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Analyse criminologique de la présnce d'enfants dans les sites miniers artisanaux à  Kolwezi

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par Musevu Vould Kawele
Université de Lubumbashi/ RD Congo - Diplôme dà¢â‚¬â„¢études approfondies en criminologie 2014
  

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Chapitre 2: Les enfants dans les sites miniers artisanaux à Kolwezi

Ce chapitre est subdivisé en trois parties suivantes : - La brève historique de l'exploitation minière à Kolwezi ;

43

- Les mécanismes de protection de l'enfant ;

- Les catégories des enfants qui se trouvent dans des sites miniers artisanaux.

2.1. Brève historique de l'exploitation minière à Kolwezi

Jadis poumon économique de la République Démocratique du Congo par sa grande production du cuivre et du Cobalt à travers la Gécamines, la ville de Kolwezi a traversé des périodes difficiles après la chute de la Gécamines. Cette chute a eu des conséquences graves sur toute l'économie du pays. Etant donné que les sites qui ont servi d'investigation appartiennent à la Gécamines, nous avons trouvé impérieux de commencer par une brève historique de cette entreprise minière afin d'être éclairé sur sa création, son évolution, ainsi que la phase dans laquelle elle se trouve aujourd'hui.

2.1.1. Historique de la Gécamines

La Gécamines est une entreprise publique de droit congolais. Elle appartient à l'Etat congolais. Elle a constitué pendant longtemps l'épine dorsale de l'économie congolaise grâce à sa capacité contributive très importante dont le record s'élève à 368 millions de dollars comme contribution sous forme d'impôts, taxes et droits divers réalisés en 1988.2

La Gécamines découle de l'Union Minière du Haut Katanga, créée le 28 octobre 1906 par la fusion entre une compagnie créée par Léopold II et Tanganyika Concessions Ltd, un groupe britannique créé par Cecil Rhodes, qui prospecta les minerais au Katanga à partir de 1899, et obtint des concessions en 1900, afin d'exploiter les richesses minérales de la région. Elle fut propriété de la Société Générale de Belgique, la plus grande société commerciale de Belgique qui contrôlait environ 70 % de l'économie du Congo et qui réalisa la première production industrielle de cuivre aux usines de Lubumbashi dès le 30 juin 1911. La gamme des produits s'est successivement élargie avec le cobalt en 1924, le zinc en 1936, le cadmium 1941, et le germanium 1954.

2 http://www.gecamines.cd/detailinfo.php?clef=17

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L'Union Minière du Haut Katanga fut déjà à l'époque, une très importante société minière, car elle exploitait une concession d'une superficie aussi grande que le Royaume de la Belgique. L'année 1966 fut l'année où le Président Mobutu avait pris la mesure imposant toute société commerciale dont le principal siège d'exploitation se situait au Congo, d'y transférer son siège administratif et social3. Cette disposition allait à l'encontre de la loi Belge du 17 juin 1960, qui offrait aux entreprises coloniales d'opter soit pour la nationalité belge, soit pour la nationalité congolaise. Dans les faits, plusieurs sociétés optèrent pour la nationalité belge et les actionnaires transformèrent les entreprises actives au Congo en des filiales4.

Une autre ordonnance-loi du 7 juin 1966 dite loi Bakajika, portant régime juridique des cessions et des concessions foncières faites avant le 30 juin 1960, stipula que l'Etat congolais était le propriétaire de toutes les concessions foncières et minières accordées avant le 30 juin 1960.

Après des mois de tensions, les deux parties (les gouvernements congolais et belge) finirent par conclure un accord le 17 février 1967, accord qui permit aux deux protagonistes de sauver la face de l'entreprise. Sur le terrain, la Gécamines était fonctionnelle en n'exploitant les minerais avec l'aide technique de la Société Générale des Minerais (SGM). Mais, la commercialisation restait du ressort de la société Belge, moyennant une commission de 4,5% sur la valeur totale de la production. Et puisque, le cours du cuivre connut une hausse constante entre 1965 et 1969, la Belgique et le Congo scellèrent leur réconciliation dans l'euphorie de cette prospérité5.

La Gécamines a ainsi connu les années de gloire en 1974 et en 1986, sous la houlette de ses remarquables Dirigeants Congolais en l'occurrence Umba Kiamitala et Mulenda Mbo. Le chiffre d'affaire dépassait le Milliard de dollars américains en production6.

En 1990, la Gécamines atteignit son point culminant. Minée de l'intérieur par les effets conjugués de la baisse dramatique du cours du cuivre, du vieillissement de l'outil de

3 Ordonnance-loi n°66-341 portant transfert siège social et siège administratif des sociétés dont le principal siège d'exploitation est située au Congo.

4 www.7sur7.be/.../la-belgique-a-spolie-500-entreprises-congolaises.dhtm.

5 www.gecamines.cd/detailinfo.php?clef=17, page 08.

6 www.gecamines.cd/detailinfo.php?clef=17, page 08.

45

production et de la mauvaise gestion, elle entra dans une zone de turbulence. Depuis cette année, la Gécamines avait connu une chute dramatique de production consécutive à plusieurs facteurs dont les principaux sont :

· L'effondrement d'une partie de la mine souterraine de Kamoto à cause d'une exploitation irresponsable occasionnant l'affaissement du mur de soutènement de cette mine ;

· L'embargo contre la République Démocratique du Congo après le massacre des étudiants sur le campus Universitaire de Lubumbashi ;

· L'exportation incontrôlée et désordonnée des mitrailles ;

· L'érosion de l'important capital humain de la Gécamines par l'émigration des plus hauts cadres techniciens vers d'autres cieux et dont le point culminant fut atteint en 1993 avec l'expulsion d'une grande partie de travailleurs Gécamines oeuvrant au Groupe Ouest (Kolwezi) source principale des métaux.

Le secteur minier au Katanga a traditionnellement été occupé en grande partie par la Gécamines. Sur le plan national, l'importance de la Gécamines se constatait dans le fait qu'elle était parmi les plus grands employeurs au Congo. En 1990, elle comptait 35.000 agents dont 91,8% étaient des agents d'exécution7.

La Gécamines offrait l'existence à plus de 258.000 personnes (les agents et leurs familles). Parmi les cadres, en 1990, 1% était expatriés (essentiellement Belges) et le reste était constitué des Congolais et d'Africains. Vers les années 80, environ 70% des recettes budgétaires du Congo provenaient de la Gécamines (Ikos : 2007, 87). Elle jouait un rôle social et économique important pour beaucoup des Petites et Moyennes Entreprises qui se trouvaient dans sa périphérie8.

La province du Katanga a connu une transformation socioéconomique profonde à la suite de la faillite de la Gécamines qui a été pendant plus de 30 ans le moteur de l'économie national. Ainsi, la production des minerais se présentait comme suit :

7www.gecamines.cd/detailinfo.php?clef=17, page 09. 8 http://www.gecamines.cd/detailinfo.php?clef=17.

46

2.1.1.1. La production des minerais au fil des années

Les chiffres qui suivent dans le tableau ci-dessous illustrent la dégradation de la production des minerais de la Gécamines au fil des années (Ikos : 2007, 94-95).

Tableau n°5 : Evolution de la production annuelle des métaux

Année Cuivre Cobalt Zinc

1954

223.791

8.609

7.800

1955

234.673

8.587

8.587

1956

247.452

9.089

33.968

1957

240.280

8.115

42.084

1958

235.586

6.501

53.432

1959

280.403

8.431

54.844

1960

300.675

8.222

53.358

1961

293.509

8.326

56.960

1962

295.236

9.683

56.025

1963

269.924

7.376

52.724

1964

275.547

7.676

55.553

1965

287.568

8.388

57.019

1966

309.239

10.945

61.500

1967

318.976

9.718

61.492

1968

324.500

10.549

62.574

1969

362.216

10.596

63.690

1970

385.460

13.958

63.749

1971

405.832

14.518

62.673

1972

428.703

13.043

67.170

1973

460.697

15.042

66.170

1974

471.072

17.545

66.150

 

47

1975

463.148

13.638

65.588

1976

407.704

10.686

60.622

1977

450.938

10.208

51.049

1978

391.347

13.095

43.508

1979

369.796

14.029

43.693

1980

425.695

14.593

43.848

1981

468.241

11.123

57.633

1982

466.404

5.475

64.425

1983

465.792

5.360

62.535

1984

465.549

9.075

68.411

1985

469.950

10.571

67.911

1986

476.033

14.518

63.914

1987

473.373

11.871

55.129

1988

438.451

10.026

61.091

1989

422.492

9.311

54.043

1990

338.708

9.981

38.208

1991

222.097

9.662

28.321

1992

134.993

6.547

18.833

1993

45.910

2.092

4.149

1994

29.300

3.274

600

1995

34.000

4.200

4.500

1996

60.000

5.500

9.000

1999

64.706

7.924

-

2001

44.000

6.000

6.000

2002

19.000

1.800

-

2003

9.105

2.140

-

2004

12.150

7.762

-

 

48

La production du cuivre qui est le principal produit de la Gécamines, est passée de 476.033 tonnes avec un prix de 2.855 USD la tonne (1986) à 9.000 tonnes avec un prix de 1.800 USD la tonne en 2003.

En novembre 1998, la société est gérée par des industriels Zimbabwéens, sur ordre gouvernemental. Cette nouvelle Direction de l'entreprise prend en 1999, la décision de réduire les effectifs en procédant par la mesure appelée « dispense de l'obligation de prester » qui frappe une partie du personnel aux groupes Sud (Lubumbashi), Centre (Likasi) et quelques cas au groupe Ouest (Kolwezi). Le désastre social est extrêmement poignant en 2001, où les agents se sont vu retraités sous l'opération « départ volontaire », sans recevoir suffisamment d'argent conformément aux années qu'ils ont travaillés dans la société.

Parlant de la chute de la Gécamines, Dibwe (2003, 46) note que les travailleurs de la Gécamines, l'ex U.M.H.K., jadis enviés traversent eux aussi une période difficile. En effet, depuis 1991, la production minière ne cesse de décroître. Le cuivre a vu sa production passer de 222.100 tonnes métriques en 1991 à 48.000 en 1993 ; la production du cobalt est passée de 8.600 tonnes à 2.200 tonnes, et, enfin celle du zinc a chuté de 28.900 tonnes à 4.150 au cours de la même période. La baisse a donc été de 78,4% pour le cuivre, de 74,4% pour le cobalt et de 85,6% pour le zinc.

L'outil de production s'est également détérioré au fil des années, parce que la politique de son renouvellement n'était pas d'application. Ceci nous ramène à pouvoir présenter l'état des installations de la Gécamines.

2.1.1.2. L'état actuel des installations de la Gécamines

Toutes les installations de la Gécamines sont vétustes. Actuellement elles ne sont que ruines ou vestiges. De ce fait, voici les déclarations d'un ancien Administrateur Délégué Général de la Gécamines, Paul Fortin (Moreau et Brion : 2009, 118) :

« La Gécamines, c'est un vaisseau qui a été perdu dans le temps et qui continue à voguer. C'est comme arrêté dans le temps. Ça attend une nouvelle vie. On voit le squelette aujourd'hui. C'est comme un champ de bataille après le combat. Ce sont de très vielles installations. Elles datent de 1913. C'était

49

l'essor de l'Union minière. Alors, ces usines, ces équipements produisaient 600 tonnes de cuivre par jour. 1 million de dollars par jour à la belle époque. Maintenant ils produisent zéro. La Gécamines s'est écrasée après 1987. Raison politique, raison de perte d'espoir, raison de pillage. Je pense que les causes sont multiples. Et ces multiples causes ont mis complètement à terre ce géant qu'était l'Union Minière et la Gécamines ».

Ces propos prouvent la vétusté de toutes les installations de cette Société. Il lui faut un redressement.

Depuis l'avènement du code minier de 2002, l'Etat congolais a libéralisé le secteur minier. La Gécamines a conclu des contrats de partenariats avec des privés pour sa relance. D'après le rapport des travaux des partenariats conclus par la Gécamines (2007, 5), plusieurs contrats de partenariat et deux contrats d'amodiation ont été conclus entre la Gécamines et des privés pour sa relance. Ces contrats ont abouti à la création des entreprises ci-après :

· Boss Mining sprl, (BM),

· Compagnie Minière du sud Katanga sprl, (CMSK),

· Compagnie Minière de Tondo sprl, (CMT),

· La Congolaise des Mines et de Développement sprl, (COMIDE),

· Compagnie Minière de Kambove sprl, (COMIKA),

· Compagnie Minière de Luisha sprl, (COMILU),

· Compagnie Minière de Musonoie sprl, (COMMUS),

· DRC Copper and Cobalt Project sarl, ( DCP), actuellement Katanga Copper Campany (KCC),

· Kasonta-Lupoto Mines sprl, (KALUMINES),

· Kipushi Company sarl, (KICO),

· Savannah Mining sprl,

· Kingamyambo Musonoie Tailings sarl, (KMT)

· La Minière de Kasombo sprl, (MIKAS), devenue la Minière de Kambove, (MIKA),

· La Minière de Kalumbwe-Nyunga sprl, (MKM),

· Mukondo Mining sprl, (MM),

· Mutanda Mining sprl, (MUMI)

50

· Ruashi Mining sprl, (RM),

· La Société d'exploitation de Kipoi sprl, (SEK),

· La Sino-Congolaise des Mines sarl, (SICOMINES),

· Shituru Mining Company sprl, (SMCO),

· La Société de Kabolela et de Kimpese sprl,(SMKK),

· La Société Minière de Kolwezi sprl, (SMK),

· La Société Minière de Deziwa et Ecaille sprl (SOMIDEC),

· Tenke Fungurume Mining sarl, (TFM),

· Anvil Mining, actuellement Mining Metal and General (MMG),

· Société pour le traitement du Terril de Lubumbashi sprl, (STL),

· Compagnie Minière du Sud Katanga (CMSK),

· Deux contrats d'amodiation : AMCK et SOMIKA.

