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La promesse de vente de la chose d'autrui


par Florent Kuitche Takoudoum
Université de Nice sophia antipolis - Master II droit de l'immobilier et de l'urbanisme 2007
  

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§2) les sanctions de l'inexécution

Le débiteur n'est pas tenu seulement d'une obligation de livrer une chose, mais d'une obligation d'en acquérir la propriété pour la transmettre ; il faut en déduire qu'il se trouve en état d'inexécution du seul fait qu'il n'a pas procuré la propriété, et même s'il a livré108(*). Comme toute obligation de faire, celle -ci n'est pas susceptible d'exécution forcée en nature. En effet, tout transfert de propriété suppose le consentement de celui qui acquiert. Comme l'obligation résultait d'une vente, il s'agira d'éviter à l'acheteur de payer le prix ou de lui permettre de se le faire restituer s'il l'a déjà payé, et éventuellement de le dédommager du préjudice supplémentaire que lui cause l'inexécution.

Trois types de sanctions sont envisageables à ce niveau : les nullités relative et absolue, et la résolution. Avant d'aborder l'évolution actuelle du droit en la matière (B), il convient de prime à bord d'expliquer ces trois types de sanctions (A).

A) La consistance des trois sanctions possibles

1) Nullité relative et nullité absolue

La nullité se défini comme l'anéantissement rétroactif d'un acte juridique à cause de l'existence d'un vice survenu lors de la formation de l'acte. Classiquement les nullités font l'objet d'une division bipartite qui en général donne des réponses à toutes les questions que soulève leur étude.

Ainsi lorsqu'on parle de la nullité d'un contrat, on peut entendre cette expression dans son sens plein : le contrat n'existe pas. Il est un néant juridique et ne peut produire aucun effet à l'égard des personnes. Chacun peut le méconnaître.

Mais la sanction n'est pourtant pas toujours aussi énergique. D'où une deuxième catégorie de nullités. A coté de la nullité radicale, une sorte de nullité atténuée. Le contrat existe ; il produit effet. Seulement certaines personnes peuvent l'attaquer en justice et le faire déclarer non avenu. Elles peuvent aussi renoncer à l'attaquer. On dit alors que le contrat est confirmé ; il devient pleinement valable. Dans ce second cas, on parle de contrat annulable, ou encore, en remarquant que la nullité ne peut être opposée que par certaines personnes, de nullité relative. Au premier cas au contraire, il y a nullité de plein droit, nullité absolue ou inexistence.

Comment comprendre cette dualité de sanctions ? Traditionnellement, on donne deux explications : la rationnelle et l'historique.

Rationnellement, les conditions de formation des contrats n'ont pas toutes la même importance. Elles sont de deux catégories : les conditions d'existence et les conditions de validité.

Les conditions d'existence sont celles qui sont nécessairement impliquées par la notion même de contrat, telle qu'elle résulte de la nature des choses ou de la loi. Ainsi en est-il au point de vue de la nature des choses, de l'accord de volontés, de l'existence de l'objet ou de la cause, et, au point de vue de la loi, du caractère licite de l'objet, des formes dans les contrats solennels. A défaut de ces conditions, l'acte n'existe pas juridiquement. La nullité est encourue de plein droit.

Les conditions de validité ne sont pas essentielles à l'existence du contrat. Celui-ci se conçoit logiquement malgré leur absence. Mais elles ont été introduites pour protéger certaines personnes. Il en existe deux catégories ; les unes concernent l'absence de vices de consentement (erreur, violence, dol), les autres, la capacité. Ce sont des conditions que sanctionne l'annulabilité.

Donc la différence des deux sanctions s'explique par la différence de leur raison d'être. Dans le premier cas, le contrat n'est pas viable ; il lui manque un organe essentiel. Il est mort né. Dans le second, il est complet, mais affecté d'un vice. C'est un organisme malade, qui pourra guérir (confirmation) ou périr (annulation). C'est la conception de «  l'acte-organisme ». Comme exemple du premier cas, citons la vente sans objet, et comme exemple du second, la vente affectée du vice d'erreur.

Historiquement, les deux sortes de nullité ont des origines très différentes. En droit romain, la nullité de plein droit a existé de tout temps, par la force des choses. En l'absence d'un élément essentiel, les jurisconsultes romains disaient que l'acte est nul, réputé ne pas exister.

En revanche, l'annulabilité est née d'une procédure créée par les prétoires pour protéger certaines personnes contre des actes que le droit civil reconnaissait valables : la « restitutio in intégrum ». Elle était donnée en particulier en cas de contrat atteint d'un vice de consentement ou passé par un mineur de vingt-cinq ans. Le prêteur ne déclarait pas l'acte nul, mais autorisait la personne lésée à s'adresser à lui ; après examen de l'affaire, si le cas lui paraissait digne d'intérêt, il décidait en vertu de son imperium que le demandeur serait restitué «  in intégrum », autorisé à considérer l'acte comme non avenu à son égard.

