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Une expérience d'art thérapie au sein d'établissement pour personne à¢gée dépendante

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par Daisy JOUAUD
Faculté de médecine François Rabelais Tours - Diplôme universitaire d'Art-thérapie 2010
  

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C/ Le bien être des résidents passe aussi par le bien être de l'équipe.

Nous avons principalement abordé la vie en institution sous l'angle de la personne âgée. Il ne faut cependant pas oublier que si cette vie en institution est possible c'est grâce au travail des professionnels. Il convient de s'intéresser aux difficultés qu'ils peuvent rencontrer dans leur travail.

1/ L'équipe de soin peut rencontrer des difficultés

a)- Le contexte de soin au sein d'un EHPAD est particulier

Les "soignants" entendus ici comme étant l'ensemble des aides-soignants(es), des A.M.P., des A.S.H., mais aussi toutes celles et tous ceux qui sont amenés à soigner ou à servir en E.H.P.A.D., ont pour tâche de faire au mieux, pour assurer le bien-être des résidents(es).

Pour les infirmières, les aides soignantes ou auxiliaires de vie, être confrontées chaque jour à la dépendance, à la vieillesse et à la mort est un vrai défi. Cela nécessite des ressources personnelles importantes, une énergie de chaque instant. Le travail est éprouvant physiquement, par des allées et venues continuelles d'une chambre à l'autre, du salon à la salle à manger, par de nombreux transferts de résidents aussi, du lit au fauteuil et du fauteuil au lit, plusieurs fois pas jour, même si ces manoeuvres sont le plus souvent facilitées par des lits médicalisés ou l'utilisation de lève malade. La moindre absence d'un salarié perturbe cette organisation minutée et demande chaque fois au personnel un effort supplémentaire pour satisfaire à l'ensemble des soins exigés.

Le manque de temps, cette course contre la montre, sont souvent évoqués dans les transmissions d'équipe, surtout lors de certaines périodes, ou du fait de l'aggravation de la dépendance de certains résidents, la charge de travail s'accroît considérablement. Au delà d'un travail physiquement pénible, le personnel doit faire face à un travail éprouvant sur le plan psychologique.

b)- Les soignants peuvent souffrir d'un manque de reconnaissance

Dans son quotidien, le personnel est confronté à la dépendance, à la déchéance physique, à la démence, à l'agressivité de certains résidents.

Les soignants absorbent comme des éponges, les angoisses, les souffrances, les moments de déprime, l'agressivité et les délires...ils essaient d'y répondre par de l'attention, de l'écoute de la réassurance. . Ils doivent faire preuve de patience : négocier, discuter, pour un soin, un repas, une prise de médicament. (comme nous avons pu le voir lors de la prise en charge d'Anna).

A ces difficultés s'ajoute le contact quotidien avec les familles parfois exigeantes, agressives, ou angoissées, ce qui demande du temps et de la patience.

Par ailleurs, le décès d'un résident est bien souvent vécu comme une épreuve, après une période de soin ou chacun s'est beaucoup investi, car accompagner la vie jusqu'à son terme ne laisse jamais indifférent.

Le travail en maison de retraite est différent d'un autre service de soin car c'est un lieu de vie où la sortie se solde par le décès. Ce côtoiement avec la mort et la vie retirée avec les résidents entraîne un isolement professionnel qui contraste avec les autres soignants. Pour ces derniers, l'objectif du soin est le retour à l'autonomie alors que l'infirmier de maison de retraite par exemple doit se fixer d'autres buts pour lui permettre de trouver une motivation dans son travail.

Ajoutez à cela les facteurs personnels, ainsi que les facteurs institutionnels (manque de soutien, de reconnaissance, mauvaise communication au sein de l'équipe, rapports hiérarchiques) mais aussi facteurs liés à la spécialité ( charge de travail, répétition des deuils). De plus, les équipes ont à appréhender tout un éventail de profils psychologiques et donc de comportements devenant parfois difficiles à maitriser, à comprendre et à partir desquels il faut s'adapter, et les savoirs construits chaque jours par les soignants ne sont malheureusement pas toujours considérés

c)- La souffrance des soignants peut avoir un impact sur les résidents.

Les personnes âgées transfèrent toutes leurs charges affectives et leurs angoisses sur le personnel qui devient leur seul interlocuteur et on peut déjà mesurer le poids qui incombe aux soignants.

Les soins quotidiens, notamment la toilette ou l'aide aux repas vont créer une sorte de relation parents/enfants. Le risque étant de créer une situation infantile provoquant une situation de régression chez le résident.

Ce rapport de force inversé donne au personnel un pouvoir qui, lorsqu'il n'est pas contrôlé peut conduire à des situations de maltraitance.

2/ Proposons une hypothèse de prise en charge des soignants.

a)- L'équipe soignante est une équipe multiculturelle

Ces derniers temps ont vu se rencontrer dans les équipes, des membres plus anciens et non qualifiés et des effectifs nouvellement diplômés ou nouvellement arrivés.

De plus, il est des différences interculturelles au sein des équipes qu'il est indispensable de prendre en compte

b)- L'art-thérapie peut permettre aux soignants de retrouver un plaisir dans l'activité ainsi qu'une reconnaissance.

Cette hypothèse est principalement axée autour de l'idée de fédérer une équipe et créer du lien par une démarche participative autour d'un projet.

Mettre en place des séances d'art-thérapie de groupe, avec des personnes de diverses qualifications et provenant d'équipe différentes, peut permettre à ces groupes de travailler de façon transversale dans une approche différente, offrant une approche culturelle diversifiée. Cela permettrait au personnel de mieux se connaître et de faire émerger une communication et des relations entre les différentes personnes constituantes du groupe.

Au cours de ces séances, les difficultés rencontrées par le personnel peuvent être mises à l'écart ou abordées librement.

Proposer de l'art-thérapie au personnel peut permettre de décloisonner l'organisation du travail pour créer du lien.

Souvent, une affectation des salariés en binôme par étage est donnée. Mais cette situation peut aussi donner lieu à un manque de communication et de relation avec les autres membres de l'équipe. A travers les séances d'art -thérapie, l'objectif pourrait être de recréer du lien afin de rendre l'équipe plus dynamique et solidaire, et de fait, plus disponible et plus efficace pour les résidents.

L'intérêt de ces groupes étant de rencontrer l'autre, d'apprendre à le connaître hors du contexte de soin. Le personnel devient le temps d'une séance le centre d'intérêt. En leur permettant de partager des expériences autres que les expériences professionnelles, de mettre en commun leur savoir, savoir faire et savoir être.

Puisque mieux connaître l'autre, c'est aussi avoir la possibilité de créer des liens et de développer ainsi une certaine cohésion dans l'équipe.

c)- La mise en place d'un atelier collectif de soignants peut poser quelques difficultés.

Concevoir et mettre en oeuvre ce type de projet nécessite de trouver du temps disponible pour sa mise en oeuvre. Les personnes principalement concernées, à savoir le personnel comme nous l'avons vu plus haut, sont déjà très prises par le temps.

Compte tenu de l'organisation du travail, il serait inenvisageable d'imaginer réduire le temps consacré aux soins en projetant ces séances sur leur temps de travail, ainsi le seul levier d'action serait que le personnel participe à ces séances hors de leur temps de travail. Mais comme nous pouvons le comprendre, ils quittent leur lieu de travail une fois leurs journées terminées. Ainsi, on peut se demander si le personnel accepterait de rester une heure supplémentaire, au sein de l'établissement pour participer aux séances. On pourrait peut être imaginer qu'un lieu extérieur a l'établissement serait plus propice à ce type de projet.

De plus, accepter de participer à ces séances pourrait sembler paradoxal à l'équipe puisqu'ils passeraient du statut de soignant à celui de soignés. Avouant ainsi le passage de la plainte à une demande d'aide et les difficultés qu'il implique.

3/ Proposons l'hypothèse d'un atelier d'art-thérapies de groupe soignants/soignés.

a)- La difficulté des relations humaines au sein de l'institution est une souffrance commune.

Les résidents ont besoins de soin, mais surtout que l'on prenne soin d'eux. Et prendre soin ne s'arrête pas à offrir une prestation de soin, social, hôtelière mais à reconnaître le résident comme sujet dans toute sa singularité. Ainsi, les besoins des résidents ne se portent pas simplement sur des besoins physiologiques, mais aussi relationnels et sociaux.

Les interventions des salariés auprès des résidents leur renvoient une image de leur exercice professionnel souvent dévalorisante et insatisfaisante. Ils enchaînent des toilettes, des changes, des aides alimentaires dans des temps très courts avec des gestes très techniques mais où l'espace relationnel est mis de coté.

Ces deux observations nous permettent de cibler une difficulté inhérente aux deux parties. En effet le manque de relation semble être une souffrance commune.

b)- L'établissement est un lieu de travail pour l'un et un lieu de vie pour l'autre

Il faut noter que le personnel est sur son lieu de travail alors que le résident est dans son lieu de vie.

Bien qu'indissociable, le temps des résidents et celui des personnels ne sont pas de la même nature. Lorsque les uns sont pressés par le temps (pour finir avant 11h les toilettes par exemple) les autres attendent. Les deux parties souffrent de la situation. D'un coté ceux qui patientent et réclament, et ceux qui s'irritent de voir tant d'impatience. La charge de travail du personnel ne peut être augmentée sans affecter le bien être des résidents.

C'est cette valeur accordée au travail du personnel qui constitue souvent le point de rencontre entre le temps des résidents et celui du personnel. Et souvent, leur congé, leur qualité de travailleur, leurs horaires servent de sujet aux résidents (nous avons pu l'observer dans l'étude de cas d'Anna).

Ainsi, le rythme de la vie en institution est plus souvent centré sur l'activité soignante que sur la vie de ses résidents. La journée des résidents est rythmée par le travail soignant sur le déroulement duquel ils n'ont aucune prise.

L'optimisation de la prise en charge est contrainte par l'optimisation du travail soignant.

c)- l'atelier d'art-thérapie offre un espace relationnel

Face aux contraintes techniques, au manque de temps, l'atelier d'art-thérapie offre l'occasion, de développer la relation humaine soignant / soigné.

Parce qu'à l'occasion de ces ateliers, soignants et soignés « travaillent » ensemble, ils construisent une relation faite de complicité et de confiance.

La prise en charge en art-thérapie d'un groupe soignant/soigné pourrait participer à la recherche d'un mieux être, à une amélioration de la qualité de vie au quotidien tant pour les résidents que pour les membres de l'équipe.

En favorisant les échanges par le biais de l'expression créatrice de chacun, l'objectif de ce type de prise en charge serait de tenter de développer un état d'esprit porté par l'ensemble des acteurs de l'établissement, à savoir les résidents et le personnel.

En offrant à chacun la possibilité de se rencontrer dans un autre contexte que celui du soin, en permettant à chacun tout d'abord d'exprimer ou non son choix de participation, du type d'activité, en favorisant l'expression de ses désirs, comme celui de prendre du plaisir pour soi et avec les autres. En finalité, se sentir exister, et, en favorisant des échanges et des transmissions mutuelles fondées sur le plaisir de partager aide à lutter contre le cloisonnement entre ces deux parties qui pourtant cohabitent.

Le contexte d'une prise en charge en commun en art-thérapie apparaîtrait comme une raison, une motivation à cette relation. Le lieu même de l'atelier jouant le rôle de lieu de contact qui permettrait de créer un lien, comme un pont entre les rives qu'ils représentent. .

Si l'acte de soin purement médical ne peut subir cette transgression, le « prendre soin » à travers l'activité et le plaisir partagé, lui, le peu.

L'atelier d'art-thérapie serait en mesure d'offrir un contexte de communication à la fois verbale ou non verbale. L'art et l'art thérapeute jouant le rôle de médiateur.

En effet, à mesure que la personne âgée avance dans la dépendance, elle voit aussi la communication mise en cause.

A travers cette hypothèse de prise en charge, la personne âgée et le personnel se voient offrir la possibilité d'une expressivité accessible .

Le personnel et les résidents n'ont souvent la possibilité de créer une relation que lors des moments clés de la vie du service, à savoir les toilettes, les repas, les soins...

Nous pouvons donc supposer que leur prise en charge en art-thérapie pourrait leur permettre de communiquer autrement, de prendre du temps, de donner du sens autre que médical à leurs actes, de façon à rompre les relations techniques qui lient le personnel aux résidents.

d)- L'équipe de soin se doit de garder une distance avec les patients.

On peut se questionner sur les risques que pourrait présenter une telle prise en charge.

Nous comprenons que l'équipe se doit de garder une distance avec les résidents, et inversement. Cette distance qui correspond à une relation juste que deux individus doivent trouver pour pouvoir se parler.

Les résidents étant déjà en demande d'un rapprochement relationnel avec le personnel soignant, la mise en place d'un atelier commun pourrait mettre le personnel dans une position encore plus vulnérable.

Il se dessine dans ce questionnement une opposition entre une attitude purement déontologique objective, et une attitude où le soignant serait amené à agir au delà de son rôle en tant que personne face à une autre personne et cela sans filet, et sans distanciation mettant le patient et lui même en danger.

e)- La prise en charge d'un groupe soignant/soigné pourrait permettre une meilleure qualité de soin.

Il est évident qu'il y a nécessité d'une collaboration entre les résidents et les soignants, ne serait ce que lors des soins.

La personne âgée doit pourvoir se mobiliser pour aider le soignant, se tourner sur le coté par exemple.

Nous savons qu'une relation de confiance est un élément moteur dans l'acceptation du soin. Hors, en EHPA la communication se met essentiellement en place à travers un échange d'ordre médical.

Ainsi, les résidents et les soignants voyant la possibilité d'entrer en relation dans un autre
contexte , verraient en même temps la possibilité d'engager une forme de confiance entre eux.

Et l'on peut imaginer que cette confiance acquise au sein de l'atelier, serait bénéfique lors des soins.

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"Aux âmes bien nées, la valeur n'attend point le nombre des années"   Corneille