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Evolution et mutation de l'inspection du travail

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par Anne Claire Michaut
Université Paul Cézanne - Aix Marseille III - Master Droit social 2008
  

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§ 2 : Le régime dérogatoire de l'inspecteur du travail quant aux missions classiques de police judiciaire:

Investi de pouvoir de police judiciaire, il résulte de ses droits qu'il puisse entrer dans les établissements soumis aux règles dont il surveille l'application. Lui est donc reconnu implicitement le droit de circuler librement dans l'entreprise et sans information préalable de l'employeur. Une première prérogative, puisqu'un policier de la police judiciaire doit demander le consentement du propriétaire118(*). Notons une particularité : les textes relatifs au contrôle des régimes de protection social confèrent aux agents de contrôle de l'inspection en agriculture le droit d'entrée dans les établissements n'employant pas de salariés119(*). En matière d'inspection, l'inspecteur contrôle avant tout que les dispositions législatives et réglementaires soient respectées dans une relation employeur-employé. Il est alors étrange d'autoriser les inspecteurs en agriculture de pénétrer dans des locaux où aucun salarié ne travaille. Le contrôle des installations justifient donc à lui seul ce droit. Mais en matière d'inspection général du travail, notre inspecteur de droit commun ne se voit pas octroyer la même possibilité. Ainsi il ne peut pas contrôler des installations où personne ne travailleraient. Solution d'autant plus critiquables, que dans un raisonnement pénal, il pourrait exister l'organisation d'un travail clandestin, dans des locaux où un employeur peu scrupuleux saurait qu'il ne risque aucune visite. Cependant le législateur a veillé à cette hypothèse, en accordant à l'inspecteur du travail le droit d'entrée dans tout établissement où il soupçonne un travail dissimulé.

Le droit d'entrée dans l'établissement s'effectue de jour comme de nuit, dès lors que l'entreprise est connue pour être assujettie aux dispositions dont l'inspecteur du travail a à assurer l'exécution. Mais s'il n'est pas connu des services de l'inspection du travail, le contrôle ne pourra s'exercer que de jour. Curiosité la encore discutable. Que l'établissement soit connu ou non des services, le rôle de l'inspecteur du travail reste le même : veiller à l'application de la législation sociale. Estimerions nous donc que la nuit il y aurait une présomption de non-assujettissement, au motif que l'entreprise n'est pas connue des services ? Cette limite au droit de visite la nuit nous semble contestable d'autant plus que si l'entreprise est soumise au contrôle de jour une fois, elle pourra par la suite être contrôlée de nuit. Nous aurions pu penser que la condition que l'entreprise fonctionne du nuit pour qu'elle puisse être contrôlée aurait du être suffisante pour autoriser son entrée. Dans un premier temps, la Cour de cassation avait autorisait le droit d'entrée nocturne dans les entreprises travaillant de nuit120(*). Elle a également admis la possibilité d'entrer dans une entreprise, bien que ne travaillant pas de nuit, dès lors qu'il dispose de sérieux indices de soupçonner un travail dissimulé121(*). Ainsi, « le code du travail avait refusé de reconnaître plus de droit aux inspecteurs du travail qu'aux officiers de police judiciaire »122(*), c'est la Cour de cassation qui est venu préciser les modalités de son droit d'entrée.

Le droit d'entrée est aussi limité au lieu de travail123(*). Si le local de travail est aussi un lieu d'habitation, il faut alors l'autorisation du propriétaire124(*), sous peine de tomber sous le coup d'une violation de domicile125(*). Il en est de même pour le domicile de l'employeur, « sauf soupçons inhérents au travail dissimulé ». Donc si l'inspecteur du travail ne peut, en principe rentrer dans un lieu d'habitation sans l'accord des propriétaires, ce principe ne résiste pas aux soupçons de travail dissimulé qui lui permette de passer outre le refus du propriétaire. Voila qui nous semble bien étrange. Si l'inspecteur du travail soupçonne effectivement l'existence d'un travail illégal, il n'en demeure pas moins soumis au droit et doit de ce fait respecter l'avis du propriétaire. Le recours possible serait alors de demander tout simplement le soutien de la force publique. La Chambre criminelle aménage la charge de la preuve du refus opposé à l'inspecteur du travail à celui qui s'en prévaut126(*). Cette charge de la preuve est d'autant plus protectrice pour l'inspecteur du travail, qu'en règle générale, nous imaginons que le refus est opposé verbalement lors de la visite et que, sauf présence de témoins, il ne sera pas simple de prouver que l'inspecteur a pénétré illégalement dans le domicile. Nous constatons qu'en la matière le droit d'entrée est plus étendu que celui accordé aux agents et officiers de police judiciaire pour lesquels une ordonnance du Président du TGI est requise pour procéder à des visites domiciliaires, perquisitions et saisies de pièces à conviction dans les lieux de travail. D'un côté le code du travail refuse de donner plus de droits aux inspecteurs du travail qu'aux officiers de police judiciaire, mais de l'autre l'action de l'inspecteur se voit simplifier sur la forme et, malgré tout, est plus souple sur le fond.