Aussi apparaissait, précisément dans les cas modernes d'annulabilité, l'idée d'un contrat provisoirement valable, mais qui peut être rendu inefficace par décision du magistrat.

L'annulabilité moderne est sortie de cette « restitutio » par deux modifications : elle est devenue une action en justice ordinaire par la disparition de l'antithèse entre le «  juridictio » et « l'imperium ». Ensuite, la loi a supprimé la part d'arbitraire qui résultait à Rome de la « cognito causae ». Elle a déterminé elle-même les conditions dans lesquelles le contrat serait annulable, au lieu de s'en remettre à l'appréciation du magistrat. Si ces conditions sont réunies, le juge est désormais obligé de prononcer la nullité.

Certains auteurs ont tenté d'élaborer une doctrine plus nuancée, qui comporte une division tripartite des nullités ; à côté de la nullité relative, ils distinguent l'inexistence et la nullité absolue. D'après Aubry et Rau, si les éléments absents sont des éléments de fait, il y a inexistence (absence d'objet). Si l'acte contrevient à un commandement ou à une défense de la loi, il y a nullité (vente ayant un objet illicite). La différence pratique est la suivante : en cas d'inexistence, « l'inefficacité de l'acte est indépendante de toute décision judiciaire ». En cas de nullité au contraire, il faut un jugement qui le reconnaisse. Cette distinction est intéressante, mais la plupart des auteurs la déclarent sans utilité. En effet, logiquement, on ne conçoit pas la différence de sanction entre les deux cas : que l'élément absent soit un élément de fait ou un élément légal, il a la même importance, par la force des choses dans le premier cas, par la volonté de la loi dans l'autre. Quant à prétendre que l'absence d'un élément légal ne pourrait entraîner la nullité du contrat sans décision de justice, c'est confondre entre la preuve et le fonds du droit ; que l'élément qui manque soit de fait ou de droit, légalement le contrat est mort-né ; seulement, il faut le prouver. Mais il n'y a pas de distinction entre les deux catégories à cet égard. La doctrine classique se ramène donc à une division bipartite en nullité de plein droit et annulabilité.

Les conséquences de la division bipartite des nullités peuvent s'étudier sous trois angles :

· Faut-il agir en justice ? Si l'acte est mort-né, il n'y a pas d'action en justice, car on n'annule pas le néant. Ceci ne signifie pas qu'on ne soit jamais obligé de passer par la justice pour faire constater une nullité de plein droit ; Un acte est nul de droit, mais il peut exister en apparence ; il se peut qu'à l'occasion de cet acte, un certain état de fait ait été créé, par exemple, l'acte nul est constaté par un titre ; ou bien encore, il a reçu exécution. Il faudra pour cela agir en justice (revendication, répétition de l'indu). Et il faudra prouver la nullité.

Mais cette action est toute différente d'une action en annulation ; son but n'est pas de faire anéantir le contrat, mais de faire constater une nullité préexistante. La sentence judiciaire constate la nullité ; elle ne la crée pas. Il n'y a pas à proprement parler d'action en nullité. En conséquence, quand un acte est nul de plein droit, les parties peuvent immédiatement se comporter comme si l'acte n'était pas intervenu.

· Qui peut invoquer la nullité ? L intéressé peut invoquer la nullité : il n'y a rien à l'égard de personne.

· La nullité peut-elle disparaître par confirmation ou prescription ? Il n'y a pas possibilité de confirmation : le néant ne peut rien produire. Ce qui ne vit pas ne peut être appelé à la vie. Il n'y a pas de création ex nihilo dans le monde juridique, non plus que dans le monde matériel. La nullité est donc irrémédiable.

De même la prescription est impossible. La nullité ne peut se couvrir par le laps de temps : l'acte auquel manque une condition d'existence ne l'acquerra pas par l'écoulement d'un délai ; d'autre part, on ne peut invoquer ici le principe de l'article 2262 du code civil d'après lequel toutes les actions se prescrivent par trente ans ; car il ne s'agit pas ici proprement d'action en nullité ; la nullité existe indépendamment de toute action en justice109(*).

Ainsi la situation de fait résultant de l'acte nul pourra indéfiniment être remis en question, et cela entraîne une certaine instabilité dans les relations d'affaires. Mais la doctrine classique fait observer que le danger est en réalité moins grand qu'il ne parait. En effet d'après elle, deux situations peuvent se présenter : ou bien l'acte n'a pas reçu d'exécution. Dans ce cas, on pourra toujours opposer la nullité à l'action fondée sur l'acte nul, ce qui sera sans inconvénient pratique, puisque l'état antérieur sera maintenu ; ou bien l'acte a été exécuté. Alors la partie qui se prévaut de la nullité, pour recouvrer l'objet de sa prestation, intentera, soit une action en répétition de l'indu, soit une action en revendication. Or l'action en répétition de l'indu se prescrit par trente ans (article 2262). Ce n'est pas la nullité qui sera couverte par le délai de trente ans, mais en pratique, l'action en remboursement sera prescrite.

