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Le conseil constitutionnel et la continuité des services publics au Maroc

( Télécharger le fichier original )
par Anass KIHLI
Université Med premier Oujda - Master en Droit public 2011
  

Disponible en mode multipage

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Université Mohammed Premier

Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales

Oujda

Master : Droit des contentieux à vocation économique

Mémoire pour l'obtention d'un Master en Droit public

Le Conseil constitutionnel et la continuité des services publics au Maroc

Réalisé par : encadré par le professeur :

Anass KIHLI Yahya HALOUI

Jury:

Président : Professeur Yahya HALOUI.

Membres :- Professeur Abdelhak JANATI-IDRISSI.

- Professeur Redouane EL- HAJJI.

- Monsieur Yahya NASRI (Procureur du Roi à la

cour régionale des comptes, Oujda).

Année universitaire: 2010 - 2011

Remerciements

Les expressions de remerciement et de gratitude les plus sincères s'adressent au professeur Yahya HALOUI, pour l'encadrement effectif et engagé du présent mémoire.

Je remercie vivement les membres du jury qui ont accepté d'évaluer ce travail.

Sommaire

Partie I

La constitutionnalité du principe de la continuité des services publics, p 8.

La valeur constitutionnelle du principe de la continuité des services publics, essence et rang dans la hiérarchie des normes, p 9.

Section 1 : Genèse

Section 2 : Les principes à valeur constitutionnelle, rang dans la hiérarchie

des normes et pouvoir normatif du juge constitutionnel

Le principe de continuité des services publics pilier de l'ordre constitutionnel

marocain, p 28.

Section 1 : Le texte constitutionnel et le principe de la continuité

des services publics

Section 2 : Le principe de la continuité des services et la régulation

des pouvoirs publics

Partie II

Le Conseil constitutionnel garant de la continuité des services publics, p 45.

Le Conseil constitutionnel, et la marche de l'institution parlementaire, p 46.

Section 1 : La démission des députés et la continuité des services publics

Section 2 : Vacance de siège et la continuité des services publics

La continuité des services publics et l'exercice du droit de grève, p 66.

Section 1 : Cadre juridique de l'exercice du droit de grève et la position

jurisprudentielle

Section 2 : Un nouveau cadre pour l'exercice du droit de grève en

perspectives

Liste des abréviations

B.O : Bulletin officiel

C.C fr : Conseil constitutionnel français

C.C ma  : Conseil constitutionnel marocain

c. /  : Contre

D.C  : Décision sur la conformité

Fsjes  : Faculté des sciences juridiques économiques et sociales

G.A.J.A  : Grands arrêts de la jurisprudence administrative

J. O : Journal Officiel

L.G.D.J  : librairie générale du droit et de la jurisprudence

R.D.P : Revue de Droit Public

REMARC : Revue Marocaine des Contentieux

REMALD  : Revue Marocaine d'Administration Locale et du Développement

« (En protégeant les libertés), le juriste devient-il un partisan ? Oui, mais un partisan du droit, et d'un droit qui reconnaît à l'homme cette liberté sans laquelle il n'appartiendrait pas à l'espèce humaine »

François LUCHAIRE

(Le conseil constitutionnel, Economica, 1980, p.6)

INTRODUCTION GERERALE

L'intitulé du présent mémoire : Le Conseil constitutionnel et la continuité des services publics au Maroc, est un sujet qui revêt un intérêt particulier. Et cela pour plusieurs raisons. De prime abord pour son caractère inédit, les écrits en la matière sont largement insuffisants. Deuxièmement et c'est le plus important, ce travail s'érige en démonstration juridique ayant pour souci de mettre en évidence l'intérêt que porte la constitution et son instance protectrice, le Conseil constitutionnel en l'occurrence au principe général de la continuité des services publics. Et, enfin, la volonté d'ancrer ce principe dans la pratique des pouvoirs publics, et des institutions étatiques.

Ce travail vise à mettre en exergue la portée dudit principe spécialement dans le droit constitutionnel marocain, et l'ordre juridique de ce pays en général, avec une démarche qu'elle aspire de rendre compte des différents aspects de ce principe : son cadre théorique et ses applications pratiques.

Le service public est un paradigme de la science administrative, ou le doit administratif à la limite, l'inclure dans un contexte d'étude constitutionnelle n'est pas du tout répondu. En effet, dans les deux disciplines susmentionnées, le service public fait partie des notions clefs, voire même l'objet central d'étude. Par contre l'objet du droit constitutionnel est l'étude des institutions politiques, et l'organisation des pouvoirs, c'est la branche du Droit la plus proche de la science politique. Dans le sens matériel le service public se définit comme étant toute activité destinée à satisfaire un besoin d'intérêt général, et qui, en tant que telle, doit être assurée ou contrôlée par l'administration, car la satisfaction continue ne peut être assurée que par elle1(*). De la simple lecture de cette définition, il nous parait que la continuité du service public est inhérente à la fourniture des prestations de celui-ci.

La continuité des services est un principe qui couvre deux aspects, premièrement c'est un droit pour les usagés de bénéficier de manière continue de ses prestations, deuxièmement c'est une obligation pour ceux qui ont la charge de faire fonctionner le service sans rupture, et discontinuité, c'est un principe consacré par la quasi-totalité des sources du Droit, notamment les textes légaux, la jurisprudence, la doctrine, et les principes généraux du droit. La continuité des services publics est une variante du principe de la continuité de l'Etat, supposé exister sans éclipse.

L'intérêt dans le cadre de ce mémoire est de démontrer comment le Conseil constitutionnel marocain, s'inspirant de la constitution, et du bloc de la constitutionnalité, affirme le dit principe via ses décisions, d'une façon qui peut être implicite ou explicite, mais certaine. La continuité des services publics est un principe à valeur constitutionnel, c'est-à-dire un principe général du droit, bien qu'il ne soit pas énoncé de manière expresse, il est reconnu par le Conseil constitutionnel comme s'imposant au législateur2(*). En postulat, on peut dire que c'est un principe qui se trouve dans un rang supérieur à la loi dans l'échelle de la hiérarchie des normes juridiques.

Toute étude portant sur le droit constitutionnel dans un pays donné, ne peut se passer de la nécessité de consacrer même quelques lignes à l'historique, et la nature du constitutionnalisme dans le pays en question. L'intérêt dans ce cadre est de situer l'objet d'étude par rapport à l'ensemble du corpus constitutionnel qui le conditionne, voire qui le détermine.

Au Maroc la culture du constitutionnalisme a vu le jour dans les premières années du vingtième siècle, chose qui s'est manifesté par l'apparition de trois projets de constitutions, qui émanaient toutes d'institutions, ou de personnes non officielles, le premier dénommé projet de constitution de Cheikh Abdel Karim ETARABLESSI 3(*) datant de 1906, le deuxième qui s'est intervenu deux ans après, s'intitule projet de constitution du groupement la voix du Maroc (ÌãÇÚÉ áÓÇä ÇáãÛÑÈ)4(*), le troisième c'est celui de Haj Ali ZNIBER, c'est un projet de constitution qui d'emblée comme les deux susmentionnés, prend en considération le référentiel religieux5(*). Ces trois projets de constitutions n'ont pas abouti à cause de la déconnexion régnante entre les corps de la société, notamment l'élite et les autres franges de la population. En effet, les projets de réforme proposés par l'élite intellectuelle n'ont pas bénéficié de l'adhésion de toutes les sphères de la population. Cela s'explique par le déterminisme des conditions socio-économique qui existaient au Maroc de l'époque, et les répercussions négatives qui se sont reflétaient sur la mise au point d'un projet de société absorbant les aspirations du peuple. On remarque également, que les trois projets sont inspirés de la mouvance constitutionnelle dans l'empire Ottoman, et précisément sa constitution datant de 1876. Ces projets avaient en commun l'incarnation d'un idéal de l'Etat musulman dont le quel la règle de droit s'harmonise avec la Chariâ, cela revient au fait que l'élite de l'époque était de formation théologique.

En 1912 le Maroc signe le protectorat qui le fait entrer dans une ère où il perd sa souveraineté au profit de la France, le pays protecteur. Chose qui a avorté dans la phase embryonnaire toute tentative d'instaurer un constitutionalisme marocain. Aussitôt le Maroc reprend son indépendance qui a pris acte le 2 mars 1956, dès cette date le Roi Feu Mohammed V avait comme préoccupation d'instaurer les bases normatives d'une monarchie constitutionnelle incarnées par une constitution, son discours datant du 8 mai 1958 atteste de cette volonté : « Édifier un régime de monarchie constitutionnelle qui tienne compte de l'intérêt supérieur du pays, et répondre à ses caractéristiques propres, régime permettant l'avènement d'une démocratie authentique s'inspirant à la fois de l'esprit de l'Islam, de l'évolution de notre pays, et traduisant notre volonté de faire participer progressivement notre peuple à la gestion et au contrôle des affaires de l'Etat »6(*).

Une commission constituante a été mise en place, mais son travail n'a pas abouti à cause des divergences des points de vues de ses membres, en 1962 le Roi successeur Feu Hassan II a soumis un projet de constitution au peuple qui l'a approuvé par referendum. Dans ce cadre il n'est pas permis de dresser avec détails les spécificités de cette constitution, et celles qui l'ont succédé aussitôt - la constitution de 1970 et celle de 1972- à cause des aléas de la vie politique, notamment la proclamation de l'état d'exception en 1965. Par contre il n'est pas vain de mentionner que la constitution de 1972 a fait l'objet de deux révisions, la première en 1992, tandis que la deuxième en 1996, en vigueur jusqu'à nos jours7(*), d'emblée c'est ce dernier texte qui fera l'objet de l'articulation analytique du cadre normatif constitutionnel visé dans le présent mémoire.

Avec la création du Conseil constitutionnel en 1994, les objectifs été lancés dés le départ. Le discours du défunt Roi Feu Hassan II les illustre de façon très explicite : «  Par ce Conseil constitutionnel, vous allez inaugurer une nouvelle ère de justice, vous serez appelés à créer une école juridique marocaine en Droit public, et en Droit constitutionnel tout particulièrement »8(*)

Le Conseil constitutionnel, est également une pièce maîtresse dans l'ordre constitutionnel marocain en vertu des prérogatives et compétences dont il est investi en tant qu'organe émetteur de décisions, et créateur de jurisprudence à le pouvoir de contredire le législateur en censurant les lois ! À cet égard une foule d'interrogations s'impose, entre autres : comment un organe tel que le Conseil constitutionnel peut adopter une décision qui peut aller à l'encontre de la volonté du législateur ? La loi n'est pas sensée être l'expression de la volonté générale de la nation ? La souveraineté n'appartient- elle pas à la nation, telle qu'indique l'article 2 de la constitution marocaine ? Les réponses à ces questions apparaissent comme inéluctables afin d'entamer le processus de la présente étude. En effet, dans les démocraties représentatives les représentants de la nation (le parlement), exprime la volonté de celle-ci, néanmoins il arrive dans la vie politique que ce pouvoir soit détenu par une majorité parlementaire dont les aspirations, et les convoitises contredisent les dispositions et les préceptes énoncés par la constitution, de ce fait elle peut légiférer en adoptant des lois inconstitutionnelles, ce qui est communément appelé l'abus de la majorité. L'objectif de mettre en place un organe qui a comme tâche le contrôle de la constitutionnalité des lois et de jouer le rôle du gardien de la constitution, et par ricochet gardien du système politique et son ordre normatif, ainsi que garantir l'équilibre des institutions, et des pouvoirs publics.

Un nombre considérable de spécialistes du Droit constitutionnel décrivent les systèmes politiques dont il est instauré un organe de contrôle de constitutionnalité comme un système politique où gouvernent les juges, mais la véracité d'une telle thèse ne résiste à la pertinence des arguments qui l'a réfutent, les juges n'ont pas l'initiative, ils n'interviennent que lorsqu'ils sont sollicités, la grande majorité des décisions des pouvoirs publics échappe aux contrôle des ces derniers, on peut conclure sur ce point en disant que les juges peuvent retarder, contrarier, gêner mais pas gouverner9(*).

Pour rendre ses décisions, le Conseil constitutionnel puise dans des sources multiples du droit ; des sources écrites telles que la constitution et les lois organiques et ordinaires, ainsi dans des sources non écrites faisant partie du bloc de la constitutionnalité, comme les principes généraux du droit ayant valeur constitutionnelle, dont le principe de la continuité des services publics. Les principes généraux du droit peuvent êtres définis comme étant des sources non écrites du droit, ayant le caractère normatif, et exprimés dans les décisions judiciaires10(*). L'expression à valeur constitutionnelle désigne des principes généraux du droit exprimés constamment d'une manière expresse par la jurisprudence constitutionnelle. Seulement il est très important de dire à cet égard que l'insertion de ces principes dans la construction des décisions juridictionnelles est une manifestation illustrée du pouvoir normatif des juges, c'est-à-dire leur pouvoir des créer la norme de droit, d'ailleurs cette question n'a pas manqué de susciter la polémique dans les milieux d'universitaires s'intéressant aux études de droit à perspectives non juridiques, c'est-à-dire ils s'intéresse à l'étude du Droit non seulement comme étant un ensemble de règles générales, impersonnelles dont les manquements impliquent la sanction, ainsi qu'à leurs applications pratiques, mais à l'étude du Droit comme un fait et une construction sociale impliquant un sens développé de la notion du vivre ensemble, et comme un instrument du pouvoir, dans la panoplie de ses sciences on trouve notamment la philosophie du Droit, la sociologie du Droit et bien d'autres disciplines, dans le contexte d'une introduction il serait impossible de s'adonner davantage à exposer les différents contours de l'idée. En effet, l'introduction joue le rôle d'une porte d'entrée elle énonce le sujet, définie les concepts, dresse la problématique et énonce le plan.

Comme il est susmentionné, le but du présent travail est de rendre compte du souci du juge constitutionnel marocain et sa préoccupation de garantir dans l'ordre juridique marocain et dans la pratique des pouvoir publics l'application du principe de la continuité des services publics. Certes, le dit juge ne le montre pas expressément dans toutes ses décisions se rapportant de prés ou de loin à ce principe mais même dans les fois où sa volonté de garantir le principe en question n'est pas explicite, elle se trouve saisissable dans une sorte d'arrière pensée de sa décision.

Pour ce faire, il convient d'adopter une démarche méthodologique rationnelle, capable de mettre en évidence la véracité et la pertinence de la thèse prônée par le mémoire. Certainement, en matière des sciences sociales dont fait partie la science juridique, l'atteinte d'un aboutissement parfait de la recherche est carrément impossible, car pour la résolution d'un même problème, il peut y avoir des solutions multiples, aussi les sciences sociales ont pour objet d'études des faits et des phénomènes sociaux complexes supposant l'implication de plusieurs facteurs et d'interactions qui sont dans la plupart du temps volatiles, et insaisissables. Mais d'un autre côté cette nuance ne signifie pas pour autant, que les méthodes des sciences sociales manquent de rigueur. Elles impliquent des démarches intellectuelles rigoureuses, et scientifiques, elles prennent la forme des procédures et manières de faire méritant la dénomination de méthode dans le sens le plus élevé du terme.11(*)

Puisque les écrits dans le vif du sujet sont rares, le présent travail aura comme matière de recherche des écrits et des cas appliqués transversaux dont le concours aspire à brasser le sujet, et réalise son raffinement, mais principalement il sera fait usage des décisions d'un organe qui coiffe la structure juridico-politique du Maroc, le Conseil constitutionnel en l'occurrence. La recherche s'articulera sur un noyau central : extraire une lignée jurisprudentielle caractérisant l'importance que porte le juge constitutionnel pour le principe de la continuité des services publics.

L'orthodoxie de rédaction en matière de science juridique impose l'énoncé d'une problématique que l'écrit se propose de résoudre, mais dans le cadre de ce travail la boucle est bouclée, cette tâche a déjà été faite lorsque nous avons exposé le but du travail. Tout de même il n'est pas vain de la reformuler sous forme d'interrogations pour la rehausser davantage : qu'elle est la portée du principe de la continuité des services publics ? Quelle est sa valeur normative ? Comment est-il appliqué et interprété dans les décisions du juge constitutionnel ? Enfin quelles sont ses éventuelles limites ?

Les réponses à ces questions constitueront la construction progressive d'un aboutissement répondant aux ambitions du présent mémoire, tout en gardant omniprésent à l'esprit l'obligation d'objectivité académique, qui se traduit par la faculté de savoir distinguer ce qui est réel, à l'abri de toute idée préconçue, et l'implication personnelle, ainsi la capacité de demeurer neutre et impartial devant les fait, c'est le contraire de la subjectivité12(*). Cela n'exclut pas l'analyse, l'explication, et l'évaluation, pourvu que ça soit appuyé par des arguments solides.

Pour le traitement du sujet nous proposons de diviser le travail en deux parties, la première se dénommera la constitutionnalité du principe de la continuité des services publics, elle sera consacrée à l'étude du cadre théorique du sujet. La deuxième partie aura comme objet de rendre compte de l'application jurisprudentielle dudit principe.

Première partie :

La constitutionnalité du principe de la continuité des services publics

En guise d'une première partie, il est très important d'entamer l'étude par la mise en relief du cadre théorique du principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle. Pour cela, il faudra articuler la démarche sur les circonstances et les « mobiles » jurisprudentiels ayant constitués la matrice de la valorisation du concept. L'exercice sera donc de faire la rétrospective du principe de la continuité des services publics afin de déterminer sa nature juridique, tout en comparent le principe et son application au sein du système juridique marocain, et son modèle d'inspiration : le système français.

Dans une seconde étape, nous nous efforcerons de faire la démonstration ayant pour finalité de dresser la preuve que le constituant marocain était conscient lors de l'élaboration de la constitution, de la valeur réelle et la portée du principe de la continuité des services publics. Pour exposer ce point en bonne et due forme, nous avons jugé opportun de procéder à un dépouillement du texte de la constitution, afin d'en extraire les articles qui ont pour vocation de garantir l'application du principe de la continuité des services publics. Dans le même sens, nous nous pencherons cette fois-ci, sur la tâche de mettre en évidence les orientations du juge constitutionnel marocain en matière d'application dudit principe, et ce, en étudiant l'exemple de deux techniques utilisées par le juge lors de son examen de la constitutionnalité, à savoir ; le déclassement législatif et l'incompétence négative.

CHAPITRE I

La valeur constitutionnelle du principe de la continuité des services publics, essence et rang dans la hiérarchie des normes

La règle générale dans les études juridiques et dans certaines autres disciplines de sciences sociales est de commencer par une clarification terminologique et conceptuelle. Sachant que l'autonomisation des principes à valeur constitutionnelle par rapport à d'autres notions voisines n'est pas encore affirmée définitivement et que l'authentification de la genèse de ce principe et son développement au Maroc sont desservis par la pauvreté du cadre théorique, doctrinal et jurisprudentiel.

Même les spécialistes en la matière (juristes de doctrine et juges constitutionnels) ne peuvent s'épargner de l'erreur de tomber à certaines reprises dans le piège de la confusion. La deuxième difficulté inhérente à l'exercice d'authentification de la genèse de ce principe et son cheminement dans le temps au Maroc, est relative à la pauvreté de son cadre théorique, et davantage pour ce qui est des développements jurisprudentiels et doctrinaux.

Le fait de citer ces difficultés ne vise pas à justifier les négligences et le manque de rigueur dans le traitement de l'objet d'étude, mais d'aviser que nous en sommes conscients, le but était aussi d'intégrer le facteur de la complexité dans l'analyse du sujet.

Ce chapitre visera donc, dans un premier temps de rendre compte de la manière dont le concept de principe à valeur constitutionnelle a été élaboré en France et les étapes dont il est passé. Ainsi, de démontrer comment il a été reçu par le juge constitutionnel marocain. Dans un second volet, nous tenterons d'exposer l'idée selon laquelle l'affirmation des principes à valeur constitutionnelle revient à reconnaître au juge constitutionnel de très larges pouvoirs dans l'interprétation des normes constitutionnelles, voire même leur création pure et simple ; d'où le pouvoir normatif du juge constitutionnel.

Section 1 : Genèse

Sous section 1 : Tissage du concept en France

Avant d'aborder directement le principe de la continuité des services publics, il nous semble qu'il n'est pas fastidieux de revenir à la notion même de principe à valeur constitutionnelle.

La jurisprudence du Conseil d'Etat qui précède même la création du Conseil constitutionnel en France avait relevé un certain nombre de ces principes ; à titre d'exemple on cite : le principe du droit de la défense13(*), la liberté de constituer des associations14(*), et le principe de la continuité des services publics. En effet, dans son arrêt datant du 17 juillet 195015(*) , le Conseil d'Etat reconnaît que les deux principes, respectivement le droit de grève, et le principe de la continuité des services publics ont une valeur constitutionnelle. De ce fait on remarque que la qualification de «valeur constitutionnelle » n'est pas seulement une simple déclaration solennelle de la part du Conseil constitutionnel, mais une donnée que l'on peut qualifié d'objective.

De 1958, date de la création du Conseil constitutionnel, à 1971 le Conseil était quasiment qu'un simple arbitre qui jouait le rôle de régulateur entre l'exécutif et le législatif 16(*), deuxième remarque à propos du travail du Conseil constitutionnel dans cette période qu'elle est non moins importante, c'est que le Conseil lorsqu'il jugeait de la conformité des lois, il ne puisait ses arguments que dans la constitution écrite, écartant ainsi toute autre source, chose qui rendait le pouvoir du juge constitutionnel pour l'interprétation des normes liées au texte de la constitution plus au moins restreint. Le 16 juillet 197117(*), le juge de la haute instance (Le Conseil constitutionnel) rompe avec la période antérieur par l'émission d'une décision révolutionnaire qui posera la pierre angulaire de ce qu'on appellera par la suite le bloc de constitutionnalité18(*).

Ce bloc contient les principes politiques, économiques et sociaux particulièrement nécessaires à notre temps qui sont tirés du préambule de la constitution de 1946, parmi ces principes on trouve : le principe de la liberté de la presse, le droit d'asile et celui de la liberté syndicale...etc. la plupart de ces principes sont considérés comme des droits créance, c'est-à-dire leur accomplissement nécessite une intervention positive de l'Etat et non pas que ce dernier à l'obligation seulement de ne pas y porter atteinte. La deuxième composante est la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, de sa part, citée dans le préambule de 1946, la déclaration a inauguré son entrée dans le bloc de constitutionnalité par la décision du Conseil datant du 27 décembre 197319(*) relative à la taxation d'office. La troisième est composée des principes fondamentaux reconnus par les lois de la république, ceux-là également sont cités dans le préambule de 1946 mais sans être énumérés précisément, ce qui laisse au juge une grande marge pour leur interprétation.

L'exemple phare de ces principes est le principe de la liberté associative qui a fait l'objet de la décision du 16 juillet 197120(*). Une autre composante : les principes à valeur constitutionnelle, qui est d'emblée l'objet du présent mémoire qu'on peut définir comme étant des principes extraits par le juge sans qu'il fait forcément référence à un texte particulier, à titre d'exemple c'est le cas du principe de la continuité de l'Etat et des services publics. Le bloc de constitutionnalité se compose également des objectifs à valeur constitutionnelle, ces objectifs peuvent vider la substance des autres droits et liberté en cas de contradiction, ou au moins ou en cas de conciliation avec eux, pour l'illustration les exigences de l'ordre public peuvent atténuer les libertés individuelles telle que la liberté d'aller et venir21(*). La dernière source est la charte de l'environnement introduite dans le préambule de la constitution de 1958 par la loi constitutionnelle du 1er mars 2005, elle contient certains principes tel que le principe de précaution qui pose l'obligation aux autorités qui ont la charge de prendre les mesures nécessaires pour éviter tout dommage environnemental22(*) .

Dans la décision qui retient notre attention, qui n'est autre que celle du 16 juillet 1971 qui a marqué l'entrée dans une ère nouvelle de la vie constitutionnelle française, celle où le juge puise ses considérants et ses attendus dans des sources autres que la constitution écrite, ce constat nous pousse à poser une question très importante, c'est celle de savoir qu'est ce que cette décision à de particulier ?

Les circonstances générales dont les quelles elle s'est intervenue étaient marquées par le conflit de la guerre froide qui opposait le bloc socialiste au bloc libéral. En France le gouvernement de Jaques CHABAN-DELMAS poursuivait une politique libérale ouverte davantage, son ministre de l'intérieur Raymond MARCELLIN n'économisait aucun effort pour réprimer les agitations gauchistes. Sous l'impulsion du philosophe Jean-Paul SARTRE une association appelée «  les amis de la cause du peuple » fut crée pour le but de prêter main forte au journal dissous qui portait le même nom et qui était un organe du mouvement de la gauche prolétarienne dissous le 27 mai 1970. L'association avait comme obstacle à sa constitution le refus du préfet de police pour délivrer le récépissé, contrariés par l'obstination de l'administration les membres de ladite association saisirent le tribunal administratif de Paris afin que celui-ci annule l'acte administratif, ces derniers ont obtenu gain de cause. En effet, le juge de la légalité estime que la décision du préfet de police été entachée d'un excès de pouvoir. Raymond MARCELLIN tentera de modifier le régime juridique en place en stimulant l'adoption d'un certain nombre de dispositions légales faisant intervenir l'autorité judiciaire dans le processus de constitution des associations, tout d'abord il tente de le faire par décret, mais le Conseil d'Etat consulté sur la question répond par le négatif, une loi était nécessaire selon les dispositions de l'article 34 de la constitution, un projet de modification de la loi de 1909 portant contrat d'association.

Ledit projet de loi fut adopté par l'Assemblée nationale par 373 voix contre 97 et 7 abstentions, le Sénat lui rejette le projet par 129 voix contre 104 et 42 abstentions. Après la formation de la commission mixte paritaire le vote fut confirmé par l'Assemblée nationale, le Sénat maintint son refus le 30 juin par 357 voix contre 100 et 10 abstentions.

Alain POHER président du Sénat décida le lendemain de saisir le Conseil constitutionnel pour lui demander de se prononcer sur la conformité de ce texte à la constitution23(*) , le Conseil rend sa décision le 16 juillet 197124(*) , le verdict été à la faveur de la non-conformité du projet de loi portant modification de la loi de 1901, dans son deuxième considérant il affirme que : « nombre de principes fondamentaux reconnus par les lois de la république et solennellement réaffirmés par le préambule de la constitution , il y'a lieu de ranger le principe de la liberté d'association, que ce principe est à la base des dispositions générales de la loi du 1er juillet 1901 relative au contrat d'associations » de ce qui précède on tire l'idée selon laquelle la liberté d'association est une liberté constitutionnelle, cela en se référant au préambule de la constitution.

Il est très important de mentionner que la valeur constitutionnelle du préambule a fait l'objet de nombreuses controverses au sein de la doctrine depuis 1946. En effet, les partisans de la non reconnaissance de la valeur constitutionnelle du préambule se prévalaient de l'idée selon laquelle en droit positif l'effet normatif ne commence qu'avec la numérotation des articles, mais cette thèse ne tient pas devant la pertinence des arguments des partisans de la valeur constitutionnelle du préambule : « Le fait que le préambule de la constitution se compose à la fois de phrase détachées et l'article premier de la constitution rend inacceptable la thèse selon laquelle la constitution selon le droit positif ne commencerait qu'avec la numérotation des articles » (G. Vedel, Droit administratif, 5éme éd, p.270)25(*).