La Cour de cassation a été amenée, au fil des espèces, a précisé ce qu'il fallait entendre par domicile privé pour l'inspecteur du travail. Ainsi, la qualification de lieu de travail nécessite la présence d'une activité de nature professionnelle et permanente127(*)et « l'absence d'équipements nécessaires à une habitation effective ».

S'agissant des salariés à domicile, l'inspecteur du travail doit recueillir leur consentement avant de pénétrer dans le domicile. En laissant entrer l'inspecteur du travail sans opposition le propriétaire d'un local professionnel habité est censé avoir donné de façon tacite son consentement prévue par le code du travail128(*).

Dans un arrêt de 2006129(*), la Cour de cassation va encore plus loin, en affirmant que « les dispositions des articles L611-13 et L231-1 du Code du travail autorisent les opérations de contrôle en lieux de travail de quelque nature qu'ils soient, publics ou privés, compris au domicile d'un particulier ». La Haute juridiction semblait déjà ouvrir la porte aux inspecteurs du travail en estimant qu'il bénéficiait d'un « droit de regard » sur ce qu'il pouvait voir de l'intérieur de l'habitation, sans pour autant y pénétrer. Elle admettait donc déjà une atteinte au domicile privé en matière de contrôle. Pour ce faire, elle se fondait sur l'article L231-1 du code du travail qui visait les « établissements industriels, commerciaux et agricoles ». La nouvelle codification a remplacé ces termes par « employeurs de droit privé ». Dés lors, il n'est pas certain que dans des faits similaires, la Cour tranche dans le même sens, encore qu'ayant reconnu à une maison le caractère d'établissements industriels, elle pourrait qualifier d'employeur de droit privé un particulier qui ferait réaliser des travaux de rénovation chez lui par exemple.

Les pouvoirs de l'inspecteur du travail peuvent se classer selon deux catégories : ceux qui sont liés à son fonction de contrôle et ceux qui sont liés à son pouvoir de décision. Comme nous venons de le voir, les pouvoirs attachés à sa mission de contrôle de l'application de la législation en matière de droit pénal du travail, le rapproche de plus en plus d'un officier de police judiciaire sans pour autant lui conférer les mêmes prérogatives. Comme le révèle Monsieur CESARO dans sa note, « Répression du travail dissimulé : la police à domicile130(*) », le droit social répressif est plus large pour l'exercice des inspecteurs du travail que pour les officiers de police judiciaire. Il est un autre critère qui les différencie, et non des moindre, puisque l'It reste libre d'engager ou non la procédure pénal : prérogative fermée aux officiers de police judiciaire. Comme le dit très justement Valérie BOUCHARD131(*), « la finalité préventive des pouvoirs de l'inspecteur du travail débute par la reconnaissance de moyens à procéder à la constatation des infractions », pour autant c'est cette finalité qui prime sur le côté répressif de sa mission.

* 118 Art 76 CPP.

* 119 Art L722-1 et s. du Code rural.

* 120 Cass. crim. 14 décembre 1912.

* 121 Cass. crim, 12 juillet 1912.

* 122 Cass. Ch. Réunies, 29 juin 1911, « Des pouvoirs de police judiciaire de l'inspecteur du travail », V. BOUCHARD, RSC, 2005, p.273.

* 123 Art L611-8 al 3 code du travail.

* 124 Cass. crim. 19 mars 1985 : Bull. crim. 1985, n°113.

* 125 Art 226-4 CP.

* 126 Cass. crim. 4 janvier 1994, pourvoi n°92-86290.

* 127 Cass. crim. 17 octobre 1995 : Bull. crim. 1995, n°310. « Un atelier de ciselure et une fonderie, dépourvus des équipements nécessaires à une habitation effective et dans lesquels les personnes mises en examen n'exercent aucune activité permanente, ne sauraient constituer un domicile. »

* 128 Cass. crim. 4 janvier 1994 : Jurisp. soc. UIMM, n°94-572.

* 129 Cass. crim. 28 novembre 2006 : JCP S, 2007, n°25, 1471, note de J.-F. CESARO.

* 130 Note sous Cass. crim. 28 novembre 2006 : JCP S, 2007, n°25, 1471.

* 131 Note « Des pouvoirs de police judiciaire de l'inspecteur du travail » : RSC, 2005, p.273RSC, 2005, p.273.

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