L'action en revendication, elle, ne se prescrira pas, car le droit de propriété ne s'éteint pas par la prescription acquisitive. Mais l'autre partie qui a été mise en possession, a pu usucaper ; elle opposera alors la prescription acquisitive, ce qui n'a rien de commun avec la prescription extinctive d'une action en nullité. Et l'on conclu qu'en fait, il n'y a pas d'inconvénient pratique à l'imprescriptibilité de la nullité.

Si l'acte est viable, mais viciée, la solution sera inverse. Il faut agir en justice, car un acte d'autorité anéantissant l'acte est nécessaire. Cette action est réservée à certaines personnes, celles qu'il s'agit de protéger. La confirmation est possible ; elle fait disparaître le vice ; l'acte malade est guéri. De même, la nullité est sujette à prescription par voie de confirmation tacite. Qu'en est-il des effets de l'annulation ?

Pour assurer une sanction à la règle de droit violée par l'acte nul, il faut que celui-ci soit sans effets. Dans les cas où l'action en nullité n'est pas nécessaire, il se produit de plein droit. Si l'action en nullité est nécessaire, c'est-à-dire dans la très grande majorité des cas, l'acte a une existence au moins apparente. Il a produit effet. Il faut donc pour atteindre le but de la nullité que l'acte agisse, non seulement sur l'avenir, mais sur le passé, qu'elle ait un effet rétroactif. Celui-ci n'est pas dans ce cas une fiction ; il se justifie par le but même de l'annulation, qui est d'assurer la sanction d'une règle de droit violée.

Cette solution n'est pas indiquée par la loi, qui n'offre ici qu'un texte général, insuffisant et prêtant à équivoque. L'article 1234 cite l'annulation parmi les modes d'extinction des obligations. Cela est inexact. Quand une obligation s'eteint par exemple par le payement, son existence antérieure n'est pas réputée rétroactivement effacée. Les effets qu'elle a produit dans le passé subsistent. Au contraire, l'annulation fait réputer que le contrat n'a jamais été formé. En conséquence, tous les effets que le contrat avait pu produire dans le passé disparaissent. C'est là une conséquence très grave qui entraîne l'anéantissement de situations acquises. D'où le danger des actions en nullité au point de vue de la sécurité du crédit. Ce danger est particulièrement grave en droit français en raison du principe fondamental qui fait du contrat, en même temps qu'un acte créateur d'obligations, un titre translatif de droits réels. Il en résulte que l'annulation du contrat entraîne l'anéantissement, non seulement des obligations qu'il a créées entre les parties, mais encore des droits réels qu'il a pu constituer. Or ces droits réels ont pu être transmis à des tiers qui ignoraient le vice du contrat ; ces tiers seront atteints par l'annulation.

Entre les parties, lorsque l'annulation intervient avant que le contrat soit exécuté, la situation est très simple : l'exécution ne pourra pas être demandée. La situation au contraire est plus délicate lorsque le contrat a été exécuté. Il faut remettre les choses en l'état, donc restituer les prestations, ce qui entraîne un règlement de compte compliqué entre les parties.

A l'égard des tiers, l'annulation anéantit les actes de disposition fait par la partie pour laquelle elle est obtenue. Relativement à ces actes eux même, l'effet de l'annulation est écarté si le tiers est protégé par la prescription acquisitive ou par l'article 2279 du code civil.

Ainsi délimité, l'effet de l'annulation à l'égard des tiers reste considérable et très dangereux. Il y aurait grand intérêt pour les tiers à connaître les causes de nullité. Mais la loi française n'a pas organisé à cet égard une publicité suffisante.

Concernant la prescription de l'action en nullité, la règle générale d'après laquelle les actions s'éteignent par prescription (article 2262 du code civil) s'applique aux actions en nullité. Toutes les fois que la nullité est mise en oeuvre par une action, l'action se prescrit, même si la nullité est absolue. Cette solution, contraire à la théorie classique, est celle de la jurisprudence110(*).

La durée de l'action est en principe de trente ans ; mais des exceptions très importantes sont introduites par l'article 1304 qui organise dans de nombreux cas d'action en nullité une prescription plus courte que la prescription extinctive de droit commun (article 2262 du code civil) : dix ans au lieu de trente. Qu'en est-il à présent de la résolution pour inexécution ?

* 108. En ce sens, Vallimaresco, observation sur cassation romaine, 3 novembre 1937, cette revue, 1983, 865.

* 109. Contra, req, 5 mai 1879, S. 79. 1. 313, D. 80. 1. 145, notes Beudant.

* 110. Aff ; des frères de saint-viateur, Req., 5mai 1979, S ; 79. 1. 313, D. 80. 1. 165.

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"Il faut répondre au mal par la rectitude, au bien par le bien."   Confucius