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Les problèmes juridiques posés par la poursuite des parlementaires en RDC.

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par Ithiel BATUMIKE MIHIGO
Université Catholique de Bukavu - Licence en Droit 2013
  

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II. Les limites légales et de droit international

La loi relative à la procédure devant la Cour de cassation n'a fait que répliquer les dispositions constitutionnelles relatives aux immunités de procédure contrairement à l'ordonnance-loi n°82-017 du 31 mars 1982 relative à la procédure devant la CSJ qu'elle abroge en ce qui concerne cette matière. Une brève présentation de cette ancienne législation sera suivie des prétendues limites imposées par le Statut de Rome en matière d'immunités.

a. Les limites issues de l'ordonnance-loi sur la procédure devant la CSJ

L'article 109 de cette ordonnance prévoyait à son deuxième alinéa que : « s'il y a flagrant délit ou s'il y a des indices sérieux de corruption ou de l'existence d'un attentat contre la vie ou l'intégrité corporelle, l'OPJ ou l'OMP saisi accompli tous les devoirs requis par le droit commun jusqu'au moment où il reçoit les instructions du PGR». Cette ordonnance ajoutait à la formule traditionnelle consacrant les immunités, les cas de corruption et des attentats contre la vie ou l'intégrité corporelle. Cette atténuation sensible de l'inviolabilité se comprend aisément dans la mesure où le texte consacrant ces hypothèses est une émanation de l'exécutif et qui à l'époque était animé par le souci de réduire le parlement à une simple chambre d'enregistrement.

Les attentats à l'intégrité corporelle visés par cette ordonnance-loi semblent avoir inspiré le législateur de 2006 à introduire à l'article 10 du code de procédure pénale les infractions de violences sexuelles à côté des infractions flagrantes pour lesquelles la formalité d'informer l'autorité hiérarchique avant toute arrestation du présumé coupable cadre public n'est pas requise94(*).Quand bien même, le parlementaire est tenu d'observer le code de conduite de l'agent public de l'Etat tel que défini par le décret-loi n°017-2002 du 03 mars 200295(*), il y a lieu de constater que l'article 10 de ce code modifié ne cite pas à titre nominatif, le parlementaire dans les catégories rentrant dans la terminologie de cadre public. Encore faut-il s'interroger si agent et cadre public renvoient à une même réalité.

Il s'en dégage qu'en dehors des hypothèses constitutionnelles susmentionnées, le droit interne ne prévoit pas d'autres situations qui anéantiraient l'obligation de solliciter au préalable l'autorisation en vue de poursuivre ou d'arrêter ou encore d'instruire.

Qu'en est-il alors du droit international pénal ?

b. La controverse autour de l'inopposabilité des immunités en matière des crimes internationaux

Les dispositions constitutionnelles à caractère politique n'envisagent pas expressément le cas des crimes graves contre le droit international et que les hautes autorités de l'Etat puissent en être auteurs96(*). La constitution de 2006 ayant été élaborée quatre ans après la ratification du statut de Rome, il aurait fallu qu'elle intègre les aspects relatifs à la poursuite des crimes internationaux. En France, par ex., la révision constitutionnelle de 1999 a prévu expressément que : « les parlementaires auteurs des crimes de guerre, crimes contre l'humanité ou de génocide doivent en répondre devant la CPI »97(*). Face au silence du constituant congolais en ce domaine, il parait indiqué de rechercherla portée du défaut de pertinence de la qualité officielle posé à l'art. 27 du statut de Rome face aux immunités parlementaires prévues à l'art. 107 de la constitution.

En effet, aux termes de cette disposition, le statut s'applique à tous de manière égale, sans aucune distinction fondée sur la qualité officielle. En particulier, la qualité officielle de chef de l'Etat ou de gouvernement, de membre de gouvernement ou d'un parlement, de représentant élu ou d'agent d'un Etat, n'exonère en aucun cas de la responsabilité pénale au regard du statut, pas plus qu'elle ne constitue en tant que telle un motif de réduction de la peine.

Cette disposition qui a récemment fait l'objet des vives critiques de la part des dirigeants africains, ne consacre pas les immunités pour lutter efficacement contre l'impunité98(*).

Cet articleprévoit à son point 2 que les immunités ou règles de procédure spéciales qui peuvent s'attacher à la qualité officielle d'une personne en vertu du droit interne ou du droit international99(*), n'empêchent pas la Cour d'exercer sa compétence à l'égard de cette personne.

Il s'en suit que les immunités parlementaires consacrées à l'article 107 de la constitution sont inopérantes en cas de poursuites contre un parlementaire pour crimes internationaux.

Cependant, cette conclusion n'est pas sans soulever le débat relatif à la primauté du droit international sur le droit interne. Ce débat non tranché et dominé plus par les monistes présente le droit interne comme un ordre qui doit se conformer au droit international100(*).

Pour notre part, nous osons croire que la primauté du droit international doit être distinguée selon qu'il s'agit de la constitution ou des autres sources du droit interne. Cette solution est également partagée par notre constituant qui prévoit d'abord la suprématie des traités et accords internationaux sur les lois encore quec'est sous réserve de réciprocité101(*). Ensuite, la possibilité de réviser la constitution avant la ratification d'un traité comportant une clause contraire à la constitution102(*).Même si nombreux ont abouti à la conclusion que la constitution demeure également inférieure puisqu'appelée à être ajustée au traité international à ratifier, l'on ne doit pas perdre de vue que le traité n'entre dans l'ordonnancement juridique d'un Etat que s'il est préalablement ratifié. La condition de révision constitutionnelle qui est posée renforce le prestige et la suprématie dont jouit une constitution dans un Etat.

La constitution congolaise étant rigide, sa révision nes'obtient pas facilement dans n'importe quelles circonstances et matière103(*).En tout état de cause, la constitution demeure le fondement de la validité de l'ordre juridique d'un Etat et aucune norme ne peut lui être supérieure.

C'est ainsi d'ailleursque sont frappés de nullité les traités dont le consentement lors de la conclusion par un Etat a été exprimé en violation des dispositions d'importance fondamentale de son droit interne104(*).Ce qui nous permet de constater que les immunités parlementaires, en ce qui concerne les députés nationaux et les sénateurs, doivent être respectées même s'agissant de la poursuite des crimes internationaux car consacrées directement par la constitution qui est supérieure au statut de Rome. Surtout que l'observance de cette procédure ne fait pas échapper continuellement le parlementaire à la compétence de son juge naturel.

Cette attitude ne pourra pas par contre être observée en ce qui concerne les immunités des députés provinciaux qui résultent de la loi105(*).

Dans les cas des parlementaires Jean-Pierre BEMBA et Fidèle BABALA poursuivis par devant la Cour pénale internationale et dans bien d'autres au niveau de la RDC, nous essayerons de voir s'il n'existe pas des atteintes aux immunités parlementaires.

* 94 Exposé des motifs de la loi n°06/019 du 20 Juillet 2006 modifiant et complétant le décret du 06 Aout 1959 portant code de procédure pénale congolais, JORDC, n° 15, 47ème année, 1er Aout 2006.

* 95 Article 96 du Règlement intérieur de l'Assemblée nationale, 1ère législature de la Troisième République.

* 96 P. AKELE ADAU, « Projet de constitution. Dimension pénale et lutte contre l'impunité » in Examen critique du projet de constitution à soumettre au referendum, Congo-Afrique n°397, CEPAS, Journées sociales, p.135.

* 97 Article 53-2 inséré dans la constitution de 1958 par la révision constitutionnelle du 8 juillet 1999

* 98 Préambule du statut de Rome

* 99 En ce qui concerne les immunités de droit international, il y a lieu de constater que le défaut de pertinence n'est pas absolu car l'article 98 du statut prévoit que la Cour ne peut poursuivre l'exécution d'une demande de remise ou d'assistance qui contraindrait l'Etat requis à agir de façon incompatible avec les obligations qui lui incombent en droit international en matière d'immunités des Etats ou d'immunités diplomatiques d'une personne ou des biens d'un Etat tiers en vue de la levée de l'immunité.

* 100 Les monistes soutiennent cette suprématie en avançant le principe « pactasuntservanda » consacré à l'article 27.1 de la Convention de Vienne sur le droit des traités qui prévoit que : « Un Etat partie à un traité ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution du traité». Lire pour plus de détails, D. NGUYEN QUOC et alii, Droit international Public, 7ème édition, Paris, LGDJ, pp.277-279.

* 101 Article 215 de la constitution, JORDC, 47ème année, Numéro spécial, Kinshasa, 18 février 2006.

* 102 Article 216 de la constitution.

* 103 Articles 219 et 220 de la constitution du 18 février 2006, JORDC, 47ème année, Numéro spécial, Kinshasa, 18 février 2006.

* 104 Article 46 de la convention de viennes du 23 mai 1963 sur le droit des traités in M. CIFENDE KACIKO et S. SMIS, Op. cit., p.69 ; Voir aussi E. BOSHAB et MATADI NENGA, Op. cit., pp.28-31

* 105 Article 9 de la loi n°08/012 du 31 juillet 2008 portant principes fondamentaux relatifs à la libre administration des provinces

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