Il est à préciser également que la décision du 16 juillet 1971 n'est pas la première à valider la valeur constitutionnelle du préambule, le Conseil constitutionnel l'avait déjà fait lorsqu'il rendait sa décision du 19 juin 197026(*) portant sur un traité de la communauté européenne, mais c'est la première fois qu'il le fait à l'égard d'une loi. Seulement la décision en question n'évoque pas la notion de principe à valeur constitutionnelle mais plutôt la notion de principes fondamentaux reconnus par les lois de la république, c'est-à-dire des principes postérieurs à la révolution française faisant l'objet de base à la législation adoptée dans l'ère républicaine27(*). Mais la question qui se pose, c'est de savoir est ce qu'il faut prendre en compte tous les principes reconnus dans la période post-monarchique ? C'est-à-dire depuis la première république. Sur la question Jean RIVERO pense qu'il faut juste prendre en considération les principes reconnus par les lois adoptées à partir de la troisième république, en arguant que cette période a était l'âge d'or des libertés et du libéralisme, bien entendu il faut bien sûr exclure les lois qui portent des restrictions aux droits et libertés, (Jean RIVERO, le Conseil constitutionnel et les libertés, p.181). Par contre le professeur François LUCHAIRE, considère qu'il est inacceptable d'exclure les principes reconnus par la première et la deuxième république , car elles recèlent la reconnaissance d'un certain nombre de principes très importants à savoir le principe d'abolition de l'esclavage contenu dans le décret du 27 avril 1848, l'abolition de la peine de mort en matière de procès politiques ( déclaration du 26 février 1848), la liberté de l'enseignement secondaire ( loi du 15 mars 1850)... le professeur LUCHAIRE établit trois critères pour cerner le concept de principes reconnus par les lois de la république :

1. Il faut que ces lois aient été en vigueur et non abrogées avant 1946.

2. il faut que ces principes soient reconnus par les lois des trois premières républiques.

3. exclure les lois adoptées dans l'ère de la cinquième république, car reconnaître que les lois adoptées dans cette période contiennent des principes à valeur constitutionnelle entraîne ipso facto la reconnaissance du pouvoir constituant au législateur28(*) .

Par sa décision datant du 20/07/198829(*), le Conseil constitutionnel a répondu clairement pour la première fois à cette question. En effet, il a considéré que la reconnaissance d'un principe fondamental ne saurait être dans l'ère monarchique, ni celle de l'empire mais il doit être dans l'ère républicaine avant 1946 ; le Conseil a exclu également les principes faisant l'objet de lois écrites de la cinquième république, en cela il a rejoint l'opinion du professeur LUCHAIRE30(*).

Le bloc de constitutionnalité en France contient des éléments dont l'autonomie des uns par rapport aux autres pourrait apparaître illusoire, surtout en ce qui concerne les principes généraux du droit ayant le caractère constitutionnel31(*). En effet, la jurisprudence du Conseil constitutionnel français, outre la notion de principes fondamentaux reconnus par les lois de la république qui trouvent leurs fondements dans des textes, notamment la constitution de 1958, le préambule de 1946... utilise d'autres principes tels que les principes à valeur constitutionnelle qui son pas liés forcément à des textes écrits.

Certes, la notion de principes fondamentaux reconnus par les lois de la république ne doit pas se confondre carrément avec celle de principe à valeur constitutionnelle, mais les deux notions se recoupent à plusieurs points, dont on peut citer : toutes les deux font partie du bloc de la constitutionnalité, aussi le fait de tracer une frontière entre les deux notions n'est guère une tâche facile , l'une d'elles pourrait facilement incarner l'autre, et la jurisprudence du Conseil constitutionnel ne fait pas le tri. Les expressions telles que «  les exigences de valeur constitutionnelle », « les objectifs de valeur constitutionnelle », « règles ou dispositions de valeur constitutionnelle » sont utilisées par le juge constitutionnel indifféremment dans certains cas, et cela sans qu'il se réfère à un texte particulier, de ce fait le juge constitutionnel impose au législateur des principes qui sont inspirés de l'oeuvre du constituant, mais une partie de la doctrine en essayant de minimiser le problème considère toutes ces appellations comme une seule formule générique, par laquelle le Conseil désignerait les principes généraux du droit ayant valeur ou rang constitutionnel32(*).

Ce qui est important, c'est que cette décision a ouvert la voie pour le Conseil constitutionnel pour qu'il puisse désormais chercher les motifs de ses décisions dans des sources de droit autres que la constitution écrite, également elle a inauguré la constitutionnalisation d'un certain nombre de principes, de ce fait le Conseil constitutionnel a apposé son sceau, en l'occurrence le sceau de la constitutionnalité.

S'agissant du principe de la continuité des services public qui a vu le jour grâce à la jurisprudence du Conseil d'Etat en France, précisément par l'arrêt Dehaene33(*)relatif au droit de grève et ses limites, tout en constatant un vide juridique en la matière, le juge du Conseil d'Etat confie au gouvernement la tâche d'assurer le bon fonctionnement des services publics. Concernant l'institution du principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle, il a fallu attendre la décision du Conseil constitutionnel datant du 25 juillet 197934(*), ladite décision est importante à double sens, premièrement elle consacre le principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle, deuxièmement cette décision conciliât entre deux principes à valeur constitutionnelle.

Pour le moment c'est la première question qui retient notre attention , dans ce sillage le premier considérant de la décision l'affirme expressément et sans équivoque : « ...en ce qui concerne le service public, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d'apporter à ce droit des limitations nécessaires en vue d'assurer la continuité des services publics, tout comme le droit de grève à le caractère d'un principe de valeur constitutionnelle... ». A cet égard une remarque à faire, lorsqu'il déclare le principe de la continuité des services publics comme principe à valeur constitutionnelle, le juge constitutionnel ne s'appuie sur aucune sources de droit à caractère écrit pour motiver sa décision, même la doctrine semble économiser ses efforts pour l'explication de ce fait, pour elle le fait d'ériger le principe de la continuité des services publics en principe à valeur constitutionnel relève de l'évidence.

Outre ledit principe il y'on a d'autres qui ont cette vocation, c'est-à-dire la valeur constitutionnelle dont le juge de la haute juridiction est habitué à faire la parade des arguments pour en affirmer, et réaffirmer le trait sans se lasser ni se préoccuper de la répétition, à titre d'exemple le principe d'égalité qui fait l'objet de plusieurs décisions du Conseil constitutionnel35(*) .

Nonobstant cette remarque il en demeure pas moins que les écrivains de l'ouvrage qui fait rituel chez les constitutionnaliste : les grandes décisions du Conseil constitutionnel on inséré une citation du commissaire du gouvernement GRAZIER sur l'arrêt Dehaene qui démontre habilement la justesse de proclamer le principe de la continuité des services publics comme un principe à valeur constitutionnelle : « admettre sans restriction la grève des fonctionnaires , ce serait ouvrir des parenthèses dans la vie constitutionnelle, et comme on l'a dit consacrer officiellement la notion d'un Etat à éclipses, une telle conception est radicalement contraire aux principes les plus fondamentaux de notre droit public ». Et en ce sens le principe de continuité est incontestablement l'un de ces principes fondamentaux (répliquent les auteurs)36(*).

Dans cette optique on peut pousser plus loin la réflexion on posant la question suivante : en déclarant le principe de la continuité des services publics un principe à valeur constitutionnelle sans le référer directement à une source de droit bien précise, le juge constitutionnel manifeste un pouvoir normatif ? C'est dire sa faculté de créer le droit, un droit élevé au rang constitutionnel, nous tenterons de répondre à ces question dans le chapitre qui portera sur le rang des principe à valeur constitutionnelle dans la pyramide de la hiérarchie des normes, pour le moment il convient d'examiner la portée du principe de la continuité des services publics au Maroc.

Sous section 2 : Enracinement au Maroc

Au Maroc, et dans d'autres pays du Maghreb le juge constitutionnel enregistre une montée en puissance. De par la notoriété dont jouit ses décisions il intervient pour censurer le législateur qui outrepasse les limites de la constitution, il régularise l'action des institutions politiques, protége les droits fondamentaux, voire il entreprend même une juridisation du politique, seulement il reste que la faible culture juridique dans ces pays rend le rôle des instances de contrôle de la constitutionnalité plus au moins isolé des préoccupations majeures de ces société. C'est tout à fait le contraire de ce qui se passe dans les pays d'Europe occidentale où les instances de contrôle de constitutionnalité, requièrent un immense intérêt de la part des masses médias, des observateurs, et des citoyens. À titre d'exemple il suffit de citer les réactions qu'a suscitées la décision du Conseil constitutionnel français sur la taxe carbone37(*) . La juxtaposition d'un tel constat se justifie par la nécessité de situer la position du Conseil constitutionnel dans la donne politique et sociale au Maroc, pour étudier avec justesse cette institution, et sa production (les décisions qu'elle rend).

S'agissant du principe de la continuité des services publics que nous étudions, comme on a vu précédemment il est né en tant que principe à valeur constitutionnelle en France par la jurisprudence du Conseil d'Etat tout d'abord, puis par celle du Conseil constitutionnel, et bien sûr cela s'est effectué avec l'impulsion et l'inspiration du patrimoine juridique antérieur qui s'enracine avec force dans la tradition constitutionnelle Française. Qu'en est-il pour l'application de ce principe au Maroc ?

Tout d'abord il est à dire que dés ses débuts, le Conseil constitutionnel marocain avait fait preuve de son intention de puiser dans des sources de droit à part la constitution écrite. De ce fait, il a essayé de faire parler l'esprit de la constitution, et ce, en allant vers le sens de faire émerger petit à petit un bloc de constitutionnalité. Dans sa décision portant n° 52-9538(*) , le juge constitutionnel avait réaffirmé un principe constitutionnel, sans pour autant aborder de front le concept de principe à valeur constitutionnel, car le principe en question était le principe d'égalité qui fait l'objet de l'article 5 de la constitution. Il dit dans l'un des considérants de la décision : «  Considérant que, les dispositions du premier paragraphe de l'article 125 qui réserve le droit de présenter des objections ou des observations relatives au procès verbaux des séances exclusivement aux groupes parlementaires...transgresse le principe d'égalité contenu dans la constitution ». La doctrine a suivi ce raisonnement en mettant l'accent d'avantage sur le concept de principe à valeur constitutionnelle, sans pour autant de le forger39(*)

Au Maroc, l'apparition de la notion de principe à valeur constitutionnelle a vu le jour pour la première fois dans la jurisprudence du Conseil constitutionnelle par sa décision n° 124-9740(*) lors de son examen de la loi organique n° 31.97 relative à la chambre des représentants. Les principes à valeur constitutionnelle ont été évoqués de manière générale et timide, dans la dernière phrase du dernier considérant de la décision, sans que le juge constitutionnel en précise la portée : « ...Considérant que suite à l'étude de la loi organique n° 31.97, adopté par la chambre des représentants le 17 septembre 1997, conformément aux dispositions de l'article 58 de la constitution, que ses dispositions sont conformes à la constitution, et que rien dans son contenu est contraire à une règle de droit, ou principe à valeur constitutionnelle... » .

La deuxième décision qui a évoqué les principes à valeur constitutionnelle, est celle portant n° 382-200041(*) se rapportant à la loi 15.97 faisant l'objet de code de recouvrement des créances publiques, l'importance de cette décision réside dans le fait quelle aborde les principes à valeur constitutionnelle de manière répétée et en précisant leur objet, contrairement à celle relative à la loi organique n°31.97. En effet, dans un premier temps il est dit dans un considérant : « Considérant que...il doit être (le fait de préciser les cas d'incompatibilité) compatible avec les principes cités par la constitution, et les principes à valeur constitutionnelle ». Puis le juge constitutionnel passe dans un autre considérant à citer en particulier un de ces principe qui est d'emblée l'objet du présent mémoire, le principe de la continuité des services publics, il affirme : «  Considérant que, de surplus à ce qui a précédé, les dispositions soumises à l'examen du Conseil constitutionnel ne précisent pas les sanctions relatives à la déclaration des cas d'incompatibilité, il pourrait être compris du paragraphe susmentionné de l'article 142 qui dispose que « l'incompatibilité est levée après acquittement des créances (de l'Etat )». En effet, cette déclaration est considérée seulement en tant que gèle de l'exercice de la fonction officielle ou élective en attente du paiement des créances publiques, ce qui est contraire au principe de la continuité des services publics ».

Les circonstances de la décision se présentent comme suit : le premier ministre saisit le Conseil constitutionnel par lettre déposée au secrétariat de ce dernier le 15 février 2000 de la loi numéro 15.97 portant code de recouvrement des créances publiques, dont il estime l'inconstitutionnalité de son article 142 qui dispose : « Est réputée en état d'incompatibilité pour l'exercice d'une fonction officielle ou élective, toute personne qui ne s'acquitte pas des créances publiques à sa charge, devenues exigibles en vertu d'un titre exécutoire et qui ne font pas l'objet de contentieux . L'incompatibilité est levée après acquittement des sommes dues. ». Dans sa lettre de saisine le premier ministre développe les arguments suivants :

Ø les membres du gouvernement, les magistrats, et un nombre important des hauts fonctionnaires de l'Etat sont nommés par le roi, ce qui est susceptible de lier les compétences constitutionnelles du souverain.

Ø l'article 142 traite de façon incomplète des cas d'incompatibilité, alors que les cas d'incompatibilité doivent faire l'objet de loi organique, notamment celles relatives à la chambre des conseillers, celle des représentants et du Conseil constitutionnel, cela en vertu des articles 37 et 38 de la constitution.

Pour rendre sa décision le Conseil constitutionnel a suivi un raisonnement qui lui est propre, il a écarté les griefs avancés dans la lettre de saisine du premier ministre. En effet, il a conclu à la censure du législateur en faisant usage de la théorie de l'incompétence négative mise au point par le Conseil constitutionnel français.

Le fondement de la décision qui retient le plus notre attention dans ce cadre est l'emploi de la notion de principe à valeur constitutionnelle à deux reprises, premièrement la haute juridiction en fait usage lorsqu'elle déclare que les citoyens ont droit à l'accès aux emplois publics sans aucune discrimination, et que ce droit fait l'objet d'un principe à valeur constitutionnelle. Deuxièmement, le juge constitutionnel précise que le cas d'incompatibilité dont parle l'article 142, qui d'ailleurs tient lieu d'un gèle de l'exercice de la fonction officielle ou élective et non d'une incompatibilité proprement dite, est de nature à causer une perturbation dans la marche des institutions de l'Etat, chose qui porterait forcément atteinte à la continuité des services publics, qui est un principe à valeur constitutionnelle, déclare la haute instance42(*) .

En somme, le principe de la continuité des services publics est une partie intégrante des sources de droits usés par le juge constitutionnel lors de son examen de la constitutionnalité des lois, depuis la décision 124-97 citée ci-dessus, la notion de principe à valeur constitutionnelle à été citée de manière très fréquente dans la jurisprudence du Conseil. Pour illustrer ce constat nous citons la décision numéro 583-0443(*) portant sur la loi relative à la haute cours de justice, et la décision numéro 586-0444(*) sur l'immunité parlementaire. Ainsi l'existence du principe à valeur constitutionnelle, et davantage le principe de la continuité des services publics est désormais incontestable, la haute juridiction cite désormais ces principes de façon transversale dans ses décisions, et les exemples sont nombreux au point qu'il est difficile de les dresser de façon exhaustive.

De sa part la doctrine constitutionnelle marocaine fait preuve qu'elle est consciente de l'importance de ses principes, mais il faut dire tout de même qu'elle reste figée face à ce concept, elle ne vise pas à ce qu'il parait de consacrer des études qui auraient pour objectif de les rehausser pour mieux les expliquer, ce qui pourrait mettre en avant l'instauration d'une école marocaine de droit constitutionnel, une aspiration qui été celle du Roi défunt Feu Hassan II, qui avait déclaré dans son discours inaugural du Conseil constitutionnel : «  Par ce Conseil constitutionnel vous allez inaugurer une nouvelle ère de la justice, vous serez appelez à créer une école juridique marocaine en Droit public et en droit constitutionnel tout particulièrement. »45(*). Certes, l'arrivée du Conseil constitutionnel a bouleversé très positivement l'ordonnancement constitutionnel marocain notamment par la protection des droits et libertés publiques, mais ce passage du discours montre avec clarté que les objectifs du départ ne sont pas encore atteints.

Chose qui revoie à poser la question suivante : Est ce le Conseil constitutionnel qui n'a pas accomplie sa mission à ce niveau, ou bien c'est les études doctrinales qui font défaut ? La réponse à cette question nécessite une étude propre, mais nous pouvons avancer sans un grand risque d'erreur que les principes à valeur constitutionnelle, et en particulier le principe de la continuité des services publics continue à gagner du terrain dans les écrits des spécialistes, mais le plus important se trouve dans le volet jurisprudentiel du droit constitutionnel. En effet, le Conseil constitutionnel marocain fait des principes à valeur constitutionnelle, et spécialement le principe de la continuité des services publics son cheval de bataille pour censurer le législateur qui outrepasse les dispositions constitutionnelles. C'est un constat qu'il faut nuancer car ce législateur reste au moins en théorie fort par la légitimité que lui procurent les urnes.

Section 2 : Les principes à valeur constitutionnelle, rang dans la hiérarchie

des normes et pouvoir normatif du juge constitutionnel

Après avoir mis en exergue la genèse et l'évolution dans le temps des principes à valeur constitutionnelle opérés pas la jurisprudence, dans cette section nous tenterons de situer les principes à valeur constitutionnelle dans la hiérarchie des normes juridiques. Hans KELSEN, père fondateur du positivisme juridique et du concept de la hiérarchie des normes, définit la norme de droit comme : « Elle  (la norme) exprime l'idée de quelque chose qui doit se conduire d'une certaine façon. Telle est la signification que possèdent certains actes humains qui selon l'intention de leurs auteurs visent à provoquer une conduite d'autrui »46(*).

Le fait de parler du positivisme juridique se justifie par l'évocation de la notion de la hiérarchie des normes, elle est inventée par cet auteur qui s'est efforcé de mettre les fondements d'une science juridique « pure ». Somme toute, la notion de la hiérarchie des normes désigne la cohabitation dans le même système juridique de plusieurs règles de droit de valeurs différentes, ces valeurs se déterminent selon la notoriété et le rang de l'institution, ou l'autorité qui a édicté la norme en question.

Il est à dire également, qu'on ne peut situer le rang des principes à valeur constitutionnelle dans la pyramide de la hiérarchie des normes sans verser dans la réflexion même de façon plus ou moins non approfondie sur le rôle du juge constitutionnel dans leur création et leur interprétation, ainsi sur la légitimité - au niveau académique- de son entreprise.

Nous divisons donc cette section en deux volets, le premier tentera de déterminer le rang qu'occupent ces principes de valeur constitutionnelle dans la hiérarchie des normes juridiques, tandis que le deuxième visera de réfléchir sur le rapport qu'entretient le juge constitutionnel avec ces principes.

Sous-section 1 : Le rang des principes à valeur constitutionnelle dans la

hiérarchie des normes

D'après leur dénomination, ces principes ont la valeur constitutionnelle incontestée, c'est-à-dire ont le même rang que la constitution écrite. De ce fait ils se trouvent dans une position que l'on qualifie de supra législative.

La particularité de ces principes réside dans le fait que seul le Conseil constitutionnel est habilité à les découvrir47(*), donc leur valeur est sauvegardée par ce monopole que détient le Conseil constitutionnel à cet égard. Ce postulat peut être expliqué comme suit : le Conseil constitutionnel est un organe qui coiffe le système dans son ensemble, c'est-à-dire dans ses composants politiques, juridiques et administratifs. Par opposition on ne peut imaginer que les principes à valeur constitutionnelle pourraient êtres générés par un organe inférieur, chose qui ne ferait que dégrader les dits principes.

Que ça soit au Maroc, ou en France le fait que les décisions du Conseil constitutionnel sont imposables à tous (à tous les pouvoirs et à toutes les institutions), revient à dire que ce Conseil est placé au sommet de l'édifice institutionnel de l'Etat, en sa qualité de gardien de la constitution, il ne peut s'acquitter pleinement de sa mission sans une véritable expansion des sources de droit dont il puise les fondements juridiques de ses décisions, d'où l'objet des principes à valeur constitutionnelle48(*). Dorénavant, il est clair que le Conseil constitutionnel surtout celui de la France est une institution dotée de très larges pouvoirs pour l'accomplissement de ses missions.

Pour revenir à la théorie de la hiérarchie des normes afin de mieux l'exposer, le juriste allemand Hans KELSEN pense que l'ordre juridique dans un Etat donné est formé par des règles de droit qui sont connectées entre elles non pas seulement par des liens horizontales (normes du même rang), mais aussi par les liens verticales. C'est-à-dire que l'ordre en question est constitué par des «  couches » de normes dont la relation est régie par le rapport : supérieur/inférieur. Toutes ces règles sont subordonnées à un certain nombre de normes suprêmes formant la constitution.

Dans ce sens la constitution est un ensemble de normes fondamentales qui déterminent entre autres la manière (les procédures), et l'organe qui a la compétence de créer les autres normes juridiques (l'organe législatif). La couche de règles qui est directement subordonnée à l'ordre constitutionnel est la législation. Dans tous les Etats modernes il existe un organe chargé de l'édiction de ce genre de règles (un parlement) qui est en générale sous forme d'assemblée élue dont le rôle principal est d'édicter et produire des règles de droit dénommées lois qui ont en général une qualité supra décrétale. Dans ce sens KELSEN pense que la différence entre la loi décrétée par l'organe législatif, et le règlement (décret, arrêté...) se trouve dans l'aménagement opéré par la constitution, cette dernière octroie la compétence de créer des normes juridiques qui ont le caractère général recélant plus d'importance à une assemblée élue par la nation (le parlement), tandis que la compétence de produire des règles de droit à caractère technique ou exécutif au gouvernement. Mais il se peut bien sûr que la constitution habilite le gouvernement à créer des règles ayant les mêmes traits que la loi, pour la distinction le juriste allemand utilise une terminologie propre à chaque catégorie.

En effet, l'auteur propose d'utiliser l'expression de loi matérielle pour désigner des normes juridiques à caractère général mais qui sont formulées sous forme de règlement, et la terminologie de loi formelle pour désigner des normes ayant les mêmes caractéristiques mais elles sont formulées dans une loi législative. En termes de la pyramide de la hiérarchie des normes, le règlement que l'on peut définir comme étant la manifestation normative du gouvernement se situe en dessous de la loi.

En dessous du règlement, il se trouve les normes infra décrétale qui sont : les décisions juridictionnelles, qui de leur tour créent le droit au niveau individuel, les actes de l'administration qui sont investis d'un pouvoir de commandement, et qui édictent des règles de conduite individuelles et générales, compte tenu que ces règles n'opèrent que dans les limites des compétences matérielles et territoriales de l'administration concernée49(*).

Bien évidemment il arrive que les normes de ladite pyramide tombe dans l'emprise d'un conflit entre elles, mais la règle général dans ce cas est : la norme supérieur l'emporte sur l'inférieur. Un autre cas de figure est également envisageable, c'est le conflit opposant des normes du même rang, dans ce cas c'est la jurisprudence qui est habilitée à « trancher » entre ces normes si l'expression est appropriée. Généralement, elle procède par l'instauration d'un équilibre subtil entre les règles en conflit, elle opère par une sorte de réconciliation entre elle50(*).

On observant ce classement, on décèle l'idée selon laquelle les principes à valeur constitutionnelle ont le même rang dans la pyramide de la hiérarchie des normes que le texte constitutionnel écrit, ils font partie intégrante du bloc de constitutionnalité. Il est incontestable donc que les dits principes ont la force juridique qui leur permet de s'imposer au législateur. D'ailleurs, cette prise de position ne relève pas uniquement de la corroboration d'une opinion doctrinale mais c'est également de l'observation des faits au Maroc comme en France, et c'est forcément le cas dans la quasi-totalité des Etats adoptant un système juridique moderne et positif.

La supériorité des principes à valeur constitutionnelle par rapport aux normes infra constitutionnelles est affirmée et réaffirmée à maintes reprises par le Conseil constitutionnel, un organe qui à l'exclusivité d'interpréter les normes en la matière.

Certes, nous avons inclus dans la démarche de situer les principes à valeur constitutionnelle dans la hiérarchie des normes de droit que la vision de l'école positiviste pilotée par le juriste allemand Hans KELSEN et ses disciples, de ce fait nous avons exclu les partisans des autres écoles, notamment l'école du relativisme juridique, et l'école analytique, mais nous expliquons cela par deux raisons. La première est que les polémiques en la matière est un paradigme qui relève d'une autre discipline qui est la théorie du droit, la deuxième est tout à fait pragmatique, dans la pratique l'école positiviste est l'école du droit triomphante.

Tout de même, il est très important de consacrer quelques lignes à l'un des disciples les plus connus et dont le nom reste intimement lié à KELSEN, et sa théorie qui est basée sur un but et une finalité ultime : la purification de la science de Droit, en l'occurrence c'est Charles EISENMANN. Ce juriste adhère pleinement aux préceptes du positivisme juridique, mais avec moins de rigidité aux exigences de la « pureté ».

En effet, EISENMANN rejoint la prophétie sur la science du Droit qui s'articule tout d'abord sur la nécessité d'instaurer un système juridique ayant comme socle le « normativisme positif », c'est-à-dire un système normatif dont les règles sont positives, autrement dit : indépendantes des sources extérieures, telles que les sources religieuses, philosophiques, idéologiques...etc.

Une chose qui suppose systématiquement des approches et des méthodes analytiques «scientifiques ». À ce sens, la science juridique devrait se mettre à l'égard de tout risque faisant d'elle une conquête des autres sciences sociales, surtout celles qui ont la vocation de lui être voisines, telle que la science politique d'où la satisfaction de l'exigence de la «pureté » de la science de droit.

C'est à ce dernier niveau que Charles EISENMANN contredit son maître et trahit les enseignements de sa théorie. Lui il ne croit pas à la rigidité de la pureté de la science juridique dans le sens de Hans KELSEN, il pense que l'analyse du droit ne peut s'en passer des apports des autres sciences sociales ; notamment, la science politique et la sociologie. Voire, il va plus loin en considérant en quelques sortes, que la science juridique fait partie des science (s) politique (s). De ce fait, il outrepasse la théorie pure du droit de Hans KELSEN et intègre le relativisme juridique51(*).

De ce qui précède, il devient nécessaire d'étudier dans l'étape suivante le rôle du juge constitutionnel, et son pouvoir de créer le droit, particulièrement les principes à valeur constitutionnelle.

Sous-section 2 : Le rôle du juge constitutionnel dans l'interprétation et la

création des normes constitutionnelles

Dés l'aube de son existence, le droit constitutionnel fut l'objet de fixation, et d'attention de toute personne s'intéressant au pouvoir étatique et son aménagement ; notamment les hommes politiques, les juristes et les politologues.

Ce droit est passé par trois étapes majeurs, la première était marquée par le dévouement mystique aux textes c'est ce que le professeur TURPIN le dénomme le temps des obsédés textuels, la deuxième c'est celle où les politologues s'emparent du droit constitutionnel et réclament le monopole de son analyse. Au cours de cette période, la science politique en vogue considérée comme militante avait pris le dessus sur la science juridique en matière d'appropriation de l'étude du droit constitutionnel. Avec la 5éme république en France dont l'apport principal et la création du Conseil constitutionnel, et précisément avec sa décision du 16 juillet 1971 une nouvelle ère a été inaugurée, celle du nouveau droit constitutionnel, en l'occurrence le droit constitutionnel jurisprudentiel52(*).

Cette nouvelle ère est marquée par la montée en puissance du juge constitutionnel, dans ce sens la constitution ne serait que le produit des décisions du juge constitutionnel, cette «dictature » du juge constitutionnel se manifeste par son dépassement des limites du texte constitutionnel. En infirmant les principes à valeur constitutionnelle, voire en les inventant ; le juge constitutionnel peut intervenir dans certaines affaires de la vie publique même que ces principes ne sont pas traitées ou abordées par le texte constitutionnel.

