SECTION II : LES
PRINCIPAUX DEFIS DE LA COOPERATION DECENTRALISEE FRANCE - CAMEROUN
La coopération décentralisée entre les
collectivités locales Camerounaises et leurs homologues de l'hexagone
pose de nombreux défis dont les plus importants, nous semble-t-il, sont
la promotion d'un développement local durable assorti des politiques
d'aide au développement (paragraphe 1), la valorisation des
compétences locales à l'échelle national et international
(paragraphe 2).
PARAGRAPHE 1 : LA
PROMOTION D'UN DEVELOPPEMENT LOCAL DURABLE ET LA DEMOCRATISATION DE
L'ADMINISTRATION
A- LE DEVELOPPEMENT LOCAL
DURABLE ET LES POLITIQUES D'AIDE AU DEVELOPPEMENT
Si des modèles comme la démocratie, la bonne
gouvernance ou les droits de l'homme et libertés publiques sont
généralement admis comme des normes universelles, le concept de
"développement local durable" semble s'imposer moins facilement. A la
croisée des chemins de l'économique, l'environnement ou le
social, il est né d'une peur majeure apparue dans les années 1980
dû aux mouvements de surproduction et de surconsommation de telle sorte
que, la gouvernance mondiale s'est mobilisée sur le sujet et plusieurs
sommets dits "de la terre" se sont employés à promouvoir des
mesures de nature à empêcher, sinon retarder le désastre
annoncé. Dans les années 1990, des partenariats plus globaux
à dominante institutionnelle et territoriale, d' « aide
à la gouvernance locale » ou « d'appui
institutionnel » ont émergé et semblent être une
réponse pertinente au défi actuel de l'essor conjoint de la
mondialisation et de la décentralisation. Les collectivités
françaises ne sont pas les seules à être confrontées
à la maîtrise de l'urbain. Tandis que la dimension internationale
du développement des territoires, leur attractivité, le dynamisme
des acteurs socio-économiques deviennent des enjeux majeurs à
prendre en compte dans la promotion d'un développement durable (Santus,
2003 : 21), la promotion du développement local durable dans les
« Suds », modèle élaboré,
affiné et testé au Nord est consubstantielle aux politiques
d'aide au développement ;la coopération
décentralisée se contentant d'être un paravent pour la
construction des balises néolibérales (2) et surtout une nouvelle
politique d'acheminement de l'aide au développement (1).
1) La coopération
décentralisée : une nouvelle recette d'acheminement de
l'aide au développement ?
Dans les pays du Sud où le processus de
décentralisation n'est pas toujours achevé, la coopération
décentralisée revêt un autre sens et semble renvoyer
plutôt à une nouvelle forme d'aide au développement
(Finken, 1996 : 66-67). D'ailleurs, pour Jean-Louis Venard, la
coopération décentralisée s'entend aujourd'hui dans un
double sens : d'une part, les institutions de coopération tendent
de plus en plus à favoriser la mobilisation des collectivités
locales des pays développés au service du développement
urbain en Afrique, en apportant des compléments de financement aux
accords directs passés entre villes du Nord et du Sud, d'autre part,
selon le sens qui lui est donné par la communauté
économique européenne (CEE), la coopération
décentralisée a pour objet de mettre l'aide au
développement directement à la disposition des
collectivités locales du Sud en contournant les administrations
centrales des Etats (Jaglin ; Dubresson, 1993 : 24).
Remarquons tout de même que la coopération
décentralisée peut certes être considérée
comme une nouvelle technologie d'acheminement de l'aide au
développement, mais fétichiser ou naturaliser cette
appréhension de la coopération décentralisée,
reviendrait à faire l'impasse sur tout un jeu de légitimation
réciproque, d'où l'importance de remuer la problématique
suivante : A quoi sert l'aide publique en Afrique ? Qui aide
qui ? Et comment ?
Les gouvernements des grandes puissances le reconnaissent
ouvertement : le propos de l'aide dite au développement n'est pas
d'abord d'assurer le développement des pays pauvres mais de garantir
leurs intérêts dans certaines parties du monde, qu'ils soient
commerciaux, stratégiques ou tout simplement culturels ou politiques
(Brunel, 1997 : 55-56). Dans le cas d'espèce, ce ne sont pas les
pays les plus pauvres qui sont aidés en priorité par la France,
mais ceux qui lui sont le plus utile dans une optique qui est d'abord
clientéliste. Ainsi, parmi les objectifs de l'aide publique, le
développement des pays pauvres n'est pas la première
priorité (Brunel, 1997) ; elle contribue à contrario
à promouvoir la culture néolibérale.
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