Par le même code minier de 2002, l'Etat congolais a également autorisé l'exploitation minière artisanale, en autorisant le ministère des mines à créer officiellement des zones d»exploitation artisanale (ZEA) pour les creuseurs. Le point qui suit traite de l'exploitation minière artisanale à Kolwezi.

2.1.2. L'exploitation minière artisanale à Kolwezi

L'exploitation minière artisanale est définie par le code minier de 2002 comme toute activité par laquelle une personne physique de nationalité congolaise se livre, dans une zone d'exploitation artisanale délimitée en surface et en profondeur jusqu'à trente mètres au maximum, à extraire et à concentrer des substances minérales en utilisant des outils, des méthodes et des procédés non industriels. Mais depuis des longues années, l'exploitation minière artisanale se pratiquait clandestinement à Kolwezi.

2.1.2.1. Historique et évolution de l'exploitation minière artisanale à Kolwezi

L'exploitation minière artisanale est une pratique qui date du 19ème siècle. L'histoire nous renseigne que les ancêtres fabriquaient les croisettes en cuivre qu'ils se servaient comme monnaie. Ces croisettes étaient fabriquées sur base du minerai à partir des procédés qu'on appelait « lwanzo lwa mikuba ». Pendant la période de l'Etat Indépendant du Congo (EIC), à travers le décret du 8 juin 1888, les indigènes étaient autorisés de continuer à exploiter les

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mines (qu'ils exploitaient avant le décret) pour eux-mêmes. Arrivé en 1937 par le décret du 24 septembre 1937, l'exploitation des mines était interdite à toute personne n'ayant pas le droit. Mais les indigènes pouvaient sans acte de concession, continuer l'exploitation des mines dans les conditions qu'ils pratiquaient à la date de l'entrée en vigueur du décret de 1937. Ces droits accordés aux indigènes portaient sur les gisements de fer et de salines (Mukendi : 2000, 192). L'exploitation des mines par les indigènes à cette époque se pratiquait à l'aide des procédés traditionnels non industriel, comme c'est le cas à ces jours avec l'artisanat minier.

L'exploitation artisanale des substances minérales précieuses était strictement interdite depuis l'Etat Indépendant du Congo jusqu'en 1967, année de la promulgation de la première législation minière du Congo par l'ordonnance-loi n° 67/231 du 3/05/1967 portant législation générale sur les mines et les hydrocarbures, à l'époque où le pays s'appelait République Démocratique du Congo. Une peine de 15 à 20 ans de servitude pénale était prévue à quiconque sans titre légal procéderait à des travaux d'exploitation ayant pour objet les substances précieuses. Il était aussi clairement décrit : toute personne qui pouvait découvrir fortuitement des pierres précieuses brutes ou des métaux précieux non ouvrés était tenue de les remettre dans le délai de quinze jours (Mukendi : 2000, 193). D'après ce même auteur, cette interdiction d'exploiter artisanalement les substances minérales précieuses ne favorisait pas la participation des nationaux aux richesses minières du pays et avait débouché à l'exploitation artisanale clandestine et à la fraude de l'exploitation des substances minérales précieuses, telles que les diamants au Kassaï.

L'ordonnance-loi n°67/231 du 3/05/1967 est à la base de l'institution du permis d'exploitation artisanale et a édicté les règles et principes devant régir l'exploitation artisanale des substances minérales. En 1981, cette ordonnance-loi fut abrogée par l'ordonnance-loi n°81-013 du 2 avril 1981 portant législation générale sur les Mines et les Hydrocarbures. Une année après, l'ordonnance-loi n°81-013 du 2 avril 1981 fut modifiée par l'ordonnance-loi n° 82-039 du 5 novembre 19829. Celle-ci avait édicté les règles relatives à l'exploitation artisanale et à la commercialisation de la production artisanale des substances minérales précieuses. L'article 30 énonçait : Aux conditions indiquées au présent chapitre, certains gisements d'or, de diamant ou de toute autre matière ou substance concessible déclarée précieuse, peuvent faire d'objet d'une exploitation artisanale. Il y a exploitation artisanale,

9 Journal Officiel n° 22 du 15/11/1982, p10.

Cette période va des années 1985 à 1990. Les creuseurs exploitaient du minerai qu'ils appelaient « roche » et qui se vendait par kilos. En soit, il s'agissait de l'hétérogénite. Les

52

lorsque les facteurs techniques et économiques qui caractérisent les gisements ci-dessus décrits ne permettent pas d'en assurer une exploitation industrielle au sens de la présente législation et de ses mesures d'exécution. Dans ce cas, de tels gisements seront érigés, dans les limites d'une aire géographique déterminée, en zone d'exploitation artisanale, par voie d'arrêté du Commissaire d'Etat ayant les mines dans ses attributions, après avis du Service des Mines, du Gouverneur de Région concerné et, le cas échéant, des entreprises chargées de l'exploitation et, ou de la commercialisation de telles substances.

L'exploitation artisanale ne concernait pas les minerais du cuivre, cobalt, cassitérite, coltan, principaux minerais extraits au Katanga. C'est seulement les substances (pierres) précieuses qui sont l'or, le diamant, etc. Ngoie (2009, 141) précise que lors du régime de Mobutu, l'artisanat minier était accepté partout ailleurs (au Kasaï, par exemple, dans l'exploitation artisanale du diamant) mais interdit exceptionnellement au Katanga pour des raisons politiques et techniques. Politiquement, les Katangais étaient considérés par le régime de Mobutu comme des rebelles depuis la guerre de sécession tenue en échec en 1963 et le Katanga comme un grenier ou une banque où devaient se servir financièrement les autorités politico-administratives et les « dignitaires » de la deuxième république. Techniquement, le cuivre et le cobalt qui constituent les minerais répandus au Katanga ne pouvaient être exploités qu'industriellement au regard de la profondeur de la couche minéralisée de différents gisements. Les populations Katangaises en ont éprouvé un sentiment de marginalisation par l'Etat lui-même.

A Kolwezi, la population se livrait à l'exploitation frauduleuse des minerais du cuivre, du cobalt et même de l'or dans les concessions minières de la Gécamines. Par rapport à cette situation, cinq grandes périodes ont été observées. Il s'agit : la période du minerai appelé « roche », la période de l'opération « mitraille », la période du minerai dit « ndandashe », la période de « l'or » et enfin, l'actuelle période du minerai dit « l'hétérogénite ».

A. La période du minerai dénommé « Roche »

53

principaux acheteurs étaient des libanais. A cette période, peu des gens s'adonnaient à cette activité. Il n'y avait pas d'engouement comme à ces jours.

B. La période de l'opération dite « mitrailles »

L'opération dite « mitrailles » s'était passé entre les années 1990 à 1994. Elle consistait à ramasser toute la ferraille de la Gécamines en cuivre ou en cobalt. Cette période avait coïncidé à la période des conflits tribaux au Katanga qui avaient opposé les populations d'origine Katangaise contre celles d'origine Kassaïnne. L'opération « mitrailles » fut autorisée par le Gouverneur de la province du Katanga à l'époque, qui déclara : l'heure avait sonné où les fils du Katanga devaient profiter de ses richesses. Il autorisa que les Katangais descendent dans les sites de la Gécamines, qu'ils y ramassent tout ce qu'il y avait comme déchets de cuivre, cobalt et qu'ils les vendent10. Tout ce qui était en cuivre et en cobalt (fils électriques, barres-de-fer, robinets, etc.) était emporté par la population. Les installations de la Gécamines furent envahies par la population à la récupération des mitrailles.

Mais, quand il n'y eut plus rien à ramasser, les gens se mirent à creuser dans les installations de la Gécamines à la recherche des mitrailles.

Ikos (2007, 79) poursuit que l'opération mitraille, autorisée par les responsables politico administratifs de la province du Katanga à l'époque, avait privé l'entreprise de son matériel technique qui s'était vu dépouillé de toutes ses pièces en cuivre, pour des raisons pseudo économiques.

C. La période du minerai dit «ndandashe »

Cette période avait fait presque deux ans, allant de 1994 à 1996. L'exploitation du minerai dit « ndandashe » se passait à Kolwezi, précisément à « Luilu », une cité périphérique de la ville de Kolwezi, située à plus ou moins 18 Km du centre-ville. Cette exploitation consistait à récupérer les déchets du minerai de cobalt jetés par la Gécamines dans ses bassins de réserve sous forme de la boue de couleur noir. La population a nommé ces minerais « ndandashe ». Pour la Gécamines, c'est fut une forme de stockage pour une

10 www.broederlijkdelen.be/.../doc../9289-mijnbouw-katanga-fr-lr-pdf?

54

réutilisation pour les années à venir. Malheureusement que la population avait tout pris. Ce minerai était exporté en Afrique Australe (Zambie et Afrique du Sud). A cette période, les cités de « Luilu » et celle de Tshamundenda avaient connu un afflux considérable de la population venant de différents milieux pour ramasser ce minerai. Après avoir vidé tous les bassins, fut la découverte de l'or en 1997.

D. La période de l'or

Dès 1997 à l'arrivée de l'AFDL, jusqu'en 1998, les creuseurs exploitaient de l'or dans les installations de la Gécamines à Kolwezi. L'opération consistait à tamiser du sable ramassé dans toutes les canalisations des eaux des usines de la Gécamines et du sable ramassé dans les différents remblais se trouvant dans les installations de la Gécamines. Plusieurs creuseurs s'étaient lancés dans cette opération. Les uns furent de Kolwezi, et les autres provinrent des différents districts du Katanga. Les sites réputés en or furent : le remblai du sable de la cité Gécamines Mutoshi, les installations de la Gécamines KTC (Kamoto Concentrateur), le remblai de la terre de la cité Gécamines UZK (usine de zinc de Kolwezi), le sable de la petite rivière artificielle (communément appelée Katapula) qui draine toutes les eaux des différentes installations de la Gécamines Kolwezi. Les adultes tout comme les enfants tous âges confondus, exploitaient de l'or qui presque se ramassait. Exception faite aux femmes et filles. A cette époque, nous avons également exploité le « ndandashe » et l'or à Kolwezi. Après cette période, vient maintenait, l'actuelle période d'exploitation de l'hétérogénite.

E. La période de l'hétérogénite

Ladite période commence à partir de l'année 1998 jusqu'à ce jour. Après l'épuisement de l'or, les creuseurs exploitaient l'hétérogénite dans les concessions minières de la Gécamines. Comme le témoigne Ngoie (2009, 142) que (...) les populations katangaises autour de trois principales villes (Lubumbashi, Likasi et Kolwezi) se lancent dans l'exploitation minière artisanale du cuivre et du cobalt, sous forme d'hétérogénite ; mais le marché de ces produits est limité à la Gécamines ou à une compagnie minière de Chambeshi, en Zambie. Cette activité démarre donc avant la libéralisation du secteur minier en RDC mais elle prend une ampleur considérable après la promulgation du Code minier de

55

2002. Autrement dit, l'afflux des investisseurs étrangers, venus après cette libéralisation, intéresse également les populations autochtones. Une frange de la population katangaise constituée majoritairement des chômeurs s'adonnait déjà, depuis 1998, à l'artisanat minier. Pour elle, la loi de 2002 est venue légaliser les pratiques en cours. Mais après cette loi, ce secteur a intéressé de nombreuses autres couches sociales, notamment les travailleurs du secteur public.

Après que le législateur congolais ait mis sur pied la loi n°007/2002 du 11 juillet 2002 portant code minier qui autorise l'exploitation minière artisanale, le ministère national des mines avait par le décret n°47-C/2003 du 28 mars 2003, crée un service public dénommé Service d'Assistance et d'Encadrement du Small Scale Mining ou production à petite échelle, en sigle SESSCAM. Ce service a pour rôle d'encadrer et d'apporter une assistance technique aux creuseurs. Les activités minières artisanales constituent l'unique débouché pour les nombreux jeunes sans emploi (Jan et Kawele: 2010, 1). De ce fait, des zones d'exploitation minière artisanale ont été créées par le Ministère national des mines. A Kolwezi, sur arrêté ministériel n° 0639/CAB.MIN/MINES/01/2009 du 22 septembre 2009, six zones d'exploitation minière artisanale ont été créées et une zone a été affectée à l'artisanat par simple lettre n°CAB.MIN/MINES/01/0090/2010 du 26 janvier 2010, du Ministre des mines Martin Kabwelulu à l'Administrateur-Directeur Général de la Gécamines. Il s'agit de zones d'exploitation minière artisanales ci-après :

· ZEA 076, S11/25, 13 carrés miniers, dans le territoire de Lubudi ;

· ZEA 077, S11/25, 20 carrés miniers, dans le territoire de Mutshatsha ;

· ZEA 078, S11/25, 170 carrés miniers, dans le territoire de Mutshatsha ;

· ZEA 079, S11/25, 59 carrés miniers, dans le territoire de Mutshatsha ;

· ZEA 080, S11/25, 6 carrés miniers, dans le territoire de Mutshatsha ;

· ZEA 081, S11/25, 18 carrés miniers, dans le territoire de Lubudi ;

· ZEA de Kawama sur la route Kolwezi-Lubumbashi après la rivière Lualaba dans le territoire de Lubudi.