En France, comme au Maroc, de part ces principes et leur montgolfière dénommée bloc de constitutionnalité, le juge constitutionnel procède à la constitutionnalisation de toutes les branches du droit - public et privé- à juste titre nous citons la décision du Conseil constitutionnel marocain n° 580-200453(*) relative à la levée de l'immunité parlementaire en cas de poursuites pénales, à travers laquelle le juge de la haute juridiction entame la constitutionnalisation du droit pénal. Nous citons également la décision de son homologue français n°465-2002 D.C54(*)relative à la loi sur les salaires, au temps de travail et au développement de l'emploi par laquelle le juge constitutionnel français constitutionnalise le droit social.

Par les principes à valeur constitutionnelle, le juge de la loi élargie le champ des normes constitutionnelles et appose le sceau de la constitutionnalité sur des principes généraux du droit pour les élever au sommet de la hiérarchie des normes, et son avatar le bloc de constitutionnalité55(*).

Ce constat peut facilement être confirmé en examinant la jurisprudence du Conseil constitutionnel en matière de libertés fondamentales. Puisque la constitution n'est pas exclusivement une déclaration des droits et libertés, le juge constitutionnel via les principes à valeur constitutionnelle tend à leur donner un caractère constitutionnel, ledit constat est valable pour le juge marocain ainsi qu'à son homologue français.

Les principes à valeur constitutionnelle apparaissent donc comme une création du juge constitutionnel, ce postulat a fait l'objet de controverses au sein de la doctrine constitutionnaliste française. Le débat est divisé entre les tenants de l'idée selon laquelle les principes à valeur constitutionnelle auraient une existence objective inhérente au fonctionnement du système juridique, et ceux qui prônent la thèse avançant que ces principes seraient une manifestation normative du juge constitutionnel, autrement dit se sont une pure création de la jurisprudence du Conseil constitutionnel. A juste titre, Pierre BRUNET pense que les principes à valeur constitutionnelle ne sont pas autre chose qu'une synthèse constructive accomplie par le juge en se basant sur les caractéristiques juridiques d'un milieu donné, il rétorque : « Les principes à valeur constitutionnelle s'imposent au législateur et ne peuvent être modifiés que par le seul constituant. Ainsi, cette thèse prétend-elle se fonder sur la nécessaire unité de l'ordre juridique »56(*).

Quoi qu'il en soit, et outre la question de trancher le débat pour élire une doctrine dominante, le rôle prépondérant du juge constitutionnel soit pour la proclamation des principes à valeur constitutionnel, soit pour leur création pure et simple n'est pas à démontrer.

Dans le système politique français, le Conseil constitutionnel jouit d'une notoriété ennuie, que ce soit pour les medias ou l'opinion publique, c'est un organe déterminant dans l'édifice institutionnel de la France, ce qui fait du juge constitutionnel un acteur principal dans le processus de la fabrication de la loi.

La loi, supposée représenter l'expression générale de la nation, et corollaire de la souveraineté parlementaire ancrée dans la tradition constitutionnelle française jusqu'à l'instauration de la 5éme république en 1958. Ce régime fut pulvériser par la conception juridique et institutionnelle de la 5éme république, notamment par la refonte du système de l'élection du président de la république, et davantage par la création du Conseil constitutionnel ; surtout après la décision du 16 juillet 1971 par laquelle le juge constitutionnel s'est reconnu des compétences plus larges que celles qui lui étaient attribuées au départ.

En effet, le juge de la haute juridiction est un élément clef de la procédure législative, le professeur François LEOTARD dit à ce propos : « le parlement légifère sous l'ombre du Conseil constitutionnel», une expression certes poétique mais très expressive. Pour nuancer le concept de la loi expression de la volonté générale, le juge constitutionnel avance l'idée de la soumission de la loi à la constitution, autrement dit la loi n'exprime la volonté générale que dans le respect de la constitution57(*).

Pour le juge constitutionnel, le dogme de la loi en tant qu'expression de la volonté générale est révolu, il considère que la loi ne tire sa légitimité que de sa conformité à la constitution. De ce fait on déduit que le juge de la loi s'autoproclame un co-législateur à part entière, ce qui nous renvoie à emprunter la citation : «  Les juges du Conseil constitutionnel dissimulent leur pouvoirs de créateurs de normes juridiques derrière le paravent du respect scrupuleux de la constitution »58(*) . Somme toute, les juges s'emparent de la volonté générale !

Au Maroc, la position qu'occupe le juge constitutionnel dans le système juridique et politique ne cesse de croître. En effet, depuis l'instauration du Conseil constitutionnel, le juge de la haute instance dans sa mission de contrôle de la conformité avait pris des décisions habiles et courageuses qui ont bouleversé l'ordonnancement de l'ordre juridique dans le pays. Néanmoins, une partie de la doctrine marocaine considère que le juge constitutionnel au Maroc comme limité dans sa mission par des conditions objectives inhérentes aux spécificités du système politique marocain, que nous dressons comme suit :

1 : L'existence et la consécration constitutionnelle d'une subordination du Conseil constitutionnel au Roi, rendent le rôle du juge constitutionnel en sa qualité de gardien de la constitution facultatif. Le Roi est un acteur principal dans le processus de la production des normes juridiques au Maroc, il préside le conseil des ministres, contrôle le secrétariat général du gouvernement et promulgue la loi. De ce fait il parait inconcevable de dire que le Conseil constitutionnel est le gardien suprême de la constitution.

2 : Dans le système politique marocain, et davantage chez les acteurs politiques, le Conseil constitutionnel est considéré comme un organe qui joue le rôle d'intermédiaire de la consécration juridique des compromis et consensus politiques déjà contractés, nous pouvons illustrer ce constat par la citation de la décision n° 475-200259(*) relative à la loi organique n° 06.02 modifiant et complétant la loi organique relative à la chambre des représentants, par laquelle le Conseil réitère un compromis entre les partis politiques et le gouvernement. Il s'agit de la mise en place d'un cotas de représentation féminine au parlement. C'est une décision du Conseil qui va à l'encontre de l'article 8 de la constitution et le vide de son essence, chose qui impose à croire que notre Conseil constitutionnel privilégie la soumission au dictat des protagonistes politiques habitués des pratiques politiques non formelles canaliser par des voies non institutionnelles, au détriment des dispositions constitutionnelles.

3 : La formation du juge constitutionnel sur le plan socioprofessionnel est quelques fois vectrice d'une autolimitation du juge de la haute juridiction dans son exercice du contrôle de la conformité à la constitution, surtout en matière d'interprétation des normes. Son travail est marqué par un emploi excessif du formalisme, et l'omniprésence de la méfiance qui constitue un arrière plan de la quasi-totalité de ses décisions60(*).

Cette position qui porte un jugement critique sur le Conseil constitutionnel marocain ne fait pas l'unanimité. Certains, pensent que le Conseil constitutionnel marocain en dépit de sa jeune création a participé activement à l'encadrement et la régulation des pouvoirs publics marocains et son apport crucial n'est pas à nier. Ladite doctrine considère les critiques adressées au Conseil qui sont dues à la comparaison trop rigide au model d'inspiration naïves et non fondées61(*).

De manière générale, Le juge constitutionnel se reconnaît un pouvoir très large dans l'interprétation des règles constitutionnelles, il considère ce pouvoir inhérent à l'accomplissement de sa mission. Pour faire parler la constitution, il utilise à cette fin les principes à valeur constitutionnelle. Comme il est indiqué plus haut, ces principes n'ont pas besoin d'être rattachés directement à un texte particulier ; ils sont inspirés de l'esprit de la constitution. Certes, le travail du juge constitutionnel est très constructif à ce niveau, mais ce dernier doit toujours garder à l'esprit l'obligation de se tenir à la constitution, sans verser à son amendement en brèches, ou aller dans le sens de créer une constitution bis62(*).

CHAPITRE II

Le principe de la continuité des services publics pilier de l'ordre constitutionnel marocain

Après avoir mis en exergue la genèse et l'évolution du principe à valeur constitutionnel de la continuité des services publics et la discussion des pouvoirs du juge constitutionnel pour leur édiction et leur interprétation ; il convient pour le moment de souligner l'importance dudit principe dans le fonctionnement du système politique marocain en mesure de son ordre constitutionnel.

Seulement, il est très important de procéder à une clarification terminologique et conceptuelle avant d'entamer le vif de l'exposé du présent chapitre. Notons tout d'abord, comme il a été déjà souligner plus haut que le principe de continuité des services publics et son corollaire le principe de la continuité de l'Etat vont de pair. Ce principe constitue l'essence même de l'existence de l'Etat, nous étudions dans ce sens l'influence dudit principe sur le fonctionnement des institutions politiques au Maroc, et ce, à travers le texte de la constitution et son application jurisprudentielle.

Dans la première section on étudiera le principe de la continuité dans le texte de la constitution en ses deux manifestations : implicite et explicite, il sera procéder à un dépouillement du texte constitutionnel pour en extraire les traits. Tandis que la deuxième section se bornera à mettre en évidence le principe de la continuité des services publics en tant que matrice et instrument du juge constitutionnel pour accomplir une mission qui est la sienne, en l'occurrence la régulation des pouvoirs publics.

Section 1 : Le texte constitutionnel et le principe de continuité des services

publics

La présente section se penchera sur un dépouillement pur et simple du texte de la constitution pour mettre en relief ses articles traitant de la continuité des services publics. Pour une raison méthodologique la section sera divisée en deux, respectivement les articles ayant un rapport avec la continuité des services publics en période normale, et ceux dont l'application est inhérente aux périodes exceptionnelles. L'expression période exceptionnelle n'est pas utilisée dans ce cadre pour désigner l'état d'exception faisant l'objet de l'article 35, elle est employée pour désigner toutes les périodes de la vie politique et constitutionnelle ayant vocation insolite ou furtive qui se démarquent du cours normal.

Sous- section 1 : Le principe de la continuité en période exceptionnelle

Cette catégorie de dispositions juridiques constitutionnelles traite elle aussi de façon directe ou indirecte de la continuité des services publics, mais elle a la particularité de s'efforcer de préserver ladite continuité dans des conditions extrêmes ou exceptionnelles. Dans cette optique intervient l'article 18 de la constitution ; qui pose l'obligation pour tous les citoyens de supporter solidairement les calamités nationales. Sans doute, le constituant a tenu de manière délibérée d'écrire les termes de cet article couverts d'équivoques. En effet, les calamités signifient les catastrophes ou les désastres, se sont des termes génériques qui pourraient couvrir plusieurs sortes de catastrophes, voire les catastrophes de toute nature, et cela dans le but d'élargir la portée de l'article 18. L'obligation pour les citoyens de supporter les calamités nationales suppose également la revitalisation des services publics, qui en périodes exceptionnelles subissent des altérations subtiles, donc la couverture des charges supplémentaires viserait également de garantir la marche et la continuité des services publics.

Nous citons également l'article 35 qui stipule de l'état d'exception, c'est un article fameux qui a fait coulé beaucoup d'ancre. Concernant son rapport à la continuité des services publics, il est important à cet égard pour deux points, le premier réside dans l'expression : « (...) le retour au fonctionnement des institutions constitutionnelles et des affaires de l'Etat... », les affaires de l'Etat ne sont pas uniquement les institutions constitutionnelles mais aussi toutes les activités de la vie publique, ce qui laisse entendre également les prestations de services publics. Deuxièmement, la non dissolution du parlement stipulée dans le deuxième alinéa de l'article 35 impose le maintien d'une partie des compétences parlementaires même dans les périodes d'exception, c'est le droit de regard sur l'activité gouvernementale dont dépend la quasi-totalité des organes de l'Etat fournissant des prestations de service public ; ce droit de regard permettrait aux parlementaires de souligner tout dysfonctionnement et toute discontinuité desdits services.

De sa part l'article 49 qui stipule de l'état de siège qui se traduit dans les faits par la substitution des autorités militaires aux autorités civiles dans tout le territoire national ou seulement dans une partie de celui-ci. L'état de siège est déclarée par Dahir pour un délai qui ne peut dépasser trente jours, toute prorogation de ce délai doit faire l'objet d'une loi, c'est ainsi que sont tissés en substance les termes de l'article 49. La proclamation de l'état de siège à pour vocation de porter atteinte à la bonne marche des services publics, pour ce, le constituant a imposé ce délai. Il semble animé par le souci de préserver la continuité des services publics dont les autorités militaires compétentes en période d'état de siège ne pourraient garantir.

L'article 50, octroie au gouvernement, si l'année budgétaire arrive à sa fin et la loi de finances n'est pas encore votée ou dans le cas où cette loi est soumise au Conseil constitutionnel risquant de dépasser le délai, la possibilité d'ouvrir par décret : « les crédits nécessaires à la marche des services publics, et à l'exercice de leur mission ... ». Ainsi l'Etat continuera de percevoir les recettes, qui sont une condition sine quo non au financement des services publics afin de garantir leur continuité.

L'article 72 stipule de la continuité du service public législatif en cas de dissolution du parlement ou l'une de ses deux chambre par le Roi. Le délai pour organiser des élections ne peut dépasser trois mois, entre temps la fonction législative est exercée par le Roi, une chose qui garantirait la continuité de l'activité législative.

Nous regroupons les articles 73, et 77 pour les étudier ensemble, le premier est relatif à la dissolution d'une des deux chambres du parlement, il impose la règle selon laquelle aucune autre motion de censure ne pourrait intervenir à l'encontre d'une chambre élue après dissolution de sa devancière qu'après l'écoulement d'un délai d'un an de son élection. Cela se justifie par la raison de laisser le temps nécessaire d'un an pour la chambre afin qu'elle met en évidence son travail. Le deuxième (l'article 77) : «...lorsque le gouvernement a été censuré par la chambre des conseillers, aucune motion de censure de la chambre des conseillers n'est recevable pendant un délai d'un an ». Certes, chacun des deux article traite d'un organe particulier ; le premier de l'organe législatif, tandis que le deuxième du gouvernement mais ils poursuivent un intérêt commun celui de la non perturbation du travail des institutions constitutionnelles et garantir la continuité de leur travail et par ricochet la continuité des services publics.

Sous- section 2 : Le principe de la continuité en période normale

L'article premier dans l'aménagement du texte constitutionnel qui traite de la continuité des services publics est l'article 2, qui stipule que la souveraineté appartient à la nation, qui l'exerce directement par voie de référendum et indirectement par l'intermédiaire des institutions constitutionnelles. Par cet article le constituant garantit la constance de l'exercice de la souveraineté par la nation, et ce via les institutions constitutionnelles, le présent article renferme dans ses termes l'assurance de l'exercice continu de la souveraineté. Certes, le dit article traite de la souveraineté de la nation qui peut paraître comme une notion abstraite et vide de tout aspect concret, mais cet article évoque également le fait que ladite souveraineté est exercée de manière constante à travers les institutions constitutionnelles. Nous remarquons à cet égard que le texte constitutionnel donne une importance particulière aux citoyens, dont la volonté est incarnée par la nation. Si on revient aux termes de l'article 2 on conclu que l'exercice effectif de la souveraineté revient à la nation qui le fait directement par référendum, mais puisque la vie publique nécessite la prise des décisions de manière continue, la nation élue les institutions constitutionnelles pour la présenter, et de ce fait il y'a constance et continuité.

Le deuxième article allant dans le même sens est l'article 14 stipulant la garantie de l'exercice du droit de grève, toutefois il laisse à une loi organique le soin d'organiser et de déterminer les conditions dans lesquelles devrait s'exercer ce doit. Ce renvoi à cette loi organique, qui d'ailleurs demeure inexistante laisse entendre que le constituant était animé par le souci de préserver la continuité des services publics. Cette loi devrait organiser la jouissance du droit de grève afin que ce dernier ne porte pas atteinte à la marche continue des services. Concernant le droit de grève et la continuité des services publics, nous nous limitons à ces phrases car le traitement de ce sujet fera l'objet d'un chapitre séparé (chapitre II de la deuxième partie).

De sa part l'article 17 de la constitution, on décèle que le constituant est propulsé par le même souci, c'est-à-dire préserver la continuité des services publics et des institutions de l'Etat. En substance, l'article pose l'obligation pour tous les citoyens de payer l'impôt, bien sûr en fonction de leur capacité contributive, cette obligation est incorporée dans le corps du texte constitutionnel démontre avec pertinence que le constituant a voulu inscrire cette obligation dans le sommet de la hiérarchie des normes afin d'assurer pleinement la couverture des charges de l'Etat et les services publics bien sûr.

L'article suivant n'est autre que le fameux article 19 qui fait objet de statut constitutionnel du souverain, il est stipulé une expression qui retient notre attention : « (le Roi) garant de la pérennité et la continuité de l'Etat... ». Les prestations de services publics demeurent l'oeuvre des institutions étatiques, ce qui laisse croire que parmi les pouvoirs et les prérogatives du Roi est de garantir la continuité des services publics.

L'article 26 : « le roi promulgue la loi dans les trente jours qui suivent la transmission au gouvernement de la loi définitivement adoptée ». Le délai de trente jours pour que le Roi promulgue la loi à pour objet d'assurer le fonctionnement normal de l'activité législative, et éventuellement les services publics en rapport avec la loi à promulguer. Généralement les lois constituent-elles une manifestation de l'expression de l'organe législatif pour assurer l'organisation et l'aménagement d'un secteur donné de la vie en société, ce qui inclut ipso facto les services publics.

L'article 45 qui traite de la loi d'habilitation, par laquelle le parlement octroie au gouvernement la possibilité de légiférer par décret dans un domaine qui relève du champ de la loi. Cette pratique est généralement usée dans les périodes entre les sessions législatives, on décèle de cet article que le constituant marocain a instauré un dispositif qui garantit la continuité du service public législatif. Certes, il peut paraître que l'organe législatif ne constitue guère un service public, mais nous démontrerons le contraire ultérieurement (chapitre II, deuxième partie).

Dans le même sens nous évoquons l'article 47 : « les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi appartiennent au domaine réglementaire ». Il serait impossible que le constituant dresse une liste limitative du domaine réglementaire, une chose pareille serait l'équivalent de provoquer dans la vie constitutionnelle, ou au moins de ne pas prévenir des cas d'incompétence pour le gouvernement et le parlement de légiférer. En effet, en limitant la liste du domaine législatif et ne pas faire autant concernant le domaine réglementaire, c'est-à-dire en laissant la liste de la compétence réglementaire ouverte le constituant a barré la route à tout cas de figure ressemblant à celui que nous avons cité. Somme toute, la continuité de l'activité normative de l'Etat est assurée par la non limitation de la liste du domaine réglementaire.

L'article 51 qui stipule en substance que les modifications que peuvent être apportées par les membres du parlement à la loi de finances ne peuvent en aucun cas porter sur la diminution des ressources de l'Etat ni sur l'augmentation de ses charges. L'objectif ici est de permettre aux institutions de l'Etat y compris bien sûr les services publics de fonctionner normalement et sans rupture et menaces de perturbation, qui serait causée par le manque de ressources, ou augmentation des charges, une chose qui entraînerait inéluctablement un dysfonctionnement, et donc une menace pour la continuité des services publics.

L'article 53 impose un délai de 8 jours pour le Conseil constitutionnel pour proclamer son verdict en matière de déclassement législatif, ce qui témoigne du souci du constituant de prévenir la rupture dans la marche normale des institutions de l'Etat, et des services publics. Un délai plus long ou un délai sine die aurait comme conséquence de provoquer la rupture dans la marche des institutions étatique, qui peuvent êtres prestataire de services publics.

En poursuivant le même objectif, nous regroupons les articles 54 et 55 pour les étudier ensemble. Le premier mis en place un dispositif juridique selon lequel entre les sessions législatives, les propositions et les projets de loi sont envoyés auprès de la commission parlementaire concernée dont l'exercice se poursuit entre les sessions dans l'intervalle des sessions, ce qui laisse entendre que cet article à pour objectif d'assurer la continuité du service public législatif. Le deuxième (l'article 55) poursuit le même objet, en l'occurrence garantir la continuité du service public législatif, et ce par un autre dispositif juridique : le décret loi qui assure l'activité de l'Etat qui consiste à légiférer.

L'article 80 relatifs au Conseil constitutionnel. Le renvoi à une loi organique pour la détermination des modalités de remplacement des membres empêchés, démissionnaires ou décédés en cours de leurs mandats. Ce renvoi poursuit un seul objectif : la continuité de l'institution du Conseil constitutionnel dans le cas d'empêchement de ses membre.

Section 2 : Le principe de la continuité des services et la régulation

des pouvoirs publics

Le terme régulation signifie toute action ou activité qui vise à maintenir dans un état constant le milieu intérieur d'un système ou d'un organisme. Dans le cas de figure qui nous concerne : la régulation de l'activité normative des pouvoirs publics et les institutions politiques par le Conseil constitutionnel, ce dernier joue le rôle d'arbitre usant du juridique pour contrôler l'activité des protagonistes politiques. A force d'exercer de tel contrôle le juge constitutionnel devient de sa part un joueur dans l'échiquier de la rivalité, et la concurrence pour atteindre une position de domination procurant un pouvoir sur les autres : individus et institutions, mais les instruments et les outils dont il fait usage différent de ceux des autres acteurs.

Parler de la régulation des pouvoirs par un organe juridictionnel ou quasi-juridictionnel nous fait inéluctablement revenir au débat traditionnel entre le juridique et le politique, et la question de savoir qui détermine l'autre ? Surtout on est sur un terrain marécageux, le droit constitutionnel en l'occurrence. C'est la branche du droit qui demeure l'objet de revendication de la science politique. Pour l'illustration de l'idée nous citons l'exemple des tentatives de théoriser et de conceptualiser la régulation des pouvoirs publics par le Conseil constitutionnel qui étaient des tentatives plus au moins réussies.63(*) Pour ne pas verser dans la polémique de savoir qui prime sur l'autre pour l'étude de tel paradigme le juridique ou le politique, nous dressons la citation suivante : « Le juridique tient le politique en état, (en ce que) le fonctionnement du système politique dépend désormais de la manière dont fonctionnent un certain nombre de mécanismes juridiques et que l'on ne peut donc expliquer telle ou telle particularité constatée à tel moment sans faire référence à la combinaison et au jeu des règles juridique mais réciproquement, le politique tient le juridique en l'état, car les mécanismes juridiques ne peuvent produire leur effets régulateur qu'autant que subsistent le jeu politique et l'intérêt qu'il confère aux décision du Conseil »64(*).

La régulation en tant que phénomène de la vie politique n'à aucune existence juridique, mais affirmer sa négation pure et simple passe facilement pour de l'obsession pour les textes, personne ne peut nier l'existence des considérants ou des attendus du Conseil constitutionnel visant l'incitation, l'orientation ou la persuasion...etc. De telles pratiques ont pour objectif de sauvegarder le fonctionnement habituel du système ou modeler l'activité des pouvoirs publics pour les rendre conformes à un modèle, qui n'est autre que la constitution, bien sûr en incluant le bloc de constitutionnalité.

Parler de régulation suppose que le modèle est remis en cause par des manifestations nouvelles qui ne s'inscrivent pas dans a logique du système, ces manifestations peuvent être des dépassements de compétence, manquements aux obligations...etc. Donc le Conseil constitutionnel est un élément très important dans l'édifice juridique et institutionnel du pays, il joue le rôle de stabilisateur de l'ordre juridique et politique65(*).

Au Maroc, la fonction régulatrice est reconnue au Conseil constitutionnel, elle est exercée en vertu des articles 48 et 53 de la constitution. En effet, ces deux articles lui octroient la compétence de trancher les différends survenus entre le législatif et l'exécutif, en tranchant la question de tracer les frontières entre le domaine de la loi et celui du règlement, d'ailleurs cette mission est héritée de la chambre constitutionnelle de la cour suprême, devancière du Conseil constitutionnel, ce qui fait du Conseil une instance qui encadre et recadre le politique66(*).

Seulement il est à noter que dans le système politique marocain le Roi jouit d'un statut constitutionnel qui lui permet d'être au dessus des autres institutions, de ce fait il a exercé la mission de régulation des pouvoirs publics durant de longues années, c'est la mission dites arbitrage royal.68(*)

Une partie de la doctrine considère que le Roi, et de part l'article 19 de la constitution et le gardien effectif de la constitution, et que les missions dont il est investi le Conseil constitutionnel ne sont que des délégations du Roi, c'est l'avis notamment du professeur Abderahim ELMANAR ESSLIMI 68(*). Mais en ce qui nous intéresse dans ce cadre c'est que le Conseil constitutionnel est un régulateur des pouvoirs publics, et sa première décision dans ce cadre est celle relative au décret-loi instaurant une taxe sur l'installation des récepteurs des chaînes télévisées par satellites portant numéro 37-9469(*) d'emblée c'est une décision très connue qui a fait l'objet de plusieurs commentaires de doctrine, par laquelle le Conseil constitutionnel a rendu son verdict en donnant gain de cause aux députés qui l'ont saisi. Ce qui est regrettable dans cette décision c'est que la haute instance a raté l'occasion de se prononcer sur le fond, ce constat nous ramène à poser une question qui cible notre sujet et le touche dans son fin fond : le fait que le Conseil ne s'est pas prononcé sur le fond ne s'inscrit pas dans une logique de négociation et de résolution des différends politiques de manière diplomatique ? C'est-à-dire trancher le litige sans désigner ni un gagnant ni un perdant. S'interroger sur la légitimité d'une telle pratique ne relève pas de l'objet du présent mémoire, néanmoins cela nous ait utile dans la mesure où cela se présente comme la preuve tangible que la mission régulatrice fait partie intégrante des attributions du Conseil constitutionnel marocain.

Pour faire le lien entre le principe de la continuité des services publics, en tant que principe à valeur constitutionnelle qui fait l'objet d'étude de ce mémoire et la mission régulatrice du Conseil constitutionnel, nous répartissons la présente section en deux, la première poursuivra l'étude du déclassement législatif et la continuité des services publics, la deuxième sera consacrée à la technique usée par le Conseil constitutionnel lorsqu'il contrôle la constitutionnalité de la loi, dite l'incompétence négative.

Sous section 1 : Le déclassement législatif et la continuité des services publics

Le Conseil constitutionnel joue le rôle de régulateur des pouvoirs publics, notamment entre l'exécutif et le législatif, ainsi entre la majorité et l'opposition. Les alternances au sein du parlement font également l'objet de l'activité régulatrice du Conseil constitutionnel, par laquelle il soumit les ambitions partisanes à la logique de l'ordre juridique et constitutionnel. Ces ambitions nuisibles peuvent être des révisions ou des abrogations à la production normative de la formation parlementaire précédente, bien sûr à but politiste.70(*)

Au Maroc, la relation entre le parlement et le gouvernement n'est pas tout à fait claire et le fait de définir avec précision sa nature n'est pas une chose simple. Nous prenons à titre d'exemple le principe sacro-saint de la séparation des pouvoirs tellement chanté par les politiciens, il se trouve battu en brèches en matière de détermination des ressources financières nécessaires au fonctionnement de l'institution parlementaire. En effet, c'est une compétence de l'appareil gouvernemental, et ce par consécration du Conseil constitutionnel : « Considérant que la chambre des représentants, et celles des conseillers, et vu leur indépendance, elles jouissent de l'attribution de gérer leurs budgets. Par contre elles ne détiennent pas la compétence d'établir les dites indemnités (indemnités de leurs fonctionnaires) en dépit du fait qu'elles sont des services de l'Etat, car l'établissement de ces indemnités est soumis à l'opération d'évaluation et d'intégration dans le cadre de la loi des finances »71(*) .

