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La problématique des conflits en Afrique: le cas de la Somalie, de la Côte d'Ivoire et de la RDC

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par Salif Kà¢
Université Gaston Berger de Saint-Louis - Maitrise en science politiques 2012
  

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Introduction Générale

Le continent africain est depuis des siècles le théâtre de compétitions, d'affrontements et de rivalités entre des acteurs aux ambitions différentes. Cette situation de l'Afrique résulte essentiellement de sa position géographique, de son peuplement et de son histoire. On distingue une Afrique septentrionale relativement riche et une Afrique subsaharienne pauvre. La première est dite Afrique blanche compte tenu de son peuplement arabo-berbère et la seconde Afrique est communément appelée Afrique noire. L'empreinte historique de ce continent, berceau de l'humanité, crée encore une pluralité géopolitique. On parle de l'Afrique lusophone, francophone, hispanophone, italophone, et anglophone. Du Nord au Sud, de l'Est à l'Ouest, de grands ensembles géopolitiques s'identifient par rapport aux ex puissances coloniales.

Ainsi cette présente étude loin d'être exhaustive va s'appesantir sur l'Afrique subsaharienne pour aborder la question des conflits. De l'est à l'Ouest, le continent africain est miné par le phénomène de la conflictualité. A l'exception du Cap Vert et dans une moindre mesure du Sénégal, rares sont les pays de l'Afrique subsaharienne qui n'ont pas connu de coup d'Etat, de guerres civiles, d'émeutes et d'autres formes d'instabilités politique et sociale. Par ricochet, l'Afrique de l'ouest, l'Afrique Centrale et l'Afrique de l'Est ne sont pas épargnées et traversent des moments de turbulences faits d'«impasses institutionnelles, de coup d'Etat, de conflits frontaliers » »1(*).

Dans ce cas de figure, nous porterons notre regard sur trois pays pour étudier les conflits en Afrique. Il s'agit notamment de la Côte d'Ivoire, un pays ouest africain de tradition francophone, de la République Démocratique du Congo (RDC), un pays de l'Afrique centrale ex colonie de la Belgique et la Somalie qui est un Etat d' Afrique orientale autrefois colonisé par la grande Bretagne et l'Italie.

Ce dernier Etat est né de la réunification de deux entités administratives distinctes pendant la colonisation qui sont le British somaliland situé au Nord et indépendant le 26 juin 1960 et la Somalia Italiana au Sud indépendant le 1er juillet 1960. La fusion de ces deux entités indépendantes l'une après l'autre dans un seul Etat a été possible sous les auspices de l'Organisation des Nations Unies (ONU). C'est ainsi que l'on a assisté à la naissance de la Somalie dans la corne de l'Afrique.2(*) La pertinence du choix de ces trois pays se constate à plusieurs niveaux d'appréhension du phénomène de la conflictualité dans les régions concernées.

Parmi les pays ouest africains en situation de conflits, le cas ivoirien semble être plus urgent pour une sortie définitive de crise. Plusieurs raisons peuvent être avancées pour justifier cet état de fait.

D'abord la Côte d'ivoire a un poids économique et financier très pesant dans l'Afrique Occidentale. En atteste sa part de participation dans la zone de l'Union Economique et Monétaire Ouest Africain (UEMOA) et dans la Communauté Economique des Etats de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Et comme ce fut avec le régime du président Félix Houphouët Boigny, elle garde une position stratégique pour la France soucieuse de conserver ses intérêts dans un monde marqué par la reconfiguration des relations internationales avec l'émergence des pays comme la Chine.

Ensuite la Côte d'ivoire est frontalière avec cinq pays ouest africains plus ou moins instables. Il s'agit du Libéria, de la Guinée, du Mali, du Burkina Faso et du Ghana. Les relations historiques dans cet espace commun ont engendré des liens séculaires extrêmement profonds entre les peuples qui, de cultures différentes, d'origines différentes, forment une Nation aujourd'hui remise en cause pour des raisons occultes. De ce point de vue, quand le conflit ivoirien éclate et se régionalise, c'est toute la sous-région qui en est fortement affectée. En effet le peuplement ivoirien est presque le même que celui de ses voisins immédiats et l'économie profitait beaucoup aux organismes sous-régionaux. D'où l'intérêt qu'il y a de porter un choix sur ce pays autrefois (donc avant la crise septembre 2002) considéré comme un géant financier, économique et politique de l'Afrique en général et de l'Afrique de l'Ouest en particulier.

Dans la région des grands Lacs, la République Démocratique du Congo (RDC) constitue une zone tampon entre l'Afrique Orientale et l'Afrique Australe. Sa proximité avec ses voisins immédiats (comme le Rwanda, le Burundi, l'Ouganda, l'Angola, la République Centrafrique entre autres) favorise et cimente leur relation socio-linguistique à travers la langue Swahili fédératrice de cet espace géographique caractérisé par l'existence de « foyers de tensions ». Ainsi la RDC, le troisième pays le plus vaste d'Afrique derrière le Soudan et l'Algérie, le plus peuplé d'Afrique Centrale et de la francophonie avec une population estimée à soixante huit (68) millions d'habitants, se distingue particulièrement par l'abondance de ses ressources naturelles qui font l'objet d'une convoitise particulière. Ainsi, le Congo Belge demeure le point de mire des investisseurs étrangers derrière lesquels se cachent certains pays développés.

L'autre identité remarquable de la RDC c'est d'être un trait d'union entre l'Afrique Centrale et l'Afrique Orientale à laquelle appartient la somalie.

C'est ainsi que pour François Thual, la Corne de l'Afrique joue un rôle géostratégique très influent en Afrique. Compte tenu de cette situation, deux éléments géopolitiques de base sont à considérer. Il s'agit d'une part « du rôle géoéconomique de cette région située à l'articulation de la mer rouge et de l'Océan Indien et plus précisément de la mer d'Oman, grande artère pétrolière »3(*) et d'autre part de la situation de ces pays pendant la période coloniale et des mouvements complexes de décolonisation.

Deux faits majeurs ont marqué l'Afrique Orientale avec l'explosion de certains Etats au début des années 90. Le premier fait est l'accession de l'Erythrée à l'indépendance avec l'affaiblissement du régime Mengitsu de l'Ethiopie.

Le deuxième fait majeur est au regard de François Thual la « désintégration de la Somalie qui, au moment de l'indépendance avait été formée de Somaliland britannique au Nord (Capitale Berbera) et de la Somalia italienne (Capitale Mogadiscio) »4(*).

Un autre aspect fondamental qu'il y a lieu de retenir est sans doute l'émiettement ethnique de ces nouvelles entités. Aujourd'hui, l'on note en Ethiopie un accord précaire entre les Oromos, les Tigréens ayant mis fin au régime de Mengitsu et les Amharas. En Erythrée, il y a deux grandes fractures entre les Afars au Sud du pays et les Erythréens au Nord divisés entre tribus musulmanes et chrétiennes.

Quant à la république Djiboutienne soutenue par l'Arabie Saoudite et la France, elle n'a qu'un seul port viable dans la sous-région Est africaine. Ce port utile à l'Ethiopie est menacé d'implosion par la rivalité entre les Afars, autrefois majoritaires et les Issas qui sont des somalis.

Le cas assez particulier de la Somalie réside essentiellement dans la rivalité tribale qui sévit dans le pays. Il y a toujours eu des tensions entre les Issas et les autres groupes. Malgré cette rivalité tribale historique, François Thual souligne qu'elle est « dans un processus très avancé de liquéfaction tribale »5(*). Ainsi l'on assiste à un jeu complexe qui « s'insère dans les politiques contradictions des grandes puissances occidentales et des puissances régionales »6(*).

La question lancinante des conflits reste encore préoccupante dans ces trois Etats de l'Afrique subsaharienne. Voila pourquoi il serait nécessaire de définir clairement la notion de conflit avant de dégager les différentes conceptions qui l'entourent dans le champ des sciences sociales.

Du point de vue étymologique, la notion de conflit vient du latin de basse époque « conflictus » dérivé de « confligere » qui veut dire « heurter, frapper ensemble ».

Pour Gérard Cornu, le concept de conflit révèle une opposition de vue, d'intérêt, une mésentente, une situation critique de désaccord pouvant dégénérer en litige ou en procès d'affrontement de fait (voie de fait, violence). En Relations Internationales, le phénomène de conflictualité suppose une opposition de vue ou d'intérêts entre des Etats d'une ampleur telle que la recherche de solution débouche sur l'emploi de la force.7(*) Selon le dictionnaire le Petit Robert, la notion de conflit renvoie à « une rencontre d'éléments, de sentiments contraires qui s'opposent »8(*) . Cette définition met en évidence l'idée de contradiction plus ou moins manifeste entre des acteurs défendant, chacun en ce qui le concerne, une position particulière. Dans la même perspective, Djibril Samb, à la suite de William Zartman, pense qu'il faut retenir la position selon laquelle il faut entendre par conflit « les contradictions surgissant de différences d'intérêts, d'idées, d'idéologies, d'orientations, de perceptions et de tendances ».9(*) Cette appréhension est la plus appropriée pour éclairer quelques principes théoriques dans l'explication des causes du phénomène de la conflictualité.

Sur le plan théorique, il existe selon Djibril Samb trois grandes théories de la conflictualité. La première théorie consiste en une sorte de rivalité mettant en opposition deux parties dont chacune essaie d'imposer unilatéralement sa volonté. La deuxième considère le conflit comme étant une scène à l'intérieur de laquelle les acteurs sont libres de rationaliser leurs intérêts. Cette approche est proche de l'analyse stratégique de Michel Crozier qui met en perspective l'existence dans un système un certain nombre d'acteurs agissant de manière rationnelle pour maximiser leurs intérêts.

En science politique et de manière spécifique en politique comparée, cette analyse théorique d'historiens et de sociologues pourrait connaitre certaines limites, du moins certaines insuffisances. Car elle aurait négligé quelques éléments pourtant essentiels pour appréhender la réalité des conflits en Afrique et plus particulièrement en Afrique subsaharienne réputée pour son histoire coloniale et ses traditions ancestrales confrontées au processus de modernisation des sociétés.

Dans cette perspective, cinq approches sont préconisées pour l'analyse des phénomènes socio-politiques dans les Etats africains en construction ou en pleine mutation sociale et politique. A cet effet, l'on distingue deux types d'approches, à savoir les approches d'ordre historique, économique et culturel et les approches d'ordre institutionnel et stratégique.

Les premières s'intéressent à l'étude des objets macropolitiques et sociologiques tels que l'Etat, la démocratie. Elles mettent l'accent sur le poids explicatif des structures économiques, historiques et culturelles. Ces approches « minorent le poids explicatif des acteurs et des arrangements juridiques et institutionnels ».10(*) Les approches institutionnelles plus appropriées pour cette présente étude mettent toujours l'accent sur les « stratégies des acteurs sociaux et politiques et sur les choix institutionnels dans leurs analyses »11(*).

Mais il serait plus pertinent de recourir à l'approche néo-institutionnaliste pour aborder l'étude des conflits en Afrique subsaharienne et plus précisément en Somalie, en Côte d'Ivoire et à la RDC. En ce sens on assiste non seulement au « retour des institutions » sans verser à l'ancien institutionnalisme mais aussi à la redéfinition de la notion d'institution dans le temps et dans l'espace. D'où la nécessité selon Guy Hermet et Bertrand Badie d' « accorder une attention soutenue aux institutions replacées dans leur contexte spatial et temporel ».12(*)L'on rompt avec le formalisme pour renouer avec le symbolisme. Ainsi Peter A. Hall et Rosemary Taylor reconnaissent en cette approche néo-institutionnaliste la prise en compte des aspects historiques, sociologiques et stratégiques.13(*) A cet effet, l'étude des conflits va mettre en évidence les acteurs en conflits (Etats, élite politique, groupes de pressions etc.), leurs stratégies (de domination, de défense, de profit), le contexte (colonisation, guerre froide, mondialisation, crise etc.) et l'espace dans lequel se déroulent les évènements. L'approche néo-institutionnaliste va permettre d'appréhender le sens des conflits dans les Etats africains postcoloniaux dont la Côte d'Ivoire, la RDC et la Somalie.

Cinquante ans après les indépendances, l'instabilité perdure dans ces différents pays de l'Afrique noire victime des siècles d'exploitation et de domination culturelle, politique, économique et sociale. Le bilan est sombre et les foyers de tensions nombreuses quelquefois incompréhensibles car cela relèverait, au regard de certains esprits obscurantistes du destin fatal et tragique de l'Afrique comme si l'on avait affaire à une pièce de tragi-comédie. Il n'en est rien de tout cela, contredisent d'autres plus optimistes.

Cependant dans l'état actuel des choses, l'accentuation de la mondialisation, la fin de la guerre froide, l'implication accentuée des acteurs locaux, l'atomisation et la sédimentation locale comme le cas à la RDC et à la Somalie, suscitent encore autant d'interrogations sur les causes et les modes de gestion et de résolution des conflits.

Quelles sont les principales causes des conflits en Côte d'Ivoire, en Somalie et en RDC ?

Quels sont les mécanismes de résolution des conflits dans ces trois Etats ?

Quelles expériences en termes d'efficacité et d'effectivité faut-il tirer de leurs applications ?

Ces interrogations feront l'objet, à travers l'approche néo-institutionnelle, d'une analyse rigoureuse. Pour ce faire, il sera question d'une part de l'examen des causes des conflits en Somalie, en Côte d'Ivoire et en RDC( Première partie), d'autre part des mécanismes d'ordre traditionnel et moderne de résolution des conflits dans ces trois pays avant d'apprécier les expériences de leur application (Deuxième partie) .

* 1 Jeune Afrique hors série No 24. L'Etat de l'Afrique 2010, p18.

* 2 Antonio Torrenzano. L'imbroglio Somalien : Historique d'une crise de succession. Edition Harmattan, 1995, p11.

* 3 François Thual. Géopolitiques au quotidien. Institut des Relations Internationales et Stratégiques, Paris 1993, p197.

* 4 Idem.

* 5 Op.cit. François Thual, pp140-141.

* 6 Idem.

* 7 Gérard Cornu. Lexique des termes juridiques. Association Henry Capitant. Vol.1, Presses Universitaires françaises, 1987.

* 8 Le nouveau Petit Robert de la langue française 2010, p 504.

* 9 Djibril Samb. Conflits et crises en Afrique : étiologie, typologie, symptomatologie, prévention et résolution. Leçon inaugurale de l'Amphi de rentée UGB, Saint-Louis 2007/2008.

* 10 Bertrand Badie et Guy Hermet. Politique Comparée. Edition Armand Collin, Paris, 2001, pp188-191.

* 11 Ibidem.

* 12 Ibidem.

* 13 Op.cit. Bertrand Badie et Guy Hermet, pp202-204.

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