Pour mieux organiser l'exploitation minière artisanale, le décret n° 038/2003, du 26 mars 2003 portant règlement minier oblige les creuseurs à se regrouper dans des coopératives minières. L'article 234 du règlement minier déclare : Les groupements d'exploitants artisanaux qui désirent procéder à la recherche de substances minérales classées en mines à

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l'intérieur de la zone d'exploitation artisanale à l'aide de procédés industriels ou semi-industriels sont tenus de se constituer en coopérative et solliciter auprès du Ministre ayant les mines dans ses attributions l'agrément au titre de coopérative minière. Pour être agréée, la coopérative doit être composée de personnes détentrices de cartes d'exploitant artisanal valables pour la zone d'exploitation artisanale à l'intérieur de laquelle se trouve le périmètre sur lequel la coopérative souhaite obtenir un permis de recherches.

Plusieurs coopératives minières ont été créées sur toute l'étendue de la République Démocratique du Congo. Ainsi au Katanga, 25 coopératives minières ont été agréées par le Ministre national des mine, d'après l'annexe de l'arrêté ministériel n°0641/CAB,MIN/MINES/01/2009 du 22 septembre 2009 portant institution d'une zone d'exploitation artisanale dans la province du Katanga. La liste détaillée de toutes les coopératives minières agréées au Katanga est présentée dans le tableau ci-dessous:

Tableau n°6 : Liste des coopératives

 

Dénomination de la coopérative

Sigle

N° Arrêté d'agrément

01

Coopérative Minière Maadiniu Kwa Kilimo

CMKK

0726 du 14/10/2010

02

03

04

05

06

07

08

09

10

11

12

13

Coopérative Minière Kisamamaba

CMK

0664 du 07/10/2009

Coopérative Minière Miambo

CMM

0727 du 14/10/2010

Coopérative Minière du Katanga

COMIKA

0037 du 01/03/2011

Coopératives des Exploitants Miniers du Congo

CEMICO

0721 du 13/10/2010

Coopérative Minière de Développent Dikuluwe

CMDD

0431 du 21/06/2010

Coopérative Minière et Artisanale du Katanga

COMAKAT

0355 du 05/06/2009

Coopérative Minière du Lualaba

COMIL

0127 du 06/04/2011

Coopérative Minière pour le Développement
Communautaire

CMDC

0714 du 04/10/2010

Coopérative des Artisanaux Miniers du Congo

CDMC

0717 du 09/10/2010

Denis Coopérative Mining

DCM

0728 du 14/10/2010

Coopérative Minière d'Encadrement des Démobilisés des Ex-combattants maï-maï

COMEDECOM

0336 du 10/07/2008

Exploitants Miniers du Katanga en Coopérative

EMAK-C

0725 du 14/10/2010

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14

Coopérative Minière Nguvu

CMN

0085 du 25/03/2010

15

Coopérative d'Exploitation Minière Artisanale

COKEMA

0672 du 14/10/2009

16

Coopérative Minière Mima

MIMA

0663 du 07/10/2009

17

Coopérative Minière la joie de vivre

JOIE DE
VIVRE

0627 du 16/06/2009

18

Coopérative Minière Mukuba

CMM

0071 du 20/03/2010

19

Coopérative Minière du Peuple en action pour le Développement

COMIPAD

0671 du 07/10/2009

20

Coopérative Minière Bana Kolwezi

Bana Kolwezi

0665 du 07/10/2009

21

Fondation Monseigneur Kapya

FOMKA

0428 du 14/10/2010

22

Mining Development System

MDS

0002 du 09/01/2009

23

Coopérative Minière Bahati

COOMIBA

0072 du 20/03/2010

24

Coopérative Minière et de Développement du

Katanga

COMIDEK

0723 du 14/10/2010

25

Coopérative Minière pour le Développement du

Congo

CMDCO

0141 du 05/05/2011

Le constat fait sur terrain, montre que l'exploitation minière artisanale ne se pratique pas uniquement dans des zones créées officiellement par l'Etat (ZEA). Elle se pratique aussi sur les sites miniers (concessions minières) appartenant à des entreprises publiques et privées. Ces dernières se plaignent souvent de l'envahissement de leurs concessions par les artisanaux. Cela est le cas de tous les quatre sites où nos investigations se sont menées. Tous sont des concessions privées appartenant à la Gécamines. L'exploitation minière artisanale s'accompagne parfois avec certains phénomènes, tels que la présence des femmes et des enfants dans des sites artisanaux. Etant intéressé par la présence des enfants dans des sites miniers artisanaux, le point qui suit traite du mécanisme de protection de l'enfant.

2.2. Les mécanismes de protection de l'enfant

Cette section est constituée de deux parties. La première partie étale les mécanismes internationaux de protection de l'enfant. Enfin, la deuxième partie présente les mécanismes mis en place par l'Etat congolais pour protéger l'enfant.

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2.2.1. La législation pour enfant d'après la communauté internationale

La communauté internationale fut consciente de l'importance accrue de l'image, du respect et de la considération qu'il faut accorder à l'enfant. Le 24 septembre 1924, la Société des Nations (SDN) avait adopté la Déclaration des droits de l'enfant, dite déclaration de Genève. Le préambule de cette déclaration indiquait : « par la présente Déclaration des droits de l'enfant, dite déclaration de Genève, les hommes et les femmes de toutes les nations reconnaissent que l'humanité doit donner à l'enfant ce qu'elle a de meilleur, affirmant leurs devoirs, en dehors de toute considération de race, de nationalité, de croyance ».

Malemba (2003, 58) confirme que la communauté internationale reconnaît que l'enfant est un être pourvu de peu ou pas de discernement, sa personnalité est encore en train de se former et son état tant physique que mental est en pleine croissance.

Pour lui assurer une bonne protection et respecter sa dignité pour son bon épanouissement, l'article 1 de la déclaration de Genève énonce ce qui suit : L'enfant doit être mis en mesure de se développer d'une façon normale, matériellement et spirituellement.

L'article 2 déclare que l'enfant qui a faim doit être nourri ; l'enfant malade doit être soigné ; l'enfant arriéré doit être encouragé ; l'enfant dévoyé doit être ramené ; l'enfant orphelin et l'abandonné doivent être recueillis et secourus. L'article 3 poursuit que l'enfant doit être le premier à recevoir des secours en cas de détresse. L'article 4 renchérit que l'enfant doit être mis en mesure de gagner sa vie et doit être protégé contre toute exploitation. Enfin, l'article 5 conclut que l'enfant doit être élevé dans le sentiment que ses meilleures qualités devront être mises au service de ses frères.

Ces articles montrent comment est-ce que dès les années 1924, la Société des Nations avait accordé une attention particulière à l'endroit de l'enfant pour son plein épanouissement et amorcer la lutte pour l'avancée de l'affirmation de la personnalité de l'enfant. Ce même souci anima les Nations-Unies (ONU), qui succédèrent à la SDN, à prévoir les droits de l'enfant dans la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme du 10 décembre 1948. L'article 1 stipule que tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits.

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Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité.

Les Etats Africains ne sont pas restés muets par rapport à la question de la protection de l'enfant. En juillet 1990 à Addis-Abeba (Ethiopie), les Etats Africains membres de l'Organisation de l'Unité Africaine à l'époque, actuellement Union Africaine, avaient voté la charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant. Le 2eme article de cette charte donne la définition du mot « enfant » en ce terme : « Aux termes de la présente Charte, on entend par "Enfant" tout être humain âgé de moins de 18 ans ».

L'article 3 énonce la non-discrimination de l'enfant sous toutes ses formes : Tout enfant a droit de jouir de tous les droits et libertés reconnus et garantis par la présente Charte, sans distinction de race, de groupe ethnique, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'appartenance politique ou autre opinion, d'origine nationale et sociale, de fortune, de naissance ou autre statut, et sans distinction du même ordre pour ses parents ou son tuteur légal. »

L'article 4, alinéa 1 consacre même un intérêt supérieur de l'enfant comme suit : dans toute action concernant un enfant entrepris par une quelconque personne ou autorité, l'intérêt de supérieur de l'enfant sera la considération primordiale.

Par ailleurs, l'Assemblée générale des Nations Unies a adopté le 25 mai 2000, le Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant. Le contenu de cette Convention tourne autour de quatre grands thèmes tels relevés par Malemba (2003, 59) à savoir :

- Les droits à la survie qui concernent la vie de l'enfant, son nom, sa nationalité, son identité, sa sécurité sociale, son logement, sa nourriture et les soins pour sa santé. Bref, ces droits visent la satisfaction des besoins vitaux essentiels de l'enfant.

- Les droits au développement qui recouvrent la guidance, l'éducation, le jeu, le repos, les activités culturelles, la liberté de pensée, de conscience, de religion, le droit à l'information, à la réadaptation et à la réintégration.

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- Les droits à la protection qui portent sur la vie privée, sur l'enfant handicapé et le réfugié et contre les mauvais traitements, la drogue, la vente, l'exploitation sexuelle et économique dont l'enfant doit être épargné.

- Les droits à la participation qui visent les droits d'être consulté et de donner son opinion, de la liberté d'expression, de pensée, d'association, d'organiser, des réunions, pacifiques et le droit de réunir les moyens pour mettre en oeuvre la Convention relative aux droits de l'enfant et d'en assurer le respect de ses droits. Il s'agit ici de préparer l'enfant de jouer un rôle actif dans son groupe social.

La République Démocratique du Congo n'est pas restée insensible à cette préoccupation internationale. Ainsi, elle a ratifié plusieurs Conventions relatives aux droits de l'enfant. Il s'agit :

1. La Convention relative aux droits de l'enfant, ratifiée par l'Ordonnance-loi n° 90-048 du 21 août 1990 portant autorisation de la ratification de la convention relative aux droits de l'enfant.

2. Protocole facultatif à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, entré en vigueur le 18 janvier 2002, ratifié par la République Démocratique du Congo par décret-loi n° 003/01 du 28 mars 2001.

3. Protocole facultatif se rapportant à la Convention relative aux droits de l'enfant, concernant l'implication d'enfants dans les conflits armés, entré en vigueur le 12 février 2002, ratifié par la République Démocratique du Congo par décret-loi n° 002/01 du 28 mars 2001.

4. Convention concernant le travail forcé ou obligatoire (Convention 9 : Genève, 1930) entrée en vigueur le 01 mai 1932, ratifiée par la République Démocratique du Congo le 20 septembre 1960.

3. Le décret du 30 janvier 1940 portant code pénal congolais tel que modifié et complété à ce jour. L'article 155 stipule que seront punies d'une servitude pénale d'un à cinq

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5. Convention concernant l'âge minimum d'admission à l'emploi (Convention C138 : Genève, 1973), entrée en vigueur le 19 juin 1976. La République Démocratique du Congo y a adhéré par décret-loi n° 013/01 du 28 mars 2001.

6. Convention sur les pires formes du travail des enfants du 17 juin 1999, ratifiée par la République Démocratique du Congo par décret-loi n°015/01 du 28 mars 2001.

7. Charte africaine des droits et du bien-être de l'enfant, ratifiée par la République Démocratique du Congo par décret-loi n°007/01 du 28 mars 2001.

Hormis les Conventions internationales, la République Démocratique du Congo a mis sur pied ses propres mécanismes de protéger de l'enfant.

2.2.2. La législation congolaise relative aux droits de l'enfant

La République Démocratique du Congo n'est pas restée muette par rapport à cette préoccupation internationale qui concerne la protection de l'enfant. Ainsi, plusieurs instruments légaux ont été mis sur pieds afin de protéger l'enfant sous toutes les formes. Parmi ces instruments nous citons :

1. Le décret du 30 juillet 1888 modifié et complété par le décret du 10 septembre 1916, décret du 16 juin 1947, le décret du 26 août 1959, le décret du 23 juin 1960 et la loi n° 73-21 du 20 juillet 1973 portant régime général des biens. L'article 260 explique qu'on est responsable non seulement du dommage que l'on cause par son propre fait, mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre, ou des choses que l'on a sous sa garde. Le père, et la mère après le décès du mari, sont responsables du dommage causé par les enfants, habitant avec eux.

2. l'ordonnance-loi n° 42 du 7 avril 1937 relative à la circulation nocturne des mineurs.

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ans, les personnes qui se rendront coupables de supposition d'enfant. La même peine sera appliquée à ceux qui auront donné la mission de commettre l'infraction, si cette mission a reçu son exécution. Cela constitue l'infraction contre l'ordre des familles.

4. Le décret du 6 décembre 1950 sur l'enfance délinquante tel que modifié par l'ordonnance loi n°78/016 du 04 juillet 1978, définit le mineur en termes de « (...) l'enfant âgé de moins de 16 ans accomplis (...).

5. Le décret du 4 décembre 1952 modifiant le décret du 6 décembre 1950 prévoyant des mesures spéciales à l'égard des mineurs (enfants orphelins ou abandonnés).

6. L'ordonnance-loi n°13/398 du 3 août 1959 sur l'enfance délinquante.

7. Le décret du 6 août 1959 portant Code de procédure pénale.

8. Le décret du 7 mars 1960 portant Code de procédure civile, l'article 56 énonce que le juge peut ordonner la comparution personnelle des incapables (les enfants), de ceux qui les assistent ou de leurs représentants légaux.

9. La constitution du 24 juin 1967. Les articles 12 et 13 obligent les parents à protéger leurs enfants et à leur garantir l'éducation.