A partir de ce considérant nous pouvons déduire qu'au Maroc la notion de la séparation des pouvoirs est un concept qui ne renferme pas la plénitude de son sens. D'ailleurs, le Roi incarne un quasi-monopole en ce qui concerne l'exercice des trois pouvoirs, à savoir : le législatif, l'exécutif et le judiciaire ; et les prérogatives dont jouissent les autorités qui ont la charge ne sont que des délégations royales72(*) .

Bien sûr c'est un propos à nuancer, l'admettre tel qu'il est dans un contexte d'écrit universitaire n'est pas admissible, ça serait signe et indice de naïveté. Néanmoins, un discours du Feu Hassan II justifie son inclusion : «  Je l'ai dit et je le répète toujours, en ce qui me concerne en tant que premier serviteur du Maroc, il n'existe pas de séparation des pouvoirs au Maroc, je suis le père de tous, du législateur comme de l'exécutif, je suis père du puissant et père du faible »73(*) c'est un propos du défunt Roi justifié peut être par les conditions politiques de l'époque et qui doit être lu dans son contexte, le juxtaposer en matière de déchiffrement des conditions politiques et sociales d'une époque qui est la notre, ne permet pas de rendre compte de la réalité des choses.

Dans le cadre qui nous intéresse, c'est-à-dire traiter le principe de la continuité des services publics en sa relation avec le déclassement législatif nous commenterons deux décisions du Conseil constitutionnel qui ont opéré dans le sens de changer un texte juridique pris sous forme législative par décret. La particularité de ces deux décisions c'est qu'elles interviennent à l'encontre de textes adoptés dans une période où le Maroc était sous l'emprise de l'article 35 de la constitution qui stipule de l'état d'exception. Le rapport au principe de la continuité des services publics se traduit par le fait que ces deux textes (décrets royaux) étaient pris par le Roi pour assurer la continuité du service public législatif.

La première décision porte le numéro 425-200074(*), sa procédure été déclenchée par une lettre du premier ministre par laquelle il demande au Conseil constitutionnel de changer le décret royal n°65.799 datant du 18 mars 1966 en vertu duquel il est créée une agence centrale de comptabilité des services diplomatiques et consulaires dépendant du ministère des affaires étrangères.

La haute instance a répondu favorablement à la demande du premier ministre en considérant que cette compétence ne fait pas partie de celles reconnues au domaine législatif, et ce en vertu de l'article 46 de la constitution qui dresse une liste limitative des compétences du domaine de la loi. De ce fait le Conseil affirme dans l'un des considérants de la décision : « Considérant qu'en prenant en considération ce qui a précédé, et conformément à l'article 47 de la constitution, les dispositions du décret royal n°65.799 précitées relève de la compétence du règlement... » En dépit de la réponse favorable du Conseil constitutionnel à la demande du premier ministre il a exclu du domaine du règlement les dispositions de l'article 7 dudit décret qui traite du régime des responsabilités des comptables de l'agence centrale de la comptabilité des services diplomatiques et consulaires, car l'établissement d'un tel régime est de la compétence de la loi (le domaine législatif) et cela en vertu de l'alinéa 2 de l'article 46 de la constitution. Pour l'illustration nous insérons le considérant qui traite de la question : « Considérant que les dispositions du premier alinéa de l'article 7 du décret royal en question stipulent de la responsabilité personnelle et pécuniaire des comptables publics, de ce fait ces dispositions sont du domaine de la loi, conformément à la substance de l'article 46 de la constitution » remarquer l'habilité dont a fait preuve le Conseil constitutionnel n'est pas du tout difficile , la haute instance a opéré avec une grande maîtrise, cela est louable pour deux raisons : la première c'est la déclaration que la création de l'agence objet du décret royal est de la compétence du domaine réglementaire, la deuxième c'est l'isolation de l'article 7 dudit décret et son exclusion, car en droit cela relève du domaine de la loi.

La deuxième décision à commenter est celle portant numéro 677-0875(*) , elle intervient dans le même sens de la première, c'est-à-dire changer un décret royal qui revêt la forme législative par un décret du premier ministre relavant du domaine réglementaire. Cette fois aussi c'est le premier ministre qui amorce la procédure par lettre adressée au Conseil constitutionnel à l'encontre du décret royal partant n°65.429 qui institue l'école du complètement de la formation des administrateurs du ministère de l'intérieur. Là aussi le Conseil constitutionnel donne une suite favorable à la demande du premier ministre, le juge de la haute instance applique strictement les dispositions constitutionnelles notamment ; les articles 46, 47, 48, et 61.

Un considérant de la décision précise clairement les motifs du verdict : « Considérant que le décret royal n°65.429 datant du 27 septembre 1965 créant l'école du complètement de la formation des administrateurs du ministère de l'intérieur objet de consultation, il comporte en plus du premier et deuxième article relatifs à la création de l'école et la détermination des objectifs, attendus d'elle contient trois titres, le premier détermine le secteur gouvernemental de tutelle et la précision des rangs des fonctionnaires qui ont la charge de la gérer ainsi la duré de la formation et les conditions de nomination de ses lauréats, le deuxième précise ses programmes pédagogiques et les conditions d'admission, et le règlement déterminant les obligations de ses stagiaires et les membres formant son Conseil, pour le titre trois, il dresse un ensemble de dispositions transitoires ...considérant que les dispositions précitées ne sont que des mesures d'application rentrant dans les compétence de l'autorité gouvernementale conformément à l'article 61 de la constitution ».

Concernant ces deux décisions qui ont fait l'objet de notre commentaire, il est à remarquer que les demandes du premier ministre ayant pour objet de changer des décrets royaux qui sont des textes juridiques qui renferment le caractère législatif, par décrets du premier ministre qui incarnent le règlement est intervenu très tardivement, environ 40 ans après leur promulgation.

En tout état de cause, les décrets royaux ont pour tâche de légiférer pour pallier les insuffisances de la production normative des institutions qui ont la charge. Les décisions du Conseil constitutionnel viennent pour remettre les choses dans l'ordre, c'est le gouvernement qui est compétent de part la constitution pour légiférer dans un tel domaine, de ce fait il est le plus habile à assurer la continuité des services quel gère, car il dispose de l'administration.

Revenant pour le moment, aux dispositions du texte constitutionnel pour débattre de la question du déclassement législatif sous un angle normatif, autrement dit, nous allons nous focaliser sur l'examen de la question de savoir qui domine l'autre, la loi ou le règlement.

Le fait que la liste des compétences de la loi faisant l'objet de l'article 46 de la constitution soit limitée, et celle relative aux compétences du règlement soit ouverte, couvrant ainsi tous les domaines qui ne font pas l'objet du domaine de la loi (article 47) ; ne doit en aucune manière être compris dans un sens, qui, en s'appuyant sur une lecture superficielle des dispositions constitutionnelles, prôner que le domaine de la loi est limité et celui du règlement est large. D'ailleurs cette idée est avancée par un certain nombre d'observateurs, néanmoins sa portée en tant que certitude devrait être nuancée.

Tout d'abord par ce que le domaine de la loi selon ladite liste est de légiférer dans des secteurs qui couvres presque la quasi-totalité de la vie publique, qui selon l'article 46 de la constitution concerne notamment ; la détermination des crimes et délits et leurs sanctions, les procédures civile et pénale, l'aménagement et l'organisation de la jouissance des droits et les libertés publiques...etc. Deuxièmement, les compétences du domaine de règlement autonome, c'est-à-dire le règlement qui crée des effets normatifs indépendamment de la loi, autrement dit, celui qui n'a pas comme objet d'émettre des dispositions relatives à l'application des lois, est très limité, l'expérience le montre clairement. Troisièmement, la loi pourrait s'enfoncer dans le domaine réglementaire pour légiférer sans même aviser le gouvernement, ce dernier ne peut que s'opposer à l'adoption de la loi, qui à ses yeux relèverait du domaine réglementaire (article 53 de la constitution), ou saisir le Conseil constitutionnel afin de changer le texte réglementaire pris sous forme législative par un règlement (article 48 de la constitution)76(*).

La décision portant n° 280-9977(*) confirme cette nuance. En effet, il en résulte que le parlement n'est pas obligé d'appuyer les lois qu'il émit sur des visas. Lorsque le gouvernement aspire à légiférer dans un domaine qui relève en vertu de la constitution de la compétence de la loi, il doit solliciter l'accord du parlement ou l'un de ses organes (les commissions parlementaires permanentes) ; par contre il y'a aucune disposition dans la constitution qui dispose que lorsque le parlement veut légiférer dans un domaine qui relève normalement du règlement doit avoir l'accord du gouvernement ou même de l'aviser. Les dispositions règlementaires prises en forme législative, ne peuvent être changées en en règlement qu'après avis conforme du Conseil constitutionnel. A défaut, elles continuent à être en vigueur jusqu'à que le gouvernement déclenche la procédure devant le Conseil constitutionnel.

La lecture avertie des articles 53 et 48 de la constitution relève que même dans les cas où la loi s'enfonce dans le domaine règlementaire, cela ne constitue guère un vice de compétence78(*)

Sous-section 2 : L'incompétence négative et la continuité des services

L'incompétence négative est une technique usée par le Conseil constitutionnel dans son travail de contrôle de la constitutionnalité des lois, par laquelle il censure l'acte législatif (la loi) n'ayant pas rempli des conditions requises ; c'est-à-dire légiférer en laissant un vide manifeste qui pourrait présenter un dysfonctionnement d'application de la loi en question. On abordera donc cette notion (l'incompétence négative) en faisant le lien entre elle et le principe de la continuité des services publics, pour se faire nous discuterons un ensemble de décisions du Conseil constitutionnel dont il en fait usage pour invalider des lois susceptibles de porter atteinte au principe de la continuité des services publics.

Nous commençons par la décision n° 583-0479(*) relative à la loi organique de la haute cour de justice. Le titre VIII de la constitution dispose en substance que les membres du gouvernement sont responsables des crimes et délits commis dans l'exercice de leurs fonctions, et qu'ils peuvent être mis en accusation par les deux chambres du parlement. La constitution renvoie à une loi organique qui aurait comme objet de déterminer les modalités, les conditions de formation de la dite cour et son fonctionnement. Cette loi fut votée en 2004 mais il comporte un article (art. 11) que le Conseil constitutionnel n'a pas digéré. Cet article soustrait de la procédure de récusation le président de la cours et le président de la commission d'instruction.

L'inconstitutionnalité est prononcée par le Conseil pour motif que cette loi est incomplète pour la raison qu'elle ne comporte pas de dispositions relatives à la procédure de récusation du président de la cours et du président de la commission d'instruction. Même dans les cas où l'on pourrait croire que la procédure applicable aux autres juges de la cours serait applicable à ces deux derniers, la loi resterait incomplète dans la mesure où l'autorité compétente pour recevoir de telles demandes serait le président de la cours, alors c'est une chose qui est contraire aux principes les plus élémentaires relatifs au déroulement des procès, car le président serait juge et partie !

Observant le considérant de la décision qui a fait l'objet de motif de la déclaration d'inconstitutionnalité : « Considérant que l'exception à l'égard des deux présidents, respectivement le président de la cours et celui de la commission d'instruction de la procédure de récusation, bien qu'en comparaison avec les autres juges de la cours qui leurs sont soumis, ils exercent des compétences plus larges dans le travail judiciaire et ils ont des responsabilités déterminantes dans la décision, en plus du fait que cette exception ne se fonde sur aucune justification juridique, elle est donc contraire au principe à valeur constitutionnelle de l'indépendance de la justice. Considérant que l'abondant de cette exception requiert qu'il soit accompagné de la révision des dispositions de la loi organique soumise l'appréciation du Conseil constitutionnel, surtout les dispositions du troisième paragraphe de l'article 12 et de l'article 14 et ce dans le but de créer une complémentarité et une harmonisation entre toutes les dispositions de cette loi, et en ajoutant d'autres dispositions de nature à garantir la continuité de la haute cours dans l'accomplissement de ses missions dans le cas de l'acceptation de la récusation des deux présidents précités ... »

Par ce considérant le Conseil évoque un principe à valeur constitutionnelle pour déclarer l'inconstitutionnalité, c'est le principe de l'indépendance de la justice, mais aussi de manière implicite il évoque le principe de la continuité en considérant que cette loi est incomplète, chose qui porterait atteinte à la continuité de la cours pour ce qui est de la mise en place de procédure pour la récusation du président de la cours et du président de la commission d'instruction80(*).

L'application de cette loi serait en quelque sorte considérée comme une omission du législateur pour prévenir d'un tel cas, c'est ce que la doctrine et la justice constitutionnelles appellent l'incompétence négative. Le principe de la continuité des services publics été l'un des motifs pour prononcer l'inconstitutionnalité.

La deuxième décision que nous commenterons dans ce cadre (n°382-2000)81(*) concerne également la technique de l'incompétence négative, elle est mariée au principe objet du présent mémoire, en l'occurrence le principe de la continuité des services publics. La décision déclare l'inconstitutionnalité à l'encontre d'une loi qui aurait fait l'objet d'un code de recouvrement des créances publiques.

Le législateur ayant pour mobile la bonne foi et la volonté de moraliser la vie publique a inséré en son sein un article (art.142) stipulant : « est réputée en état d'incompatibilité pour l'exercice d'une fonction officielle ou élective, toute personne qui ne s'acquitte pas de créances publiques à sa charge devenues exigibles en vertu d'un titre exécutoire et qui ne font pas l'objet d'un contentieux. L'incompatibilité est levée après acquittement des sommes dues ».

C'est la notion d'incompatibilité qui pose problème, et davantage en ce qui concerne les fonctions électives parlementaires, car conformément à la constitution le régime des incompatibilités est fixé par une loi organique. Deuxièmement, le régime et les modalités de cette «  incompatibilité » ne sont ni déterminés ni précisés, chose qui revoie à dire que le législateur n'a pas exercé la plénitude de sa compétence. Le Conseil constitutionnel, et via son verdict intervient pour protéger le législateur contre lui même82(*) .

Ce qui est appelé communément incompatibilité ne s'agit en fait que d'un gèle des fonctions car l'alinéa 2 de l'article 142 de la loi censurée dispose : «  l'incompatibilité est levée après acquittement des sommes dues » ce qui porterait inéluctablement atteinte en cas d'application de ladite loi au principe de la continuité des services publics, et le Conseil constitutionnel le dit clairement dans sa décision, pour l'illustration nous insérons le considérant traitant de la question : « considérant... que le deuxième alinéa de l'article 142 précité stipulant que « l'incompatibilité est levée après acquittement des sommes dues », peut signifier qu'il résulte de ladite déclaration est une simple suspension de la fonction officielle ou élective jusqu'à l'acquittement des créances publiques, ce qui est contraire au principe de la continuité des services publics » le principe de la continuité des services publics comme étant un principe à valeur constitutionnelle est un instrument au main du juge constitutionnel qui lui sert à censurer les lois à ses yeux inconstitutionnelles, mais il est aussi une finalité dont la consécration est la traduction concrète d'une volonté de l'ancrer de plus en plus dans la pratique des pouvoirs publics.

Conclusion de la première partie

Le principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle a fait sa première apparition dans une décision du Conseil constitutionnel français datant de 1979, très connue pour la réconciliation qu'elle établit entre deux principes à valeur constitutionnelle, respectivement le principe de la continuité des services publics et l'exercice du droit de grève.

Au Maroc il a fallu attendre la décision n° 124-97 pour en consacrer la portée constitutionnelle, même s'elle le fait de façon très timide, de telle sorte que l'on pourrait penser que le juge de la haute instance l'a évoqué inconsciemment, heureusement que cette préposition se voit en perdition du sens au fur et à mesure de la production jurisprudentielle de notre Conseil constitutionnel. La constance de l'évocation du principe de la continuité dans les décisions du Conseil atteste qu'il ne s'est pas infiltré inconsciemment dans la décision 124-97, et que le juge constitutionnel marocain puise ses arguments dans des sources autres que la constitution écrite, ce qui corrobore l'idée d'un bloc de constitutionnalité au Maroc.

La notion de bloc de constitutionnalité suppose ipso facto l'auto-proclamation d'un grand pouvoir par le juge constitutionnel en matière d'interprétation des normes relevant de ce bloc, surtout celles qui ont la vocation non écrite.

Dés fois on se trouve pas uniquement devant une interprétation des ces normes, mais devant une création pure et simple ; c'est une chose qui renvoie à penser que le juge constitutionnel se lance dans une pratique qui frôle et frise la création d'une constitution bis dont il est l'artisan. Quoi que l'on puisse dire sur ce point c'est-à-dire sur le fait de s'interroger sur la légitimité d'une telle pratique, et se questionner sur la notion tellement vulgarisée du gouvernement des juges dont le spectre hante les politiciens.

Nous disons qu'une telle pratique ne peut être que bénéfique pour l'environnement dans le quel le Conseil constitutionnel opère ; surtout s'il s'agit de créations allant dans le sens de la protection des droits et libertés fondamentales, chaque nouveau droit ou une nouvelle liberté sont bons à prendre !

Le texte constitutionnel lui-même est chargé de dispositions juridiques visant à garantir la continuité des services publics et des institutions étatiques en général. Le constituant été donc animé par le souci de consacrer constitutionnellement ladite continuité. C'est un principe qui s'inspire de l'essence même de l'Etat dont la principale caractéristique est la continuité et la permanence. En somme, le principe de la continuité des services publics est inhérent à l'existence de l'Etat.

Deuxième partie :

Le Conseil constitutionnel garant de la continuité des services publics

Après avoir exposé le cadre théorique du principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle, en dressant ses soubassements conceptuels et ses développements opérés par la jurisprudence constitutionnelle dans la première partie. Il convient pour le moment d'expliciter encore plus sa portée, et sa croissante envergure qui ne cesse de s'affirmer et se réaffirmer, et qui continue d'être illustrée via les décisions du Conseil constitutionnel. Le Conseil constitutionnel marocain, et de part l'expérience qu'il a cumulé avec l'écoulement des années de travail, en plus des occasions qui se présentent à lui, pour qu'il puisse intervenir dans les différentes facettes de la vie publique, surtout en ce qui concerne l'institution parlementaire, il n'économise aucun effort pour appuyer ses décisions sur des principes à valeur constitutionnelle et le principe de la continuité des services publics tout particulièrement.

Pour rehausser davantage ce constat, nous proposons d'étudier l'intervention du Conseil constitutionnel vis-à-vis d'un certain nombre d'événements et des pratiques de la vie parlementaire, qui, par leurs natures ; portent, ou sont susceptibles de porter atteinte ou provoquer des altérations à l'application du principe de la continuité des services publics, à titre d'exemple : la démission, et la vacance de siège... (Chapitre I). Par la suite, nous nous pencherons sur l'étude du droit de grève, dont l'exercice non rationalisé comporte les altérations les plus importantes sur le principe objet d'étude (Chapitre II).

CHAPITRE I

Le Conseil constitutionnel et la marche de l'institution parlementaire

Le présent chapitre à pour objet d'étudier le rapport du principe de la continuité des services publics aux cas de figure relatifs à l'institution législative, le parlement. Une chose qui nous met devant l'obligation de démontrer que le parlement est un service public pour rendre légitime leur traitement dans ce cadre. Sans tarder, et parce qu'il y'a pas un avis qui prévaut sur celui du Conseil constitutionnel nous dressons le considérant suivant : « considérant que la chambre des représentants, et celles des conseillers, et vu leur indépendance, elles jouissent de l'attribution de gérer leurs budgets. Par contre elles ne détiennent pas la compétence d'établir les dites indemnités (indemnités de leurs fonctionnaires) en dépit du fait qu'elles sont des services de l'Etat, car l'établissement de ces indemnités est soumis à l'opération d'évaluation et d'intégration dans le cadre de la loi des finances »83(*).

Le considérant ci-dessus est inclus dans une décision du Conseil constitutionnel qui vise à trancher sur la question de savoir si la chambre des représentants et celle des conseillers ont la capacité juridique d'établir leur budget, mais ce que nous jugeons important est l'attestation du Conseil constitutionnel considérant le parlement en tant que service de l'Etat (ãÑÞ ãä ãÑÇÞ ÇáÏæáÉ). Il est vrai que la terminologie de la haute instance utilise l'expression service de l'Etat et non celle du service public, mais nous croyons avec une forte conviction que l'expression du Conseil constitutionnel ne désigne pas autre chose que la notion de service public. Sinon, ça serait quoi un service de l'Etat ?!

Même dans le cas où cette expression (service de l'Etat) signifierait autre chose que le service public, l'étude de ces cas de figure (la démission et la vacance de siège...) dans l'institution parlementaire reste légitime et justifiée, car comme nous l'avons démontré plus haut, l'expression service public est un concept générique qui recouvre un ensemble de notions : continuité des services publics, continuité de l'Etat, continuité des institutions... cela est décelable par la simple lecture des décisions du Conseil constitutionnel en la matière au Maroc, comme en France.

Le présent chapitre traitera la démission des parlementaires, cela en étudiant le régime des démissions en général, et la démission des parlementaires en particulier en s'interrogeant sur la légitimité d'une telle pratique (section : 1). Nous traitons également la vacance de siège au sein du parlement et d'autres pratiques voisines suscitant la vacance, ainsi leurs impacts sur le principe de la continuité des services publics (section : 2), tous cela via les décisions du Conseil constitutionnel.

Section 1 : La démission des députés et la continuité des services publics

Sous-section 1 : Le régime général de la démission

Le régime de la démission dans les fonctions publiques est organisé par le Dahir portant statut de la fonction publique datant du 24 février 1958, et précisément ses articles : 77, 78 et 79. En vertu de ses dispositions la demande de la démission doit être adressée par lettre à l'autorité de nomination, dans laquelle le fonctionnaire exprime sans équivoque sa volonté de démissionner de ses fonctions et non la mise en retraite, la démission ne prend effet qu'à la date de l'acceptation de l'autorité compétente qui doit statuer dans un délai d'un mois. Après l'acceptation de l'autorité compétente la démission devient irréversible, lorsque l'administration refuse la démission pour motif que le fonctionnaire en question fait l'objet d'une poursuite disciplinaire ce dernier peut saisir la commission paritaire qui donnera un avis motivé adressé à l'administration. Le fonctionnaire ayant adressé une demande de démission à l'administration qui quitte ses fonctions avant l'acceptation de l'administration s'expose à des mesures disciplinaires84(*) .

En ce qui concerne les élus de l'institution parlementaire, les modalités de présentation de la démission diffèrent, elles ont une procédure à part. Pour les représentants la procédure se résume comme suit : le député présente sa démission au bureau de la chambre, ce dernier saisit le Conseil constitutionnel pour en faire constater, par la suite la procédure change d'orientation. En effet, après un itinéraire ascendant elle va dans un sens descendant ; le Conseil constitutionnel en informe le président de la chambre des représentants, qui en informe de sa part la chambre dans la première séance qui se présente. Cela conformément à l'article 7 du règlement intérieur de la chambre des représentants, le président de la chambre des représentants est tenu également d'informer le premier ministre de chaque vacance de siège85(*)

Deux remarques à faire à ce propos, premièrement il y'a une pauvreté des dispositions juridiques traitant de la question en dépit de l'importance de l'impact sur la marche des institutions politiques du pays. Deuxièmement, l'article 7 dudit règlement il ne traite pas uniquement du cas de la démission, il traite également de la vacance de siège en cas de décès et annulation des résultats des votes. Un mot à ajouté de surplus : la loi organique relative à la chambre des représentants ne contient pas de dispositions spécifiques à la procédure ou les modalités des demandes, et des constatation des démissions des députés de la chambre des représentants, son article 84 stipule de la vacance de siège de manière générale y compris bien sûr le cas de la démission86(*) .

S'agissant de la chambre des conseillers, la procédure de la démission ne diffère pas de celle de la chambre des représentants, c'est la même en fait, avec un petit artifice juridique de plus ; la disposition traitant des demandes de démissions dans l'intervalle des sessions, dans ce cas le Conseil constitutionnel informe le président de la chambre, qui donne l'ordre de publier la décision au bulletin officiel et en fait part à la chambre dans la premier séance de la session qui suit. La même procédure est applicable aux cas de : décès, et annulation des résultats des votes par le Conseil constitutionnel 87(*) .

Notons eu égard de la comparaison entre le régime de la démission en matière de la fonction publique et celui des mandats des députés de l'institution parlementaire que les fonctionnaires sont assujettis à une procédure plus contraignante par rapport aux parlementaires. En effet, pour être déclarés démissionnaires les fonctionnaires sont tenus d'attendre une réponse favorable de l'administration, qui est généralement assortie d'une date à respecter, car conformément aux dispositions juridiques régissant la matière, la démission ne prend effet qu'à partir de la date fixée par l'administration sous peine que le fonctionnaire quittant son poste avant cette date serait exposé à des peines disciplinaires. Par contre les députés qui restent fort de leur légitimité procurée par les urnes, la démission représente un droit, ils l'exercent en suivant une procédure que nous qualifions d'informative. Le député désirant démissionner informe le bureau de la chambre dont il fait partie, ce dernier saisit le conseil constitutionnel pour faire la constatation de la vacance de siège.

Cela s'explique forcément par la sensibilité que représentent les fonctionnaires pour la marche des services publics, et notamment pour le principe de la continuité. Les services publics sont dans la majorité des cas gérés et mis en marche par des fonctionnaires, d'où la justification des dispositions imposant à ces derniers l'attente de l'expiration du délai fixé par l'administration compétente avant de quitter le poste. Ce sont des mesures légales allant dans le sens de garantir l'application du principe de la continuité des services publics.

La constatation du Conseil constitutionnel est d'un aspect formel, sa compétence en la matière est liée, pour constater la vacance de siège résultant d'une démission le Conseil vérifie juste le volet processuel, et ce en vertu des dispositions de la loi organique relative à la chambre des représentants, et la loi organique relative à la chambre des conseillers. Par sarcasme du sort, réitéré par les textes, notre Conseil constitutionnel a déclaré la vacance de siège suite à des démissions dans un certains nombre de cas à contre coeur, que nous étudions dans le prochain titre.

En effet, le Conseil constitutionnel ne contrôle que la procédure et les modalités de la présentation des démissions, pour l'illustration nous évoquons à titre d'exemple la décision 426-0088(*), connue sous le nom d'AZMANI dans laquelle notre Conseil constitutionnel expose de matière très claire de ce qui entend par la constatation de la vacance de siège : «  Considérant que rien ne démontre dans la lettre de saisine que la demande de démission de Monsieur AZMANI a été enregistrée par le bureau de la chambre des représentants dans ses séances par un procès verbal, et que le président de la chambre des représentants n'a présenté aucun document extrait du procès verbal de la réunion de la chambre des représentants avec sa lettre de saisine qui prouve l'enregistrement de la démission » le Conseil exige des pièces justificatives probantes pour qu'il constate la démission, il se fie pas uniquement à la demande présenté dans la lettre de saisine.

