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Eléments pour une clinique différentielle de l'anorexie à travers le stade du miroir

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par Serafino Malaguarnera
Université Libre de Bruxelles - DEA en Sciences Psychologiques et de l'Education 2006
  

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5. Conclusion

Dans ce premier chapitre, nous nous étions fixé l'objectif de présenter, préciser et motiver nos premières hypothèses. En premier lieu, nous avons montré l'importance de la problématique de l'image du corps chez les anorexiques. A travers un premier parcours historique, bien que succinct, nous avons eu l'occasion de souligner que, dès les premières découvertes, quelques auteurs ont tenu compte de cette problématique pour spécifier davantage le fonctionnement psychique de l'anorexie. En 1965, les conclusions du Symposium de Göttingen ont présenté un déplacement de l'intérêt de la recherche, jusqu'à ce moment centré sur la nourriture, vers les phénomènes concernant les relations avec le corps. Ensuite, nous avons poursuivi une enquête concernant les apports théoriques de H. Bruch et de ceux faisant référence à une perspective cognitivo-comportementale. De cette enquête, nous avons retenu que la plupart des auteurs que nous avons mentionnés accordait, à des degrés divers, une place importante à la problématique de l'image du corps. Certains de ces auteurs, comme Bruch et Garner, lui ont davantage attribué une place importante en la mettant au centre de leur modèle explicatif. Nous avons également eu l'occasion de montrer l'intérêt qu'elle occupe dans le DSM-IV, CIM-10 et parmi les facteurs jugés à risque. Dans ce résumé de littérature que nous avons proposé, il apparaît que les perturbations concernant les relations que l'anorexique entretient avec son image du corps semblerait en effet une caractéristique importante de ces patients. Elles se manifesterait par un ensemble d'attitudes concernant le poids et les formes du corps, dominées par un désir effréné de minceur et une hantise de grossir. Cependant, ces perturbations se manifesteraient sous différentes modalités. Certaines se verraient grosses en dépit de la réalité, la plupart se reconnaîtraient minces ou même maigres mais elles peuvent surestimer certaines parties de leur corps, et d'autres seraient très fières de leur apparence corporelle. Celles-ci, tout en étant conscientes de leurs maigreurs, attribueraient à cet aspect une valeur esthétique et morale exceptionnelle.

Ensuite, nous avons abordé la littérature psychanalytique concernant l'anorexie. Dans ce domaine de recherche, peu d'auteurs ont mis la problématique de l'image du corps au centre de leurs théorisations. Parmi ces auteurs, nous avons mentionné les travaux de S. Palazzoli qui a mis au centre de l'anorexie la nécessité de contrôler le corps vécu comme dangereux. Cependant, la plupart des auteurs, et plus particulièrement ceux de ces vingt dernières années, ont mis au coeur de cette pathologie la problématique de l'identité et du narcissisme. Comme nous le verrons au chapitre suivant, le stade du miroir introduit par J. Lacan met étroitement en lien l'identité et le narcissisme avec l'image du corps, et plus précisément avec l'image spéculaire. Il nous semblerait finalement possible soutenir l'idée que la problématique de l'image du corps, tel qu'elle est articulée par le stade du miroir de J. Lacan, occupe une place prééminente dans l'anorexie. Ainsi, nous croyons avoir montré une pertinence « à priori » du choix de nous appuyer sur le stade du miroir pour procéder à la recherche d'éléments pour une clinique différentielle de l'anorexie. Il nous reste à éclaircir ce deuxième aspect de notre recherche, à savoir l'intérêt à nous engager sur la voie d'une clinique différentielle de l'anorexie.

A travers un parcours des différents apports psychanalytiques, nous avons vu que l'anorexie mentale a été considérée soit comme un symptôme qui se manifesterait à partir de différents contextes psychopathologiques soit comme une structure spécifique. Ces différentes lectures ont été au centre des débats sur la place de l'anorexie mentale dans la psychopathologie et dans la nosographie psychiatrique. Du point de vue historique, nous avons vu que l'anorexie a été d'abord assimilée à l'hystérie et à la dépression mélancolique. Ensuite, elle a été considérée comme la manifestation d'une structure psychotique. Après le tournant des années soixante, lorsque de nouvelles catégories nosographiques deviennent de plus en plus d'actualité, elle est assimilée tantôt à une structure borderline tantôt à une structure narcissique. Dans cette même période, un courant progressivement dominant fait de l'anorexie une structure autonome bien individualisée dans le champ psychopathologique et psychiatrique. Plus récemment, plusieurs auteurs ont mis en évidence la dimension addictive de l'anorexie conduisant certains auteurs à l'intégrer dans le vaste champ des toxicomanies. En concevant le symptôme de l'anorexie comme une fonction défensive contre des affects dépressifs non structurés pouvant se manifester à partir de structures psychiques différentes, ces auteurs n'ont pas abandonnée l'idée que l'anorexie puisse être envisagée comme un symptôme à partir de différents contextes psychopathologiques. Ils reprennent l'axe névrotique ainsi que psychotique mais sous des termes un peu différents de ceux de la littérature classique. A titre d'exemple, selon Corcos le symptôme se manifesterait dans un registre névrotique précaire, plutôt que dans le cadre d'une névrose structurée, ou dans un registre narcissique ou limite - psychoses passionnelles froides, toxicomanie - , plutôt que dans le monde narcissiquement clos de certaines psychoses. D'autres auteurs - comme Lacan, T. Vincent, Bidaud, Nasio et d'autres auteurs qui se réfèrent à Lacan - reprennent certains regroupements classiques et assimilent l'anorexie à une structure hystérique ou psychotique. Sur la base de ces considérations, il nous paraît donc encore d'actualité de nous pencher sur une recherche visant à établir une clinique différentielle de l'anorexie. En effet, même quand l'hypothèse d'une structure psychopathologique autonome est évoquée, les auteurs sont amenés à la rapporter à des mécanismes non spécifiques qui peuvent se retrouver dans différentes structures. Il nous semble raisonnable de poser l'hypothèse que la distinction entre symptôme et structure permettrait de rendre compte des différents axes névrotiques et psychotiques évoqués dans la littérature sur l'existence de différents types d'anorexies selon la structure du sujet.

En suivant cette orientation selon laquelle l'anorexie s'inscrirait dans des structures psychiques sous-jacentes différentes, nous voudrions soutenir l'hypothèse que le vécu et la problématique de l'image du corps chez les anorexiques se manifesteraient différemment en fonction des différentes structures psychiques. Dans le cadre de ce travail de DEA, cette hypothèse nous permettra de poser les bases cliniques et théoriques de ce que nous appelons « une clinique différentielle ». Au prochain chapitre, notre souci sera, entre autres, de présenter et développer cette démarche.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe