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Histoire et épidémiologie historique de la noyade dans le Rhône XIXème-XXème siècles


par Charlotte Gouillon
Université Lyon 2 - Master 2 2025
  

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CHAPITRE 1

LE RAPPORT AU FLEUVE

Dans le cadre de notre étude concernant le rapport entretenu entre les Lyonnais et leurs cours d'eau, le Rhône et la Saône, nous allons nous intéresser dans un premier temps au rapport au fleuve. Lorsque nous évoquons le rapport au fleuve, nous évoquons d'une part le fleuve du Rhône, mais également d'autre part la rivière qu'est la Saône. Pour des questions pratiques, nous évoquerons ces deux cours d'eau en les nommant « fleuve » à plusieurs reprises dans notre étude, bien que la Saône ne soit pas à proprement parler un fleuve.

I- Les constructions autour du fleuve à Lyon

Dans un premier temps, nous allons voir les constructions qui sont établies autour du Rhône et de la Saône à Lyon aux XIXème et XXème siècles, et voir en quoi l'état de ces constructions permet de mieux comprendre le lien unissant les Lyonnais à leurs cours d'eau.

Depuis l'Antiquité, l'installation urbaine de Lyon s'est développée autour de la Saône, jugée plus docile que son voisin, le Rhône, considéré comme un obstacle difficilement maîtrisable. Jusqu'à la fin du XVIIIème siècle, la majorité des constructions se fait sur la Saône ce qui permet d'assurer à la ville une croissance économique et marchande. Elle constitue véritablement l'axe majeur principal de la ville42. Jusqu'au XIXème siècle, les cours d'eau de la ville occupent une place cruciale quant au ravitaillement de la ville qui est essentiellement assuré par des bateaux naviguant sur ces deux cours d'eau. La Saône est utilisée par un nombre important d'embarcations qui transportent des marchandises tels que des grains, des vins ou des poissons. Le Rhône quant à lui, proposant une navigation plus difficile à maîtriser est utilisé afin de transporter des matériaux sur des grands radeaux destinés à la construction tels que le bois, qui provient généralement de la Savoie et du Bugey tandis qu'on remonte du sud de la France et de la Méditerranée des céréales, du sel et des huiles.

42 MUSÉE GADAGNE, Lyon, Exposition Les pieds dans l'eau : Vivre avec le Rhône et la Saône, 2021

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a) Les ponts, bacs, et barques

Depuis l'Antiquité, période de construction de la ville de Lyon, des constructions sont établies afin de pouvoir traverser les fleuves. Durant plusieurs siècles, les Lyonnais utilisaient des barques ou des bacs afin d'y parvenir, qui étaient conduits par des passeurs.

Les bacs à traille ou bacs à chaîne correspondent à un type d'embarcation utilisé pour traverser un cours d'eau. Le système est simple : un câble traverse le cours d'eau et est attelé à un pilier de chaque côté du fleuve. La progression du bac se fait alors grâce au courant, et dans les cas où ce dernier n'est pas assez intensif, la traversée se fait à l'aide de rames ou tout simplement avec les bras, en tirant sur la corde ou en poussant sur une perche. Cette construction généralement provisoire était notamment utilisée par les hommes en compensation d'un pont endommagé ou détruit43. Nous pouvons citer par exemple la présence du bac à traille des Terreaux qui joignait le 2ème arrondissement de Lyon en rive droite à celui du 6ème arrondissement en rive gauche et qui fut construit vers 1745 44 . En 1827, Marc Seguin invente les ponts suspendus à Lyon ce qui

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engendre entre 1830 et 1850 une construction massive de ponts suspendus favorisant alors la disparition des bacs à traille, qui appartenaient pour la plupart à l'État français46.

Construits à l'origine en bois, les premiers ponts établis au sein de la ville de Lyon datent de l'époque gallo-romaine. Durant le Moyen-Âge et l'Époque moderne, aucune évolution n'est à noter concernant ces ponts, dont la construction n'est pas développée. Il faut attendre l'époque contemporaine et plus particulièrement la fin du XVIIIème siècle et la première moitié du XIXème siècle pour observer une forte croissance des constructions de ces ponts à Lyon. Au XVIIIème siècle, la ville comptabilise au total sept ponts. La Saône est alors traversée par cinq ponts : le pont de Serin, celui de Saint-Vincent, de l'Evêché, d'Ainay et de la Mulatière. Le Rhône est quant à lui traversé par deux ponts, à savoir le pont de la Guillotière et le pont Morand47.

À partir du XIXème siècle, la navigation à vapeur inventée par le marquis Jouffroy d'Abbans est en plein essor à Lyon et révolutionne la manière de penser les constructions autour du fleuve, on

43 Guy D†RRENMATT, Le Rhône autrefois, Les Provinciales Curandera, Aubenas, 1987.

44 Sandrine PAGENOt, Isabelle HAVARD, Bruno DECROCK, « Bac à traille du Bât d'argent, puis bac à traille des Terreaux ou bac à traille du Grand Collège, ou bac à traille des Recteurs de l'Hôtel-Dieu (disparu) », Rhône-Alpes, Lyon, 2010. Dernière mise à jour en 2016.

Disponible sur : < https://patrimoine.auvergnerhonealpes.fr/dossier/IA69006581>

45 Jean PELLETIER, Ponts et quais de Lyon, Lyon, Éditions Lyonnaises d'art et d'histoire, 2013.

46Louis BONNAMOUR, Le XIXè siècle et la Saône. Tradition et Bouleversements, Z'est Éditions, 2020, 256p. 47 Jean PELLETIER, Les ponts de Lyon, l'eau et les Lyonnais, Le Coteau, Éditions Horvath, 1990, 207p.

détruit par exemple le pont de Pierre (ou du Change) sur la Saône qui est désormais considéré comme trop dangereux pour la navigation à cause du courant rapide qu'il enjambe et qui est par ailleurs surnommé « la Mort qui Trompe ». Dès 1860, on comptabilise 19 ponts à Lyon. Durant la deuxième moitié du XIXème siècle, Lyon connait une autre modification importante dans son paysage urbain : la construction de grands ponts métalliques. C'est ainsi que sont construits de 1852 à 1856 les deux viaducs de la gare de Perrache, celui de la Quarantaine sur la Saône et de la Méditerranée sur le Rhône mais également le viaduc en amont sur le Rhône qui correspond aujourd'hui au pont Poincaré. À la fin du XIXème siècle, la construction de ces grands ponts métalliques ne fera que de s'accroître laissant place à deux nouvelles constructions majeures que sont le pont Lafayette et celui de l'Université48. Après cette véritable transformation architecturale autour des cours d'eau Lyonnais, la ville ne connaît que de légères évolutions au XXème siècle. Nous pouvons notamment citer l'utilisation de nouvelles techniques et/ou nouveaux matériaux après 1910, tels que l'emploi du béton armé et du béton précontraint. Durant la Seconde Guerre mondiale (1939-1945) la ville de Lyon est victime de nombreux bombardements de la part de l'Allemagne nazie, ce qui occasionne la destruction ou l'endommagement de nombreux ponts et constructions sur le fleuve. Nous ne développerons pas davantage la période de la Seconde Guerre mondiale qui demeure trop conséquente pour pouvoir être traitée au sein de notre étude.

b) Les quais et les rives

Le paysage architectural de la ville de Lyon est ainsi constitué de ces nombreux ponts mais est également marqué par la présence de quais et de rives. Un quai est une « section de berge, de rive ou de rivage d'un port ou d'une voie navigable, aménagée en vue de permettre l'accostage des bâtiments de navigation, l'embarquement ou le débarquement des passagers, le chargement ou le déchargement des marchandises49 ». Les quais à Lyon reflètent la relation entretenue entre les Lyonnais et leur deux cours d'eau et leur construction est relativement récente puisqu'avant le XVIIIème siècle ils n'existent pas. Le bord de l'eau est occupé du côté du Rhône par des murailles et du côté de la Saône par des maisons.

À partir du XIXème siècle apparaissent les véritables premiers travaux d'aménagements des quais à Lyon qui sont tout d'abord destinés à dégorger la circulation routière en centre-ville qui se fait de

48 Jean PELLETIER, Les ponts de Lyon, l'eau et les Lyonnais, Le Coteau, Éditions Horvath, 1990, 207p.

49 Larousse, « Quai », dans Dictionnaire en ligne. Consulté le 2 mai 2024. Disponible sur : < https://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/quai/>

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plus en plus difficilement. Le prix de ces travaux étant élevé, les frais sont partagés entre la ville de Lyon et l'État français jusqu'à la fin du siècle50. La construction des quais s'explique également par un besoin de protéger les habitations des flots. Le premier quai construit à Lyon est le quai Saint-Vincent dont le projet voyait le jour dès 1599. Sa construction a lieu vers 1620 et est rapidement suivi par la construction de deux autres quais : le quai de la Baleine, correspondant aujourd'hui au quai Rolland vers 1640 et le quai Chalamont, aujourd'hui quai Saint-Antoine en 1713.

Les travaux d'aménagements des quais sur la rive gauche débutent quant à eux uniquement à partir du XIXème siècle. La rive droite du Rhône connait ses premiers travaux d'aménagements en 1573 avec les premières digues de Bandinelli pour parvenir à la fin du XVIIIème siècle aux travaux d'aménagements de Perrache. La rive gauche du fleuve est quant à elle construite au XIXème siècle. Concernant l'aménagement des rives de la Saône, sa rive droite est depuis toujours habitée et regroupe notamment l'économie Lyonnaise. La rive gauche est quant à elle au départ garnie de jardins et de vignes sur les flancs de la Croix-Rousse ainsi que de quelques couvents ou chapelles, avant de connaître à son tour des travaux d'aménagements des quais à partir du XVIIème et surtout lors des XVIIIème et XIXème siècles.

c) Les ports

En 1826, les frères Seguin, ingénieurs et industriels français se voient concéder par la ville de Lyon un terrain de 283 000m2 au sud du nouveau quartier de la presqu'île afin d'y construire une gare d'eau en y conduisant le voie ferrée reliant la ville de Saint-Étienne à celle de Lyon ainsi que d'y implanter 79 établissements industriels, maisons ou entrepôts51. Si une première gare d'eau avait été construite en 1779 par l'ingénieur Perrache, son état d'inachèvement la rend insalubre. Les frères Seguin entreprennent alors des travaux afin de viabiliser la zone de Perrache. Cette gare d'eau aura permis la création plus tardivement d'un port industriel de grande envergure au sein d'un lieu stratégique que représente le confluent du Rhône et de la Saône et sera détruite en 192052.

Le port Rambaud est à Lyon le plus ancien et le plus important de la région. Il a été construit en 1926 entre le pont de la Mulatière et l'ancienne gare d'eau sur les bords de Saône près du confluent

50 Jean PELLETIER, Ponts et quais de Lyon, Lyon, Éditions Lyonnaises d'art et d'histoire, 2013.

51 Chalabi MARYANNICK, Ministère de la Culture, « Gare d'eau de la Compagnie Seguin », Inventaire général du patrimoine culturel, Région Rhône-Alpes, Ville de Lyon.

Disponible sur : < https://www.pop.culture.gouv.fr/notice/merimee/IA69000818>

52ART ET HISTOIRE, « Société Seguin & Cie ».

Disponible sur : < https://www.art-et-histoire.com/request_print_page.php>

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avec le Rhône en succession à la gare d'eau. Sa mission est importante puisqu'il doit répondre aux besoins industriels d'une grande ville telle que Lyon53. Lieu destiné aux échanges commerciaux, il est spécialisé dans le trafic fluvio-maritime et avait pour mission notamment d'assurer des liaisons régulières entre Lyon et le mythique port du Pirée situé à Athènes en Grèce, ou des liaisons vers l'Italie afin de transporter des produits métallurgiques. Très actif durant les années 1950 à 1960, notamment dans le transport de produits tels que le sucre, le sel ou le vin, il cesse néanmoins son activité en 1991 54 .

Un second port pris forme au début des années 1920 à Lyon avant de devenir effectif en 1937 : il s'agit du port Édouard Herriot, situé sur le Rhône en aval de Lyon. Il est nommé ainsi en l'honneur du Président du Conseil et maire de Lyon Édouard Herriot. À la différence du port Rambaud qui n'a pu connaître une grande expansion notamment dû au fait que son arrière port touchait directement la ville de Lyon, le port Édouard Herriot a quant à lui toute possibilité d'extension que ce soit le long des berges qui ne sont pas aménagées ou derrière avec une immense zone industrielle en plein essor55. En effet, étant construit en pleine campagne sur un marécage, sa capacité d'extension est illimitée. Il est créé de prime abord afin de stocker les hydrocarbures et d'approvisionner les centrales de la région. Il est par la suite agrandi dans les années 1945-48, avec la construction d'une première darse, c'est-à-dire d'un canal puis d'un bassin permettant l'accostage aux gros transports d'hydrocarbures56.

53 Paul FELS, Alain DUCOS, INA, 30 octobre 1964, « Les installations portuaires de Lyon », 4:47. Consulté le 2 mai 2024.

Disponible sur : < https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/lxf99005735/les-installations-portuaires-de-lyon>

54 PORT RAMBAUD, « L'histoire du port Rambaud », consulté le 9 juin 2024. Disponible sur : < https://portrambaud.com/port-rambaud/son-histoire/>

55 Paul FELS, Alain DUCOS, INA, 30 octobre 1964, « Les installations portuaires de Lyon », 4:47. Consulté le 2 mai 2024.

Disponible sur : < https://www.ina.fr/ina-eclaire-actu/video/lxf99005735/les-installations-portuaires-de-lyon

56 VILLE DE LYON, « Port Edouard Herriot ». Consulté le 10 juin 2024.

Disponible sur : < https://www.lyon.fr/lieu/patrimoine-industriel/port-edouard-herriot>

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d) Les moulins

Les premiers moulins apparaissent sur le Rhône aux XIVème et XVème siècles et sont pour la plupart des moulins à blé 57 . Ces moulins flottants qui se développent ensuite sur la Saône et qui fonctionnent grâce à l'énergie hydraulique qui leur sert de force motrice servaient alors à fournir la population Lyonnaise en farine58. La Fédération des moulins de France définit ces moulins flottants ou moulins-bateaux comme des « bâtiments en bois, flottant sur une rivière de façon statique, qui convertit l'énergie du courant de la rivière en mouvement rotatif de sa (ou ses) roue(s) pour actionner les meules d'un moulin à farine. Le seul déplacement qu'il effectuait, était dicté par la recherche de la meilleure position dans le courant de la rivière59 ». À la fin du XVIIIème siècle, Lyon connait un hiver rude qui provoque l'apparition de glace sur le Rhône ce qui eut pour conséquence la mise à l'arrêt des moulins qui à son tour causa l'apparition d'une famine meurtrière au sein de la population Lyonnaise60. Leur utilisation était donc primordiale. Avec le développement des bateaux à vapeur à partir de 1820 et l'augmentation du trafic fluvial, les moulins-bateaux perdent en popularité. Le 5 mai 1835, les Ponts et Chaussées interdisent la réparation des moulins défaillants à Lyon. C'est ainsi que fut détruit en 1894 le dernier de ces moulins voguants, année durant laquelle émerge par ailleurs la « Société des forces motrices du Rhône »61, l'un des premiers grands groupes privés de distribution et de production de l'électricité en France.

En conclusion, nous pouvons dire qu'un certain nombre de constructions sont établies sur les fleuves à Lyon aux XIXème et XXème siècles. Démontrant toujours plus d'intérêt pour leurs fleuves, les Lyonnais tentent par tous les moyens de rentabiliser leurs activités économiques en s'appuyant sur le développement et la maîtrise de leurs cours d'eau qui offrent également à la population des intérêts propices quant à la réalisation de certaines tâches et activités quotidiennes.

57 Jacques ROSSIAUD, Lyon : la rivière et le fleuve, Lyon, Éditions Lyonnaises d'art et d'histoire, 2013, p60-63.

58 MUSÉE GADAGNE, Lyon, Exposition Les pieds dans l'eau : Vivre avec le Rhône et la Saône, 2021.

59 FDMF, « Les moulins-bateaux », publié le 2 novembre 2013. Consulté le 2 mai 2024. Disponible sur : < https://fdmf.fr/les-moulins-bateaux/>

60 Jacques FONTES, « Quand les moulins-bateaux préservaient les Lyonnais de la famine », Le Progrès, publié le 17 avril 2021. Consulté le 14 juin 2024.

Disponible sur : < https://c.leprogres.fr/culture-loisirs/2021/04/17/quand-les-moulins-bateaux-preservaient-les-Lyonnais-de-la-famine>

61 Jacques ROSSIAUD, Lyon : la rivière et le fleuve, Lyon, Éditions Lyonnaises d'art et d'histoire, 2013, pp64.

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