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L'exigence démocratique en droit international

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par Zied AYARI
Université Jean Moulin Lyon 3 - Master 2 Droit international public 2012
  

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2- La compatibilité de l'exigence démocratique avec le principe de non ingérence

L'émergence ou non de l'exigence démocratique dans l'ordre international est elle tributaire d'un droit à l'intervention démocratique ou à l'interdiction de l'intervention ? Il y certains qui soutiennent que l'intervention démocratique donne un élan à l'établissement de la démocratie, comme l'affirme le professeur Anthony d'AMATO: the invasion of  « Grenada and Panama may very well act as catalysts in the current global revolution of popular sovereignty. »224(*), Pour d'autres il n'y a point lieu d'exigence démocratique puisque l'intervention est interdite quelque soit ses motifs, à ce titre Le professeur Slim LAGHMANI déclare à propos de la contradiction des règles de droit international qui donnent à l'Etat le droit de s'auto-organiser sans ingérence des autres Etats et celles qui l'obligent à respecter le droit des citoyens d'élire et d'être élus : « La question qui nous retiendra ici est de savoir l'issue actuelle de cette contradiction. S'est elle traduite par l'apparition d'une norme du droit international général créant à la charge des Etats l'obligation d'adopter un régime démocratique et autorisant les Etats à intervenir pour établir ou rétablir la démocratie ? »225(*).

Ce lien établi nous parait d'un point de vue théorique non pertinent pour préjuger sur l'émergence ou non d'une exigence démocratique. En effet, il s'agit de deux règles distinctes, la première oblige les Etats à se doter d'un régime démocratique, la deuxième touche au droit de la responsabilité, et particulièrement aux sanctions en cas de mise en oeuvre de la responsabilité de l'Etat. Elle est censée permettre une intervention en cas de violation de la première règle. Ce qui implique que la prétendue règle d'intervention démocratique serait une norme secondaire dépendante de la violation de la règle substantielle, celle prescrivant l'établissement d'un régime démocratique.

C'est ce que décrit le Professeur Jean COMBACEAU comme « les chaînes normatives ». En effet, chaque ordre juridique doit comporter « des réseaux de normes d'application successive, et que la mise en oeuvre de certaines d'entre elles dépende du comportement des assujettis : la norme substantielle, ou toute norme non substantielle qui lui est logiquement liée, doit attacher à une conduite (celle que prescrit la norme substantielle ou toute conduite déviante par rapport à elle) des conséquences telles que l'application de la seconde norme puisse être considérée comme la conséquence - normative et non causal bien sûr - de la conduite de l'assujetti par rapport à la première ou, si l'on veut, comme la « rétribution » de cette conduite. Ainsi se constituent des chaînes normatives caractéristiques de l'ordre juridique »226(*). Même si le régime de responsabilité constitue un corollaire de tout ordre juridique, il paraît tout de même aberrant de conditionner la validité d'une norme primaire à la validité d'une norme secondaire.

De plus, la violation de la quasi-totalité des engagements internationaux, ne sont pas de nature à permettre une intervention. Ainsi le non remboursement d'une dette ou le non respect des règles environnementales ne légitime pas une ingérence à l'encontre de l'Etat qui a commis l'infraction, et nul doute de la positivité de ses obligations. De ce fait, l'existence ou non d'une norme permettant une ingérence démocratique fera l'objet d'une analyse ultérieure dans le Chapitre relatif à la responsabilité de l'Etat pour non respect de l'exigence démocratique.

Reste l'affirmation que l'exigence démocratique touche au domaine réservé des Etats et en particulier leur mode d'organisation interne, et comme l'a déclaré la CIJ en 1986 dans l'affaire des activités militaires :

« L'intervention interdite doit donc porter sur des matières à propos desquelles le principe de souveraineté des Etats permet à chacun d'entre eux de se décider librement. Il en est ainsi du choix du système politique, économique, social et culturel et de la formulation des relations extérieures »227(*)

L'institut de droit international a défini la notion comme :

« Le domaine réservé est celui des activités étatiques où la compétence de l'Etat n'est pas liée par le droit international.