Ce cas d'espèce (la démission de Mr. AZMANI) a bizarrement fait l'objet d'une autre décision, et d'ailleurs ce n'est pas la première fois que notre Conseil statue en bis in idem, mais tout d'abord procédant à l'éclaircissement factuel du cas AZMANI. Comme il a été exposé par le considérant du Conseil constitutionnel la lettre de saisine qui a déclenché la procédure de constatation de la vacance de siège par le Conseil n'a été appuyée par aucune pièce justificative, de ce fait la haute instance a refusé d'en affirmer. C'est que dans une deuxième décision (451-01) 89(*)que le Conseil constitutionnel constate la vacance de siège en motivant par un considérant qui relève les mêmes critères que ceux annoncés dans la première mais avec la forme affirmative, en l'occurrence le contrôle des modalités ( pièces justificatives) et la procédure : « Considérant qu'il ressort du procès verbal de la réunion , du 25 juin 2001, du bureau de la chambre des représentants que la démission datant du premier janvier 2000, de Mr Abdellah AZMANI adressée au président de la chambre des représentants a été examinée dans une réunion par les membres du bureau et qu'elle a été constatée et enregistrée dans un procès verbal, et que par cette procédure du bureau de la chambre dont il a pris toutes les mesures nécessaires pour que le Conseil constitutionnel, déclare le siège, occupé par un élu démissionnaire, vacant » ce considérant traite du procès verbal du bureau de la chambre portant justification de la demande de démission, après il enchaîne avec un autre traitant de la procédure : «  Et considérant que la réunion précitée présidée par le président du bureau n'a connu qu'une seule absence de l'un de ses membres parmi douze la composant, et que la démission de Mr AZMANI , membre de la chambre des représentants élu dans la circonscription d'Aît Baha, a été examinée par tous les membres présents et que la réunion et l'examen se sont déroulés selon une procédure qui est conforme à la constitution »90(*).

Comme nous l'avons évoqué plus haut ce n'est pas la première fois que le Conseil constitutionnel se prononce deux fois sur le même cas d'espèce, mais cette fois-ci dans d'autres circonstances. En effet, il s'agit d'un cas où une députée demande au Conseil constitutionnel un avis consultatif pour savoir est ce que la fonction de directrice générale de la société d'assurance des exportations qu'elle exerce est compatible ou non avec son mandat élective dans la chambre des représentants. Dans sa décision n° 678-08 91(*)avec laquelle il répond à cette demande, le Conseil constitutionnel affirme l'incompatibilité en considérant qu' : «  il ressort des pièces jointes au dossier que la société marocaine d'assurance des exportations que madame Nezha ELHARICHI assume sa présidence générale, l'Etat possède plus de 30% de son capital ce qui rend l'appartenance à la chambre des représentants objet de la consultation incompatible avec ladite fonction dans la société susmentionnée... » Ainsi le Conseil a rendu sa consultation, s'été à Madame ELHARICHI de régulariser sa situation, c'est-à-dire de démissionner de l'une des fonctions qu'elle exerce ; la présidence de la société ou l'appartenance à la chambre des représentants, elle a préféré démissionner de son mandat élective en présentant sa démission, comme l'édictent les dispositions juridiques régissant cette pratique, le président de la chambre des représentants a saisi le Conseil constitutionnel pour qu'il constate la vacance de siège, et il la fait par sa décision n°689-0892(*) : «  Considérant qu'il est à constater la vacance de siège suite à la demande de démission présentée par Madame Nezha ELHARICHI qu'elle occupait un siège à la chambre des représentants... ».

Dans le premier cas d'espèce relatif à Monsieur AZMANI, le Conseil constitutionnel s'est prononcé deux fois sur la même affaire, dans la première décision il refuse de prononcer la vacance de siège pour la raison que les pièces justificatives faisaient défaut, alors que dans sa deuxième décision, il l'a fait car l'autorité de saisine avait rectifiée les insuffisances du dossier. Tandis que dans le deuxième cas concernant Madame ELHARICHI, la première saisine été une consultation, alors que la seconde été une demande adressée par le président de la chambre des représentants pour que le Conseil constate la vacance de siège. Pour le premier nous soutenons l'idée que le Conseil a statué en bis in idem, prohibé en matière judiciaire dans les tribunaux nationaux qu'internationaux par le principe général du droit formulé en latin sous la forme de l'adage no bis in idem. Mais il reste probable qu'en matière constitutionnelle cela n'a pas d'effets néfastes, mais il reste que conformément aux dispositions du dernier alinéa de l'article 81 de la constitution que les décisions du Conseil constitutionnel ne sont passibles d'aucun recours.

Pour le moment il n'est pas fastidieux d'étudier la contexture des décisions du juge constitutionnel déclarant vacant un siège au parlement suite à une démission. Tout d'abord l'entête de la décision dresse la date et le numéro de la décision, avec trois expressions standards à toutes des décisions du Conseil, respectivement : louange à Dieu seul, au nom du Roi et le Conseil constitutionnel après le Conseil se met à mentionner l'autorité, ou les personnes ayant déclenché la saisine, généralement dans la formule suivante : « Après examen de la lettre adressée au secrétariat général du Conseil constitutionnel par ... », l'étape suivante est la mention des visas, c'est-à-dire les textes juridiques et les précédentes décisions du Conseil faisant office de base à la décision, sont dressés de la manière suivante : « Vu la constitution..., Vu la loi organique n° 29.93...Et vu les décisions du Conseil constitutionnel, Et après l'examen du rapport du membre rapporteur et les délibération conformément au droit applicable... ». Par la suite le juge de la haute instance se penche à motiver sa décision, pour l'illustration nous dressons une des formule utilisées : « Considérant que les dispositions du règlement intérieur de la chambre des représentants (ou des conseillers)...Considérant que l'article stipule...Attendu... ». Juste après il y'a le dispositif de la décision qui est toujours précédé par l'expression : par ces motifs dispose, avant de passer au vif de l'objet de la décision : « premièrement, le Conseil déclare la vacance de siège.... Deuxièmement ordonne que la présente décision soit publiée au bulletin officiel ». La dernière étape c'est la mention de la date de la décision et les noms des membres ayant assistés aux délibératoires.

La constatation de la démission des députés sans prendre en considération ses motifs, est considérée par le droit marocain comme un acquis légitime des parlementaires. Comme il a été dit précédemment de manière brève, la procédure des demandes de démissions des parlementaires poursuit l'atteinte d'un objectif purement informatif, puisque l'aboutissement de la procédure est quasi-automatique. Il est à dire également que les dispositions juridiques applicables à la procédure de demandes de démissions traitent au même temps des autres cas pouvant susciter des vacances de siège au sein du parlement à savoir le décès et l'annulation des résultats de vote par le Conseil constitutionnel.

La section suivante aura comme objet d'étudier la notion de la vacance de siège au sein du parlement hormis le cas de la démission bien sûre. Pour le titre suivant il nous semble très important d'examiner la question de la légitimité des démissions parlementaires et d'avantage lorsqu'elles sont présentées pour un objectif de gain « politiste », ou politique pour des raisons de neutralité.

Sous-section 2 : Un parlementaire peut démissionner ?

Avant d'entamer le travail consistant à s'interroger sur la légitimité des démissions parlementaires, il convient de présenter même de façon concise l'essence de la fonction des députés. Tout d'abord nous notons que l'existence de l'institution parlementaire se justifie par un souci majeur, notamment la participation des citoyens à la gestion des affaires publiques. Sans aborder les grands paradigmes des ouvrages de science politique et du Droit constitutionnel en la matière nous résumons par dire que les parlementaires tirent leur légitimité des résultats des suffrages, ils représentent l'électeur dans l'exercice de la souveraineté qui au moins en théorie appartient à la nation, ils édictent des lois de leur tour censé exprimées la volonté générale. Concluons sur ce point par l'insertion de l'article 2 de la constitution marocaine : « la souveraineté appartient à la nation qui l'exerce directement par voie de référendum et indirectement par l'intermédiaire des institutions constitutionnelles », ainsi que son article 36 : « le parlement est composé de deux chambres, la chambre des représentants et la chambre des conseillers, leurs membres tiennent leur mandat de la nation... ».

Pourquoi une telle introduction ? La réponse est tout à fait simple, l'exercice ici est d'étudier la légitimité des démissions parlementaires, donc les juger ; seulement toute tentative d'évaluation, d'examen ou de jugement suppose la comparaison à un cadre référentiel, qui par convention est crédibilisé et admis par tous, ou les membres d'un domaine donné. Autrement dit, nous examinons est ce que la démission d'un parlementaire est en conformité avec ce cadre de référence.

Avant août 2006, jamais au Maroc la démission des parlementaires n'a suscité un tel intérêt par les commentateurs, la presse, et l'opinion publique. Comme nous avons mentionné plus haut les demandes de démissions des parlementaires sont présentées au bureau de la chambre dont ils font partie, après la vacance de siège doit être déclarée par le Conseil constitutionnel. Dans les cas qui retiennent notre attention93(*), et contrairement aux précédents jurisprudentiels du Conseil constitutionnel en la matière, la haute instance qui a les mains liées constate les démissions en exprimant son état d'âme, en l'occurrence une grande amertume !

Un article de doctrine intervenu pour commenter les décisions du Conseil constitutionnel qui tout en déclarant la vacance de siège suite à une série de démissions, exprime le regret de l'avoir fait, n'à pas économiser d'efforts pour blâmer cet acte du juge constitutionnel, en faisant la parade des arguments, et en usant du sarcasme le plus aigu94(*). En effet, l'auteur contredit le juge constitutionnel en deux points, tout d'abord il pense que les parlementaires démissionnaires sont en plein légitimité de l'exercice de leur droit en demandant la démission de la chambre des représentants pour pouvoir se présenter aux élections du renouvellement du tiers des membres de la chambre des conseillers dont l'appartenance offre plus d'opportunités et de perspectives politiques. Deuxièmement, il considère l'expression du juge constitutionnel de sont état d'âme et son regret d'avoir déclaré la vacance de siège suite à une série de démissions comme insensée, car l'attente du Conseil passerait pour « un voeu pieux et inapplicable ».

Pour discuter la véracité et la pertinence de tels propos, nous proposons de les traiter un par un. Dans un premier temps nous abordons la question des « voeux pieux ».

Toutes les décisions susmentionnées contiennent un attendu, d'ailleurs il semble être l'objet du commentaire du professeur de Rabat, il convient de le dresser in texto :

« Considérant que le Conseil constitutionnel est tenu de déclarer la vacance de siège suite à la démission en faisant abstraction de son motif, et ce conformément à l'alinéa premier de l'article84 de la loi organique n° 31.97 susmentionné. Considérant que le Conseil constitutionnel, dont parmi les fonctions est la participation à la régulation de la marche normale des institutions en agissant en conformité à la constitution, ne peut que rappeler que les démissions, qui, par leur nature sont parmi les actes exceptionnels, doivent s'exercer dans certaines limites afin qu'elles ne perturbent pas la marche des institutions constitutionnelles et leur rendement et que la représentation qui est tirée de la nation en vertu de l'article 36 de la constitution est considérée comme fonction et une responsabilité exigeant la confiance, son objet est la participation à l'expression de la volonté générale en vertu de la constitution ».

On reproche donc au Conseil constitutionnel, d'insérer dans ses décisions ce considérant qui reste, qu'on le veuille ou non chargé de souhaits, et des voeux moralisateurs aspirant la rationalisation, voire l'idéalisation du jeu politique. Seulement, une décision de justice quelle soit constitutionnelle, administrative ou autre comme il note le commentateur doit avoir un caractère normative, c'est-à-dire produire des droits et des obligations de manière impérative, deuxièmement elle doit être imposable, en langage juridique elle doit renfermer l'autorité de la chose jugée.

Animé par la volonté de moraliser la vie politique au Maroc, le juge de la haute juridiction constitutionnelle a fait abstraction de toutes ses conditions, qu'il a d'ailleurs l'habitude de suivre à la lettre. En fait le juge constitutionnel marocain est très connu pour son formalisme excessif, qu'à-il arrivé pour qu'il change de d'orientation ? Est ce la crainte de la présentation massive des demandes de démissions ?!

Si on revient aux dites décisions on peut facilement constater que l'expression de l'état d'âme du juge constitutionnel été certes dans le corps des décisions, mais dans les motifs de celles-là et non pas dans le dispositif qui énonce les effets de la décision, donc il n'est pas si aberrant que le juge de notre juridiction constitutionnelle exprime son point de vue parmi les motifs de ses décisions.

Il est vrai que les décisions du Conseil sont imposables à tous, et de ce fait elles doivent être exprimées dans le respect et les limites juridiques pour qu'elles seraient pas inapplicables, chose qui mettrait en cause l'autorité du Conseil stipulée par la constitution, le document dont le rang est le plus élevé dans la hiérarchie des normes. Mais les décisions objet du commentaire respectent tous ces critères dans leurs dispositif, et le considérant en question été un motif parmi d'autres ; et ce n'est pas la première fois que le juge constitutionnel en énumère plusieurs pour enfin prendre compte d'un , ou seulement de certains d'entre eux.

D'un point de vue pragmatique le considérant en question est vecteur de bienfaits, hormis le fait qu'il soit normatif ; il reste utile à deux niveaux, il se pourrait qu'il a joué le rôle des freins, barrant la route à d'autres demandes de démissions dont il est envisageable que leur nombre aurait été exagéré ! Dans un deuxième niveau c'est un clin d'oeil pour le législateur pour attirer son attention afin qu'il adopte des mesures juridiques qui traitent de la question.

S'agissant maintenant de la légitimité de la démission des parlementaires, ou au moins sa convenance aux règles d'éthique, l'article soutient que les parlementaires son dans une situation conforme aux règles juridiques en vigueur, en l'occurrence la loi organique dont la procédure d'adoption requiert l'approbation du Conseil constitutionnel ; ce qui est tout à fait vrai ! Il voit également que leurs démissions mêmes en ayant pour objet de se défaire du siège qu'ils occupent à la chambre des représentants pour se porter candidats aux élections du renouvellement du tiers de la chambre des conseillers. Cette pratique ne constitue pas une trahison des électeurs ? L'auteur de l'article ne le pense pas, il considère que les démissions des parlementaires si discutables soient-elles sont un phénomène moins néfaste pour le rendement des institutions constitutionnelles que la pratique consistant à changer de groupe parlementaire, communément appelée «  nomadisme parlementaire » accepté par le Conseil dans sa décision 213-9895(*).

En tout état de cause, de part le monde il existe un certain nombre d'Etats où la démission des parlementaires est considérée comme un acte interdit, à cet égard nous citons le cas du Royaume Uni, dans lequel le mandat des parlementaires est impératif, ces derniers ne peuvent pas s'en défaire. Mais même dans un Etat appelé le père du parlementarisme l'ingéniosité des protagonistes politiques ne manque pas pour faire diversion et détourné les dispositions juridiques en la matière. En effet, pour démissionner les députés de la chambre des communes intègrent un emploi ou adhère à une fonction incompatible à l'appartenance à la chambre pour qu'ils se fassent déclarés démissionnaires96(*) .

Pour clore ce point, il n'est pas sans utilité d'examiner les propos des députés qui ont fait l'objet des décisions commentées. Monsieur TAHIRI qui a fait l'objet de la décision n° 618-2006 il affirme : « Je ne considère pas ma démission comme une infidélité car le mode de scrutin de liste utilisé lors des élections 2002 engage la responsabilité des programmes des partis et non pas les personnes». De sa part Monsieur KIOUH qui siège à la chambre des représentant depuis 1977, faisant l'objet de la décision n° 622-2006 rétorque : « Il est contradictoire que des jeunes siègent à la Chambre des conseillers alors que les personnes âgées ayant une certaine expérience de la vie et de la politique continuent à la Chambre des représentants», à jouté : le second dans la liste qui lui a succédé à la chambre des représentants après constatation de la vacance de siège par le Conseil constitutionnel est son fils !97(*)

Un député jouissant d'un charisme notoire, ou faisant partie des notables, qui forment la quasi-totalité de la diaspora parlementaire, pourrait présenter sa démission à la chambre des représentants en cédant la place au deuxième sur la liste électorale, comme le cas de Monsieur KIOUH qui cède la place à son fils, et en se faisant élire à la chambre des conseillers par la suite après échéance de son mandat, il peut être une nouvelle fois à la chambre des représentants pour déclencher un nouveau va et vient entre les chambres du parlement !

De nouveau nous reviendrons au fameux considérant mais cette fois pour l'examiner sous l'angle de l'application du principe à valeur constitutionnel objet du présent mémoire, le principe de la continuité des services publics en l'occurrence. Lorsque le juge constitutionnel affirme : « (Les) démissions, qui, par leur nature sont parmi les actes exceptionnels, doivent s'exercer dans certaines limites afin qu'elles ne perturbent pas la marche des institutions constitutionnelles et leur rendement » En considérant les démissions comme des actes exceptionnels de la vie représentative qui doivent s'exercer dans certaines limites, il exprime son souci de garantir la continuité des services. En effet, le juge de la haute instance le dit clairement et met en garde contre les conséquences de la large utilisation de ce droit par les parlementaires (la démission). Ces conséquences sont comme il l'exprime la perturbation de la marche des institutions constitutionnelles et leur rendement.

En usant de ces termes le juge constitutionnel ne voulait que mettre sa crainte en évidence, une crainte du dysfonctionnement de l'organe législatif qui pourrait être causée pas des démissions massives, d'où son intérêt pour l'application du principe de la continuité des services publics, corollaire du principe de la continuité de l'Etat.

Il est vrai que les députés démissionnaires n'ont fait qu'exercer leur droit qui leur ait octroyé par les dispositions juridiques, il s'agit du droit de présenter la démission. Néanmoins la démission devrait rester une faculté pour les députés ayant vraiment un motif justifiant leur acte ; en reprenant les termes de notre juge constitutionnel elle est parmi les actes exceptionnels dans la vie parlementaire, c'est un propos au quel nous adhérons sans réserves dans les cas qui ont fait l'objet de notre commentaire il s'agissait de démissions entrant dans un cadre de stratégies et de tactiques politiques, ce qui est pas à notre sens conforme à l'éthique de la mission et du travail parlementaire. En effet, la mission d'un député exige un engagement complet, et un dévouement pour la chose publique, et davantage une loyauté envers son électorat ; ce qui n'été guère le cas de nos députés démissionnaires.

De ce fait le juge n'a fait que pallier aux carences du système normatif régissant la vie parlementaire. En effet, le système en place manque de rigueur envers certaines pratiques néfastes de la part des parlementaires adeptes de mesquinerie et cupidité politique, à titre d'exemple nous citons le nomadisme politique des parlementaires instaurant une fluctuation des formations des groupes parlementaires. Pis, il nous ait encore plus étonnant la consécration juridique d'une posture maladroite, c'est le cas notamment du désistement en matière de contentieux électoral devant le Conseil constitutionnel, il suffit que l'élu objet de saisine désiste pour que le Conseil barre l'affaire du rôle, normalement l'aboutissement à un jugement sur le fond devrait être d'ordre public : à titre indicatif nous citons une décision du Conseil constitutionnel constatant un tel cas, notamment la décision 787-1098(*) dont le dispositif : « Pour ces motifs...il est attesté que Monsieur Ahmed ELKADIRI, en désistant de sa demande aspirant l'annulation des résultats de vote du 2 octobre 2009 dans le cadre des de l'électorat composée des représentants des communes urbaines du grand Casablanca, dont les résultats ont sécrété les gagnants : Messieurs Hassan BERKAN,Ahmed BOUZIDI et Toufik KAMIL et Madame Farida NIÏMI... »

En pensant que le juge de la haute instance a voulu remédier au vide normatif en la matière en incitant à la moralisation de la vie politique, et la prévention d'un péril incarné par le trouble et la discontinuité de l'institution parlementaire ; notre propos risque lui aussi d'être taxé d'idéalisme qui serait loin de toute réalité. Seulement, loin d'être que des souhaits ou des

« Voeux pieux » il est tout à fait ce qu'implique l'application du droit, notamment la constitution, et son esprit.

Section 2 : Vacance de siège et la continuité des services publics

L'intitulé de cette section peut laisser entendre que la vacance de siège n'est que ce que va être traité, or la démission qui a fait l'objet de la section précédente fait partie intégrante des événements ou des pratiques susceptibles de mettre en cause l'application du principe de la continuité des services publics ; le fait de lui consacrer une section à part, se justifie par l'importance de ses éventuelles conséquences sur la vie parlementaire.

Dans la continuité de notre démarche nous poursuivons l'étude des autres cas de figures qui ont vocation à altérer le principe de la continuité, même de compromettre le fonctionnement de l'institution que de manière relative et dans un cadre temporel limité. Pour une raison méthodologique nous divisons la section en deux, la première traitera les cas de décès et d'incompatibilité, la deuxième étudiera deux autres cas de figure à savoir, l'annulation des résultats de vote et la déchéance parlementaire.

Sous section 1 : Le décès et l'incompatibilité

1) Comme pour la démission le décès des parlementaires provoque une certaine rupture dans le cours normal de la vie parlementaire, même que son impact est très limité, et ce car les décès sont de nature à être limités en ce qui concerne le nombre de personnes qu'ils touchent simultanément dans l'institution parlementaire, sauf cas exceptionnel bien sûr. Néanmoins, nous avons jugé bon d'inclure l'étude des décès dans un cadre qui mit en exergue des pratiques et des événements susceptible de porter des altérations à la marche normale de l'institution parlementaire, et de ce fait au principe de la continuité des services publics ; non pas pour l'ampleur de leurs conséquences sur la vie parlementaire, mais ce choix à pour objectif de mettre en évidence les dispositions juridiques et les mesures mises en place pour démontrer l'intérêt du juge constitutionnel pour le principe de la continuité, autrement dit sa préoccupation pour remplacer le membre défunt pour que le parlement fonctionne normalement, c'est-à-dire avec tous ses membres, le nombre cité par la constitution.

Pour la procédure de remplacement des membres décédés, et précisément la procédure de la déclaration de la vacance de siège à sa suite, nous soulignons que c'est la même procédure applicable en cas de démission et annulation des résultats des votes99(*), avec une petite spécificité : la lettre adressée au Conseil constitutionnel ayant pour objet de demander la constatation de la vacance de siège est présentée soit par le président de la chambre soit par le premier ministre , soit par celui de la l'intérieur. Dés fois par ces trois autorités à la fois, chose qui impose au Conseil constitutionnel de les associer pour trancher le cas par une seul décision, pour l'illustration nous citons la décision n° 632-07100(*) : « Après examen des lettres enregistrées par son secrétariat général, la première datant du 9 mars 2007 venant de la part de Monsieur le président de la chambre des conseillers, la deuxième datant du 21 mars 2007 de la part du Monsieur le premier ministre, et la troisième du 9 avril 2007 adressée par Monsieur le ministre de l'intérieur par lesquelles ils demandent au Conseil constitutionnel de constater la vacance de siège à la chambre des conseillers suite au décès de son occupant, le défunt Ayassidi AKOUMI élu représentant dans le cadre du vote de l'électoral formé par les représentants des collectivités territoriales de la région de Meknès Tafilalt » .

La contexture des décisions du Conseil constitutionnel constatant la vacance de siège suite à un décès d'un parlementaire se présente comme suit : tout d'abord, et c'est d'ailleurs le cas de toutes les décisions du Conseil il y'a l'entête qui comporte le non de l'institution émettrice de la décision ( le Conseil constitutionnel) et le numéro du dossier et la décision, l'expression au nom du Roi, et louange à Dieu seul après il est passé à l'énumération des visa, ensuite les attendus de la décision qui ne sont pas en matière de constatation de la vacance de siège suite à une démission nombreux, ils se limitent à un ou deux ; on passe par la suite au dispositif qui en général comporte deux «  articles » le premier constate la vacance de siège, tandis que le deuxième est relatif à la publication et sa notification aux parties avant de passer aux signatures.

En répertoriant les décisions du Conseil constitutionnel en la matière on est vite conquis par le sentiment de la monotonie à cause du caractère répétitif de la forme et des termes utilisés, mais on est guère en droit de blâmer notre juge constitutionnel, lui aussi il semble agacer d'opérer sur de tels cas, et ce à cause de ce qu'on vient d'énoncé. Cette monotonie est imputable à la nature de ce genre d'affaires dont les décisions qui ont résultent prenne la forme d'une tâche administrative de routine à cause de l'absence du facteur contentieux. Seulement il existe certaines affaires qui démentissent le précédent constat, c'est l'exception qui confirme la règle. La première décision porte le numéro 612-05 100(*) dont les faits se résume comme suit : un candidat dans la liste électorale dénommé «  Alizdihar » (la prospérité) Ali IKKEN saisit le Conseil constitutionnel pour l'annulation de l'arrêté du gouverneur de Taounat appelant Mr Abdessalam AHADOUCH à occuper le siège vacant à la chambre des conseillers suite au décès de Mr Abdelkader ERAIS, le demandeur se crois en droit d'occuper le siège car même s'il fait plus partie de l'électorat représentant les collectivités territoriales en moment de la vacance de siège, il s'accroche à l'idée selon laquelle il considère avoir un droit acquis car il en faisait partie lors des élections, le Conseil constitutionnel déboute sa demande en affirmant que Mr Abdessalam AHADOUCH est en plein droit d'occuper le siège, mais avant il dit dans son dernier considérant: « Considérant que l'éligibilité est d'ordre public, donc il est écarté d'appeler une personne dont elle en jouit plus, le demandeur en l'occurrence pour occuper le siège vacant à la chambre des conseillers, et ce après examen du Conseil constitutionnel. Néanmoins il est à noter que l'autorité chargée de recevoir les demandes de candidature n'a pas suivi les dispositions juridiques et les procédures en vigueur stipulées par le premier alinéa de l'article 53 de la loi organique n° 32.97 citée plus haut, considérant que le troisième candidat dans le classement de la liste électorale dont la tête de liste été le défunt Abdelkader ERAIS, qui est Abdessalam AHADOUCH, il ne serait élu pour occuper le siège vacant suite au décès de son occupant d'un point de vue juridique qu'après émission de la décision du Conseil constitutionnel, et ce en le notifiant au président de chambre des conseillers ».

La deuxième décision (n° 617-06)101(*) va dans le même sens de la première, en fait elle concerne la même liste électorale. Cette fois-ci c'est le Wali de la région de TAZA-Houseima-Taounat qui a saisi le Conseil constitutionnel pour l'annulation de l'arrêté du gouverneur appelant Mr Idris AHAKOUCH pour occuper le siège de Mr Mohamed Selami vacant suite à son décès, le Wali prône d'appel de Mr Mohamed BENZAKOUR à occuper le siège. Le Conseil tranche par un verdict disant que Mr AHAKOUCH n'est pas en droit de continuer d'occuper le siège à la chambre des conseillers, il dit également dans le dernier considérant de la décision : « Considérant que, et suite de ce qui précède, Mr Idris AHAKOUCH ne remplit plus la condition de l'appartenance à l'électorat composé des représentants des collectivités locales dont il a été portée candidat dans la liste électoral appelée « Alizdihar » au cours des scrutins du 5 décembre 1997, chose qui lui rend inéligible et ce d'ordre public, ce qui affecte la régularité d'avoir la qualité de parlementaire au sein de la chambre des conseillers suite au décès du défunt Mohamed ESSALAMI, comme il est stipulé par l'article 8 de la loi organique n° 32.97 précitée, ce qui impose de déclarer la non légalité de sa continuation d'occuper le siège à la chambre des conseillers après constatation de la vacance de siège par le Conseil constitutionnel suite au décès de Mohamed ESALLAMI avec l'appel du candidat qui lui succède sur la liste «  Alizdihar » pour l'occupation du siège dans le respect des délais en vigueur en vertu de l'article 53 de la loi organique n° 32.97 susmentionnée ».

Cette liste électorale a suscité l'intervention du Conseil constitutionnel par les deux décisions exposées plus haut, ce qui nous a donné la certitude que le Conseil constitutionnel intervient lorsque la situation l'exige pour remettre les choses dans l'ordre, dans ces deux décisions le Conseil expose de manière très explicite les moyens des partie, aussi il a donné la preuve que le Conseil été soucieux de présenter ses arguments de manière à être convaincant. L'essentiel pour nous, c'est de constater que le Conseil n'économise pas d'effort pour garantir la bonne marche des institutions constitutionnelles, d'où l'application du principe de la continuité des services publics par ricochet.

2) l'incompatibilité parlementaire peut être définie comme une situation où un représentant ou un conseiller se trouve dans une position professionnelle non conciliable avec son mandat parlementaire, dans ce cas il a le choix soit de régulariser sa situation en abondant la fonction incompatible ou en présentant la démission au bureau de la chambre dont il fait partie. A défaut il se fait déclarer démissionnaire.

Il existe trois formes d'incompatibilité : l'incompatibilité relative aux institutions constitutionnelles, l'incompatibilité relative aux fonctions publiques et celle relative aux activités privées.

Selon les dispositions juridiques en vigueur, le mandat des parlementaires est incompatible avec l'appartenance au Conseil constitutionnel et le Conseil économique et social102(*). La décision du Conseil constitutionnel portant n° 710-08103(*) atteste de l'application pratique de cette incompatibilité, il s'agit du cas du député Mr LAMDAWAR qui été nommé juge constitutionnel. En constatant la vacance de siège le Conseil constitutionnel affirme dans l'un des attendus de la décision : « Considérant que Mr Rachid LAMDAWAR est nommé membre du Conseil constitutionnel par le président de la chambre des représentants via la décision 28/06/2008 qui prendra effet à partir du 08/06/2008 comme il a été publié au bulletin officiel n°5638 du 12/07/2008. Considérant que le délai attribué à Mr LAMDAWAR pour exprimer son refus à rejoindre le Conseil constitutionnel est expiré le 28/05/2008, une chose qui impose de déclarer Mr LAMDAWAR démissionnaire du siège qu'il occupe à la chambre des représentants, et par conséquence de déclarer le siège vacant, de ce fait il est fait appel au candidat qui lui succède sur la liste électoral, en prenant compte des conditions stipulées par l'alinéa premier de l'article 84 de la loi organique n° 31.97 »

Le deuxième cas d'incompatibilité est celui relatif à l'exercice des fonctions publiques (électives ou non électives). Pour commencer il est à noter que le cumule de deux mandats parlementaires, c'est-à-dire avoir la qualité de représentant et de conseiller au même temps est considéré comme un cas d'incompatibilité, selon notre source104(*) il existe qu'une seule décision du Conseil constitutionnel en la matière, en l'occurrence celle portant numéro 359-99105(*) dans laquelle le Conseil dit dans l'un de ses considérant : « ...Après que le Conseil constitutionnel a constaté l'élection de Monsieur Lafhal ACHARQUI à la chambre des représentants , et selon les dispositions de la loi organique n° 32.97 relative à la chambre des conseillers ce dernier est considéré comme démissionnaire ».

Selon les lois organiques relatives aux deux chambres du parlementent, notamment celle portant n° 32.97106(*) (art. 14), l'accumule de deux présidences de collectivités territoriales, ou chambre professionnelles est considéré également comme incompatibilité.

Pour les fonctions publiques non électives, selon les dispositions juridiques régissant la matière107(*), est considérée comme une incompatible au mandant de parlementaire :

Ø les fonctions rémunérées par un Etat étranger ou une organisation internationale,

Ø les missions dont peuvent être chargés les parlementaires par le gouvernement pour les périodes excédant 6 mois,

Ø les fonctions publiques non électives, à l'exception des fonctions non gouvernementales, dans les services de l'Etat, des collectivités locales et des établissements publics,

Seulement ces derniers peuvent demander qu'ils soient mis en situation de détachement108(*). Ces cas d'incompatibilité ont pour objet d'empêcher toute situation où le parlementaire pourrait perdre au moins en partie son indépendance, vis-à-vis du gouvernement ou une organisation internationale.

La dernière catégorie des cas d'incompatibilité, est celle relative à certaines activités privées. C'est le cas de toute fonction de direction, concernant les qualités suivantes : président du conseil d'administration, administrateur délégué, directeur général ou directeur, membre du directoire ou du conseil de surveillance, dans les sociétés anonymes dont l'Etat détient directement ou indirectement plus de 30% du capital.

L'intérêt dans ce cadre (l'étude des cas d'incompatibilité) est de rendre compte, tant soit peu des dispositions légales et davantage l'engagement du Conseil constitutionnel pour exercer un rôle qui est le sien : entre autres, garantir la bonne marche de l'institution parlementaire, ce qui implique automatiquement l'application du principe à valeur constitutionnel de la continuité des services publics objet du présent mémoire.

Sous section 2 : L'annulation des résultats des votes et la déchéance

parlementaire

1) parmi les compétences du Conseil constitutionnel est la résolution des litiges relevant du contentieux électoral des membres des deux chambres du parlement, dans ses litiges les candidats, les autorités administratives compétentes saisissent le juge constitutionnel pour qu'il se prononce sur l'existence des faits allégués, chose qui pourrait susciter l'annulation des résultats des votes. Notre but ici ce n'est pas de s'étaler sur la notion de l'annulation des résultats des votes car cela interpellerait forcément de rendre compte de ses différents contours, ce qui risque de nous faire perdre de vue notre objet d'étude.

Or l'intérêt pour nous en évoquons l'annulation des résultat des vote c'est de mettre en exergue l'idée prônant que l'intervention du Conseil constitutionnel à pour vocation d'empêcher toute frustration qui pourrait affecter la bonne marche de l'institution parlementaire, d'où le principe de la continuité des services publics. La force du lien peut bien paraître dérisoire ou insignifiante, mais nous soulignions que toute est fait pour que la période de contestation des résultats des votes soit réduite au maximum (15 jours selon les dispositions en vigueur), et selon les décision du Conseil constitutionnel, notamment celle portant n° 636-07 dans laquelle la juridiction constitutionnelle affirme dans l'un des considérants de la décision : « Considérant qu'il ressort de l'examen de la requête, qui a pour objet de demander l'annulation des résultats du vote de la région de l'Oriental, dans le cadre des scrutins indirecte pour l'électorat composé des représentants des conseils communaux, qui demande également l'enregistrement du nom du requérant sur les listes électorales desdites élections, la présente lettre de saisine été déposée le 8 septembre 2006, autrement dit avant l'ouverture du délai réservé aux recours. Considérant qu'il est donc nécessaire de déclarer la demande irrecevable »109(*).

Nous soulignons donc que le Conseil constitutionnel est très regardant sur la question des délais, d'emblée il a les mains liées par la force du droit ce délai est imposé par les dispositions stipulées dans les textes légaux. Ce délai à pour objectif de trancher les différends en matière de contentieux électoral dans les plus courts délais, cela s'explique par le souci du législateur organique pour rendre stable le travail des parlementaires. En effet, comment un représentant de la nation pourrait bien exercer son mandat en n'étant pas sûr de la détention de son siège ?

Concernant le « jugement » de ces affaires sur le fond, le Conseil, et comme en empruntant la robe du juge judiciaire, il instruit l'affaire, il évoque les moyens des parties, examine les preuves...etc.

Pour l'illustration nous évoquons une affaire très célèbre, connue dans la presse sous le non de « l'affaire des écoutes téléphoniques », dans la quelle le juge constitutionnel s'appuie sur les conclusions d'un tribunal judiciaire, ainsi l'écoute des témoins comme moyen de preuve : « Considérant que Mr Mohamed TALMOUST dont l'élection fait objet du présent recours a fait usage lors de la compagne électorale des méthodes non légales, également il a fait usage de manoeuvres dolosives ayant pour objectif de porter atteinte à la régularité du vote ayant pour forme de distribution d'argent pour les électeurs, cela est détectable dans ses communications téléphoniques interceptée, dont il ressort de leurs contenu qu'il a été fait usage d'expressions explicites ou tacites prouvant les allégations, ainsi par la comparaison des données enregistrées dans les procès verbaux des interrogatoires préliminaires et exhaustifs dont il été soumis la personne concernée dont le vote est objet de contestation et d'autres personnes qui lui sont proches »110(*)

Somme toute, le fait d'insérer l'annulation des résultats des votes par le Conseil constitutionnel dans le cadre de la présente partie du travail trouve son fondement logique le liant à notre objet d'étude : le principe à valeur constitutionnelle de la continuité des services publics. Le fait que le système juridique en place, et l'intervention du Conseil constitutionnel oeuvre dans le sens de garantir la bonne marche des services de l'Etat, en empêchant les troubles qui pourraient être causées par les contestations des résultats des votes, et la vacance de siège déclarée par le Conseil à leur suite, présente la preuve tangible qu'il relève de l'essence du régime juridique, et l'intervention consciente ou inconsciente de la haute instance de protéger le système contre tout événement ou pratique qui pourrait provoquer de facto l'existence de sièges vacants, ce qui est pour conséquence de porter atteinte au principe de la continuité.

2) s'agissant maintenant de la déchéance parlementaire, qui peut être définie comme étant un acte juridique émanant des autorités compétentes par la loi, en vertu duquel la qualité de parlementaire est levée sur un représentant ou un conseiller qui en détenait avant l'intervention dudit acte. La raison principale de la proclamation de la déchéance parlementaire est la perte au cours du mandat d'une ou de plusieurs conditions d'éligibilité. Le Conseil constitutionnel a l'exclusivité pour déclarer la déchéance, et ce en vertu des dispositions stipulées dans les lois organiques 111(*)qui traitent de la déchéance parlementaire, bien sûr après demande de l'autorité gouvernementale compétente. Notamment le ministre de la justice comme dans le suivant exemple : « Après examen de la lettre de saisine enregistrée dans son secrétariat général le 24 février 2005 par laquelle le ministre de la justice demande au Conseil constitutionnel de déclarer la déchéance parlementaire pour le député membre de la chambre des représentants Mr Mohamed ECHAIBI élu dans le cadre de la circonscription électoral ERHAMNA - préfecture Kalat Esraghna- dans les élections qui se sont déroulées le 27 septembre 2002, et ce conformément à l'article 9 de la loi organique n31.97 relative à la chambre des représentants, pour motif de l'émission d'un jugement juridictionnel définitif à son encontre pour le délit d'inscription du faux dans un document officiel en le condamnant à six mois de prison ferme et à la privation du droit d'être électeur ou éligible pour une durée de cinq ans »112(*). Comme on peut le remarquer la déchéance est demandée après condamnation d'un parlementaire en vertu d'une décision judiciaire définitive à son encontre.

En rendant sa décision le Conseil examine les preuves qui lui sont présentées, notamment les documents joints à la lettre de saisine, mais également la réplique du parlementaire concerné. Il instruit l'affaire en suivant les ornières des méthodes usées par le juge judiciaire en dressant des attendus qui expose les faits dans une démarche animée par le souci d'investigation : « Considérant de ce qui précède Mr Mohamed ECHAIBI serait par force de la loi déchu de son mandat de député à la chambre des représentants, et ce, en application de l'article 9 de la loi organique n° 31.97 précitée... »113(*) .

Sans prétendre à l'exhaustivité, dans le présent chapitre nous étions amené à présenter les différents cas de figure qui pourraient par leur nature porter des frustrations à la marche normale de l'institution parlementaire qui est par l'attestation du Conseil constitutionnel un «  un service parmi les service de l'Etat » (ãÑÞ ãä ãÑÇÞ ÇáÏæáÉ (, et de ce fait une variante des institutions ayant qualité de service publique. Donc l'étude du fonctionnement du parlement sous l'angle de la notion de service public est un choix qui est tout à fait justifié. Dans le chapitre suivant on étudiera les impacts de l'exercice du droit de grève sur le principe à valeur constitutionnelle de la continuité des services publics.

CHAPITRE II

La continuité des services publics et l'exercice du droit de grève

Nous avons opté pour la réservation d'un chapitre entier à l'étude de la grève pour deux raisons. La première, est l'ampleur de l'impact de l'exercice du droit de grève sur l'application du principe de la continuité des services publics ; dont le respect est considéré comme une condition sine quo non à la bonne marche, et à la constance des prestations fournies par ces services. En effet, lorsque les services publics gérés par l'administration ou contrôlés par elle font l'objet d'une rupture, même limitée dans le temps, les conséquences sont graves, surtout quand il s'agit des services vitaux, tels que le service de la santé, l'enseignement ou la justice.

Les conséquences des grèves sont également pénibles quantitativement si nous osons dire, car parmi les phénomènes qui peuvent toucher la bonne marche des services publics, c'est la grève qui en l'altère le plus, et ce pour le fait qu'elle touche le nombre le plus élevé de la population « les usagers des services publics » et davantage lorsqu'elle est répétitive, dans ce cas elle agit comme une bombe à fragmentation pour anéantir le principe de la continuité et le vider carrément de son essence.

Avant d'entamer le vif du sujet, il convient de commencer par un éclaircissement terminologique de la notion du droit de grève pour la différencier des autres concepts voisins Le professeur Roger LA TURNERIE définit la grève comme étant tout arrêt collectif du travail de la part les salariés ou les fonctionnaires d'une institution donnée, ou plusieurs institutions à la fois, en vu de faire pression sur l'employeur pour qu'il obtempère à leurs revendications. De sa part Hélène SINAY, la définit comme un refus collectif et délibéré du travail qui exprime la volonté des salariés ou des fonctionnaires de se mettre temporellement hors le contrat qui les lient à l'employeur pour garantir la réalisation de leurs attentes. Concernant la doctrine marocaine, et notamment le professeur Saïd BANNANI, il pense que la grève est le refus des salariés ou des fonctionnaires, tous ou en partie de travailler en ayant la volonté de faire grève, et ce à la suite d'un litige collectif, pour forcer l'employeur de répondre à leurs revendications objet dudit litige114(*).

Le droit de grève occupe une position très importante dans le registre des droits inhérents à la personne humaine. En effet, plusieurs instruments juridiques l'ont eu comme objet, et ce, à compter du droit international aux droits internes relatifs à chaque Etat, c'est un droit qui à un aspect international, pour ne pas dire universel, il est toujours le corollaire du droit syndical. Les employés dans les secteurs privés ne sont pas les seuls à en jouir, les fonctionnaires également ont le plein droit d'adhérer à des syndicats et exercer leur droit qui leur permet de faire grève. C'est ce qui a poussé le bureau international du travail, notamment sa commission de la liberté syndicale d'appeler à donner une importance spéciale à la question du droit syndical pour les fonctionnaires publics ; et de lui réserver une des session de la conférence internationale du travail afin de trouver les solutions adéquates pour résoudre les problématiques qui en découlent. Chose qui a permis la consécration d'une commission spéciale à la fonction publique qui a présenté un rapport détaillé sur la question en 1977115(*). Au Maroc, le droit de grève est garanti constitutionnellement.

Comme il résulte des précédents titres de ce mémoire, le principe de la continuité des services publics est un principe qui dispose de la valeur constitutionnelle, c'est-à-dire qu'il a la même valeur juridique que la constitution écrite. Or, comment peut-il cohabiter dans la même couche de normes juridiques  avec le droit de grève, qui en vertu de l'article 14 de la constitution est un droit constitutionnel? De part cette interrogation il devient intéressant d'étudier l'exercice du droit de grève en l'opposant au principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnel pour en déchiffrer la nature de cette cohabitation et en rendre compte.

Pour ce faire il convient de diviser le présent chapitre en deux sections la première aura comme objet de rendre compte du cadre théorique de l'exercice du droit de grève en dressant ses soubassements juridiques et la position jurisprudentielle à son propos, la deuxième portera sur son application pratique et une simulation de ses perspectives.

Section 1 : Cadre juridique de l'exercice du droit de grève et la position

jurisprudentielle

Sous-section 1 : Cadre juridique

1) Au Maroc la législation relative au droit de grève est passée par plusieurs étapes. Au début du siècle, et spécialement dan la période du protectorat, précisément de 1912 à 1958 les employés et fonctionnaires marocain étaient privés d'exercer le droit de grève. Les autorités françaises réservaient ce droit aux fonctionnaires français et étrangers, mais cela n'a pas empêché les marocains de participer de facto dans les grèves organisées par les syndicats français116(*). Cette discrimination a été maintenue à l'égard des fonctionnaires marocains car les autorités du protectorat craignaient l'adhésion de masse des marocains à des mouvements de protestation via les organisations syndicales et l'exercice du droit de grève en vu de plaider des revendications politiques. Les fonctionnaires dépendants de la métropole (les français et les étrangers fonctionnaires au Maroc) ne pouvaient se voir refuser le droit de faire grève, pour des raisons pragmatiques : ils formaient l'appareil administratif concrétisant la présence de la France au Maroc, et pour qu'ils restent ils doivent bénéficier des mêmes droits que leurs collègues en France.

Avec la montée des mouvements de protestations, surtout dans les années 1954 et 1955, les autorités françaises ont procédé à l'émission de plusieurs circulaires interdisant le droit de grève pour les marocains. Ces circulaires exposaient les sanctions infligées à ceux qui tentent de bafouer la réglementation en vigueur, parmi les sanctions :

Ø L'arrêt immédiat du travail avec la suppression des salaires,

Ø Les fonctionnaires contractuels ou journaliers ne peuvent être réinfectés dans leurs postes qu'après approbation de l'administration et l'étude des dossiers cas par cas,

Ø Dans tous les cas il ne peut être procédé à la rémunération des jours de travail manqués117(*).

Il est à souligner qu'au Maroc il n'existe aucune définition légalement admise de la grève, en dépit du fait que toutes les constitutions du Maroc en reconnaissent la jouissance. A en croire la réglementation en interdisant l'exercice il serait : « toute cessation concertée du travail, et tout acte d'indiscipline caractérisée ... », Mais cette définition est absolument réfutable car elle considère la grave comme un acte contraire au droit en la comparant à un acte d'indiscipline caractérisée. Il est très important également de préciser que la sa portée juridique est passée par plusieurs étapes successives.

2) La deuxième étape est relative à la période pré-constitutionnelle, où l'instrument juridique applicable en la matière est le décret du 5 février 1958. Le paradoxal en ce décret c'est qu'il reconnaît le droit des fonctionnaires des administrations de l'Etat et les institutions publiques à adhérer et de s'organiser dans des syndicats professionnels, sauf ceux qui font l'objet de l'article 4 : les fonctionnaires de police, des forces auxiliaires..., et leur refuse en même temps le droit de faire grève. L'interdiction d'exercer le droit de grève fait l'objet de l'article 5 qui stipule : « pour tous les personnels, toute cessation concertée du service, tout acte collectif d'indiscipline caractérisée pourra être sanctionné en dehors des garanties disciplinaires ». Ce texte a permis à l'administration d'avoir une marge de manoeuvre très large, qui lui permet d'intervenir et de sanctionner les fonctionnaires tombant sous l'emprise de l'article 5 du décret de 1958, en justifiant ses actes par le manquement des fonctionnaires à leurs obligations, et les exigences du service public dans lequel ils travaillent. En effet, à toutes les reprises l'administration opposait aux fonctionnaires grévistes, la condition sine quo non des services publics de fonctionner normalement et sans discontinuité, qu'il qu'en soit le prix !

Plusieurs législations ont allé dans le sens du décret précité en interdisant le droit de grève et syndical à certaines catégories de fonctionnaires, notamment les administrateurs du ministère de l'intérieur, les magistrats, les militaire, les fonctionnaires de l'administration carcérale...118(*)

3) Avec l'arrivée de l'ère constitutionnelle à partir de 1962, le droit de grève a vu s'octroyer une portée effective au Maroc. En effet, toutes les constitutions marocaines reconnaissent le droit de grève, en l'occurrence celle de 1962, de 1970, de 1972, de 1992 et celle de 1996. Elles comportent toutes un article (Art. 14) stipulant : «  le droit de grève demeure garanti, une loi organique précisera les conditions et les formes dans lesquelles ce droit peut s'exercer ». Seulement, il est à souligner que le texte de l'article 14 de la première constitution marocaine (celle de 1962) comportait une expression, qui est d'emblée toujours en son sein, mais à l'époque un certain nombre d'auteurs ont inlassablement essayé de démontrer que l'exercice du droit de grève a été resté figé dans la même situation qu'il avait avant l'entrée en vigueur de la constitution de 1962. Pour cela, ils ont dressé une interprétation basée sur le côté linguistique du texte qui s'articule sur le terme Demeure qui en résulte : puisque l'article 14 comporte le terme demeure, donc l'exercice du droit de grève demeure garanti pour ceux qui en avaient le droit de jouissance avant l'ère constitutionnelle, et puisque les fonctionnaires publics ne jouissaient pas de l'exercice de ce droit, conformément aux stipulations de l'article 5 du décret du 5 février 1958, l'article 14 de la constitution n'apporte aucun changement pour eux.

Il se pourrait que cet acharnement d'une certaine partie de la doctrine, qui aspire à sauvegarder le statut quo pour la jouissance des fonctionnaires du droit de grève, qui a poussé le constituant de 1970 de changer les terme de l'article 14 en sa version arabe119(*). En effet, l'expression : les conditions qui doivent) ÇáÔÑæØ ÇááÇÒãÉ ( est changée par l'expression : les conditions et les formes dans lesquelles ce droit peut s'exercer, en arabe : ÇáÔÑæØ æ ÇáÅÌÑÇÁÇÊ ÇáÊí íãßä ãÚåÇ ããÇÑÓÉ åÏÇ ÇáÍÞ..120(*)

L'intervention du constituant de 1970 pour changer la formation terminologique de l'article 14 de la constitution, un changement qui est maintenu dans les autres constitutions qui ont succédé, atteste que l'exercice du droit de grève referme le caractère de la généralité. De ce fait, dire que les fonctionnaires publics n'ont pas le droit de jouissance, c'est systématiquement s'induire en erreur.

Même après la promulgation de la constitution de 1962, l'administration a resté obstinée sur sa position, il semble que l'administration n'assimilait pas qu'est ce que une constitution en édictant des actes, et des décisions administratives allant dans le sens d'interdire l'exercice du droit de grève. Elle pensait qu'en garantissant l'exercice du droit de grève, l'article 14 de la constitution entendait les salariés et non pas les fonctionnaires de l'Etat, alors que cet article est général et ne fait pas de distinction entre les salariés et les fonctionnaires. Il est surprenant de savoir que l'administration se tenait à cette attitude, alors que la constitution, qui normalement le texte légal qui possède la plus grande force juridique, et subordonne la loi et le règlement, en consacre la portée.

Il est encore plus surprenant que l'administration est restée attachée à sa position qui fait valoir un règlement, en l'occurrence le décret du 5 avril 1958 sur le texte constitutionnel plus d'une trentaine d'années121(*) ! C'est ce qui est tout simplement contre nature. Normalement, l'administration devait consacrer la suprématie du texte constitutionnel. La normalité exige également que le décret du 5 avril 1958 soit abrogé dés l'entrée en vigueur de la constitution de 1962.

Selon la doctrine marocaine, cette situation a perduré pour trois raisons :

Ø L'administration n'a pas été contrainte de changer de positon par le gouvernement auquel elle est subordonnée.

Ø Le législateur organique qui est mandaté par le texte constitutionnel d'émettre une loi organique régissant la jouissance du droit de grève été carrément absent.

Ø La justice n'avait pas le courage requis pour trancher cette aberration juridique.

Le champ juridique marocain en matière d'organisation du droit de grève reste caractérisé par l'absence de la loi organique qui devrait préciser les modalités et les conditions de l'exercice du droit de grève. D'emblée nous nous demandons pourquoi cette réticence du législateur à en adopter, surtout que ces dernières années ont étaient marquées par la montée en puissance des mouvements de protestations du fonctionnariat notamment dans les secteurs de l'enseignement et de la justice.

Ce vide juridique cause deux situations non saines. La première est le défaut de traçage de la frontière entre la légalité et la non légalité en matière de la jouissance du droit de grève. En effet, les grèves prolongées dans leur cadre temporel surtout dans les secteurs sensibles tels que la santé, et l'enseignement outrepassent les limites de la légalité en privant les usagers des services publics d'en recevoir les prestations ; ce qui va à l'encontre du principe de la continuité. La deuxième c'est le manquement du législateur à son obligation d'intervenir pour organiser et déterminer le cadrage juridique de l'exercice du droit de grève. Par cette passivité le législateur se fait verser dans une situation de non-conformité au droit. Il est responsable par omission. Pour combler ce vide le juge administratif en sa qualité de gardien de la légalité intervient pour organiser l'exercice du droit de grève, il exerce cette compétence par intérim. Ce dernier point fait l'objet d'étude du prochain titre.

Sous-section 2 : La position jurisprudentielle

Dans le cadre du précédent titre, nous avons tenté d'exposer le cadrage juridique de l'exercice du droit de grève en dressant les différentes étapes de la réglementation en la matière. Où nous avons délibérément omit de dresser la position jurisprudentielle, car elle fait l'objet d'un titre à part, il en va de même pour les prises de positions doctrinales, car l'objet de l'inclusion du chapitre consacré à l'exercice du droit de grève ne vise pas à étudier l'exercice du droit de grève en soi, mais l'examiner sous l'angle de l'application du principe à valeur constitutionnelle de la continuité des services publics qui fait l'objet du présent travail.

Nous sommes conscient de l'ampleur des controverses que représente l'exercice de la grève, surtout entre les tenants de l'idée selon laquelle le droit de grève serait un droit absolu puisqu'il est protégé constitutionnellement, et ceux qui soutiennent que la jouissance de ce doit n'est pas encore légale car l'existence de la loi organique régissant la matière fait toujours défaut. Là, ce sont deux positions radicales dont la rigidité rend les deux positions réfutables, car elles n'intègrent pas les solutions apportées par la jurisprudence.

Nous serons amener à rendre compte de l'exercice du droit de grève au Maroc, et ce, en faisant la rétrospective de l'intervention judiciaire sur la question de savoir est ce que faire la grève est légal ou on au Maroc ? Commençons par un arrêt de cours suprême très connu chez les administrativistes sous le nom d' ELHIHI122(*), dont les faits se présentent comme suit : Monsieur ELHIHI est fonctionnaire de la jeunesse et des sports dépendant du ministère de l'éducation nationale, le 25 mars 1960 il participe à une grève, ce qui a poussé le ministre de l'éducation nationale de prendre à son encontre des mesures de sanction très sévères ; le renvoi et la radiation des cadres de la jeunesse et des sports. Cette sanction été prononcée en application du décret de 1958 stipulant dans son article 5 : « Pour tous les personnels, toute cessation concertée des services, tout actes d'indiscipline caractérisée, pourra être sanctionné en dehors des garanties disciplinaires ».

Monsieur ELHIHI a saisit la cours suprême en reprochant au ministre l'application de ce décret. Seulement, c'est ce décret qui a fait l'objet d'ossature de l'arrêt du juge de la cours suprême. En effet, pour rendre son verdict, le juge s'est épaulé sur sa substance, pis dans cette décision juridictionnelle, la cours suprême avait considéré que le président du conseil (le premier ministre), est en droit de prendre toutes les mesures nécessaires pour garantir la bonne marche et la continuité de tous les services publics du pays123(*).

De part cet arrêt, on peut extraire la conclusion disant que la position des juridictions, notamment la cours suprême été conforme aux aspirations de l'administration et aux actes de celle-ci. Loin de donner gain de cause au requérant, le juge de la cours suprême a considéré que l'administration n'exerçait que ses prérogatives en vertu de la réglementation en vigueur, et lui a signé un chèque sur blanc en incluant dans l'un des considérants de l'arrêt que le président du conseil est habilité à prendre les mesures nécessaires imposant le respect de la bonne marche des services publics dans tout le Maroc. Ce qui laisse entendre que la grève était carrément interdite.

L'arrivée de l'ère constitutionnelle inaugurée par la constitution de 1962 qui comportait en son sein un article 14 qui stipulait que le droit de grève demeure garanti, d'ailleurs c'est un article qui est resté le même dans les autres constitutions qui l'on succédé. Une nouvelle application jurisprudentielle du droit de grève était en perspectives. Mais les attentes étaient vaines, la cours suprême a resté sur sa position exprimée dans l'arrêt ELHIHI, elle faisait valoir le texte du décret de 1958 sur l'article 14 de la constitution.

Cette position on peut la déduire de son arrêt datant de 25/05/1984 opposant Monsieur Idris NIDAE au ministre de la poste et des télécommunications124(*), dons les faits : Monsieur Idris NIDAE est révoqué de son poste, par motif que l'administration lui reproche les allégations selon lesquelles ce dernier aurait arrêté de manière concertée le travail, incité à la grève, et provoquer la rupture dans la marche du service public. Pour annuler la décision administrative, il saisit le juge de chambre administrative de la cours suprême, Mais l'arrêt de celui-ci est allé dans le même sens du précédent jurisprudentiel de la cours suprême en la matière (arrêt ELHIHI), en affirmant : « Considérant qu'il n'existe aucun texte imposant à l'administration de motiver sa décision objet de ce recours...Mais contrairement au moyen évoqué par le requérant aspirant à appliquer les dispositions de l'article 66 de la loi de la fonction publique qui a déterminé les sanctions disciplinaires, l'article 5 du décret du 5 février 1958 relatif à l'exercice du droit syndical par les fonctionnaires applicable au présent cas d'espèce stipule que tout arrêt concerté du travail ou acte d'indiscipline caractérisée, et tout arrêt collectif délibéré qui a pour objet de porter atteinte aux règles de disciplines est sanctionné en dehors des garanties disciplinaires. De ce fait l'administration n'est pas obligée de faire bénéficier le demandeur de ces garanties disciplinaires citées par loi de la fonction publique». Donc la cours suprême a resté figée sur sa position du départ, et ce, en dépit de l'écoulement de plusieurs années après l'inauguration de l'ère constitutionnelle.

Cette situation récurrente a persisté, mais avec la création des tribunaux administratifs en 1994 un nouvel air de changement s'apprêtait à souffler sur l'exercice du droit de grève, mais quand même on a dû attendre quelques années encore pour que le juge administratif intervienne pour en garantir la jouissance ! L'air du renouveau a soufflé la première fois le 11 juillet 2001 à Méknès. En effet, par son jugement communément connu sous le non de Chibane125(*), le tribunal administratif de Méknès a rendu un verdict favorable à la jouissance du droit de grève, un jugement dont il convient de citer les faits afin de comprendre sa portée.

Monsieur Chibane, un instituteur qui ne s'est pas présenté à son poste le 1er mars 2000 car il faisait grève, seulement ce jour a coïncidé avec le passage de l'inspecteur. De ce fait il a reçu une sanction disciplinaire de la part du Ministre de l'éducation nationale un avertissement motivé par le manquement, et la négligence de ses fonctions. Convaincu qu'il n'exerçait que son droit, Monsieur Chibane a saisi le juge administratif de Mekhnès pour annuler la décision administratif lui infligeant la sanction. Le juge de la légalité a joué un rôle déterminant en affirmant : « Si l'article 5 du décret du 15 Rajab 1377 correspondant 5 février 1958 relatif à la l'activité syndicale des fonctionnaires énonce que « pour tous les personnels, toute cessation concertée du travail, tout acte d'indiscipline caractérisée pourra être sanctionné en dehors des garanties disciplinaires » les dispositions de cet article qui constituent une interdiction absolue du droit de grève, sont incompatibles avec les dispositions constitutionnelles confirmées dans les constitutions qui se sont succédées ; de ce fait, cette disposition s'efface compte tenu de son absence de compatibilité avec les dispositions de la constitution »126(*).

En effet, le juge administratif a donné gain de cause au requérant, il est clair qu'il s'agit là d'un revirement jurisprudentiel ; mais le plus surprenant que ce revirement a été l'oeuvre d'un juge du premier degré. Le juge du tribunal administratif renverse une position jurisprudentielle du juge de la cours suprême, il y'a de quoi s'étonner !

Une partie de la doctrine se verse dans des démonstrations et interrogations allant dans le sens de poser la question suivante : est ce que le juge administratif a apprécié la constitutionnalité du décret de 1958 en résultant à son incompatibilité ? À notre sens, il n'est pas si importante cette question car il est clair que le juge administratif n'a pas agit en juge constitutionnel, ce dernier n'apprécie pas la constitutionnalité du règlement ; et à quoi servirait une constitution si -entre autres- les autorités judiciaires ne se référent pas à ses règles127(*) !

Par contre, nous jugeant bon de poser une question très importante à nos yeux ; est ce que ce revirement jurisprudentiel effectué par un juge du premier degré est si fiable au point qu'il résistera à l'écoulement des années et au risque de voir la cours suprême émettre un arrêt qui corrobore sa position antérieure ? En réponse, nous pensons que la tendance va dans le sens du jugement Chibane, mais juridiquement parlant il reste que pour la tradition juridique marocaine c'est la cours suprême qui dispose de la mission de réguler la jurisprudence de toutes les juridictions du pays, qui lui sont inférieurs. Donc il faut attendre la confirmation de la haute juridiction.

Cette réticence à se fier sans réserves à l'émancipation de la tendance du jugement Chibane, a été exprimée par la doctrine avisée. En effet, le professeur BENABDELLAH (M.A), l'exprime au début de son commentaire du jugement Chibane, alors que le professeur ROUSSET (M), auteur de l'ouvrage Droit administratif marocain n'en a pas tenu compte dans sa 6éme édition revue et mise à jour datant de 2003.128(*)

Puisque le législateur n'a pas encore joué son rôle en matière d'adoption de la loi organiques relative à l'exercice du droit de grève, le juge administratif intervient de manière très habile, non pas pour garantir le droit de grève seulement, mais pour instaurer un équilibre entre sa jouissance et les exigences du service public, notamment la continuité. En suivant les ornières de son homologue français, le juge administratif marocain applique un certain nombre de critères pour que l'exercice du droit de grève soit légal :

Ø Elle (la grève) ne doit pas s'étaler sur une période excessive,

Ø Elle doit défendre que des intérêts professionnels, elle ne doit pas être utilisée comme un moyen de contestation politique,

Ø L'appel à la grève, doit être fait par un syndicat national,

Ø Un préavis doit être adressé à l'autorité administrative compétente.

Pour illustrer l'emploi jurisprudentiel de ces critères, il convient de dresser le dernier considérant du jugement Chibane : « Considérant que, tenant compte de ce qui précède et les détails de l'affaire, il ressort que la grève dans laquelle a participé le demandeur avec les autres instituteurs le 1er mars 2001 a respecté la procédure du préavis comme il est démontré par la copie du télégramme envoyé au délégué provincial du ministère de l'éducation nationale de Errachidia jointe au dossier. L'appel à la grève a été fait par les syndicats nationaux dont l'union Marocaine du Travail, et ce comme il ressort du dossier, ce que l'administration ne le rejette guère, et que la période de la grève été limitée à une seule journée, et qu'elle en a pas une vocation politique, ce qui n'est pas contesté par l'administration. De ce fait, la grève qui a fait l'objet de motif de la sanction du demandeur en lui alléguant qu'il a été négligeant et qu'il a manqué à ses obligations professionnelles, ne justifie pas la sanction de l'avertissement ».

Comme nous avons pu le constater, le juge administratif comble les insuffisances législatives imputables au législateur, et de ce fait il s'autoproclame créateur de normes et remplit bien sa mission. Dans les actes administratifs dont il a la possibilité de contrôler en matière de l'exercice du droit de grève, il fait triompher la norme constitutionnelle (Art.14), sur le décret de 1958, ce qui est tout à fait juste. Par l'application de ces critères pour garantir le droit de grève le juge de l'administration trace la frontière entre la légalité de l'exercice du droit de grève, et les exigences de la marche des services publics qui ont un caractère intransigeant et indéniable tel que la continuité des services publics.

Hormis le fait que le juge administratif à une forte conviction en ce qui concerne la jouissance des fonctionnaires du droit de grève, il en demeure pas moins qu'il est soucieux de garantir au gouvernement et à l'administration le droit de sanctionner tout dérapage dans l'exercice de ce droit. Il est très regardant en ce qui concerne les motifs de la grève, qui ne doivent guère poursuivre la défense ou l'expression d'une revendication politique. Il en examine également l'effectivité de l'adhésion du fonctionnaire en question, autrement dit ; est ce que l'absence été justifiée par une grève ou bien une simple négligence des obligations professionnelles ? Dans ce cas il reconnaît à l'administration le droit de sanction afin d'empêcher toute atteinte au rendement et à la bonne marche des services publics. De ce fait, le travail du juge de la légalité rime en parfaites cohérence avec les stipulations de la constitution, notamment sont article 61 qui dispose : « Sous la responsabilité du premier ministre, le gouvernement assure l'exécution des lois et dispose de l'administration »  : « Il est nécessaire que son exercice ( La grève) soit conforme aux règles évitant un mauvais usage de ce droit et tendant à garantir son adaptation avec le fonctionnement normal des services publics de sorte qu'il n'afflue pas sur leur rendement ; et que si de nature de ce droit est de causer des troubles graves dans le fonctionnement d'un service public ou de présenter un danger à l'ordre public, l'administration à le droit, voire l'obligation de sanctionner ceux des fonctionnaires qui l'organisent », ( jugement Chibane). Somme toute, le droit de grève doit s'exercer dans le respect des principes inhérents à la bonne marche des services publics.

En fin, il est à dire que l'exercice du droit de grève porte des altérations majeures au principe de la continuité des services publics, s'il n'est pas régi de manière à respecter certaines normes. Le juge administratif s'est intervenu pour combler un vide juridique causé par la l'absence de la loi organique relative à l'exercice du droit de grève, et il faut dire qu'il accomplie sa mission avec succès, mais l'adoption d'une loi organique est incontournable pour la stabilité de l'ordonnancement juridique, personne ne peut nier le fait que la situation actuelle est fluctuante. Dans la section suivante nous allons tenter de mettre en relief les dispositions du projet de loi organique relative à l'exercice du droit de grève en perspectives, on examinera également comment est-il aménagé en France.

Section 2 : Un nouveau cadre pour l'exercice du droit de grève en

perspectives

Après avoir fait le point sur l'application du droit de grève au Maroc, en dressant le cadre dans lequel il s'exerce, en l'évoquant en deux volet : le cadre juridique, et la position jurisprudentielle qui lui ait applicable. Dans cette section, l'exercice sera de faire une lecture du projet de loi organique relative à l'exercice du droit de grève (sous-section : 1), après il sera opportun de voir comment le juge constitutionnel français s'est intervenu pour accomplir la mission d'instaurer l'équilibre entre l'exercice du droit de grève et le principe de la continuité des services publics en tant que principe à valeur constitutionnelle.

Sous-section 1 : Lecture du projet de loi organique relative à l'exercice

du droit de grève

D'entrée de jeu, il est très important de préciser que cette loi organique129(*) n'est pas applicable uniquement aux fonctionnaires mais également aux salariés des secteurs privés. En effet, son article premier le dit en des termes très explicites ; selon cet article le droit de grève s'exerce : dans les entreprises, les établissements et les activités soumises à la loi n ° 65.99, dans la fonction publique et semi-publique, les collectivités locales, ainsi que dans les professions libérales. Dans le cadre de notre travail, nous allons prendre en considération uniquement les dispositions générales qui traitent de la grève sans distinction entre les catégories des personnels susmentionnées, nous allons également se focaliser d'avantage sur les dispositions traitant des fonctionnaires parce que c'est eux qui sont étroitement liés au service public.

L'article deuxième de la loi dresse une définition légale de la grève : «  la grève est un arrêt collectif et délibéré du travail pour des revendications syndicales ou professionnelles ». On remarque que cette définition ne diffère pas beaucoup de celles proposées par la doctrine. Dans le premier alinéa de son article trois le législateur fait bénéficier les grévistes d'un gage de protection en bonus en stipulant : « personne ne peut être sanctionné pour sa participation à une grève qui s'est effectuée conformément à cette loi ». En effet c'est un gage de plus pour les fonctionnaires grévistes, cet alinéa à pour objectif de barrer la route à toute interprétation de la loi allant dans le sens de porter des restrictions à l'exercice du droit de grève.

Puis la loi passe à la codification de la procédure d'exercice du droit de grève. Il est très important de codifier cette procédure car le volet processuel porte plus de garanties pour la jouissance de ce droit, et ce en rendant les démarches uniformes et de ce fait identiques pour tous ; ce qui profite au principe de l'égalité.

Concernant la décision de faire grève, un alinéa est réservé pour les fonctionnaires des secteurs publics et semi-publics, qui stipule que la décision de faire grève doit être prise par les syndicats les mieux représentatifs ou le bureau syndical, ou par les séances plénières des salariés dans les cas où les syndicats les mieux représentatifs n'existeraient pas, la décision doit être prises hors les locaux du travail (Art.9).

Pour les fonctionnaires de l'Etat et des établissements semi-publics et les collectivités locales, un préavis de 10 jours révolus doit être adressé aux chefs des administrations (Art. 10). De sa part l'article 12, relatif à la procédure de notification de la décision de la grève ; consacre un alinéa aux fonctionnaires publics qui doivent adresser une lettre de notification recommandée avec accusé de réception au ministère concerné, ou à la collectivité locale, ou au service public concerné, ou bien au délégué provincial, ou à toute autre administration directement concernée. La décision de grève doit contenir obligatoirement le nom du bureau du syndicat faisant appel à la grève, les causes de la grève et les revendications, le lieu sur lequel portera la grève, la date de la grève, la période de la grève et les noms de la commission organisatrice dans les cas où la décision de la grève est prise par l'assemblée générale du syndicat (Art.13).

Le titre quatre de la présente loi, traite spécialement et exclusivement de la grève des fonctionnaires des services publics, il est précisé dans son article 25 que les dispositions de ce titre sont réservées aux fonctionnaires des administrations publiques, et les employés des collectivités locales, et les établissements semi-publiques. L'article 26 exclu l'application de la présente loi pour une certaines catégories de fonctionnaires : les militaires des forces armées royales, les fonctionnaires de la sûreté nationale et les forces auxiliaires, les agents d'autorité, les magistrats, les douaniers, les fonctionnaires des services extérieur de l'administration carcérale, les sapeurs pompiers, les agents des eaux et forêts. Le délai de préavis pour les grèves des fonctionnaires est de dix jours (Art.27).

Aux yeux du présent mémoire, c'est l'article 28 de ladite loi qui est le plus important, car il procède à un arbitrage entre l'exercice du droit de grève, et les exigences de la continuité des services publics ; en rendant effective la notion dite de service minimum. Il stipule : « les employés des services vitaux dont la rupture de fonctionnement provoquerait des dangers sur la vie, la sécurité ou la santé des usagers ou une partie d'entre eux, ou les personnes ayant droit de bénéficier des prestations fournies par ces services, doivent en période de grève garantir une marche minimum de ces services, et ce, pour protéger la vie, la santé, et la sécurité des personnes concernées ». L'article 29 précise que l'autorité gouvernementale est compétente pour l'établissement d'une liste contenant les services qui doivent garantir un service minimum pendant les périodes de grève. Les articles qui suivent stipulent des sanctions.

L'adoption d'une telle loi apporterait sans doute une valeur ajoutée à l'exercice du droit de grève. Pour en déduire, il suffit de citer que la codification de la procédure, et l'exigence de service minimum qui tend à garantir la continuité des services publics dans certains domaines vitaux.

Sous-section 2 : Le Conseil constitutionnel français et la conciliation entre

l'exercice du droit de grève, et la continuité des services

Le Conseil constitutionnel français a eu l'occasion de concilier l'exercice du droit de grève, et l'exigence de la continuité des services publics. Comme au Maroc, en France aussi le droit de grève est un droit qui est protégé constitutionnellement, avec la nuance qu'en France il a été cité dans le préambule de 1946 da constitution, qui a requis la valeur constitutionnelle en étant incorporé dans le bloc de constitutionnalité par la décision du Conseil constitutionnel portant numéro 71-45 D.C130(*) , il est également cité dans celui de 1958 ; alors qu'au Maroc le droit de grève est protégé par l'article 14 de la constitution. Seulement répondre à la question de savoir si c'est un droit absolu ou non, c'est-à-dire qu'il comporte des limites, n'est pas du tout un exercice facile malgré l'apparence simpliste de la question ; ainsi qu'elle qu'en soit la réponse, elle ne peut avoir un caractère notoire et imposable que s'elle est donnée par le Conseil constitutionnel, l'instance mandatée d'interpréter la constitution.

Le Conseil constitutionnel de France a été appelé à le faire, en rendant la décision 79-105 D.C131(*) se rapportant au contrôle de la proposition aspirant à modifier la loi du 7 août 1974 relative au droit de grève au sein du service public de la radiodiffusion. Cette décision est également importante pour le présent travail car elle consacre la valeur constitutionnelle du principe de la continuité des services publics. En somme, le Conseil constitutionnel considère le droit de grève, et la continuité des services publics comme principes à valeur constitutionnelle, qui disposent de la même force juridique, le Conseil l'exprime clairement et son équivoques dans le premier considérant de la décision : «  Considérant qu'aux termes du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, confirmé par celui de la constitution du 4 octobre 1958 ; « le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent » ; qu'en édictant cette disposition les constituants ont entendu marquer que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle, mais qu'il a des limites et ont habilité le législateur à tracer celles-ci en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnelles, dont la grève est un moyen , et la sauvegarde de l'intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ; que notamment en ce qui concerne le service public, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d'apporter à ce droit les limitations nécessaires en vue d'assurer la continuité des services publics, qui tout comme le droit de grève, à le caractère d'un principe de valeur constitutionnelle ».

De ce considérant, on remarque que le juge constitutionnel français s'appuie sur une expression contenue dans le préambule de 1946 et confirmée dans celui de 1958 en sa vertu les constituants reconnaissent au législateur le pouvoir de réglementer l'exercice du doit de grève, pour affirmer que le droit de grève n'est pas absolu. Il en déduit, de ce fait, qu'il est habilité (le législateur) de part le préambule de la constitution qui fait partie du bloc de la constitutionnalité d'apporter des limitations à l'exercice du droit de grève, bien sûr pour un but légitime et sans vider le droit de grève de sa substance.

Nous remarquons également, que pour le juge constitutionnel français, le principe de la continuité ; et le droit de grève sont dans la même classe de la hiérarchie des normes, ils disposent d'une force juridique égale, tous les deux ont la valeur constitutionnelle. Pour conclure à la valeur constitutionnelle du droit de grève, le Conseil se réfère au préambule de la constitution, donc un texte écrit même en sachant que la valeur constitutionnelle du préambule n'a été reconnue qu'en 1971, mais au moins il a la vocation d'être indélébile. Par contre, lorsqu'il affirme que la continuité des services publics est un principe à valeur constitutionnelle il ne fait référence à aucun texte écrit.

Le débat sur cette question à fait l'objet du premier chapitre de ce mémoire, néanmoins il n'est pas fastidieux de rappeler une citation du commissaire du gouvernement Gazier132(*) : « Admettre sans restrictions la grève des fonctionnaires, ce serait ouvrir des parenthèses dans la vie constitutionnelle, et, comme on l'a dit consacrer officiellement la notion d'un Etat à éclipses. Une telle conception est radicalement contraire aux principes les plus fondamentaux de notre droit public », les auteurs de l'ouvrage répliquent : «  et le principe de continuité est incontestablement l'un de ces principes fondamentaux ».

En opérant cette conciliation, le juge constitutionnel de l'hexagone instaure un équilibre très subtil entre le principe de la continuité et le droit de grève, jusqu'au point où il devient impossible pour le néophyte de saisir son sens. A juste titre, en sa qualité de gardien de la constitution, le juge constitutionnel réfute le concept de la marche normale des services prôné par la loi objet de contrôle. En effet, il exige que l'obligation de la continuité des services publics, ne doit en aucun cas vider le droit de grève de son contenu réel, il a affirmé à cet égard : «  Mais, considérant qu'en prévoyant dans la première phrase du paragraphe II de la loi que : « lorsque les personnels des sociétés nationales de programmes de télévision sont en nombre insuffisant pour assurer le service normal, le président de chaque société peut, si la situation l'exige, requérir les catégories de personnels ou les agents qui doivent demeurer en fonction pour assurer la continuité ... » le législateur permet aux présidents des sociétés, lorsqu'une cessation concerté du travail empêche l'exécution du service normal et afin de garantir que soit cependant assurée la généralité des missions dans les cas où son interdiction n'apparaît pas justifiée au regard des principes à valeur constitutionnelle ci- dessus rappelés... ».

En faisant ladite conciliation, le Conseil constitutionnel procède également à attirer l'attention du législateur sur la détermination de ces concepts et les frontières qu'il a tracé. En effet, de son tour (le législateur), il est tenu d'en prendre compte dans les lois qu'il émit133(*). La conciliation de l'exercice du droit de grève comme étant un principe à valeur constitutionnelle, n'est pas fait seulement eu égard du principe de la continuité. Le Conseil constitutionnel l'a fait également à l'égard d'autres principes à valeur constitutionnelle, tels que les principes de la protection de la santé et de la sécurité des personnes et des biens.

Et ce, comme il ressort de sa décision portant numéro 80-117 D.C 134(*) relative à la loi sur la protection et le contrôle des matières nucléaires, il est affirmé : « Considérant qu'aux termes du préambule de la constitution du 27 octobre 1946, confirmé par celui de la constitution du 4 octobre 1958 : "le droit de grève s'exerce dans le cadre des lois qui le réglementent" ; qu'en édictant cette disposition, les constituants ont entendu marquer que le droit de grève est un principe de valeur constitutionnelle, mais qu'il a des limites, et ont habilité le législateur à tracer celles-ci en opérant la conciliation nécessaire entre la défense des intérêts professionnels, dont la grève est un moyen et la sauvegarde de l'intérêt général auquel la grève peut être de nature à porter atteinte ; que, notamment, s'agissant de la détention et de l'utilisation de matières nucléaires, la reconnaissance du droit de grève ne saurait avoir pour effet de faire obstacle au pouvoir du législateur d'apporter à ce droit les limitations nécessaires en vue d'assurer la protection de la santé et de la sécurité des personnes et des biens, protection qui, tout comme le droit de grève, a le caractère d'un principe de valeur constitutionnelle ». Dans le même sens, voir notamment la décision 86-217 D.C135(*) relative à la liberté de communication.

En rendant ces décisions, le Conseil constitutionnel français a fait la parade des arguments juridiques justifiant son attitude, il a fait preuve d'une grande habilité et de compétence. Au Maroc, un projet d'une loi organique relative à l'exercice du droit de grève est en cours de gestation, donc en cas d'adoption elle passera systématiquement par le contrôle du Conseil constitutionnel. Notre convoitise de juriste est avide de voir quel regard portera le Conseil constitutionnel sur elle !

Conclusion de la deuxième partie

L'objectif de cette partie, était d'exposer les différentes pratiques et phénomènes qui peuvent altérer la substance du principe de la continuité des services publics, qui comme nous avons pu le montrer c'est un principe qui dispose de la valeur constitutionnelle. Le premier chapitre a été consacré à l'étude de l'application dudit principe dans le cours de la vie parlementaire, et ce, en proposant l'analyse de quelques procédés, ou dispositifs qui demeures inhérents au fonctionnement de l'institution législative, sous l'angle de l'application du principe de la continuité des services publics. En effet, ces procédés revêtant la forme notamment ; de démission des parlementaire, leur décès, l'annulation des résultats de vote par le Conseil constitutionnel, la déchéance parlementaire...Tous ces procédés ont un point commun ; ils ont la vocation de susciter la vacance de siège, et de ce fait une perturbation même relative et partielle du travail de l'institution législative, d'où le fait de porter atteinte au principe de la continuité des services publics. Mais le plus important pour nous, était de rendre compte de l'attitude du Conseil constitutionnel à ce propos, c'est-à-dire déterminer la nature de son intervention à l'égard de ces pratiques, et examiner comment il agit pour remettre les choses dans l'ordre. Du point de vue de l'efficacité, on peut dire qu'il remplit bien sa mission.

Le deuxième chapitre a fait de l'étude de l'exercice du droit de grève son cheval de batail, pour rendre évidente l'idée selon la quelle le principe de la continuité est un principe qui revêt la valeur constitutionnelle, et de ce fait, il est a une force juridique égale à certains droits protégés par la constitution écrite, notamment le droit de faire gère. La particularité de ce dernier, et d'emblée c'est ce qui a justifié le fait d'en consacrer un chapitre à part, c'est que parmi tous les phénomènes, ou les pratiques qui peuvent porter atteinte à la continuité des services publics, la grève le fait davantage. Cela pour plusieurs raisons : la grève touche le maximum de services, et elle recouvre dans la majorité des cas tout le territoire national.

Une autre raison qui a justifié le choix de l'étude du droit de grève, c'est sa cohabitation dans la même classe de normes juridiques avec le principe de la continuité, le bloc de constitutionnalité en l'occurrence, quitte à les concilier bien sûr. S'agissant de cette conciliation, il était très constructif de voir comment elle s'est réalisée, de manière très équilibrée par le juge constitutionnel français ; et ce, en reconnaissant la valeur constitutionnelle, et la force juridique identique du principe de la continuité des services et l'exercice du droit de grève. Ainsi, en traçant les limites d'application de chacun d'eux pour qu'ils cohabitent et ne s'altèrent pas mutuellement. D'où l'ingéniosité juridique du gardien de la constitution de l'hexagone.

Conclusion générale

Si on revient à l'objectif du départ, notre but convoité été de démontrer qu'au Maroc la continuité des services publics est un principe à valeur constitutionnelle, et de dresser les preuves tangibles appuyant cette idée. A cet égard nous avons la ferme conviction que la démarche était au bout de ses attentes, en dépit du fait de certaines contraintes d'ordre objectif relatives au système constitutionnel étudié. A juste titre, la confusion et l'absence de définitions officielles (Par les textes juridiques, ou par les décisions du Conseil constitutionnel) des concepts. En effet, lorsqu'on évoque la notion de principe à valeur constitutionnelle, on invoque de manière quasi-systématique le concept du bloc de la constitutionnalité, alors que dans le système constitutionnel marocain il en est couvert d'équivoques. Pis, le concept n'est pas encore exhaussé, hormis quelques apports doctrinaux.

Pour aboutir à son but, le présent mémoire a suivi une démarche optant pour la division du travail en deux parties, la première était réservée à la mise en relief du cadre théorique du concept. En effet, avant d'entamer les différends contours de l'objet étudié, il a fallu exposer sa définition, et son cheminement historique, avant d'arriver à faire le constat de son état actuel. Le pistage du concept dénommé principe à valeur constitutionnelle, est débuté par la recherche de sa genèse dans le système constitutionnel français servant de modèle au système marocain. Seulement il en résulte qu'en France, où la tradition constitutionnelle authentique élaborée au fur et à mesure de la progression de l'organisation du vivre en commun concrétisée par un cadre normatif, répondant aux aspirations du peuple et de la progression de l'esprit humain ; la notion de principe à valeur constitutionnelle trouve des antécédents, et des éléments aboutissant à son raffinement, alors qu'au Maroc elle a été juxtaposée dans la décision de Conseil constitutionnel portant numéro 124-97 de manière que l'on pourrait croire qu'elle s'est glissée inconsciemment, si on l'avait pas vu se réaffirmer dans des décisions postérieurs.

