1.1.2.2 Enjeux politiques et économiques du
foncier
Un des objectifs des politiques foncières
est de promouvoir un développement économique en permettant un
usage plus productif de la terre. En bonne logique micro-économique,
néoclassique, les gains de productivité issus d'une bonne
politique foncière sont le fruit d'un double processus : à
l'échelle des exploitations tout d'abord, une meilleure
sécurité foncière des exploitants leur garantit le
bénéfice du fruit de leurs efforts et les incite à
investir. En suite, le fait de disposer des titres leur donne accès au
crédit et lève la contrainte en capital ; à
l'échelle régionale. D'autre part, elle facilite la circulation
de la terre qui doit permettre aux agriculteurs qui ont la volonté et la
capacité d'investir dans la terre, d'étendre leurs surfaces, ce
qui accroît la productivité moyenne des terres (d'où
l'importance de lever les imperfections du marché de la terre).
Mais les enjeux d'une politique foncière
ne se réduisent pas aux questions de développement agricole. Le
contrôle de la terre et des ressources est aussi un enjeu de pouvoir.
Historiquement, les législations coloniales sur le foncier et les
ressources naturelles ont été des instruments de
dépossession des communautés locales, à travers
l'immatriculation d'un côté, les politiques forestières ou
de conservation de l'autre. Légitimé par la rationalité
technique et par l'intégration nationale, le contrôle
étatique des ressources fait partie intégrante de la trajectoire
des Etats africains et a souvent été mis au service de la classe
politico-administrative. De ce point de vue, un certain nombre de
caractéristiques fréquemment soulignées des politiques
foncières (les incohérences des politiques et des
législations, le maintien d'archaïsmes coloniaux, l'absence de
décrets d'application des lois votées, etc.) ne relèvent
pas seulement d'une faiblesse administrative de jeunes Etats, elles sont aussi
partie prenante de ces logiques d'accaparement des ressources. (LAVIGNE
DELVILLE P, 1998 : 261).
Un des enjeux importants concerne la
définition du système d'autorité garantissant le
système foncier. En effet, « tout système de
propriété est fondé sur un système
d'autorité. Seule une autorité efficace garantit la mise en
application effective et durable du tissu rationnel des droits et obligations
réciproques qui fondent le système de
propriété ». Dans la logique de nationalisation de la
terre, il s'agissait de remplacer une régulation coutumière par
une régulation administrative ou judiciaire, et donc substituer l'Etat
aux autorités coutumières à la tête du
système d'autorité inhérent à tout système
foncier. La gestion étatique, telle qu'elle a été
pratiquée, est aujourd'hui remise en cause. Les débats sur la
gestion locale des ressources posent la question d'un transfert de pouvoir aux
communautés locales qui ne soit pas que formel (BERTRAND A., cité
par LAVIGNE DELVILLE P, 1998 : 262).
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