L'étendue de ce domaine dépend du droit international et varie selon son développement.

La conclusion d'un engagement international, dans une matière relevant du domaine réservé, exclut la possibilité, pour une partie à ces engagements, d'opposer l'exception du domaine réservé à toute question se rapportant à l'interprétation ou à l'application du dit engagement »228(*).

Ce qui signifie que le droit international détermine, en dernier ressort l'étendue du domaine réservé. En effet, depuis le Pacte de la SDN on a rompu avec la doctrine du domaine réservé par nature229(*), son article 15, paragraphe 8 prévoit que : « Si l'une des parties prétend et si le Conseil reconnaît que le différend porte sur une question que le droit international laisse à la compétence exclusive de cette partie, le Conseil le constatera dans un rapport mais sans recommander aucune solution ».La Charte a remplacé la notion de « compétence exclusive » par « la compétence nationale » (article 2 §7)

Comme l'a déclaré le Professeur Leo STRISOWER à propos de la compétence exclusive des Etats que « cette compétence n'embrasse pas toutes les questions non encore réglées par le droit international, mais seulement celles qui sont si intimement liées à l'ordre national que l'ordre international veut les exclure en principe de son règlement »230(*).

L'étendue du domaine réservé se trouve donc, tributaire de l'évolution des relations internationales et du droit international231(*), et la CPJI s'est prononcé sur ce sujet dés 1923, dans son Avis, Décrets de nationalité en Tunisie et au Maroc :

« La question de savoir si une certaine matière rentre ou ne rentre pas dans le domaine exclusif d'un Etat est une question essentiellement relative : elle dépend du développement des rapports internationaux. »232(*)

De ce fait, même si il y avait des textes relatifs aux droits de l'homme et des peuples qui permettaient de soutenir l'apparition de l'exigence démocratique ; La bipolarisation, la pratique des Etats et la neutralité des organisations internationales ont conduit à considérer que le mode de gouvernance interne des Etats relevait de son domaine réservé. Mais depuis la fin de la guerre froide et l'hégémonie de la culture libérale, la vague de démocratisation des Etats en Europe Centrale et Orientale, en Afrique, et surtout avec le rôle que joue désormais les organisation universelles, en particulier l'ONU, nous pousse à nous intéresser aux facteurs d'une positivité nouvelle de l'exigence démocratique en droit international général.

* 224 D'AMATO (A), « The Invasion of Panama was a Lawful Response to Tyranny », AJIL, 84, 1990, pp. 516-524, p. 516.

* 225 LAGHMANI (S), « La volonté des Etats est-elle encore au fondement du droit international ?" » Cours euro-méditerranéens Bancaja de droit international, (dir) Jorge Cardona Llorens, Cours sur les problèmes fondamentaux, Vol. XI/XII, 2007-2008, pp. 55-306.,p. 242.

* 226 COMBACAU (J), « Le droit international, bric-à-brac ou système », Archives de philosophie du droit, 1986, pp. 85-105, p. 92.

* 227 CIJ, Recueil, 1986, p. 108.

* 228 Ann. IDI, 1954, vol. 45-II, p. 292.

* 229 Selon cette doctrine qui prévalait en droit international classique, le domaine réservé comprend les matières se rattachant à la vie « intime » de l'Etat, c'est à dire tout ce qui touche son organisation interne ; Voir dans ce sens la critique de la notion du domaine réservé par nature, DALLIER (P), FORTEAU (M), PELLET (A), op cit., p. 484.

* 230 Cité par VERDROSS (A), op cit., p. 274.

* 231 Voir dans ce sens le caractère évolutif de l'étendue du domaine réservé, ibid., p. 485-486.

* 232 CPJI, Décrets de nationalité en Tunisie et au Maroc, 7 février 1923, série B, n°4, p. 23-24.

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"Ceux qui rêvent de jour ont conscience de bien des choses qui échappent à ceux qui rêvent de nuit"   Edgar Allan Poe