Le deuxième volet de la première partie du travail, avait pour objectif de démonter que même si cette notion de principe à valeur constitutionnelle ne se trouve pas enracinée dans le texte constitutionnel marocain et ses développements jurisprudentiels, elle faisait bien objet d'une sorte d'arrière plan de la pensée du constituant marocain, en admettant bien sûr qu'elle est le corollaire du principe sacro-saint de la continuité de l'Etat. Cet exercice avait comme procédé de faire le dépouillement du texte constitutionnel marocain pour en extraire les traits. Il était également question de mettre en exergue la compétence du Conseil constitutionnel marocain, comme étant une pièce maîtresse du système politique de ce pays concernant la régulation de l'activité normative des pouvoirs publics.

Tandis que la deuxième partie du travail, visait à rendre compte des applications pratiques du principe de la continuité comme étant un principe à valeur constitutionnelle, cela a été fait en étudiant dans un premier chapitre certaines pratiques de la vie parlementaire ayant pour finalité de porter atteinte, ou susceptibles d'apporter des altérations à ce principe, telles les démissions et d'autres pratiques provoquant la vacance de siège. Une remarque très importante à faire concernant l'application jurisprudentielle du principe de la continuité par le juge constitutionnel marocain ; en dépit du fait que le cadre théorique de ce principe est assez pauvre au Maroc, le juge constitutionnel marocain lui attribue la notoriété qu'il mérite. Pour terminer dans le deuxième chapitre avec l'étude de l'exercice du droit de grève, en l'analysant avec une démarche qui l'oppose au principe de la continuité, et ce, en faisant une lecture des lignes directrices du projet de loi organique relative à l'exercice du droit de grève, et l'examen de la conciliation opérée par le juge constitutionnel français, entre le principe de la continuité en sa qualité de principe à valeur constitutionnel, et l'exercice du droit de grève qui en dispose également.

Concernant le traitement du sujet, et spécialement la documentation qui lui ait relative, nous notons que nous n'avons pas fait usage de monographie qui se rapporte directement au sujet du présent mémoire, à cause de la pénurie en la matière. De ce fait nous étions amené à exploiter des écrits et des études transversaux. Le travail se présente donc comme un assemblage d'éléments différents, mais allant dans le même sens, c'est à peu prés comme un puzzle.

En définitif, un mot à dire sur les attitudes et les points de vue exprimés, surtout lorsqu'il s'agissait de faire la comparaison entre le système constitutionnel marocain et son modèle d'inspiration, le système français en l'occurrence. Les propos pourraient avoir l'apparence de considérer ce dernier comme parfait et exempt de tout reproche, au détriment du système marocain en minimisant la portée de ses points forts. Il ne s'agissait en aucun cas d'être francophile se dévouant à outrance à faire l'éloge des vertus de ce système, mais ces propos et « jugements » sont des constats tirés de l'observation empirique. Il n'est pas aberrant de dire en fin que le juge constitutionnel français nous fascine par son souci d'émettre des décisions chargées de sens de la pédagogie, et la volonté de faire école. D'après le discours de S.M le Roi Mohammed VI datant du 9 mars 2011, l'ordre constitutionnel marocain, et particulièrement le Conseil constitutionnel va connaître un essor sans précédent, axé sur l'élargissement de ses compétences, ce qui va permettre de le resituer au sein de l'édifice institutionnel du pays.

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Loi organique31.97 relative à la chambre des représentants, promulguée par Dahir n° 1.97.185 du 04/09/1997, B.O, n° 4518 du 18/09/1997.( telle que complétée et modifiée par la loi organique n° 22.06 promulguée par Dahir n° 1.07.06 du 23/03/2007, B.O n° 5514 du 05/04/2007.

Loi organique 32.97, relative à la chambre des conseillers, promulguée par Dahir n° 1.97.186 du 04/09/1997, B.O n° 4518 du 18/09/1997.&

Loi organique n° 23.06 modifiant et complétant la loi n° 9.97 portant code électoral, promulguée par Dahir n°1.07.07 du 23/03/2007, B.O n° 5514 du 05/04/2007.

Décret n° 2.57.1465, relatif de l'exercice du droit syndical par les fonctionnaires, B.O n° 2372 du 11/05/1958.

Projet de loi organique relative à l'exercice du droit de grève préparé en 2008.

Sites Internet

www.conseil-constitutionnel.fr

www.conseil-constitutionnel.ma

www.conseil-etat.fr

www.sgg.gov.ma

www.parlement.ma/fe/

www.senat.fr

www.assemblee-nationale.fr

Table des matières

Introduction Générale 8

Première partie :La constitutionnalité du principe de la continuité des services publics 15

Chapitre I : La valeur constitutionnelle du principe de la continuité des services publics,

essence et rang dans la hiérarchie des normes 16

Section 1 : Genèse 17

Sous section 1 : Tissage du concept en France 17

Sous section 2 : Enracinement au Maroc 23

Section 2 : Les principes a valeur constitutionnelle, rang dans la hiérarchie des

normes et pouvoir normatif du juge constitutionnel 27

Sous-section 1 : Le rang des principes a valeur constitutionnelle dans la hiérarchie

des normes 28

Sous-section 2 : Le rôle du juge constitutionnel dans l'interprétation et la création

des normes constitutionnelles 32

Chapitre II : Le principe de la continuité des services publics pilier de l'ordre constitutionnel

marocain 36

Section 1 : Le texte constitutionnel et le principe de continuité des services publics 37

Sous- section 1 : Le principe de la continuité en période exceptionnelle 37

Sous- section 2 : Le principe de la continuité en période normale 39

Section 2 : Le principe de la continuité des services et la régulation des pouvoirs

Publics 41

Sous section 1 : Le déclassement législatif et la continuité des services publics 44

Sous-section 2 : L'incompétence négative et la continuité des services 48

Conclusion de la première partie 52

Deuxième partie : Le conseil constitutionnel garant de la continuité des services publics 55

Chapitre I : Le conseil constitutionnel et la marche de l'institution parlementaire 56

Section 1 : la démission des députes et la continuité des services publics 57

Sous-section 1 : Le régime général de la démission 57

Sous-section 2 : Un parlementaire peut démissionner ? 62

Section 2 : Vacance de siège et la continuité des services publics 67

Sous section 1 : Le décès et l'incompatibilité 68

Sous section 2 : L'annulation des résultats des votes et la déchéance parlementaire 73

Chapitre II : La continuité des services publics et l'exercice du droit de grève 77

Section 1 : Cadre juridique de l'exercice du droit de grève et la position

Jurisprudentielle 79

Sous-section 1 : Cadre juridique 79

Sous-section 2 : La position jurisprudentielle 83

Section 2 : Un nouveau cadre pour l'exercice du droit de grève en perspectives 88

Sous-section 1 : Lecture du projet de loi organique relative a l'exercice du droit de

Grève 89

Sous-section 2 : Le conseil constitutionnel français et la conciliation entre l'exercice

du droit de grève, et la continuité des services 91

Conclusion de la deuxième partie 95

Conclusion générale 97

Bibliographie 100

Table des matières 106

* 1 GUINCHARD (S) & MONTAGNIER (G) (sous direction), Lexique des termes juridiques, Paris, Dalloz, 2003, p.531.

* 2 Id, p. 456.

* 3 Théologien, et jurisconsulte syrien qui s'est installé à Fès entre 1906 et 1907, il a proposé aux autorités du Roi Moulay Abdelaziz un document (projet de constitution) comportant des propositions de réforme de l'Etat marocain.

* 4 Revue éditée depuis déjà 90 ans à Tanger par Faraj Abdellah a consacré quatre de ses numéro (de 57à60) à la publication d'un projet de constitution comportant 93 article.

* 5 Mohammed ZINDINNE, « la naissance du constitutionnalisme marocain » (en arabe), REMALD, n° 56, 2004, p.p. 85-92.

* 6 Cité in : Robert (J), «  Le problème constitutionnel au Maroc », RDP, 1961, p.97.

* 7 Rousset (M) & GARAGNON (J), Droit administratif marocain, Rabat, La Porte, 2003, p.57.

* 8 Discours du défunt Roi Feu Hassan II, devant la première formation du conseil constitutionnel, datant du 21 mars 1994.

* 9 ARDANT (P), Institutions politiques & Droit constitutionnel, Paris, LGDJ, 2004, pp.96-98.

* 10 NAJJAR (I) & ZAKI BADAOUI (A) & CHELLALAH (Y), Dictionnaire juridique Français Arabe, Beyrouth, Librairie du Liban, 2002, p. 228.

* 11 GRAWITZ (M), Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz, 11e éd, 2007, p. 486.

* 12 Les méthodes de recherche en sciences humaines, Document en forme pdf publié sur le web, source communiquée : les éditions de la chenelière inc, 2006, Savoir plus : outils et méthodes de travail intellectuel, 2eme éd, (Raymond robert Tremplay et Yvan Perrier).

* 13 Conseil d'Etat, «  Arrêt dame Veuve Trompier », 5 mai 1944, source : site web du conseil d'Etat.

* 14 Conseil d'Etat, «  Arrêt Amicale des annamites de Paris », 11 juillet 1956, Rec., p.317.

* 15 Conseil d'Etat, « arrêt Dehaene », 7 juillet 1950, GAJA n°78.

* 16GICQUEL Jean (P), Le conseil constitutionnel, Paris Montchrestien, 2005, p.36.

* 17 C.C fr, 71-45 D.C., 16 juillet 1971.

* 18 GICQUEL Jean (P), op.cit., p.p.38-99.

* 19 C.C fr, 73-51 D.C., 27 décembre 1973. J.O du 21/06/1970, p. 5806.

* 20 C.C fr, 71-45 D.C., 16 juillet 1971. J.O du 18/07/1971, p. 7114.

* 21 A se propos voir les décisions: 

C.C fr, 80-895 D.C., 19 janvier 1981.J.O du 22/01/1981, p. 308.

C.C fr, 80-171 D.C., 20 janvier 1981.J.O du 22/01/1981, p 308.

* 22 Informations recueillies dans l'encyclopédie électronique Wikipédia, lien : bloc de constitutionnalité-Wikipédia.mht date de consultation : 30/09/2010.

* 23GICQUEL Jean (P), op. cit.p.38.

* 24C.C fr, 71-45 D.C., 16 juillet 1971. J.O du 18/07/1971, p. 7114.

* 25 Cité in FAVOREAU (L) & LOIC (P), Les grandes décisions du conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 1995, .p 253.

* 26 C.C fr, 70-39 D.C., 19 juin 1970. J.O du 21/06/1970, p.5806.

* 27 FAVOREAU (L) & LOIC (P), op. cit, .p.259.

* 28 LUCHAIRE (F), le conseil constitutionnel, Paris Economica, 1980, p. 181.

* 29 C.C fr, 88-110, 20 juillet 1988. J.O du 22/07/1988, p.9496.

* 30 YACCOUBI (D), Le bloc constitutionnel en France (En arabe), mémoire de DESA, FSJES, Oujda, 2001, p.p.17-18.

* 31 L'expression : le caractère constitutionnel, désigne de manière indifférente tous les principe généraux du droit dégagés par le juge constitutionnel sans prendre en considération des multiples appellations (ou source) utilisés par la jurisprudence constitutionnelle.

* 32 ROUSSEAU (D), Droit du contentieux constitutionnel, Paris, Montchrestien, 1990, p.p.91-92.

* 33 Conseil d'Etat, arrêt Dehaene, datant du 7 juillet 1950, GAJA n°78.

* 34 C.C fr, 79- 105 D.C., 25 juillet 1979. J.O du 27/07/1979, p.13780.

* 35 Voir à ce sens les décisions et leurs observations :

C.C fr, 89-269 D.C., du 22 janvier 1990. J.O du 24/01/1990, p.972 & C.C fr, 89-266 D.C., 9 janvier 1990. J.O du 11/01/1990, p. 464. Cité in DIDIER (M), La pratique constitutionnelle française, PUF, Paris, 1990, p.p14et107.

* 36 LOUIS (f), LOIC (p).op.cit.p.375.

* 37 BERNOUSSI (N), «  La justice constitutionnel entre légitimité et effectivité », L'économiste, n° 3269, 5 mai 2010, p.p.32 et 33.

* 38 C.C ma, 52-95, datant du 03/01/1995, (B.O n°4291 du 25/01/1995, p.70).

* 39 HALOUI (Y), « Les règlements intérieurs des chambre parlementaires et le conseil constitutionnel » (en arabe), REMALD n° 40, 2001, p.p. 31-47.

* 40 C.C ma, 124-97, datant du 26/08/1997, (B.O n° 4514 du 01/09/97, p. 7).

* 41 C.C ma, 382-2000, datant du 15/03/2000, (B.O n° 4792 du 04/05/2000, p.13-14).

* 42 BENABDELLAH (M.A), «  la constitutionnalisation des cas d'incompatibilité », REMALD n° 33, juillet et août 2000, p.p.143-152.

* 43 C.C ma, 582-2004 datant du 11/08/2004, (B.O n° 52246 du 09/09/2004, p.p.11-16).

* 44 C.C ma, 586-2004 datant du 12/08/2004, (B.O n° 52246 du 09/09/2004, p.p.38-40).

* 45 Discours du Feu Hassan II devant les membres de la première formation du conseil constitutionnel, datant du 21/03/1994.

* 46 KELSEN (H), Théorie pure du Droit, Paris, Dalloz, 2éme éd, 1962, p.6.

* 47 TURPIN (D), Droit constitutionnel, Paris, PUF, 1992, p.97.

* 48 DELPERREE (F), « Le conseil constitutionnel : Etat des lieux », Revue pouvoirs, n° 105, 2003, p.9.

* 49 KELSEN (H), Op .cit, pp.299-354.

* 50 A ce propos voir la décision du conseil constitutionnel français : C.C fr, 71-45 D.C., 16 juillet 1971. J.O du 18/07/1971, p.7114.

* 51 TIMSIT (G), «  Science juridique et science politique selon Charles EISENMANN », mélange (La pensée de Charles EISENMANN), publié sous la direction de Paul AMSELEK, Economica, 1986, pp. 31-65.

* 52 TURPIN (D), op. Cit. p.129.

* 53 C.C ma, 580-2004 datant du 20/07/2004, (B.O n° 5240, du 19/08/2004, p.p.25-28).

* 54 C.C Fr, 2002-465 D.C, du 13 Javier 2003.

* 55 MOLFESSIS (N), « L'irrigation du droit par les décisions du conseil constitutionnel », Revue Pouvoirs, n°105, 2003l, p.p.89-101.

* 56 BRUNET (P), L'architecture du droit, mélange en l'honneur de Michel TROPER, Paris, Ecoonomica, 2006, p.p. 207-221.

* 57 C.C fr, 85-197 D.C datant du 23/08/85. J.O du 24/08/1985, p.9814.

* 58 BRUNET (P), «  Que reste-t-il de la volonté générale », Revue Pouvoirs, n°114, 2005 p.p. 5-19.

* 59 C.C ma, 475-2002, datant du 25/06/2002, (B.O n° 5201, du 05/04/2004, p.p.11-15).

* 60 ELMANAR ESSLIMI (A), Les méthodes du travail du juge constitutionnel au Maroc, publication de REMALD, collection manuels et travaux universitaire, n°65, 2006, p.p 393-435.

* 61 OURIEMCHI (H),  « Le conseil constitutionnel, acteur de l'encadrement du politique et de la construction juridique », REMALD n° 92, 2010, p.p. 69-77.

* 62 MILLER (M), « Principes d'interprétation constitutionnel et autolimitation du juge constitutionnel », exposé présenté lors d'une rencontre organisée par l'OCDE à Istanbul, en mai 1998.

* 63 A ce propos voir :

MEUNIE (J), Le pouvoir du conseil constitutionnel, essai d'analyse stratégique, Bruyant-L.G.D.J, 1994.

* 64 MEUNIER (J), « Les décisions du conseil constitutionnel et le jeu politique », Revue Pouvoirs n°105, 2003, pp.29-40.

* 65TIMSIT (G), « Normativité et régulation », Cahier du conseil constitutionnel n°21 (Dossier : La normativité), janvier 2007.

* 66 OURIEMCHI (H),  « Le conseil constitutionnel, acteur de l'encadrement du politique et de la construction juridique », REMALD n° 92, 2010, p.p. 69-77.

67 L'expression arbitrage royal recouvre plusieurs aspects de la résolution des différends politiques, notamment entre les partis politique, l'opposition et la majorité, mais dans ce cadre l'arbitrage royal désigne la résolution des conflits entre le législatif et l'exécutif.

* 68 ELMANAR ESLIMI (A), op.cit .pp. 393-435.

* 69 C.C ma, 37-94 datant du 16/08/94, (B.O n° 4271 du 07/09/1994, p.p.21-22).

* 70 ROUSSEAU (D), Droit du contentieux constitutionnel, Montchrestien 1990, Paris, p.72.

* 71 CC ma, 480-2002, datant du 15/08/2002, (B.O n°5037 du 09/09/2002).

* 72 ELMABKHOUTE (H), La responsabilité politique du gouvernement dans le système politique marocain (en arabe), mémoire de DESA, fsjes Oujda, 2002, p.91.

* 73 Texte du discours : Roi Hassan II, résurrection d'une nation (titre en arabe : ÇäÈÚÇË ÇãÉ)), Imprimerie Royale, 1987, p.379.

* 74C.C ma, 425-00 datant du 20/12/2000,(B.O n° 4866 du 18/01/2001, p.15).

* 75C.C ma, 677-08 datant du 04/03/2008, (B.O n° 5617 du 31/03/2008, p.p.10-11).

* 76 ACHERGHI (M), « Le domaine réglementaire autonome : un peu de la réalité et un peu de l'illusion » (en arabe), REMALD, n° 28, 1998, p.p 17-27.

* 77 C.C ma, 280-99, datant du 24/02/1999, (B.O n° 4674 du 18/03/1999, p.26).

* 78 HALOUI (Y), Commentaire de la décision 280-99 contenu dans le cours : Justice constitutionnelle, Filière science politique, Semestre 6, Fsjes Oujda, L'année universitaire : 2008/2009.

* 79C.C ma, 583-04 datant du 11/08/2004,(B.O n° 3298 du 09/09/2004, p.p. 16-17).

* 80 BENABDELLAH (M. A), « Sur un fondement constitutionnel contestable : Récusation et indépendance de la justice », REMALD n°57-58, 2004, p.151 et suiv.

* 81 C.C ma, 382-00 datant du 15/03/2000, (B.O n° 4792 du 04/05/2000, p.p. 13-14).

* 82 BENABDELLAH (M.A), « La constitutionnalité des cas d'incompatibilité », REMALD n°33, 2000, p.143 et suiv.

* 83 CC ma, 480-2002, datant du 15/08/2002, (B.O n°5037 du 09/09/2002, p.p.35-36).

* 84 Dahir n° 1.58.008 datant du 24 février 1958 relatif au statut général de la fonction publique, (B.O n° 2372 du 11/04/1958).

* 85 Règlement intérieur de la chambre des représentants, tel qu'adopté le 29/01/2004.

* 86 Loi organique n° 31.97 relative à la chambre des représentants tel quel a été modifié et complété par la loi organique n° 06.02 et la loi organique n° 29.02.

* 87 Article 100 du règlement intérieur de la chambre des conseillers adopté par la chambre des conseillers le 14/04/1998.

* 88 C.C ma, 426-00 datant du 19/02/2000, (B.O n° 4866, du 18/01/2001, p.p. 24-25).

* 89 C.C ma, 451-01 datant du 10/07/2001, (B.O n° 4922, du 02/08/2001, p. 29).

* 90 Traduction du service des relations extérieures du conseil constitutionnel, cité in : Hassan HALOUI, Le contentieux électoral, cas des inéligibilités et des incompatibilités parlementaires, Mémoire du Master Fsjes Oujda, 2008.

* 91 C.C ma, 678-08 datant du 04/03/2008, (B.O n° 5617, du 31/03/2008, p.p. 10-11).

* 92 C.C ma, 689-08 datant du 06/05/2008, (B.O n° 5636, du 05/06/2008, p.21).

* 93 C.C ma, 618-2006. C.C ma, 619-2006. C.C ma, 620-2006. C.C ma, 621-2006. C.C ma, 622-2006. C.C ma, 623-2006. C.C ma, 624-2006. C.C ma, 625-2006. Datant du 02/08/2006, (B.O n°5451 du 28/08/2006, p.p.8-13).

* 94 BENABDELLAH (M.A), « Le conseil constitutionnel, moralisateur ? », REMALD, n°75, 2007, p.p 133-142.

* 95 C.C ma, 213-98 datant du 28/05/1998, (B.O n° 4598 du 25/06/1998, p.p. 14-18).

* 96 Marc Van Der Hulst, Le mandat parlementaire, étude mondiale comparative, (étude sous l'égide de l'union parlementaire de Genève, 2000).

* 97 Propos recueillis du journal le Matin du 30/08/2006.

* 98C.C ma, 787-01 datant du 17/03/2010, (B.O n° 5828 du 08/04/2010, p.16).

* 99 Entre autres: L'article 7 du règlement intérieur de la chambre des représentants, tel qu'adopté le 29/01/2004. &l'article 84 loi organique n° 31.97 relative à la chambre des représentants tel quel a été modifié et complété par la loi organique n° 06.02 et la loi organique n° 29.02.

92C.C ma, 632-07 datant du 24/04/2007,(B.O n° 5527 du 21/05/2007, p.23).

* 100 C.C ma, 612-05 datant du 06/06/2005, (B.O n° 5329 du 27/06/2005, p.p. 9-10).

* 101 C.C ma, 617-06 datant du 21/06/2006, (B.O n° 5439 du 17/07/2006, p.7).

* 102 Art. 11 de la loi organique n° 31.97 relative à la chambre des représentants, promulguée par Dahir n° 1.97.185, du 04/09/1997, B.O n°4518, du 18/09/1997. Et l'article 15 de la loi organique 32.97 relative à la chambre des conseillers , promulguée par Dahir n° 1.97.186, du 04/09/1997, B.O n°4518, du 18/09/1997.

* 103 C.C ma, 710-08, du 22/07/2008, (B.O n° 5657, du 18/08/2008).

* 104 HALOUI (H), Le contentieux constitutionnel électoral : cas des inéligibilités et des incompatibilités parlementaire, Mémoire de Master, Fsjes Oujda, 2008, p. 26.

* 105C.C ma, 359-99 datant du 28/12/1999, (B.O n° 4764 du 27/01/2000).

* 106 Loi organique 32.97 relative à la chambre des conseillers, promulguée par Dahir n° 1.97.186, du 04/09/1997, B.O n° 4518 du 18/09/1997.

* 107 Ibidem.

* 108 Ibid, Art .16.

* 109 C.C ma, 636-07 datant du 17/05/2007, (B.O n°5534 du 14/06/2007, p.p.30-31).

* 110 C.C ma, 636-07 datant 17/05/2007, (B.O n° 5534 du 14/06/2007).

* 111 Loi organique n° 29.93 relative au conseil constitutionnel, promulguée par Dahir n° 1.94.124 du 25/02/1994, B.O n° 2442 du 02/03/1994. ( telle que complétée et modifiée par la loi organique n° 8.98 promulguée par Dahir° 1.98.126, du 28/09/1998, B.O n° 4627 bis du 05/10/1998).&

Loi organique31.97 relative à la chambre des représentants, promulguée par Dahir n° 1.97.185 du 04/09/1997, B.O, n° 4518 du 18/09/1997. (Telle que complétée et modifiée par la loi organique n° 22.06 promulguée par Dahir n° 1.07.06 du 23/03/2007, B.O n° 5514 du 05/04/2007.)&

Loi organique 32.97, relative à la chambre des conseillers, promulguée par Dahir n° 1.97.186 du 04/09/1997, B.O n° 4518 du 18/09/1997.&

Loi organique n° 23.06 modifiant et complétant la loi n° 9.97 portant code électoral, promulguée par Dahir n°1.07.07 du 23/03/2007, B.O n° 5514 du 05/04/2007.

* 112 C.C ma, 608-05 datant du 06/02/2005, (B.O n° 5314 du 05/05/2005, p.13).

* 113 Ibidem.

* 114 Définitions citées in, ELACHRI (B), « La légalité de la grève des fonctionnaires publics au Maroc », Actes de colloque : la grève et la fermeture entre la restriction et la liberté, publication de la Fsjes Marrakech, série colloques et journées d'études n° 29, p.327. Titre en langue arabe : ( (ÇáÅÖÑÇÈ æ ÇáÅÛáÇÞ Èíä ÇáÊÞííÏ æ ÇáÅØáÇÞ.

* 115 Liberté syndicale et la procédure de détermination des conditions d'emploi dans les fonctions publiques. Bureau international du travail Genève 1977, Rapport I. cité in ibid.

* 116 BOUJEMA (R), Droit des services public (en arabe), éd Annajah Al Jadida, Casablanca, 2000, p.p. 12.

* 117 Circulaires émise par le secrétariat du protectorat le 05/08/1954, portant n° 897 cité in, ELHARCHI (B),. op. cit. ; .p.349.

* 118 Décret n° 2.57.1465, relatif de l'exercice du droit syndical par les fonctionnaires, B.O n° 2372 du 11/05/1958.

* 119 ELACHRI (B), op. , cit. p.356.

* 120 Version arabe de l'article 14 de la constitution 1962 :

ÍÞÇáÅÖÑÇÈ ãÖãæä æÓíÈä ÞÇäæä ÊäÙíãí ÇáÔÑæØ æÇáÅÌÑÇÁÇÊ ÇááÇÒãÉ áããÇÑÓÉ åÐÇ ÇáÍÞ

* 121 ELACHRI (B), op. cit. , p366.

* 122 Arrêt de la cours suprême, chambre administrative, Mohamed ELHIHI c./ Ministre de l'éducation nationale, datant du 17/05/1961, portant n° 135, publié en langue française dans le recueil des arrêts de la cours suprême de 1970, Tome III.

* 123 BENABDELLAH (M.A), « la constitutionnalité du droit de grève dans la fonction publique », REMALD, n° 44-45, 2002, p.129 et suiv.

* 124 Arrêt de la cours suprême, chambre administrative, Idris NIDAE c. / Ministre des télécommunications, datant du 25/05/1984. Cité in : Hassan SAHIB, « Quelques problématiques de l'exercice du doit de grève au Maroc », (en arabe), actes des colloques publiés par Fsjes Marrakech, op. cit.p.377.

* 125 Tribunal administratif, Mekhnès, Chibane c. / Ministre de l'éducation national, datant du 12/07/2001, n° 63/2003, publié in REMALD n° 42, p 170.

* 126 BENABDELLAH (M.A), op.cit.

* 127 ERBII (H), «  Le droit de grève entre la jurisprudence de la cours suprême et les tribunaux administratifs ; commentaire du jugement du tribunal administratif de Ménès Chibane c. / Ministre de l'éducation nationale, REMARC, n°, 2004, p.82.

* 128 ROUSSET (M) & GARAGNON (J), Droit administratif marocain, Rabat, La Porte, 2003, p.p. 333-336.

* 129 Projet de loi organique relative à l'exercice du droit de grève préparé en 2008.

* 130 C.C fr, 71-45 D.C, datant du 16 juillet 1971. J.O du 18/07/1971, p 7114.

* 131 C.C fr, 79-105 D.C datant du 25 juillet 1979. J.O du 27/07/1979, p13780.

* 132 Cité in : FAVOREAU (L) & LOIC (P), Les grandes décisions du conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 1995, .p 375.

* 133 FAVOREAU (L) & LOIC (P), Les grandes décisions du conseil constitutionnel, Paris, Dalloz, 1995, .p 375.

* 134 C.C fr, 80-117 D.C, datant du 22 juillet 1980. J.O du 24/07/1980, p. 1867.

* 135 C.C fr, 86-217 D.C, datant du 18 septembre 1986.J.O du 19/09/1986, p.11294.






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