10. L'ordonnance-loi n°78-016 du 4 juillet 1978 portant sur l'enfance délinquante.

11. La loi n° 87-010 du 01 août 1987 portant Code de la famille. L'article 5 définit le « mineur » : comme étant l'individu n'ayant pas encore atteint l'âge de la majorité civile tel que fixé par la loi.

12. L'acte Constitutionnel de la transition du 9 avril 1994 disposant sur la santé et l'éducation.

13. Le décret Constitutionnel n°003 du 27 mai 1997, contenant des dispositions sur les droits de l'enfant.

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14. Le décret n°006/2000 du 9 juin 2000 portant démobilisation des groupes armés vulnérables au sein des forces armées y compris les enfants soldats.

15. La loi n° 015/2002 du 16 octobre 2002 portant Code du travail. L'article 3 aboli toutes les pires formes de travail des enfants en ces termes : l'expression « les pires formes de travail des enfants » comprend notamment : a) toutes les formes d'esclavage ou pratiques analogues, telles que la vente et la traite des enfants, la servitude pour dettes et le servage ainsi que le travail forcé ou obligatoire, y compris le recrutement forcé ou obligatoire des enfants en vue de leur utilisation dans des conflits armés ; b) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant à des fins de prostitution, de production de matériel pornographique de spectacles pornographiques ou des danses obscènes ; c) l'utilisation, le recrutement ou l'offre d'un enfant aux fins d'activités illicites, notamment pour la production et le trafic de stupéfiants ; d) les travaux qui, par leur nature ou les conditions dans lesquelles ils s'exercent, sont susceptibles de nuire à la santé, à la sécurité, à la dignité ou à la moralité de l'enfant.

16. La constitution de transition du 4 avril 2003 dans ses articles 43 et 44 parle des soins, de l'éducation, de l'identité, de la protection et de la participation de l'enfant.

17. La loi n° 04/024 du 12 novembre 2004 relative à la nationalité congolaise. L'article 5 énonce qu'au sens de la présente loi, on entend par « mineur » l'individu n'ayant pas encore atteint l'âge de la majorité civile tel que fixé par la loi.

18. La constitution du 18 février 2006 stipule en son article 40 que tout individu a le droit de se marier avec la personne de son choix, de sexe opposé, et de fonder une famille. La famille, cellule de base de la communauté humaine, est organisée de manière à assurer son unité, sa stabilité et sa protection. Elle est placée sous la protection des pouvoirs publics. Les soins et l'éducation à donner aux enfants constituent, pour les parents, un droit naturel et un devoir qu'ils exercent sous la surveillance et avec l'aide des pouvoirs publics. Les enfants ont le devoir d'assister leurs parents. La loi fixe les règles sur le mariage et l'organisation de la famille. L'article 41 poursuit que l'enfant mineur est toute personne, sans distinction de sexe, qui n'a pas encore atteint 18 ans révolus.

L'article 13 poursuit que tout enfant a droit à la vie. Le père et la mère ou l'un d'eux ou la personne exerçant l'autorité parentale, ainsi que l'Etat, ont l'obligation d'assurer sa

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19. La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant en République Démocratique du Congo. C'est la première loi mise sur pied par la RDC, qui protège l'enfant. Elle est également la première loi qui définit le mot « enfant ». Les textes juridiques précédents ne donner que la définition du mot « mineur ». L'article 2 de cette loi définit l'enfant comme étant toute personne âgée de moins de dix-huit ans. Ce même article donne une série de catégories d'enfant à protéger :

- Enfant en situation difficile : l'enfant qui ne jouit pas de ses droits fondamentaux et qui n'a pas accès aux services sociaux de base tels que la santé, le logement, l'alimentation et l'éducation ;

- Enfant déplacé : l'enfant non accompagné de ses parents ou tuteur qui a été contraint de quitter son milieu de vie par suite de la guerre, de catastrophes naturelles ou d'autres événements graves et s'est installé dans un autre endroit à l'intérieur du pays où il réside ;

- Enfant refugié : l'enfant qui a été contraint de fuir son pays en franchissant une frontière internationale et qui demande le statut de réfugié ou toute autre forme de protection internationale ;

- Enfant en situation exceptionnelle : l'enfant en situation de conflits armés, de tensions ou de troubles civils, de catastrophes naturelles ou de dégradation sensible et prolongée des conditions socioéconomiques ;

- Enfant avec handicap physique ou mentale : l'enfant se trouvant dans une situation qui peut constituer un obstacle ou une difficulté à l'expression normale de toutes ses facultés physiques ou mentales, notamment les fonctions intellectuelles et cognitives, le langage, la motricité et les performances sociales ;

- Enfant séparé : l'enfant séparé de ses père et mère ou de la personne qui exerçait sur lui l'autorité parentale.

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survie, son éducation, sa protection et son épanouissement. Le père et la mère ou l'un d'eux ainsi que celui qui exerce l'autorité parentale ont le devoir d'élever leur enfant.

L'article 24 déclare que tout enfant a droit à l'éducation à la vie dans le respect de l'ordre public et de bonnes moeurs. Enfin, l'article 50 poursuit que l'enfant ne peut être employé avant l'âge de seize ans révolus. L'enfant âgé de quinze ans ne peut être engagé ou maintenu en service, même comme apprenti, que moyennant dérogation expresse du juge pour enfants, après avis psycho-médical d'un expert et de l'inspecteur du travail.

En bref, la loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant, est l'instrument juridique de base pour la protection de l'enfant en République Démocratique du Congo. A travers elle, des tribunaux pour enfant ont été créées dans quelques grandes villes du pays, en raison d'un tribunal par ville. Ces juridictions sont animées par les juges pour enfant, ce qui est une innovation qui n'a jamais existé auparavant en République Démocratique du Congo. Les articles 87 à 112 expliquent le fonctionnement du tribunal pour enfants en ces termes : « Le Tribunal pour enfants est composé de la chambre de première instance et de la chambre d'appel. Les deux chambres sont indépendantes l'une de l'autre quant à leur fonctionnement. La chambre de première instance siège à juge unique. La chambre d'appel siège à trois juges. Le tribunal pour enfants est doté d'au moins un assistant social affecté par les services provinciaux ayant les affaires sociales dans leurs attributions. Le tribunal pour enfants siège avec le concours du ministère public du ressort et l'assistance d'un greffier. Le tribunal pour enfants n'est compétent qu'à l'égard des personnes âgées de moins de 18 ans. Le tribunal pour enfants est seul compétent pour connaître des matières dans lesquelles se trouve impliquer l'enfant en conflit avec la loi. Lorsque le fait commis par l'enfant est connexe à celui qui peut donner lieu à une poursuite contre un adulte, les poursuites sont disjointes et l'enfant est poursuivi devant le juge pour enfants. Il connaît également des matières se rapportant à l'identité, la capacité, la filiation, l'adoption et la parenté telles que prévues par la loi ». Dans le but de consolider la législation sur la protection de l'enfant et a rendre applicable, deux arrêtés du maire de la ville de Kolwezi ont été signés en 2006 et 2007.

La partie qui suit établit des typologies des tous les enfants se trouvant dans les sites miniers artisanaux.

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2.3. Les catégories des enfants se trouvant dans les sites miniers artisanaux

Les observations faites lors de la récolte des données empiriques, font état de la présence de plusieurs catégories d'enfants dans les sites miniers artisanaux. Les uns y exercent différentes activités et les autres non. Pour ce faire, nous les regroupons en trois groupes que nous présentons de la manière suivante : Le premier est constitué des enfants qui exercent des métiers rémunérateurs. Cette catégorie d'enfants, nous l'identifions par les concepts « enfants en activités rémunératrices ». Le deuxième groupe est constitué des enfants qui n'exercent pas des métiers rémunérateurs. Cette catégorie d'enfants, nous l'identifions par les concepts « enfants en activités non rémunératrices ». Enfin le troisième groupe, qui est le dernier, est composé des enfants que nous désignons par les concepts « les sans voix ». Il est composé des bébés et autres petits enfants. Signalons que ces trois groupes d'enfants ont été établis sur base des mobiles qui justifient leur présence sur les sites miniers artisanaux. Chaque groupe est constitué des plusieurs catégories. Ainsi, les trois groupes se présentent de la manière suivante :

2.3.1. Les enfants en activités rémunératrices

Cette catégorie est constituée des enfants qui exercent différentes activités rémunératrices dans des sites miniers artisanaux. Les uns le font pour gagner de l'argent eux-mêmes et les autres aident leurs parents en exécutant quelques métiers rémunérateurs. Les uns exploitent les minerais en équipe composée uniquement d'enfants et les autres sont accompagnés de leurs parents ou encore de membres de familles. Tous sont des enfants dits « Enfants travailleurs ». La présence de ces enfants dans des sites dépend d'un site à un autre. Ils sont plus nombreux dans les anciennes carrières abandonnées de la Gécamines et dans les sites de lavage des minerais. Le rapport de Groupe One (2007, 9) explique que certains enfants travaillent avec leur famille avec laquelle ils constituent une unité de production. Cela a été le cas du groupe de Gaël avec son jeune frère Patient. Ils travaillent accompagnés de leur mère qui les aide à remonter les minerais et à les laver. D'autres sont employés par une équipe de creuseurs ou par des négociants et sont payés chaque jour en fonction du travail effectué. Cette typologie est constituée de plusieurs catégories d'enfants suivantes :

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2.3.1.1. Les enfants dits « creuseurs »

Ces deniers exploitent artisanalement le cuivre soit le cobalt comme le font les adultes à l'aide des outils tels que bêches, pioches, houes, barres de mine ainsi que les sacs où l'on met les minerais. Ils forent des puits, soit ils grattent dans les anciens remblais à la recherche des minerais. A la différence avec des adultes, les puits forés par les enfants ne sont pas si profonds. L'alinéa 21 de l'article1ère du code minier de 2002, délimite la profondeur des puits jusqu'à trente mètres au maximum. Les enfants ne peuvent pas atteindre cette profondeur. L'exploitation des minerais par les enfants diffèrent d'un site à un autre. A « Mutoshi », dans les périmètres de « Ruwe Mess, Dima et Kandimba » les enfants grattent dans les anciens remblais de la Gécamines pour ramasser les petits minerais de cuivre soit cobalt. Dans la carrière « 5 ans » tout comme « GH », les enfants forent des puits de plus ou moins un mètre dans les anciens remblais de la Gécamines. A la laverie des minerais des carrières « Kamilombe I, II et III », les enfants forent des petits puits de quelques centimètres de profondeur dans les sables qui se trouvent juste à côté de la laverie. Les enfants creuseurs travaillent toujours en équipe dont le nombre de membre par équipe varie entre deux personnes et plus. La composition du nombre d'enfants par équipe dépend des relations entre eux mais aussi des intérêts en place. Ils commencent le boulot le matin, pour terminer l'après-midi voire le soir. Cela dépend de leur volonté.

Pendant la période de forage du puits, une équipe peut faire trois jours soit plus pour arriver à la couche minéralogique. Seuls les garçons dont l'âge minimum varie ente 12 ans et plus s'adonnent à ce type d'exploitation. Les tout petits garçons dont l'âge varie entre 7 ans à plus ou moins 11 ans, ainsi que les filles grattent dans les remblais abandonnés de la Gécamines soit creusent dans les sables au bord des laveries à la recherche des minerais. Les autres creusent dans l'eau où l'on lave les minerais à la recherche des débris de minerais tombés lors des opérations de lavage.

2.3.1.2. Les enfants dénommés « Bakapandisha » ou les Remonteurs

Après la catégorie d'enfants « creuseurs », vient celle d'enfants « remonteurs ».

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En swahili, le mot « kupandisha » veut dire « remonter ». Alors, « Bakapandisha », signifie « les remonteurs ». Cette catégorie est constituée des enfants dont l'âge varie entre 12 et 17 ans. Ces derniers remontent les minerais mis dans des sacs qui pèsent plus ou moins 10 à 25 Kg, du puits à la surface, moyennant un paiement. Ils sont journaliers, utilisés par les creuseurs adultes. Ils ne font pas partie de l'équipe régulière de creuseurs adultes. Mais, Ils sont recrutés par les adultes selon que le besoin se manifeste pour les aider à effectuer une tâche qui nécessite une main d'oeuvre nombreuse. Comme l'explique Ilunga (2008, 53-56) que les enfants interviennent en cas de besoin. Ils sont parfois appelés « saliseurs ». Ce sont les jeunes qui aident les creuseurs dans l'exploitation de l'hétérogénite. On les observe dans les carrières « Kamilombe » et « terre jaune » qui se trouvent à quelques kilomètres du camp Gécamines Kapata et aussi dans la carrière « Bob » tout près de la cité « Kanina » à Kolwezi.

Seuls les garçons s'adonnent à ce type d'activité. Les filles y sont exclues parce que d'après la tradition locale, les filles et les femmes n'accèdent pas dans les puits. Le choix des enfants par les creuseurs s'explique également par le fait de l'étroitesse des galléries dans des puits, où seuls les enfants peuvent y accéder facilement afin de remonter les minerais à la surface. Après les remonteurs viennent les enfants dit « Bakapapa » soit les chargeurs.

2.3.1.3. Les enfants dénommés « Bakapapa » ou les chargeurs

Le mot swahili « kupapa » veut dire « mettre quelques chose au dos » soit, transporter quelque chose par le dos. Dans le langage des creuseurs « Bakapapa » veut dire les chargeurs. Contrairement à la catégorie précédente qui remonte les minerais du puits vers la surface, cette catégorie d'enfants charge les minerais exposés sur la surface dans des camions, sur les motos et sur les vélos pour aller les laver. Le prix à gagner dépend du nombre de camions à charger. Si pour la précédente catégorie ce sont les creuseurs adultes qui recourent aux enfants pour les aider à évacuer les minerais du puits vers la surface, pour cette catégorie d'enfants dits « Bakapata », ce sont les négociants qui font appel aux enfants pour charger rapidement les minerais dans les camions. Après le chargement, les minerais sont amenés aux différents sites pour les laver. Les enfants sont nombreux dans les sites en train d'attendre les camions à charger. Soit encorne, ils transportent les minerais sur le dos soit encore sur la tête et ce, de la carrière jusqu'au lieu de lavage. Le rapport de groupe One (2007, 14) confirme que le transport des minerais est plus réservé aux enfants qui ont plus ou moins 16 ans. La

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partie qui suit parle d'une autre catégorie d'enfants qui sont dans des sites d'exploitation minière artisanale. Il s'agit des enfants dits « Bakalokota » soit les ramasseurs.

2.3.1.4. Les enfants dénommés « Bakalokota » ou les ramasseurs

Le mot « Kulokota » signifie « ramasser ». Alors, « bakalokota » signifie « les ramasseurs ». Il s'agit de tout petits enfants dont l'âge varie entre 5 et 11 ans. Ces derniers ramassent les minerais soit dans les sites où l'on extrait les minerais, soit dans les sites où l'on lave les minerais. Tous sont munis des sacs dans lesquels ils mettent des minerais ramassés. Ces enfants se déplacent toujours en équipe de deux voire plus. Durant la journée, on les voit sillonner autour des puits, de lieux de lavage des minerais, des lieux de triage des minerais soit encore dans l'eau où l'on lave les minerais, afin de ramasser quelques minerais tombés. Pour accomplir une quantité nécessaire pour la vente, il leur faut plusieurs jours. A défaut, ils sont obligés de mettre ensemble tous leurs minerais, les garder jusqu'à ce qu'ils réalisent une quantité considérable pour la vente. Le récit du groupe de Mbuyi édifie :

« Nous ramassons de petits minerais tombés par terre soit dans la carrière, soit aux lieux de lavage des minerais. Par jour, nous ramassons 5 à 7 Kg des minerais ».

Les enfants qui ramassent des minerais sont parfois identifiés au nom de « salakateur». Ilunga (2008, 53-56) explique que les « salakateur » sont des enfants qui ne font que ramasser dans les carrières les produits miniers qui sont tombés soit lors de la mise en sacs ou soit lors du chargement dans des camions. Ils les ramassent et les vendent là où ils peuvent (...). Ce sont plus les garçons qui s'adonnent à cette activité sur les sites artisanaux. Les filles le font mais uniquement sur les lieux où l'on lave les minerais. Elles n'arrivent pas dans les carrières d'exploitation. Olivier Kahola (2008, 92) écrit que les garçons sont plus habiles à sillonner d'un puits d'extraction à un autre pour fouiller sur les épandages ou pour se rabattre sur les déchets des minerais abandonnés par les creuseurs. Ces phrases montrent comment les enfants se déplacent d'un site à un autre à la recherche des minerais à ramasser. Les photos des enfants qui ramassent les minerais sont à la page 120, annexe n°4 et à la page 121, annexe n°5.

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Une autre catégorie d'enfants présente sur les sites, ce sont les enfants dits « Bakasampisha », c'est-à-dire les laveurs.

2.3.1.5. Les enfants dénommés « Bakasampisha ou Bakutata » c'est-à-dire les

laveuses ou laveurs

Le mot « kusampisha » signifie « laver ». Alors, « Bakasampisha » signifie les laveurs. Il s'agit de la catégorie d'enfants qui lavent les minerais dans des rivières ou dans des eaux stagnantes des anciennes carrières de la Gécamines. A l'aide des tamis et des sacs vides, ils lavent les minerais pour enlever les gangues et de la terre afin que les minerais soient propres pour le triage. En géologie, les gangues sont des substances qui enveloppent des minerais ou une pierre précieuse (Dictionnaire Encarta, 2009). Ce sont les femmes et les filles qui s'adonnent plus à cette activité. Mais, on observe parfois quelques petits garçons en train de laver aussi des minerais.

Le paiement se fait à la fin du lavage. Le lavage des minerais pour un sac de 100 Kg coûte 2500Fc. Pour effectuer ce boulot rapidement, les laveurs se mettent en équipe de deux à quatre personnes. Cette façon de faire, leur permet de laver plus ou moins 5 à 8 sacs des minerais par jour. A la fin de la journée, ils se partagent le butin. Il y a certains jours où les laveuses gagnent moins d'argent. Cela s'observe le jour où il y a carence des minerais à laver dans les sites. La somme reçue par personne varie entre 2500 à 5000 franc. Cela dépend des journées.

Notons qu'il y a plusieurs enfants (filles) et femmes qui sont chaque jour dans des sites de lavage des minerais en train d'attendre le boulot. Une fois qu'un négociant arrive, il choisit de sa volonté selon ses connaissances celles qui vont laver ses minerais. Après cette typologie, nous abordons la catégorie des enfants dits « Bakatshakula » ou les trieurs.

2.3.1.6. Les enfants dits « Bakatshakula » c'est-à-dire les trieurs

Le mot « kutshakula » veut dire « trier ». Bakatshakula dans le langage des creuseurs veut dire « les trieurs ». On trouve cette catégorie d'enfants dans les sites de lavage des minerais car, le tri se fait après lavage. Plusieurs enfants s'adonnent à cette activité. On les voit assis autour des minerais versés par terre ou sur un sac, en train de trier du vrai minerai et jeter les pierres qui accompagnent les minerais. Cet exercice nécessite de l'expérience pour

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savoir du vrai à récupérer et du faux à jeter. Souvent, lors de cet exercice, le négociant ou propriétaire du minerai est sur place pour se rendre compte de la qualité du travail effectué. Sinon, on risque de le tromper. Lors de la vente des minerais au comptoir, la teneur dépend premièrement de la manière dont on a lavé les minerais et deuxièmement de la manière dont on les a triés. Les minerais bien lavés et bien triés valent plus lors de la vente.

Durant toute la journée, les enfants trieurs sont assis sous le soleil sans aucune protection contre le vent ni la chaleur du soleil. Et le soir, une rémunération qui varie entre 1500 à 3500 Franc leur est donnée par le négociant sur base de la quantité des minerais triés. Un négociant trouvé dans la carrière « Kamilombe », nous a déclaré : je préfère faire trier mes minerais par les enfants plutôt que par les grandes personnes, parce que d'après mon expérience, les enfants exécutent honnêtement les tâches qu'on leur confie, par rapport aux adultes qui veulent souvent tromper. Derrière une telle déclaration se cache la problématique du travail des enfants qui est une main d'oeuvre moins couteuse mais parfois aussi efficace. Cette notion nous la développons davantage dans le troisième chapitre. Le triage des minerais se fait par les garçons et par les filles à l'aide des mains. Certaines femmes s'adonnent également à cette pratique.

Le tri de 100 Kg de minerais coûte 2500Fc. Pour gagner le temps, les trieurs exercent cette activité en équipe de 2 à 4 personnes. Selon les propos des acteurs concernés trouvés sur terrain, par jour, ils trient au moins 3 à 5 sacs. Pour 00 Kg du minerai, les négociants dépensent 5000FC pour les opérations de lavage et triage. Les enfants trieurs se retrouvent uniquement sur les sites de lavage des minerais. Car, on ne trie pas les minerais dans les sites d'exploitation des minerais. Là les creuseurs ne font que les mises en sacs. Le triage se fait après lavage. Une autre catégorie qui suit après celle-ci, c'est celle des enfants dits « Bakanyungulula », ou les tamiseurs.

2.3.1.7. Les enfants dits « Bakanyungulula » c'est-à-dire les tamiseurs

En swahilu « kunyungulula » veut dire « tamiser ». Bakanyungulula signifie « les tamisseur » dans le langage des creuseurs. Cette catégorie d'enfants s'occupe à tamiser les minerais dans des sites miniers artisanaux. L'opération se fait avant de laver les minerais afin de réduire la quantité de la terre. Elle consiste à tamiser les minerais à l'aide d'un grand tamis fait pour cette cause. Le tamisage se fait toujours en équipe de deux personnes, l'un en face de

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l'autre en train de balancer le tamis pour faire tomber la terre. Par rapport à la forme, on distingue deux types de minerais. Il y a les minerais en forme des graviers et les minerais en forme des blocs. C'est uniquement les minerais en forme des graviers que l'on tamise, s'ils sont accompagnés de la terre.

Le prix de tamisage est de 1000Fc pour les minerais qui pèsent 100 Kg. Le tamisage précède le lavage des minerais. Certains négociants préfèrent faire tamiser les minerais dans les sites d'exploitation des minerais afin d'enlever la terre, avant de les transporter vers les lieux de lavage. Dans ce cas, seuls les garçons tamisent les minerais, parce que les filles n'accèdent pas dans les carrières. Mutombo (2011, 33) explique que cette situation tient aux croyances selon lesquelles la présence de la femme dans la carrière fait baisser le teneur des minerais exploités ou fait perdre le filon. Les autres négociants préfèrent faire tamiser les minerais sur les lieux de lavage. Pour ce cas la chance est accordée à tous, filles et garçons présents dans les sites de lavage. Signalons que même certains hommes et certaines femmes font également cette activité. Après les tamiseurs, viennent les enfants dits « bakavinya », soit les concasseurs.

2.3.1.8. Les enfants dénommés « Bakavinya » c'est-à-dire les concasseurs

En swahili « Kuvinya » veut dire « concasser ». Bakavinya signifie « les concasseurs ». Le concassage est appliqué sur les minerais formés en blocs. Les enfants dits « Bakavinya » écrasent les minerais en blocs à l'aide des marteaux et autres matériel en métal afin de réduire leurs volumes. Aussi, le concassage permet à récupérer les minerais et jeter les mauvaises pierres. Peu d'enfants pratiquent cette activité. Car, rares sont les négociants qui amènent les minerais en blocs qui nécessitent le concassage. Mais certains enfants, de par leur propre initiative ramassent les pierres dans les remblais abandonnés de la Gécamines et les concassent pour y retirer quelques petites particules des minerais en couleur verte. Les restes des blocs constitués des pierres sont jetés. Ce sont plus les garçons qui exercent cette activité que les filles. Après avoir réalisé une importante quantité des minerais, les enfants les vendent aux négociants qui circulent dans les sites. Si la quantité est trop petite, les enfants gardent leurs minerais jusque le jour où ils réaliseront la quantité voulue pour la vente.

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Après la catégorie des enfants dits « Bakavinya » ou les concasseurs, vient la catégorie des enfants dits « Bakauzisha », soit les vendeurs.

2.3.1.9. Les enfants dénommés « Bakauzisha » ou les vendeurs

En swahili « ku uzisha » signifie « vendre ». Bakauzisha veut dire « les vendeurs ». Il s'agit des enfants qui vendent plusieurs articles dans de sites miniers. Les uns vendent les denrées alimentaires telles que : des beignets, des gâteaux, d'arachides (cacahouètes), des biscuits, des bonbons, de l'eau potable, du jus, des morceaux de manioc grillés, de la boisson locale communément appelée « Munkoyo11 », des pains, des bananes, etc. Les autres vendent d'autres articles consommables et quelques produits manufacturiers tels que les unités ou recharge pour la téléphonie mobile, les cigarettes, les allumettes, les mouchoirs, les cartes mémoires pour les téléphones portables, etc. Cette catégorie est observable dans tous les sites miniers artisanaux investigués. Elle est composée de plusieurs enfants filles et garçons. Une fois qu'on est sur les sites miniers, c'est la catégorie qui saute directement aux yeux en première position.

Beaucoup arrivent sur les sites le matin et les autres au milieu de l'avant-midi. Certains exposent leurs marchandises dans des bols, surtout pour les denrées alimentaires, soit par terre sur des sacs. Les autres circulent dans différentes carrières en proposant aux creuseurs leurs marchandises. Ils restent dans des sites miniers toute la journée et rentrent à la maison le soir. A ce propos, Seydou Keita (2001, 18) montre que parmi les activités exercées par les enfants sur les sites miniers, on peut citer : la préparation et la vente de repas et de nourritures, la vente ambulante ou à poste fixe de boissons, de cigarettes, de beignets, (...). Tandis que Kahola (2008, 91) poursuit que les filles dans les carrières sont orientées vers les activités commerciales. Le plus souvent, elles sont sous la supervision d'un adulte. Les propos des filles trouvées sur les sites en train de vendre témoignent cela :

« Nous toutes telles que nous sommes ici, nous étudions. Raison pour laquelle nous ne vendons que pendant les vacances. Nous épargnons petit à petit ce que nous gagnons, jusqu'à ce que chacune réalise le montant voulu qui lui servira de se procurer ce dont elle a besoin.».

11 Munkoyo est une boisson locale fait sur base des racines d'une plante.

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Signalons que les enfants qui vendent dans des sites miniers, peuvent facilement basculer vers à d'autres activités telles que le lavage, le triage, le concassage, le ramassage des minerais, une fois que leurs marchandises se terminent. Dans les témoignages recueillis sur les sites, les filles avouent :

« Parfois, lorsque nos marchandises se terminent, nous lavons, tamisons soit trions les minerais moyennant un paiement qui varie selon le travail

effectué (...) ».

Une telle situation prouve les possibilités qu'ont les enfants de basculer d'une activité à une autre une fois dans les sites miniers artisanaux. Une photo des enfants qui vendent les denrées alimentaires sur le site est sur la page 122, annexe n° 6. Après la catégorie des enfants dits « vendeurs », vient la dernière catégorie des enfants en activités rémunératrices, qui est celle des enfants dits « Bakatsheza ma carte ».

2.3.1.10. Les enfants dits « Batsheza ma carte » ou les enfants qui jouent au jeu de

cartes

« Kutsheza » veut dire « jouer ». « Batsheza ma carte » veut dire « les joueurs aux cartes ». Cette catégorie est constituée uniquement des garçons. Les uns, après avoir gagné de l'argent en exerçant différentes activités sur les sites miniers artisanaux, s'adonnent aux jeux de hasard en jouant aux cartes soit entre les enfants, soit avec les adultes pour gagner de l'argent. Les autres proviennent de la cité où ils fuient le contrôle parental et vont dans les carrières pour jouer aux cartes avec les autres enfants. Dans l'entretien effectué avec le groupe de Kahenga, les enfants déclarent :

« Il y a les enfants qui creusent les minerais, certains lavent, d'autres

ramassent, d'autres encore chargent les minerais dans des camionnettes pour

aller les laver. Il y a aussi les enfants qui jouent aux cartes pour gagner de

l'argent. Malgré l'interdiction de ce jeu par les agents de l'ordre, il y a

toujours certains enfants et même certains adultes qui s'adonnent à ce jeu ».

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Cette situation fait que certains enfants soient accompagnés de leurs parents soit d'autres membres de familles pour les empêcher de dilapider l'argent obtenu. La maman de Gaël et d'Emmanuel trouvée dans la carrière 5 ans, a déclaré :

« Je travaille avec eux pour mieux les contrôler afin qu'ils ne gaspillent pas de l'argent. Comme je suis là, je récupère l'argent et je le garde dans la petite caisse à la maison ».

Les enfants en activités rémunératrices, sont en situation de risque de dilapidation de l'argent qu'ils obtiennent. Ils peuvent facilement être attirés par les jeux de hasard, et perdre ainsi tout leur argent. Pour certains enfants le fait d'exercer quelques travaux dans les sites miniers est un signe de bravoure. Cela se fait sentir dans les propos de Yanick présenté par Mutombo (2011, 83) en ces termes : Mina kuya kutafuta na miye yangu maïsha, mwanaume ni kudji tafutiya. Il explique que cette catégorie brave la peur et les interdictions. Elle veut que la société la considère par son travail. Ces enfants se disent capables de mieux faire. Ils reconnaissent que la société congolaise accorde plus de la considération aux personnes qui ont des moyens.

Après la partie consacrée aux enfants en activités rémunératrices, vient celle qui présente le groupe des enfants en activités non rémunératrices.

2.3.2. Les enfants en activités non rémunératrices

Cette catégorie d'enfants est constituée de ceux-là qui n'exercent aucune activité rémunératrice. Certains rendent des services à leurs mères, d'autres se livrent aux activités récréatives et d'autres encore observent les différentes activités telles qu'elles se déroulent dans des sites miniers, sans toutefois y participer. Toutes les catégories d'enfants faisant partie de ce groupe, nous les avons désignées par différentes appellations conformément aux activités auxquelles ils se livrent sur les sites. Ainsi, cinq catégories d'enfants ont été identifiées dans ce groupe. Il s'agit des gardiens, des crèches, des relais, des joueurs et des spectateurs. Nous avons misé plus sur les occupations auxquelles ils s'adonnent dans les sites miniers artisanaux pour les discerner. Raison pour laquelle, les tout petits enfants et les bébés forment un autre groupe qui est le troisième et le dernier. Il n'est pas inclus dans celui consacré aux enfants en activités non rémunératrices. Pour identifier le groupe d'enfants en

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activités non rémunératrices, il a fallu une observation attentive. Ainsi, la première catégorie est celle des enfants dénommés « crèches ».

2.3.2.1. Les crèches ou les gardiens

D'après le dictionnaire encarta (2009), la crèche est un établissement qui accueille dans la journée les enfants de moins de trois ans dont les parents travaillent. Dans les sites miniers, nous y avons remarqués la présence des enfants qui jouent le rôle de crèche. Ainsi, nous les avons dénommés « enfants crèches ».

Les crèches sont les enfants qui assurent la garde sur les sites miniers, des autres enfants qui sont plus petits qu'eux (les bébés et les autres petits enfants) dont l'âge varie entre une année à deux ans. Ils assurent la garde et la sécurité des bébés et autres petits enfants pendant que leurs mères travaillent. Ils le font pendant les heures que durent les occupations de leurs mères. Une fois que les bébés pleurent, les mamans les allaitent. Après, elles les remettent de nouveau auprès des « crèches ». Même lorsque les bébés sont endormis, ils sont soit sur les jambes des crèches, soit on les fait dormir sur un pagne étalé par terre sous un arbre et sous la surveillance des « crèches ». Ces derniers sont toujours membres de familles des bébés pour lesquels ils rendent services.

Une maman trouvée au lieu de lavage des minerais au camp Gécamines « Kapata », nous a déclaré que c'est par manque d'une grande personne qui peut garder l'enfant à la maison, qu'elle fait garder le bébé sur le site minier par son grand frère âgé de 6 ans. Elle poursuit qu'elle préfère le faire sur le site, parce qu'elle-même est présente. Ainsi, elle peut intervenir rapidement sans tarder en cas d'un besoin qui se manifeste. Après les enfants dits « crèches », viennent les enfants dits « relais ».

2.3.2.2. Les relais

Pour le dictionnaire encarta, le mot « relais » signifie médiateur ou continuateur d'une tache. Certains enfants jouent le rôle de relais dans les sites miniers. Contrairement aux « enfants crèches » qui gardent les bébés sur les sites miniers en présence de leurs mères qui exécutent quelques tâches pour être rémunérées à la fin de la journée, les enfants que nous qualifions de « relais », gardent les bébés à la maison. Ils assurent le contact entre les bébés restés à la maison et leurs mères qui travaillent dans des sites miniers. Les mères laissent les

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bébés à la maison. Une fois que ces derniers pleurent, les enfants « relais » les amènent dans les sites miniers auprès de leurs mères pour les allaiter. Après l'allaitement, les enfants « relais » les retournent à la maison. Le rôle que jouent les « enfants relais » est important, celui de faciliter le contact entre les bébés et leurs mères durant toute la journée. Raison pour laquelle, nous les désignons des « enfants relais ». La catégorie d'enfants relais est composée plus des filles.

Après cette catégorie, vient celle des enfants dits « messagers ». 2.3.2.3. Les messagers

Les enfants que nous qualifions de messagers servent de transmetteurs des messages et autres informations auprès de leurs parents et autres membres de famille qui exercent des activités sur les sites d'exploitation minière artisanale. Les messagers restent à la maison. En cas d'une situation qui advient, ils apportent l'information auprès de celui que la chose concerne. A ce propos, Malemba (2003, 113) souligne que l'enfant est utilisé comme messager ou agent de liaison entre partenaires d'affaires. Pour le cas sous examen, ce sont soit les membres de la famille, soit les voisins qui envoient l'enfant dans les sites miniers afin qu'il transmette un message à la personne concernée. Après avoir transmis le message, il rentre à la maison. Mutombo (2011, 92-94) désigne ce rôle par « courroie de transmission ». Il distingue deux catégories d'enfants comme « courroie de transmission ». La première catégorie est celle où l'enfant joue le rôle de « messager ». Il explique que l'enfant est un canal par lequel passent plusieurs messages. Il est le porte-message qui part d'un émetteur personne X vers un récepteur personne Y. Le rôle des enfants dans la circulation de l'information de toute sorte est très déterminant dans les carrières d'exploitation artisanale des minerais. La deuxième catégorie est celle où l'enfant joue le rôle d'« informateur ». Mutombo poursuit que contrairement à l'enfant messager qui est simplement un canal par lequel l'information ou message venant d'un émetteur passe pour atteindre le récepteur, l'enfant « informateur » est auteur de l'information qu'il transporte. Il la recueille par et à travers ses organes des sens et l'oriente vers les acteurs susceptibles de l'utiliser. L'enfant informateur agit en espion souvent pour le compte des personnes adultes ou d'autres enfants qu'ils soient creuseurs, négociants, policiers, ou autre agent de l'Etat présent dans la carrière, qui tirent intérêt des informations qu'il fournit.

2.3.2.5. Les spectateurs

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Le quatrième groupe d'enfants qui n'exercent pas des activités rémunératrices sur les sites miniers artisanaux sont les enfants dits « joueurs ».

2.3.2.4. Les joueurs

Certains enfants s'adonnent à des jeux dans les sites miniers artisanaux. Cette catégorie est plus retrouvée dans les sites de lavage des minerais. Notons que selon le langage des enfants trouvés dans les sites miniers, ils appellent les lieux de lavage des minerais « Pa ma l'eau ». Ceci est un mélange du swahili et du français qui veut dire « sur l'eau ». A côté des tous les sites de lavage des minerais (pa ma l'eau) investigués, il y a des remblais abandonnés par la Gécamines qui sont constitués des sables. Les uns s'amusent dans les sables en y pratiquant divers jeux, les autres jouent dans l'eau même où l'on lave les minerais. Ainsi, les sites de lavage des minerais constituent pour cette catégorie d'enfants des espaces ludiques ou récréatifs pour y pratiquer toutes sortes des jeux. Les types de jeux auxquels se livrent les enfants, varient selon que les enfants jouent dans les sables ou dans l'eau. Dans les sables, les enfants pratiquent : le jeu de cache-cache, le jeu de football, le jeu de course, le jeu de catch, etc. Et dans l'eau, les enfants y pratiquent les jeux ci-après : le concours de nage, le jeu de guerre, le jeu de catch, le jeu de course et plusieurs autres jeux que les enfants créent spontanément, tout en étant dans l'eau. Bref, certains enfants se livrent à plusieurs jeux qui leur procurent du plaisir.

Cette catégorie est plus constituée des garçons que des filles. Pendant la période scolaire, il y a moins d'enfants dans les sites de lavage des minerais. Ceux qu'on trouve dans les sites sont eux qui n'étudient pas ou ceux qui ont fait l'école buissonnière. Certains de ceux qui étudient arrivent dans des sites miniers, juste après la sortie des cours et ils y restent jusque tard à 18 heures. Mais pendant les vacances scolaires, le nombre d'enfants dans des sites miniers augmente. Plusieurs enfants se livrent aux différents jeux.

Après les enfants dits « joueurs », il y a une autre catégorie qui est la dernière dans ce groupe d'enfants en activités rémunératrices. Il s'agit des enfants dits « spectateurs ».

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Cette catégorie est constituée des enfants qui n'exercent pas des activités manuelles dans les sites miniers. Les uns après les avoir envoyés, au lieu de se rendre directement à la maison, ils restent dans les sites miniers artisanaux en train d'observer la manière dont les autres exploitent, ramassent, lavent, concassent, trient les minerais. Et les autres en se déplaçant d'un camp Gécamines vers un autre, ils s'arrêtent dans un site minier artisanal pour un petit temps pour contempler comment les activités s'y déroulent. Par après, ils poursuivent leur route. Ces derniers remplissent la fonction touristique des sites miniers. Cette catégorie a été observée à la laverie des minerais des carrières « Kamilombe I, II et III » qui se trouve juste sur la route qui mène vers la cité Gécamines « Musonoi ». Certains enfants qui quittent la cité Gécamines « Kapata » et qui se rendent à la cité Gécamines « Musonoi », s'arrêtent parfois à la laverie et contemplent le déroulement des activités sur ce site, sans toutefois s'adonner à une activité quelconque. Par après, ils poursuivent leur chemin.

Certains acteurs qui font partie du groupe des enfants en activités non rémunératrices, peuvent facilement changer d'une catégorie à une autre, selon les circonstances dans lesquelles ils se trouvent. Ainsi, un enfant peut faire partie de la catégorie des enfants « joueurs » aujourd'hui et demain, on le retrouve dans la catégorie des enfants « spectateurs », le lendemain, dans celle des enfants « crèches » soit les « messagers », ainsi de suite.

D'autres acteurs du groupe des enfants en activités non rémunératrices, basculent parfois dans la typologie des enfants en activités rémunératrices, selon les circonstances dans lesquelles ils se trouvent. C'est par exemple, les enfants « crèches », ou « messagers », ils peuvent un jour ramasser soit trier les minerais. Le fait qu'ils soient souvent dans les sites miniers, cela constitue une situation de risque.

Le dernier groupe des enfants qui sont dans les sites miniers, sont les tout petits bébés qui sont portés par leurs mères, soit par les enfants « crèches ».

2.3.3. Les sans voix

Il s'agit de tout petits bébés dont l'âge varie entre 4 mois à plus ou moins 3 ans. Nous les désignons des « sans voix » parce qu'ils ne peuvent pas décider d'eux-mêmes de leur présence ou pas dans des sites miniers artisanaux. Ils y sont par le fait de la présence de leurs

Le nombre des enfants dans les quatre sites miniers investigués nous l'évaluons à plus ou moins 350 enfants. Ils y sont nombreux en train de s'adonner aux différentes activités. La

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mères. Ils n'ont pas la capacité de se prononcer parce qu'ils sont tellement petits et dépendent directement de l'encadrement et de la protection de leurs mères. La capacité de pouvoir émettre leur consentement est pratiquement impossible, car ce sont des bébés. Le qualificatif « sans voix » n'est pas à prendre d'une manière littérale. Les « sans vois » sont facilement visibles dans les sites de lavage des minerais, car, c'est dans lesdits sites où la présence des femmes est plus remarquable. Certains « sans voix » sont soit sur le dos de leurs mères qui lavent, trient, concassent les minerais, soit sur le dos ou jambes des autres enfants dénommées « enfants crèches », qui les bercent et leur assurent la surveillance et protection. Les enfants « crèches » gardent les « sans voix » pendant toute la durée que leurs mères travaillent sur les sites miniers. C'est lorsque les « sans voix » (bébés) pleurent que leurs mères les allaitent. Après, ils sont de nouveau retournés aux enfants « crèches », parce que les mères doivent continuer à travailler.

Nous pouvons retenir que certains enfants qui sont dans les sites miniers artisanaux, s'adonnent soit à des activités rémunératrices, soit encore à des activités non rémunératrices. Les autres y sont par le fait de la présence de leurs mères sur les sites miniers artisanaux. Après avoir passé en revue d'une manière détaillée tous les trois groupes d'enfants qui se trouvent dans les sites miniers artisanaux investigués, nous pouvons à présent tenter de dévoiler les jeux, les enjeux et les logiques derrière la présence des enfants dans les zones d'exploitation minière artisanale. C'est le troisième chapitre qui répond à cette préoccupation.

Chapitre 3: Les jeux, les enjeux et les logiques derrière la présence des
enfants dans les sites miniers artisanaux

3.1. Les jeux et les enjeux de la présence des enfants dans les sites miniers

Ces trois premières procédures d'entrée des enfants dans les sites miniers artisanaux se rattachent au réseau relationnel. Lupitshi (2013, 224) montre que le réseau des relations

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bonne saisie de ces « jeux » et « enjeux » passe estimons-nous par l'examen de l'entrée dans les sites miniers et par l'analyse des conséquences subies.

3.1.1. La procédure d'entrée des enfants dans des sites miniers artisanaux

Plusieurs possibilités expliquent la manière dont les enfants parviennent à entrer dans les sites miniers artisanaux. Il s'agit des possibilités suivantes :

3.1.1.1. Par effet d'entrainement des parents et autres membres de famille

Certains enfants que l'on retrouve dans les sites miniers artisanaux, parviennent à y accéder parce qu'ils accompagnent leurs parents pour y travailler. Il arrive parfois que les enfants forment une équipe de travail avec leurs parents. Les enfants accompagnent aussi certains membres de familles (cousins, oncles, frères, soeurs, etc.) dans l'exécution des activités dans les carrières.

3.1.1.2. Par effet d'entrainement des amis

L'amitié joue également un rôle dans la conduction des enfants dans les sites miniers. Par influence des amis, certains enfants se retrouvent dans les sites miniers pour y exercer

différentes activités. Un processus de socialisation par les pairs s'y déroule par
l'apprentissage des techniques d'exercice d'activités.

3.1.1.3. Par contrainte des parents et autres membres proches de la famille

Certains parents poussent leurs enfants à aller se débrouiller dans les carrières. Soit encore c'est un membre de famille qui le fait. Les enfants nous ont témoigné que certains parents poussent leurs propres enfants à se débrouiller dans les carrières comme le font les autres enfants.

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développées par un individu lui permet de gérer certaines situations qui se présentent à lui. Il distingue ainsi trois sortes de ressources relationnelles : le repère familial, le capital social et les conseils. Par rapport à notre champ d'investigation, les enfants que l'on rencontre dans les sites miniers, nombreux ont utilisé « le repère familial et le capital social » pour accéder dans les sites miniers. Lorsqu'on analyse leur manière d'entrée pour la première fois dans les sites miniers, ils ont répondu avoir été influencés soit par les parents, soit par les membres proches de familles, soit encore par les amis.

La composition de membres d'une équipe afin d'exécuter une activité rémunératrice ou pour jouer se fait par amitié et fraternité. Cela renvoie au « réseau familial » et au « capital social ». Ainsi, l'équipe de Mbuyi qui ramasse les minerais dans la carrière 5 ans est composée de 5 personnes parmi lesquelles il y a : Mbuyi et son jeune frère, Eric et son jeune frère enfin Patient qui est seul. Les parents de Mbuyi et Monga sont aussi des amis et forment une seule équipe dans l'exploitation minière artisanale dans la même carrière. Kahenga et Patrice, tous deux exécutent différentes activités rémunératrices dans les carrières Kamilombe I, II et III. Ils sont fils d'un même père mais de mères différentes. Gaël et Monga sont tous deux frères d'un même père er d'une même mère. Ils travaillent dans la carrière 5 ans accompagnés de leur mère. Les conseils interviennent aussi. Certains parents prodiguent des conseils à leurs enfants pour mieux se comporter dans les sites. Ils leur disent de ne pas se fier aux mauvais amis qui ont des mauvais comportements. Gaël explique :

« Nous craignons de travailler en équipe de plusieurs personnes, parce que pendant que

nous, nous forons de puits non profonds, certains enfants veulent entrer dans les galléries. Dès qu'il y a éboulement, ils vont mourir et nous aurons des problèmes. Raison pour laquelle la maman nous interdit de travailler avec les autres enfants ».

Hormis les trois premières procédures d'accès des enfants dans les sites, il y a également une autre possibilité.

3.1.1.4. Par initiative propre de l'enfant

La dernière possibilité d'accès des enfants dans les sites miniers artisanaux est l'initiative propre des enfants. Ces derniers suivent facilement les routes et se retrouvent dans les carrières. Tous les sites investigués sont proches des lieux d'habitation. De ce fait, les enfants y accèdent facilement.

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3.1.2. Présence des enfants dans les sites miniers artisanaux

La présence des enfants dans les sites miniers varie selon les situations familiales et aussi selon les périodes. Il y a des parents qui interdisent leurs enfants à accéder dans les sites miniers et d'autres non. La période scolaire et celle de vacances jouent également un rôle déterminant quant à la présence des enfants dans les carrières. Pour les enfants qui sont accompagnés de leurs parents ou tuteurs, ils accèdent aisément dans les sites. Les parents trouvent cela normal. Même chose pour les enfants qui ne subissent pas de contrôle social ou qui sont sous un faible contrôle social. Ils accèdent aussi facilement dans les sites miniers. Nombreux de ces enfants n'étudient plus.

Ceux qui sont sous un contrôle rigoureux trouvent des astuces pour tromper la vigilance des parents ou des enseignants pour pouvoir accéder aux sites miniers. Les uns en allant à l'école le matin, ils portent en dessous de l'uniforme scolaire une autre tenue qui servira de tenue dans la carrière afin de ne pas salir l'uniforme. En cours de route vers l'école, ils échappent au contrôle des autres camarades et ils vont dans la carrière. Une fois sur le site minier, ils enlèvent l'uniforme scolaire, la mettent de côté. Ils restent en tenue de la cité pour exercer quelques activités. A 12 heures, ils se lavent, portent l'uniforme scolaire et rentrent à la maison, comme s'ils viennent de l'école. Les autres arrivent même à l'école. Pendant la récréation, ils fuient l'école en cachant les objets classiques dans les culottes et se rendent dans la carrière. Pendant les heures de la sortie de l'école, ils se lavent et rentrent à la maison, sans que les parents ne sachent qu'ils étaient dans les carrières. Il y a également ceux qui trompent l'enseignant disant qu'ils vont se soulager. Après qu'ils aient l'autorisation d'aller se soulager, ils fuient et vont dans la carrière. Les autres encore trompent l'enseignant qu'ils sont malades. Après les avoir autorisés de rentrer à la maison pour se faire soigner, ils se rendent dans la carrière. D'autres encore se rendent dans les carrières selon l'horaire des cours. C'est-à-dire, s'ils étudient avant midi, ils se rendent dans les carrières après les cours. S'ils vont étudier après-midi, ils se rendent d'abord avant midi dans les carrières et après ils vont aux cours. Ceux qui fuient les cours travaillent d'une manière cachée, échappant à toute visibilité par ceux qui les connaissent. A défaut, ils seront dénoncés et subiront des blâmes à la maison.

Par contre, pendant la période de vacances scolaires, ils y a une forte présence des enfants dans les sites miniers artisanaux. Les parents qui interdisaient leurs enfants de ne pas

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Les déclarations de Kahenga et Patrice témoignent la fuite des enfants à l'école pour exploiter les minerais :

« (...) nous étudions tous deux. Moi je suis en deuxième secondaire et Patrice est en 6ème à l'école primaire Nyota. Il est en retard parce qu'il a abandonné les études durant deux ans. Il fouillait aux cours pour exploiter les minerais dans la carrière (...).

En tant qu'analyste, nous trouvons qu'il y a intérêt dans la gestion de la cité à bien examiner l'emplacement des écoles par rapport aux sites miniers.

3.1.2.1. La fréquence des enfants dans les sites

La fréquence des enfants dans les sites miniers varie selon la période scolaire et la période des vacances. La période scolaire part du mois de septembre au mois de juillet. Et la période de vacances va du mois de juillet au mois de septembre. Pendant la période scolaire, il y a diminution des enfants dans des carrières. Cela se justifie par le fait qu'à cette période, beaucoup d'enfants vont à l'école. Par ailleurs, certains parents interdisent leurs enfants à se rendre dans les carrières, faute de subir une sanction. Ceux qui s'y rendent se sont soit ceux-là qui n'étudient plus, soit encore ceux qui étudient mais qui s'y rendent d'une manière cachée, ou ceux qui y vont pendant qu'ils n'ont pas cours, ou encore pendant le week-end (le samedi et dimanche). Les témoignages de Mbuyi avec les autres enfants trouvés dans la carrière 5 ans en sont une illustration :

« Pendant la période scolaire, nous ne fréquentons pas les carrières. Comme nos papas exploitent également les minerais dans cette carrière, il nous est difficile d'y accéder. Une fois que nos papa nous voient, nous subiront une sanction à la maison, qui consistera à nous priver à manger, soit nous fouetter. C'est seulement pendant la période de vacances que nous accédons dans la carrière pour y travailler ».

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s'y rendre pendant la période scolaire, les autorisent pour chercher de l'argent. Gaël et Patient expliquent :

« Pendant les vacances, nous travaillons les jours ouvrables, du lundi au samedi. Nous nous reposons le dimanche. Pendant la période scolaire, nous travaillons uniquement le samedi et le dimanche. Les autres jours, nous allons à l'école ».

Pendant cette période, les enfants vaquent à plusieurs occupations sur les sites miniers à la recherche de l'argent soit pour se payer les habits, les souliers et même les fournitures scolaires. Soit encore, pour contribuer à la survie de la famille. Les propos de Gaël et Monga en témoignent :

« L'argent que nous gagnons dans l'exploitation des minerais, nous achetons les habits, les souliers. Souvent, nous donnons à la maman qui utilise une partie pour acheter à manger, et une autre elle garde pour nous payer les frais scolaires ».

3.1.2.2. Le travail rémunérateur des enfants dans les sites miniers artisanaux

Le rapport n° 194 (2001, 1) de la Banque Mondiale présente le travail des enfants comme un travail exécuté par des enfants qui sont trop jeunes au sens qu'en le faisant, ils réduisent indûment leur bien-être économique présent ou leurs capacités futures à se faire un revenu, soit par le rétrécissement de leur horizon en matière de choix ou à travers la réduction de leurs propres capacités individuelles de production dans le futur.12

Comme expliqué dans le deuxième chapitre, les enfants s'adonnent à plusieurs activités rémunératrices dans les sites miniers artisanaux et ce, pendant plusieurs heures, afin de gagner l'argent. Les uns travaillent seuls entre enfants et les autres accompagnés de leurs parents avec qu'ils constituent une unité de production. Depuis la fin de la décennie 19801990, on assiste progressivement à un relâchement des structures économiques classiques à

info.worldbank.org/etools/docs/library/237384/toolkitfr/.../andvig.pdf .

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cause de l'arrêt des activités industrielles à la Gécamines. Les anciennes structures socio-économiques ont laissé la place à une autre organisation de la vie professionnelle, création de la population elle-même (Nkuku : 2002, 46). Les adultes tout comme les enfants s'adonnent à plusieurs activités dans les carrières. Le travail peut favoriser la maturation psychologique de l'enfant, s'il est effectué dans les conditions dignes et protégées.

La chute des activités minières de la Gécamines a eu des conséquences néfastes sur toute l'économie de la ville de Kolwezi. La majorité des populations environnant les sites miniers investigués sont des populations aux conditions socioéconomiques précaires. Certains habitants sont des agents de la Gécamines, des anciens agents de la Gécamines retraités lors de l'opération dite « départ volontaire » en 2002 et des habitants non Gécamines. Les autres sont des immigrés venant des autres territoires du pays à cause du boom minier qui a eu à Kolwezi à partir des années 2004, période d'installation des nouvelles entreprises minières. Les enfants qui fréquentent les sites miniers sont tous issus de ces familles qui sont en bas de la stratification sociale, de familles à faibles revenus, de familles vulnérables (Mary : 1998, 473). Mutombo (2011, 83) affirme qu'en tout état de cause, le fait que la plupart des enfants travaillent est un signe majeur que les familles dont ils sont issus ont été profondément ébranlées par la crise il y a plusieurs années et le travail dans les carrières et mines auquel ces enfants s'adonnent semble être pour eux l'ultime étape dans leur recherche des stratégies de survie.

3.1.2.3. Les Enfants : une main d'oeuvre moins couteuse et efficace

Plusieurs creuseurs et négociants font exécuter certains travaux sur les sites miniers par les enfants. Un négociant trouvé à une laverie de minerais, nous a déclaré qu'il préfère faire trier ses minerais par les enfants plutôt que par les adultes. Il se justifie que d'après son expérience, les enfants exécutent honnêtement les tâches qu'on leur confie par rapport aux adultes qui, parfois n'exécutent pas honnêtement les tâches leur confiées.

Une telle déclaration cache une autre explication non exprimée. Cela veut dire que les enfants constituent une main d'oeuvre moins coûteuse par rapport aux adultes. Tout en étant vulnérables, les enfants reçoivent des rémunérations qui parfois ne correspondent pas aux

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travaux exécutés, parce qu'ils n'ont pas la capacité de bien apprécier le travail qu'on leur demande d'exécuter et le prix qu'ils doivent gagner. Etant dans une position de faiblesse, les négociants leur imposent les prix. Impuissants devant les négociants, les enfants n'ont nulle part où se référer pour pouvoir les aider à apprécier le travail à effectuer et le prix leur proposé par les négociants. Dans pareil cas, les enfants acceptent le prix faute de ne pas perdre le marché. La présence de plusieurs enfants dans les sites miniers artisanaux, fait donc que les activités rémunératrices deviennent concurrentielles.

Parfois ce sont les négociants qui intimident les enfants en leur disant qu'une fois vous refuser, les autres enfants viendront exécuter cette tâche. Devant une telle situation, les enfants n'ont pas de choix à opérer. Mais, il arrive aussi que les enfants eux-mêmes enveniment la situation en se mettant dans une position de faiblesse devant un négociant, lorsqu'ils se cafouillent le travail à exécuter. Le négociant leur impose son prix. Devant une multitude d'enfants, ceux à qui la chance a souri, sont contraints d'accepter pour ne pas perdre le marché. Muzigwa (2008, 140) explique que les enfants constituent une part non négligeable d`une main-d`oeuvre plutôt captive.

3.1.2.4. Vente des minerais exploités par les enfants

Les enfants vendent eux-mêmes aux négociants les minerais qu'ils exploitent. La vente se passe dans la carrière. Les négociants circulent dans différentes carrières à la recherche des minerais. Ces derniers à leur tour les vendent aux différents comptoirs implantés à l'entrée de la ville de Kolwezi au village « Musompo ». Avant, tous les comptoirs d'achat des minerais étaient implantés sur l'avenue salongo au quartier industriel, regroupé en centres de négoces. Depuis l'année 2013, sur décision du Maire de la ville tous les comptoirs ont été délocalisés de l'avenue salongo à l'emplacement actuel. La raison de la délocalisation était d'ordre environnemental. Il fallait déplacer tous les comptoirs du centre-ville et les implanter loin de la population afin de protéger l'environnement contre la pollution des rivières.

Lorsque la quantité des minerais ne convient pas pour la vente, certains préfèrent les garder à la maison jusqu'à ce qu'ils réaliseront une importante quantité pour une bonne vente. Tandis que les autres enfants préfèrent les vendent tels quels même à un prix dérisoire.

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3.1.2.5. La gestion des revenus des enfants

Par rapport à cette préoccupation, la gestion des revenus des enfants dépend de la situation familiale de tout un chacun. Certains enfants gèrent eux-mêmes leur argent. Ainsi ils achètent facilement ce qu'ils veulent tels que les habits, les téléphones portables, la nourriture sur le site, les objets scolaires, se paient le billet pour le cinéma, etc. Bref, ils décident eux-mêmes de l'affectation de leur argent. Les autres enfants n'ont pas de pouvoir sur leurs revenus. Tout est gardé par les parents. Ces derniers décident à leur place. Dans pareil cas, les revenus des enfants servent à acheter la nourriture pour toute la famille.

Le rapport de la Confédération Syndicale Internationale (2010, 6), affirme que les enfants travaillent afin d'améliorer les revenus de leur famille ou de couvrir les frais de leur éducation ou pour l'éducation des autres membres de la famille. Roland d'Hoop (2001, 20) renchérit que certaines familles dépendent de l`argent apporté par leurs enfants pour satisfaire leurs besoins les plus élémentaires. Kahola (2008, 62) relève que le salaire perçu par les parents est modique et ne leur permet pas de nouer les deux bouts du mois. De ce fait, les enfants sont mis à contribution par leurs activités dans les carrières pour la stabilité du ménage. Ainsi, les enfants contribuent au budget familial et se prennent en charge eux-mêmes pour ce qui concernent leur besoins vitaux.

La présence des enfants dans les carrières est une preuve éloquente que les familles n'ont plus la capacité de contenance. La crise socio-économique a bouleversé toute la base familiale. L'inversion des rôles au sein du ménage, l'implication directe des enfants dans l'équilibre du ménage, la faillite de l'autorité parentale face à des enfants qui se parentalisent pendant que les parents s'infantilisent. Aussi, leur présence dans les carrières est l'expression d'une logique spatiale qui se fonde à la fois sur les innombrables besoins quotidiens qu'ils éprouvent dans leur lutte pour la survie et l'intérêt que chacun d'eux porte sur une activité pouvant lui procurer de la satisfaction (Kahola : 208, 92). La plupart des chefs de famille ne parviennent plus à remplir leur rôle de pourvoyeur du foyer. De ce fait, ils associent leurs enfants au budget du ménager.

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Carla et Andrea (2007 : 100-101) font remarquer que la famille n'est pas un espace privé où se joue la conjugalité et la filiation, elle constitue aussi une unité sociale et économique fondamentale. Sur ce point, le chômage et la précarisation transforment aussi les relations familiales entre conjoints et entre parents et enfants. A la culture ouvrière des parents succède la culture de la précarité des jeunes. Ce changement est considérable et inscrit une rupture brutale dans l'ordre de succession des générations. Les modalités d'entrée dans la vie adulte se sont métamorphosées en l'espace d'une génération. L'inscription précoce dans le monde adulte, l'obligation de se confronter jeune aux difficultés de la vie. Les enfants se prennent en charge et prennent en charge leurs parents.

3.1.2.6. Point de vue des enfants par rapport à l'exécution des activités
rémunératrices dans les sites miniers artisanaux.

Les avis des enfants sont partagés par rapport à l'exécution des activités rémunératrices dans les sites miniers. Les uns reconnaissent que les carrières ne sont pas des lieux favorables pour leur épanouissement et leur éducation. Ils sont conscients des dures conditions dans lesquelles ils travaillent. Ils se justifient que c'est pour chercher de l'argent qu'ils sont là. Ils émettent le souhait de quitter la carrière et poursuivre les études afin de devenir une autorité. Par rapport à la vision sur leur avenir, Gaël et Monga déclarent :

« Nous voulons que nous soyons comme madame le maire de la ville, le Gouverneur de province. C'est pourquoi nous voulons étudier pour devenir comme eux ».

Ils condamnent leurs amis qui dilapident leurs revenus, et condamnent également l'argent disant que c'est un mauvais conducteur. Car, certains de leurs amis s'adonnent à des mauvais comportements à cause de l'argent.

Les autres par contre ne voient aucun danger dans l'exécution des tâches dans les carrières. Ils jurent même de ne pas abandonner l'exécution des activités dans la carrière, sauf si les minerais s'épuisent. Ils considèrent les travaux qu'ils exécutent comme solution pour résoudre les difficultés qu'ils connaissent. Nous comprenons que la grande préoccupation de ses enfants est la question de savoir : quitter les carrières pour s'adonner à quelle autre activité ? Lorsqu'il n'y a pas des structures pour prendre en charge ces enfants, ils sont

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contraints d'exercer les activités dans ces lieux afin d'avoir de l'argent. Les déclarations de Kahenga et son frère Patrice en témoignent :

Kahenga et Patrice en témoignent :

« L'exploitation minière artisanale peut prendre fin un jour car, les mineras s'épuisent. Mais, nous avons du mal à pouvoir abandonner ce métier, parce que nous ne savons pas qu'est-ce que nous allons de nouveau faire pour avoir de l'argent. Si cette activité prenait fin, les gens vont mourir de faim. Tout le camp GCM Kapata sera vidé de sa population. L'exploitation minière artisanale est l'unique activité qui facilite un grand nombre de gens à avoir de l'argent. Beaucoup de creuseurs ne savent pas cultiver. Nous avons du mal à pouvoir abandonner ce boulot. A condition que nous ayons un autre boulot rémunérateur comme celui-ci ».

Ainsi, ces acteurs justifient leur présence sur les sites miniers et considèrent l'exécution des activités rémunératrices comme la solution permettant de résoudre les difficultés qu'ils connaissent (Debuyst et Joos : 1971, 146).

3.1.2.7. Point de vue des parents par rapport aux activités rémunératrices
qu'exercent les enfants dans les sites miniers artisanaux

Les parents avec qui nous nous sommes entretenu lors de la récolte des données de terrain, ont répondu que les activités auxquelles se livrent les enfants dans les carrières est une façon de se débrouiller. Au lieu de croiser les bras, vaut mieux qu'ils apprennent à se débrouiller. Pascal (2002, 16) note que sous la pression des crises qui les traversent, beaucoup de familles se débrouillent, font preuve d'ingéniosité, tentent de trouver des ressources et des appuis dans la communauté. Elles entrent dans un lent processus de métamorphose en tissant des relations diversifiées avec leur environnement. D'après les dires des parents, les enfants qui les accompagnent dans l'exécution des différentes activités dans les sites miniers sont initiés à la débrouille de la même manière qu'ils les initient aux travaux champêtres. Ils déclarent qu'ils n'ont pas d'emploi. Alors, ils se demandent ce que deviendront leurs enfants s'ils ne savent pas se débrouiller. Ils ne trouvent aucun danger lorsqu'ils se font accompagner

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de leurs enfants dans les sites miniers. Un parent nous a déclaré « tuta fanya nini ? Makazi ainako ». Qui veut dire qu'allons faire, il n'y a pas d'emploi.

3.1.2.8. Les sites miniers artisanaux : lieux de divertissement pour les enfants

Les enfants ne sont pas toujours dans les sites miniers artisanaux pour chercher de l'argent. Il y en a ceux qui s'adonnent aux activités ludiques. Ils trouvent les sites miniers comme un lieu de plaisir. Ainsi, ils s'adonnent à plusieurs jeux dans les eaux où l'on lave les minerais et dans les sables qui entourent les carrières. Parmi ces jeux nous citons : le foot, le catch, la boxe, le Karaté, la nage, la course, etc. Bref, pour une certaine catégorie d'enfants, les carrières sont des espaces de rencontre pour les jeux. Les propos de Kahenga et Patrice témoignent :

« Il y a les enfants qui creusent les minerais, certains lavent, d'autres ramassent, d'autres encore chargent les minerais dans des camionnettes pour aller les laver. Il y a aussi d'autres qui jouent au jeu de cartes ».

3.2. Impacts négatifs de la présence des enfants dans les sites miniers

artisanaux

L'environnement minier artisanal tel qu'il se présente, n'est pas propice pour l'épanouissement des enfants. Les conditions de travail laissent à désirer. Le rapport de Groupe One (2007, 8) précise que les conditions de travail et d'emploi sont mauvaises et souvent très dangereuses. Les creuseurs travaillent pieds nus, sans équipement de production. Les enfants au même titre que les autres, travaillent dans les conditions dangereuses sans mesures de protection ou de sécurité. D'après le rapport du BIT (2009, 9), le travail devient un problème quand il entraine des conséquences sur le développement de l'enfant. Ces conséquences peuvent être physiques (notamment par une dégradation de l'état général) ;

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psychologique (attachement à la famille, sentiment d'amour et d'acceptation) ; sociales et morales ou encore cognitives. 13

Les mauvaises conditions de travail exposent les enfants à plusieurs dangers. Les outils et les équipements de sécurité, lorsqu'ils existent, ont été conçus pour des adultes et ne correspondent pas à la taille des enfants. Ces derniers manipulent les minerais sans aucune protection. Tous les enfants qui se trouvent dans les sites miniers artisanaux sont en situation de danger.

3.2.1. Enfants en danger

Comme nous l'avons expliqué dans le chapitre premier, Jean Audet et Jean François Katz (2006, 111-116) expliquent la notion des enfants dits « en danger » que ce sont les enfants maltraités et les enfants en risque.

3.2.1.1. Les enfants maltraités

Les enfants maltraités sont ceux qui sont victimes de violences physiques, cruautés mentales, abus sexuels, négligences lourdes ayant des conséquences graves sur leur développement physique et psychologique (Idem: 2006, 111). La loi n° 09/001 du 10 janvier 2009 portant protection de l'enfant en RD Congo, ne définit pas le mot « enfant maltraité ». Par contre, elle précise seulement en son article 62 alinéa 5, ce qui suit : est considéré comme en situation difficile et bénéficie d'une protection spéciale, l'enfant habituellement maltraité. L'article 2 alinéa 4 précise que l'enfant en situation difficile est celui qui ne jouit pas de ses droits fondamentaux et qui n'a pas accès aux services sociaux de base tels que la santé, le logement, l'alimentation et l'éducation. Les enfants qui sont dans les sites miniers artisanaux subissent parfois quelques maltraitances, que nous étayons dans la partie ci-dessous.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote