Paragraphe 1 : L'agent consignataire de navire
L?agent consignataire de navire est une expression
composée de trois mots : agent, consignataire et navire.
L'agent : il est dérivé du
mot latin «agere», qui signifiait s?occuper, prendre soin de quelque
chose, s?occuper des affaires d?autres personnes.
L?agent est un terme utilisé aussi pour désigner
les intermédiaires indépendants2. (Agent d?affaire,
agent de change etc. ...)
Le consignataire : est un mot
d?origine latine, «consignare qui signifie cacheter. La consignation
consiste en un dépôt d?espèces, de valeurs ou d?objets
entre les mains d?une tierce personne, à charge pour elle de les
remettre à qui de droit.
Lorsqu?une somme en espèces était
déposée, le déposant apposait son cachet aux fins
d?identification. C?est pourquoi l?on qualifiait de consignataire le tiers
à qui l?armateur confiait temporairement son navire.
Le problème s?est posé de savoir s?il existait une
différence entre l?agent maritime et le consignataire de navire.
Selon Lamy Transport, « l?agent maritime appelé
également « agent de fret » a donc des activités
commerciales : il recherche des clients pour le compte des armements qu?il
représente dans une zone géographique bien
déterminée. Il exerce également la fonction de
consignataire de navire. A ce double titre, il est mandataire. Il se distingue
du simple consignataire en ce qu?il possède une clientèle propre
».
Dans un arr~t du 12 janvier 1995, la cour d?appel de Rouen
établit une distinction de principe très forte entre l?agent
maritime et le consignataire de navire, refusant à l?opérateur
portuaire qui avait selon elle, agi en qualité d?agent maritime, le
bénéfice de la prescription d?un an inscrite dans
l?article 16 de la loi du 3 janvier 1969 à l?encontre de «
toutes les actions contre les consignataires ».
Assigné en référé provision, un
opérateur portuaire ayant agi en qualité de consignataire /
agent maritime avait invoqué la prescription d?un an. Observant que
de nombreux courriers échangés entre les parties mettaient en
évidence que
la mission de cet opérateur allait bien au delà
de celle d?un simple consignataire consistant en particulier à
prospecter l?ensemble des clients potentiels, la cour de Rouen décide
que l?action poursuivie par l?armateur n?était pas soumise à la
prescription d?un an, mais à la prescription décennale de
l?article 189 du Code de Commerce.
Le professeur Bonassies observe à juste titre que cette
décision n?est pas aussi fondée qu?on pourrait le penser, eu
égard à la difficulté de distinguer, quant à leur
nature juridique, agent maritime et consignataire de navire.
En réalité, aux termes de l?article 11 de la loi
du 3 janvier 1969, le consignataire du navire agit comme mandataire
salarié de l?armateur et ce texte ajoute qu?il effectue pour les besoins
et le compte du navire et de l?expédition, les opérations que le
capitaine n?accomplit pas lui-même. On peut se poser la question de
savoir s?il existe une différence entre le fait pour un consignataire de
navire de conclure les contrats pour le compte de son mandant, et le fait pour
un agent maritime de prospecter les clients potentiels,
précisément pour les amener à conclure de tels contrats.
Le doute est permis et il n?existe pas de raison pour interpréter
l?article 11 comme restreignant les activités de mandataire
salarié de l?armateur aux opérations qu?il vise en termes
d?ailleurs largement imprécis (opérations effectuées pour
le compte du navire et de l?expédition), et non pas plus simplement
comme précisant certaines de ces activités.
Le navire : « il n?existe en
droit français à l?inverse de certains droits étrangers,
aucune définition du navire. Il n?existe que des définitions
spécifiques à telle ou telle institution, et un critère
administratif, - celui de la francisation, ni ces définitions ni ce
critère ne suffisent à cerner la notion du navire».
Cependant, on peut admettre qu?un engin est un navire si
conformément à certains critères il est d?une part apte
à affronter le péril de la mer et d?autre part
apte à effectuer des transports.
La loi du 5 juillet 1983 relative à la sauvegarde de la
vie humaine en mer et la prévention de la pollution énonce que :
« sont considérés comme navires tout bâtiment de mer
quel que soit, y compris les engins flottants qui effectuent une navigation en
surface ou sous-marine ou qui stationnent en mer (ou dans les eaux
dépendant du domaine public maritime) à l?exclusion des engins de
plage ».
Le décret du 7 ao~t 1967, relatif aux conditions
d?exercice de la profession de marins, adopte une définition moins
large. Il n?applique la notion de navire qu?aux engins flottants qui effectuent
une navigation maritime.
L?article 1 al.3 dudit décret énonce que «
sont considérés comme navire au sens du présent
décret tous les b1timents de mer quels qu?ils soient, y compris les
engins flottants qui effectuent une navigation de mer, dans les ports et rades,
ou canaux dépendant du domaine public maritime et dans les estuaires,
rivières etc.
La convention de Londres de 1972 sur les règles
internationales pour prévenir l?abordage en mer définit le navire
comme « tout engin ou tout appareil de quelque nature que ce soit, y
compris les engins sans tirant d?eau et les hydravions, utilisé ou
susceptible d?~tre utilisé comme moyen de transport sur l?eau ».
Il est en effet difficile de tirer une conclusion. Cependant,
on peut dire que tout bâtiment naviguant en mer peut avoir recours
à un consignataire. En outre, Les activités du consignataire
peuvent donc être étendues aux bâtiments affectés aux
travaux, opérations et recherches scientifiques et qui n?effectuent
aucun transport maritime proprement dit3. Cette opinion peut
être confortée par le fait que les activités du
consignataire n?ont cessé de se développer depuis son
apparition sur la scène maritime.
L?agent consignataire de navire, mandataire salarié de
l?armateur doit Etre distingué du consignataire de la cargaison,
représentant des ayants droit à la marchandise.
Tandis que l?agent consignataire de navire permet au bktiment
d?abréger son escale, le consignataire de la cargaison prend livraison
pour le compte du destinataire et hâte par conséquent le moment
où les risques passent sur sa tête. Le consignataire de la
cargaison prend proprement livraison de la cargaison des mains soit du
capitaine soit de l?agent consignataire de navire. Il arrive mrme que l?agent
consignataire de navire et le consignataire de la cargaison soient une seule et
même personne.
L?agent consignataire ne peut se définir que par
rapport aux tches plus ou moins complexes dont il va être investi par son
mandant.
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