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Les enjeux géopolitiques de la "percée" chinoise au Sénégal

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par Xavier Aurégan
Institut Français de Géopolitique - Master 2007
  

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CONCLUSION

L'objectif de cette étude était de mettre en perspective les relations bilatérales sinosénégalaises. Qui profite au mieux de ce partenariat ?

Économiquement, c'est la RPC. Elle à d'ores et déjà investit dans les secteurs les plus rentables et les plus performants du Sénégal, tels que le secteur maritime (la pêche et le transit) ; le textile ; le BTP.

Le secteur de la pêche devra répondre à l'ultimatum naturel qu'est la raréfaction des ressources halieutiques. Les sociétés sino-sénégalaises sont pour une part imputables à ce constat. L'expérience chinoise dans ce domaine est une opportunité.

Un secteur très préoccupant est celui du textile. Le coton déjà soumis à la concurrence américaine (subventions) n'est plus compétitif avec l'arrivée du textile chinois. Les opérateurs asiatiques n'investissent donc pas. Une opportunité là encore, est la modernisation des industries sénégalaises avec l'appui des sociétés chinoises.

Le BTP profite lui d'une croissance régulière et importante. Si les tarifs appliqués par Henan Chine sont un avantage (création d'infrastructures à bas coûts), le transfert de savoir-faire est faible et les investissements demeurent peu importants.

Ces trois secteurs économiques ne sont pas négligeables dans l'économie sénégalaise et ce sont donc les trois principales implantations chinoises, avec le commerce des produits made in China.

La Chine s'offre ainsi des débouchés.

Ces produits de basse qualité que l'on retrouve sur tous les étals africains sont rarement proposés sur le marché intérieur chinois : c'est donc bien une offre spécifique.

Ces produits sont vendus par des commerçants chinois, qui par leur présence, sont à l'origine de tensions et des conflits d'intérêts. Concurrencés, désavoués, les organisations syndicales et patronales exercent un repli identitaire. Ce capitalisme patriotique n'est pas propre au Sénégal, mais il est ici plus qu'ailleurs (U.E. et États-unis), difficile à mettre en oeuvre, faute de moyens et de soutiens suffisants.

Les enjeux et perspectives de l'État sénégalais sont donc :

- Diversifier les échanges commerciaux (avec la RPC) et trouver des filières d'exportations
afin de combler le déficit commercial, attirer les IDE en sorte en s'appuyant sur la SCA.

- Prendre ses responsabilités et clarifier la situation des commerçants chinois.

- Négocier avec les deux géants asiatiques dans le cadre de leurs intérêts mutuels, dont les subventions font partie (exemple de la Politique agricole commune).

- Certains secteurs dont j'ai peu parlé, sont l'agriculture, l'agro-industrie, les télécommunications, les services et le tourisme.

- Favoriser la compétition entre l'Inde et la Chine, la première fournissant en échange des matières premières, les transferts de savoir-faire, de technologie, indispensables. La seconde étant incontournable économiquement et politiquement. L'appel d'offre des gisements de fer de la Falémé, proche de la ville de Tambacounda, a été remporté par une société indienne. Ceci permettra de nuancer le poids politico-économique chinois.

- Parvenir à se positionner comme interlocuteur privilégié et indispensable dans les relations Chine-Afrique, impulsées par Hu Jintao et son prédécesseur, Jiang Zemin, et ce en dépit du sous-sol.

- Profiter de la situation de carrefour pour attirer les IDE, profiter également (et entretenir) le climat de confiance et de stabilité relatif au Sénégal, comparé aux tensions présentes en Afrique de l'Ouest (Guinée et Côte d'Ivoire).

- Tirer profit des gisements de fer de la Falémé, du phosphate et du pétrole pour investir dans le secteur public car même les ultra-libéraux du FMI et de la Banque Mondiale le reconnaisse, les biens publics sont indispensables à l'économie de marché. Le Sénégal doit donc investir dans les biens publics, qui sont donc, des jeux à somme positive.

Une perspective non négligeable est la hausse des salaires sur la façade maritime chinoise. L'Afrique et le Sénégal, pourraient profiter de délocalisations occidentales. D'ailleurs, toutes les conditions sont réunies : la langue, la connaissance des marchés, l'implantation déjà plus que centenaire.

Plus présente dans cette économie qu'au premier abord, j'ai donc remarqué cette implantation grandissante, qui a priori, ne faiblira pas ces prochaines années, au contraire.

Le gouvernement sénégalais doit non seulement composer avec la Chine, mais l'intégrer dans sa stratégie de croissance accélérée, car les investissements industriels sont une nécessité.

Les sociétés implantées pourraient également effectuer sur le territoire sénégalais une période de rodage, d'appréhension du marché local et international. Les transferts et échanges de savoirs, de technologies, doivent être la première revendication.

Le gouvernement devra par ailleurs gérer les tensions, si un véritable Chinatown voit le jour. La réaction à moyen terme des Libanais pourrait être pour le moins néfaste.

Le Sénégal doit diversifier ses partenaires économiques et politiques, en tenant compte de la concurrence France-Chine. Je rappelle que la France représente toujours 80 % des IDE. Si

Abdoulaye Wade n'a pas obtenu un partenariat privilégié auprès des États-Unis, la Chine est à l'inverse une réussite diplomatique.

Fort de ses atouts diplomatiques, stratégiques et géographiques, le Sénégal devra trouver sa place dans les relations sino africaines, car s'il n'est pas indispensable au développement de la Chine, l'inverse est moins évident.

N'excluant pas de possibles surenchères dans ces prochaines décennies, il lui faudra anticiper le futur proche, qui pourrait donner un intérêt premier à l'Afrique subsaharienne, étant donné la raréfaction des ressources fossiles. Un engagement plus important des puissances européennes, américaines et asiatiques sur la région subsaharienne, n'est pas à exclure.

L'enjeu pour l'Afrique est donc son organisation politique. La fédération africaine verra t'elle le jour ? L'Organisation de l'unité africaine (OUA) devait selon le Ghanéen Nkrumah y répondre. S'il n'en fut pas ainsi, la question est toujours d'actualité. Par ce moyen, l'Afrique ou du moins l'Afrique subsaharienne qui présente une homogénéité géographique, historique (sans tomber dans le déterminisme par ailleurs), pourrait enfin, d'une unique voix, parler à l'ensemble de la communauté internationale. Les défis, enjeux, conflits pourraient de fait être résolus ou abordés par un organe central.

Il semble évident que l'ensemble des conflits du XXe siècle (en Afrique) ne se limite pas aux frontières tracées par les puissances européennes, leurs règlements ne peuvent donc qu'être régionaux. L'individualisme serait une grave erreur : les États les plus riches (ceux ayant les ressources naturelles) accapareront l'ensemble des flux financiers, contribuant à l'enclavement des pays ne possédant d'économie stable et de produits d'exportations. La Chine comme les autres favorisera les échanges avec les premiers au détriment des seconds.

Le Sénégal est à même de prendre une place importante dans ce défi.

À long terme d'ailleurs, quelle sera la politique africaine de la Chine, dès lors qu'elle aura réintégrer Taiwan et trouvé de nouveaux partenaires commerciaux, de nouveaux fournisseurs de ressources (énergétiques notamment) ? Continuera t'elle de proposer un mode de développement alternatif, différent, lorsque sa classe moyenne sera constituée ? Faut il se méfier de la Chine, car celle-ci ne donnera pas indéfiniment sans recevoir en retour ?

L'État sénégalais doit tenir compte de toutes ces données, clarifier ses attentes, définir ses moyens, et, prendre ses responsabilités. Ce sont les conditions sine qua non.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand