projet de budget devait lui être communiqué au moins quinze (15) jours avant la réunion du conseil. Le préfet disposait de sept (7) jours pour formuler ses observations. Il pouvait à cet effet inviter le maire ou le délégué du gouvernement à lui fournir des éclaircissements ou à apporter des aménagements sur le projet de budget171(*).

2) L'approbation du budget

Faire état de l'approbation du budget voudrait que l'on cerne ce qu'il en était du circuit d'approbation avant d'en venir à la nature du contrôle effectué.

En effet, dans les quinze (15) jours qui suivaient la session du conseil, le maire devait adresser au préfet, sous pli recommandé avec accusé de réception le budget voté. Le préfet devait le transférer à son tour au gouverneur pour approbation. Dans les communes pourvues d'un contrôleur financier, celui-ci visait les délibérations portant sur le vote du budget communal. L'approbation du budget devait intervenir au plus tard le 15 juin, après son étude par le service provincial des communes et visa préalable des services financiers provinciaux compétents. Le budget communal devenait exécutoire au plus tard le 1er juillet. Un exemplaire du budget était transmis au ministre chargé des finances.

En ce qui concerne la nature des contrôles effectués, ils portent tant sur le fond que la forme. Sur le plan formel, l'autorité de tutelle doit s'assurer que la forme du document budgétaire est conforme aux lois et règlements en la matière. Sur le fond, les contrôles portent sur la régularité des inscriptions budgétaires. Il s'agit de s'assurer que le budget a été voté en équilibre réel. Compétence était reconnue au préfet de le redresser après consultation du maire ou du délégué du gouvernement et d'en informer le conseil la session suivante. D'autre part, l'autorité de tutelle pouvait supprimer ou réduire les dépenses pour cause d'irrégularité ou d'opportunité ; mais il ne pouvait les augmenter. Toutefois, il pouvait inscrire des dépenses obligatoires au budget.

B) La portée du contrôle budgétaire local

.

La loi du 29 décembre 2006172(*) constitue en matière de contrôle budgétaire des collectivités locales, le point d'aboutissement d`une évolution amorcée en 2003 avec la création d'une chambre des comptes auprès de la Cour suprême et, poursuivie en 2004 avec l'adoption des lois du 22 juillet 2004 sur la décentralisation ; lesquelles consacrent dans l'ensemble une priorité au contrôle par l'organe juridictionnel des comptes locaux.

Cette portée sera appréhendée dans le cadre du budget non voté à la date limite et du budget non voté en équilibre réel d'une part (1) et d'autre part en matière de compte administratif non présenté en équilibre et des dépenses obligatoires non inscrites au budget (2)

1) Le contrôle budgétaire et financier dans le cadre du budget non voté à

la date limite et du budget non voté en équilibre réel

Nous ferons tout d'abord cas du contrôle budgétaire et financier dans le cadre du budget non voté à la date limite (a) ensuite de celui relatif au budget non voté en équilibre réel (b).

a) Le budget non voté à la date limite

Sous l'empire de loi communale de 1974, le budget de la commune devait être voté au plus tard le 15 mars ; d'où la session budgétaire du conseil municipale tenait chaque année dans la première quinzaine du mois de mars173(*). Ainsi, si à la date limite - celle qui sera fixée - le budget n'est pas voté, l'autorité de tutelle à laquelle le budget doit être soumis devra saisir la chambre des comptes près la Cour suprême. Ce qui suspendra les pouvoirs de l'assemblée délibérante jusqu'au règlement d'office du budget par l'autorité de tutelle sur approbation de la chambre des comptes ; quoiqu'il pourra s'en passé par décision motivée174(*).

b) Le budget non voté en équilibre réel

En guise de rappelle, sous l'empire de la loi communale de 1974, lorsque le budget communal n'était pas voté en équilibre, il revenait au préfet de le redresser après consultation du maire ou du délégué du gouvernement et, d'en informer le conseil municipal la session suivante.

Dans la lignée des lois de 2004 sur la décentralisation, plus favorables à la libre administration, l'autorité de tutelle devra dans les quinze jours (15) suivant la transmission du budget, saisir la chambre des comptes qui constatera ou non le déséquilibre. Et, le cas échéant d'en formuler les propositions motivées pour son établissement. L'assemblée délibérante ainsi épinglée devra disposer d'un délai pour rééquilibrer le budget. A défaut, le budget devra être réglé et rendu exécutoire par l'autorité de tutelle.

2) Le contrôle budgétaire en matière de compte administratif non présenté

en équilibre et des dépenses obligatoires non inscrites au budget

L'étude du contrôle budgétaire à ce niveau se fera tant à l'égard du compte administratif non présenté en équilibre (a) qu'à l'égard des dépenses obligatoires non inscrites au budget (b)

a) Le compte administratif non, présenté en équilibre

Contrairement au budget qui se présente comme un catalogue de prévisions, le compte administratif retrace les recettes et les dépenses réellement effectuées pendant l'exercice budgétaire175(*).

Dans le compte administratif, les dépenses et les recettes sont classées suivant la même nomenclature que le budget. Le compte administratif retrace aussi bien les opérations au niveau de l'exécutif local que celles au niveau du receveur municipal à la fin de la période complémentaire (soit au 30 septembre, suivant l'ancienne législation).

Le compte administratif fait aussi apparaître : en recettes, les recettes à recouvrer et les créances jugées définitives, irrécouvrables ; en dépenses, les restes à payer et les dépenses engagées mais, non liquidées176(*)

Comme le compte administratif doit se présenter comme le budget en équilibre, se dégage la nécessité de son contrôle. Ainsi, si l'autorité dépasse un seuil qui reste à fixer par les textes, l'autorité de tutelle devra saisir la chambre des comptes qui précisera dans un délai - qui reste à définir - les mesures nécessaires au rétablissement de l'équilibre et vérifie leur établissement dans le budget primitif de l'exercice suivant, qui lui est transmis d'office. Si tel n'est pas le cas, elle devra adresser de nouvelles propositions à l'autorité de tutelle qui règlera et rendra exécutoire, le budget de la collectivité177(*).

b) Dépenses obligatoires non inscrites au budget

En principe, sont considérées comme dépenses obligatoires : les dépenses pour l'acquittement des dettes exigibles178(*) et celles pour lesquelles la loi l'a expressément décidé.

Au sens de l'article 69 du décret du 25 mars 1977 déterminant les pouvoirs de tutelle sur les communes, au cas où le délégué du gouvernement, le maire ou l'administrateur municipal s'abstient d'ordonnancer une dépense régulièrement autorisée et pour lesquelles existent des crédits disponibles, le préfet le mettait en demeure de procéder au mandatement de la somme due dans un délai de quinze (15) jours. Passé ce délai, il ordonnait l'ordonnancement par arrêté motivé qui tenait lieu de mandat.

Sur la base des lois actuelles sur la décentralisation, il serait judicieux que si une collectivité refuse d'inscrire une telle dépense à son budget, au lieu que l'autorité de tutelle le fasse d'autorité comme jadis, dans l'optique de garantir la libre administration des collectivités, l'autorité de tutelle devra saisir la chambre des comptes qui se prononcera dans un certain délai sur le caractère obligatoire ou non de la dépense. Si la dépense est estimée non obligatoire, l'autorité de tutelle ne pourra l'inscrire d'office179(*). Dans le cas contraire, elle pourra le faire d'office sur instruction de la chambre des comptes. S'il arrivait que l'autorité de tutelle refuse de le faire par décision motivée, pouvant engagée la responsabilité de l'administration pour faute lourde, la chambre des comptes devra mettre en demeure la collectivité d'inscrire la dépense obligatoire180(*).

3) Le contrôle juridictionnel des comptes et le contrôle de gestion.

Avoir une idée de la quintessence de chacun de ces contrôles nécessite que l'on s'accorde sur le contrôle de gestion (b) après avoir analysé à quoi renvoie le contrôle juridictionnel (a).

a) Le contrôle juridictionnel des comptes

Il y a contrôle juridictionnel des comptes locaux pour prendre l'exemple français, lorsque la chambre des comptes juge les comptes des comptables publics locaux, sous le contrôle en appel de la cour des comptes et en cassation du conseil d'Etat181(*). C'est dans ce sens que la chambre des comptes de la cour suprême juge les comptes ou les documents en tenant lieu des comptables publics patents ou de fait des collectivités territoriales décentralisées et de leurs établissements publics182(*). Ainsi, après vérification sur place et sur pièce, elle rend un jugement provisoire qui peut faire l'objet d'un recours en appel ou en cassation devant l'assemblée plénière de la Cours suprême183(*).

b) Le contrôle de gestion

A l`issue du contrôle juridictionnel des comptes locaux, un jugement est rendu. Il peut être soit un jugement de quitus, c'est-à-dire de régularité, soit un jugement de débet, c'est-à-dire d'irrégularité184(*). C'est en cela que la section de contrôle et de jugement des comptes des comptables publics des collectivités territoriales décentralisées et de leurs établissements publics au sein de la chambre des comptes de la Cour suprême fait un contrôle de gestion qui conduit à faire des observations a posteriori sur la gestion des ordonnateurs locaux et à faire d'utiles audits sur le bon emploi des fonds publics.

De ce fait, la chambre des comptes produit annuellement au Président de la République, au Président de l'Assemblée national et au Président du Sénat, un rapport exposant le résultat général de ses travaux et les observation qu'elle estime devoir formuler en vue de la réforme et de l'amélioration de la tenue des comptes et de la discipline des comptables publics185(*).

L'on peut déduire de l'analyse de ces rénovations sur les modalités du contrôle de l'Etat sur les collectivités locales que l'on tend de manière véritable vers une réelle libre administration des collectivités locales. D'où la nécessité d'apprécier au regard de cette évolution si les finalités de ces contrôles ne sont pas en reste.

* 167 Lire les articles 22, 23 et 24, Loi, d'orientation de la décentralisation.

* 168 Loin° 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la chambre des comptes auprès de la cour suprême, Loi n° 2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la cour suprême (articles 7 al. 1, 10 et 39)

* 169 Ceci tient compte du fait que le budget reste soumis à l'approbation préalable de l'autorité de tutelle. Ce qui implique que les principes en la matière resteront quelques peu de mise.

* 170 GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), (dir.), Lexique des termes juridiques, 13e éd, Paris, Dalloz, 2001, p.76. Il s'agit en effet de la manifestation de l'autonomie financière des collectivités locales ; car la personnalité juridique reconnue aux collectivités locales permet à ces dernières de disposer d'un patrimoine propre dont l'expression budgétaire n'est rien d'autre que l'autonomie financière qui leur est reconnue. Cf. NACH MBACK (Ch.), Démocratisation et décentralisation : Genèse et dynamiques comparées des processus de décentralisation en Afrique subsaharienne, Paris, Karthala - PDM, 2005, p.29

* 171 Art. 49 et 50 du décret n° 77/91 du 25 mars 1977 déterminant les pouvoirs de tutelle sur les communes.

* 172 Il s'agit de la loi fixant l'organisation et le fonctionnement de la cour suprême.

* 173 Art. 49 al.1 du décret du 25 mars 1977 déterminant les pouvoirs de tutelle

* 174 Précisons qu'il s'agit d'une analyse prospective qui est faite là en s'inspirant de la création de la chambre des comptes et de la pratique française en la matière. Cf. TURPIN (D.), Droit de la décentralisation : Principes - Institutions - Compétences, Paris, Gualino-éditeur, Coll. « Mémentos », 2003, p. 43

* 175 FINKEM (M.), Commune et gestion municipale au Cameroun : Institutions municipales, Finances et budget, Gestion locale, Interventions municipales, Yaoundé, Presse du Groupe Saint François, 1996, p.142

* 176 Ibid

* 177 Cf. Art.2 al. 1, Loi n° 2003/005 du 21 avril 2003 fixant les attributions, l'organisation et le fonctionnement de la chambre des comptes auprès de la cour suprême, art. 39, Loi n°2006/016 du 29 décembre 2006, fixant l'organisation et le fonctionnement de la cour suprême. Lire aussi TURPIN (D.), Droit de la décentralisation : Principes - Institutions - Compétences, op.cit, p. 41

* 178 Cf. TA. Versailles, 04 janvier 1994, M. Antoine c/ Préfet de l'Essonne, Directeur des services fiscaux et communes d'Yerres à propos des emprunts contractés par la société d'économie mixte locale avec la garantie de la commune

* 179 CE. 23 mars 1984, OGEC de Couëron, 4 novembre 1988, Syndicat mixte du collège Val de serre.

* 180 CE. 29 avril 1996 Département de la loire.

* 181 MORAND-DEVILLER (J.), Cours de droit administratif, 7ème éd, Paris, Montchrestien, Septembre 2001, Pp 186 - 187

* 182 Art. 2 al. Loi, n° 2003/005 du 21 avril2005 fixant les attributions l'organisation et le fonctionnement de la chambre des comptes près la cour suprême.

* 183 Lire dans ce sens les articles 7 al. 1, 10, 39 et le chapitre III relatif à la procédure devant la cour suprême de la loi n° 2006/016 du 29 décembre 2006 fixant l'organisation et le fonctionnement de la cour suprême. Ce qui permet de noter la naissance d'un double degré de juridiction en matière de comptes.

* 184 Art. 4, Loi, n° 2003/005 du 21 avril2005

* 185 Art. 3, Loi, n° 2003/005 du 21 avril2005

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry