WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

L'ordre public pénal et les pouvoirs privés économiques

( Télécharger le fichier original )
par Joseph KAMGA
Université de Nice Sophia Antipolis - Master 2 recherche en droit économique 2008
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

Section II : L'opportunité des mesures de substitution à la sanction pénale.

Face à l'inadéquation de certaines sanctions pénales en matière de groupes, notamment en droit de la consommation, il serait loisible d'opter pour les autres types de sanction, civile ou administrative. La responsabilité civile pourrait être substituée à la responsabilité pénale, à l'égard des actes qui constituent plus des erreurs de gestion que des actes délibérément malhonnêtes et des fautes non intentionnelles. Le droit pénal serait recentré sur des actes malhonnêtes et graves. Les fautes non frauduleuses pourraient relever de la responsabilité civile.

C'est ainsi que l'action de groupe pourrait convenir à sanctionner certaines inobservations du droit de la consommation (§ 1) et que certaines sanctions de natures administratives pourraient être revigorées (§ 2).

§ 1 : L'introduction de l'action de groupe au profit du consommateur.

La particularité de l'action publique, action pour la mise en oeuvre du droit pénal, est qu'elle a pour objet de rétablir le trouble qu'a souffert la société, les victimes directes de l'infraction ne sont prises en compte par la procédure pénale qu'à titre subsidiaire. Or, il a été démontré que les agissements inadmissibles des pouvoirs privés économiques contre lesquels se déploie le droit pénal portent gravement atteinte au bien-être individuel et collectif des consommateurs, destinataires directs des prestations des acteurs économiques. De même, les sanctions pénales, bien que dissuasives et exemplaires à l'endroit des opérateurs économiques, ne sont pas toujours à la mesure des préjudices soufferts par les consommateurs. C'est le problème de l'efficacité mrme de la sanction pénale qui ne remplit pas la fonction expiatoire du droit pénal lorsqu'elle s'attache aux délits économiques.

L'introduction des recours de nature civile, mais de nature expiatoire, serait plus efficace pour la répression de certains types de comportements inadmissibles et la réparation des préjudices sanitaires du fait des produits délictueux préjudiciables aux consommateurs. Les recours de nature civile seraient même plus appropriés pour la sanction des infractions non intentionnelles. Le droit pourrait céder le terrain à ce niveau à ces types de sanctions ou réguler concurremment avec elles, pour ne pas laisser en marge de la réprobation pénale certains comportements dont le caractère frauduleux peut être avéré. Il a été démontré que la décision des agents économiques, rationnels et maximisateurs, de recourir aux comportements injustifiables et inadmissibles pour faire du profit repose sur une analyse coût-avantage entre le coût certain de la condamnation et l'espérance de gain liée à une non-condamnation122. Or si les consommateurs avaient une action leur permettant de rétablir par voie contentieuse l'équilibre entre eux et les professionnels rompu par les contrats d'adhésion, la dissuasion serait accrue. C'est ainsi que l'introduction de l'action de groupe en droit français constituerait l'aboutissement nécessaire et logique de la législation favorable au consommateur entamée par la Loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 dite « loi Scrivener ».

L'action de groupe ou « class action » dans la terminologie américaine, est une voie de droit ouverte par la procédure civile, permettant à un ou plusieurs personnes d'exercer, au nom d'une catégorie de personnes (classe) une action en justice. Il a pour but d'organiser le rééquilibrage par la voie judiciaire, des rapports entre le faible et le fort. A ce titre, elle

122 T. KIRAT et F. MARTY, Economie du droit et de la règlementation, Gualino Eds, 2007, p. 90

constitue un nouvel instrument de régulation des puissants acteurs économique, qu'il convient de placer parfois devant leurs responsabilités. De nombreux pays européens comme l'Angleterre, le Portugal, le Pays de Galles ou la Suède disposent déjà d'une action de groupe qui a fait ses preuves.

L'action de groupe permet ainsi à un ensemble de victimes de comportements fautifs, illégaux ou contraires aux contrats conclus, d'obtenir la juste réparation du préjudice subi. Le formalisme du droit pénal ne permet pas au juge répressif de prendre en considération le préjudice subi par tous les consommateurs ou une partie importante d'entre eux. Il est limité dans son action par les principes de proportionnalité, de légalité, de personnalité de la peine. Il ne peut pas s'autoriser l'audace nécessaire de réparer les préjudices subis par les milliers, voire les millions de consommateurs, victimes de comportements fautifs des professionnels, ce qui a pour effet de laisser entre leurs mains le bénéfice des comportements illégaux. Cela est justifié par l'objet mrme de l'action publique. De mrme, l'absence d'accès gratuit à la justice, la complexité de la procédure, le coût de la justice et la technicité des règles juridiques conduisent généralement le consommateur isolé à renoncer à toute action, abandonnant ainsi au professionnel le bénéfice de son infraction. Ce qui constitue une atteinte inacceptable à l'état de droit.

L'exemple de l'entente anticoncurrentielle et illégale entre les opérateurs de téléphonie mobile est éclairant. Cette entente a été sévèrement condamnée par voie d'amende par le Conseil de la concurrence puisque près de 20 millions de personnes ont été déclarées victimes par cette Autorité administrative indépendante. L'association de consommateurs UFC-Que Choisir a engagé une action au nom de l'intérrt collectif des consommateurs et a proposé aux victimes de se joindre à sa procédure. Elle a affecté un personnel spécifique pour aider les consommateurs à constituer leurs demandes de réparation. 300.000 personnes se sont inscrites sur le site Internet créé à cet effet ; après 10 mois de travail, et 500.000 euros de frais de gestion, seulement 12.521 dossiers ont pu rtre finalisés et acheminés par camion jusqu'au tribunal chargé de trancher l'affaire. 12.521 demandeurs sur près de 20 millions de victimes, c'est 0,06 % des victimes qui seront peut-rtre indemnisées. C'est une rente inacceptable accordée aux opérateurs économiques ne respectant pas volontairement l'état de droit123.

Mis à part les effets pervers que cette action seraient susceptible d'engendrer et son impact négatif sur la compétitivité des firmes et l'incitation à l'innovation, elle présente

123 Voir exposé des motifs de la proposition de Loi N° 324 enregistrée à la présidence de l'Assemblée Nationale le 24 Octobre 2007 et relatif à l'introduction en France de l'action de groupe, présenté par le député Arnaud Montebourg et le groupe socialiste.

l'avantage d'inciter les consommateurs s'estimant victimes d'un comportement fautif de la part d'un professionnel et inefficacement réprimé par le droit pénal, d'ester en justice et de faire condamner le professionnel. L'action de groupe serait une voie ouverte aux consommateurs pour rééquilibrer leurs rapports avec les professionnels, déséquilibrés du fait de nombreux contrats d'adhésion qui ne sont en substance pas des contrats, mais des « règlements privés ». L'équilibre mis à mal pourrait rtre rétabli grkce aux larges pouvoirs qu'offre cette action au juge. Il exerce généralement un contrôle étroit sur la procédure et dispose d'une importante marge de manoeuvre sur la recevabilité de l'action et exerce un contrôle sur les transactions qui peuvent être conclues, le plus souvent par une procédure d'homologation. Le droit pénal devrait prendre en considération ces expériences pour se repositionner et céder certains terrains aux procédures plus efficaces, surtout que cette procédure contraint les pouvoirs privés économiques à respecter la loi mrme en l'absence d'incrimination pénale.

De même, face à la lenteur de la justice pénale et l'absence d'incrimination suffisante en d'autre matière importante comme le droit de l'environnement, les sanctions de nature administratives devraient être utilisées pour faire cesser certains agissements condamnables que n'appréhende pas le droit pénal.

précédent sommaire suivant






Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy








"Tu supportes des injustices; Consoles-toi, le vrai malheur est d'en faire"   Démocrite