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Le plafonnement de la taxe professionnelle

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par Sophie Deligiannis
Université de Strasbourg - Master 2 Recherche Droit public général 2009
  

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C. L'adoption d'une position libérale adoptée par la Haute Assemblée

La jurisprudence du Conseil d'Etat a interprété « l'excédent hors taxe » mentionné au 1 du II de l'article 1647 B sexies du CGI comme devant être calculé après déduction de l'ensemble de ces prélèvements. En effet, elle n'a pas subordonné la possibilité de déduire certains prélèvements fiscaux du calcul de la valeur ajoutée à la condition qu'ils figurent dans le Code général des impôts.

Le Conseil d'Etat a eu l'occasion de juger, dans sa première décision Sté William Pitters du 5 février 1988, que la valeur ajoutée à retenir pour le plafonnement des cotisations de taxe professionnelle est égale à l'excédent de la production de l'entreprise, au cours de la période de référence, après déduction des contributions indirectes, et notamment des droits de fabrication sur les alcools et les spiritueux53.

Aussi, dans l'affaire Sté d'exploitation de la Vallée des Belleville du 7 juillet 2004, l'administration a refusé la déduction des taxes acquittées par la société au titre de la loi « Montagne » en sa qualité d'exploitant d'engins de remontée mécanique. Le commissaire du gouvernement Laurent Vallée54 avait relevé que l'administration était allée plus loin que sa doctrine puisqu'elle considère que seule la TVA peut être déduite, à l'exclusion de toute

52 Ibid.

53 L. VALLEE, « Comment se calcule le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF 10/04, n° 123, p. 48-50.

54 Ibid.

autre taxe. Le fondement de sa position repose, selon lui, sur le fait que le législateur de 1980, en écrivant « excédent hors taxe », n'a pas voulu modifier sur ce point le régime antérieur de définition de la valeur ajoutée, prévu par le décret de 1979 qui n'excluait que la TVA de la production. L'administration paraît vouloir inciter le juge administratif à modifier sa jurisprudence55.

Or, la solution retenue par le Conseil d'Etat s'inscrit dans la continuité de la jurisprudence Sté William Pitters du 5 février 1988. Il affirme clairement que l'interprétation des mots « hors taxes » figurant à l'article 1647 B sexies du CGI, pour déterminer la valeur ajoutée, doit exclure de la valeur ajoutée l'ensemble des taxes qui sont directement incorporées au prix des produits vendus ou des services fournis par l'entreprise, que ces taxes figurent ou non au CGI. Cette acception des termes « hors taxes » permet d'assurer la cohérence économique de la notion de valeur ajoutée entre les entreprises.

En l'espèce, le Conseil d'Etat en a donc conclu que les taxes (l'une communale et l'autre départementale) sur les remontées mécaniques prévues aux articles L 2333-49 et L 3333-4 du Code général des collectivités territoriales étaient déductibles du calcul de la valeur ajoutée. Il a donc censuré la position de l'administration fiscale, en ne se limitant pas aux impositions figurant dans les deux premières parties du livre Ier du CGI. En outre, il ne semble pas se fonder sur la nature de l'impôt en cause, mais sur le critère de l'incorporation au prix des produits ou des services du prélèvement56, critère qui a, en revanche, l'inconvénient d'être peu clair et peu précis.

Le fait de plafonner la cotisation de la taxe professionnelle due par un contribuable en fonction de la valeur ajoutée qu'il a produit revient à déterminer l'impôt en fonction de sa contribution à un accroissement de richesse57. Par conséquent, il semble logique d'exclure les prélèvements répercutés ou incorporés dans le prix de vente, telles les taxes sur le chiffre d'affaires et les contributions indirectes, du calcul de la valeur ajoutée, ce qui a pour effet d'augmenter le dégrèvement accordé au titre du plafonnement.

55 Cet argument a déjà été exposé par Th. Le Roy, dans ses conclusions, concernant l'affaire William Pitters du 5 février 1998, mais il n'avait pas été suivi. Cf. Dr. fisc. 39/88, concl. 1765.

56 Le traitement fiscal des impôts et taxes dans la détermination de la valeur ajoutée, Option finance n° 837 du 6 juin 2005, p. 39 et s.

57 L. VALLEE, « Comment se calcule le plafonnement de la taxe professionnelle en fonction de la valeur ajoutée ? », BDCF 10/04, n° 123, p. 48-50.

III. La difficulté pratique de la détermination des éléments entrant dans le calcul de

la valeur ajoutée

Le choix du redevable d'inscrire telle charge ou tel produit dans un compte non mentionné par l'énumération à l'article 1647 B sexies, plutôt que dans un compte y figurant, n'est pas anodin. En effet, ce choix peut se faire dans un but d'optimisation fiscale, c'est-à-dire à minorer le montant de la valeur ajoutée. Mais il n'est pas illégitime tant qu'il n'est pas manifestement contraire à une règle comptable.

Toutefois, les litiges concernant l'inclusion de certains comptes dans la valeur ajoutée résultent davantage des incertitudes réelles entourant la définition retenue par l'article 1647 B sexies du CGI que de la volonté de mettre en oeuvre des stratégies d'optimisation fiscale. Ainsi, dans l'affaire SA Algeco du 6 décembre 2006, la société requérante a exclu du calcul de la valeur ajoutée, au titre de la production de l'exercice, le produit des cessions des constructions mobiles en cause (à savoir les algecos), effectuées au terme de la période de leur location. Selon elle, ces cessions présentent le caractère d'immobilisation puisqu'elles étaient destinées à servir de façon durable à l'activité de l'entreprise. Ainsi, les cessions d'immobilisations, représentatives de produits exceptionnels, ne peuvent être pris en compte pour le calcul de la valeur ajoutée.

Or, ce n'est pas parce que les constructions mobiles sont immobilisées que leurs cessions, après une période de location, constituent un caractère exceptionnel. En effet, l'activité même de la société requérante est de louer et de vendre des algecos. Cette activité de vente est donc habituelle, ordinaire, et non accessoire. Par conséquent, les sommes en litiges résultant des cessions de constructions mobiles constituent des ventes entrant dans la production de l'exercice au sens et pour application de l'article 1647 B sexies du CG I58.

En réalité, la société requérante a voulu se voir appliquer la même logique comptable et fiscale qu'il faudrait appliquer à la vente de son siège social, par exemple. En effet, les « ventes » mentionnées au II de l'article 1647 B sexies ne comprennent pas les produits de cessions d'éléments d'actifs, selon la société. Lorsqu'une entreprise sort de son actif un bien qu'elle cède, elle dégage une plus-value égale à la différence entre la valeur de cession et la valeur nette comptable de ce bien. Elle ne créée pas de richesse, de valeur ajoutée au sens

58 L. VALLEE, « Plafonnement : définition de la valeur ajoutée selon les dispositions du plan comptable général », RDF, 18 octobre 2007, n° 42, p. 30-32.

de cet article car une telle cession n'entre pas dans « la production de l'exercice » au sens de ces dispositions59. Toutefois, cette thèse n'a pas convaincu le juge fiscal.

Section 2 : L'évolution jurisprudentielle vers une définition spécifiquement fiscale

Lorsque le plafonnement en fonction de la valeur ajoutée a été institué par la loi du 3 janvier 1979, le décret du 29 décembre 1979, pris pour application de ces dispositions, précisait que les éléments de calcul de la valeur ajoutée devaient être pris en compte « tels qu'ils sont définis par le plan comptable général ». En revanche, la référence expresse au plan comptable général n'a pas été reprise par le III de l'article 12 de la loi du 10 janvier 1980, codifié à l'article 1647 B sexies du CGI. Rien ne permet cependant de penser que le législateur a souhaité substituer la référence aux normes comptables au profit de définitions fiscales autonomes60. Ainsi, les catégories d'éléments comptables, énumérées à l'article 1647 B sexies du CGI, qui permettent de déterminer la valeur ajoutée, semblent se fonder sur le plan comptable en vigueur au moment de l'adoption de la loi du 10 janvier 1980, à savoir celui de 1957 (I). Cependant, les nécessités du réalisme du droit fiscal exigent, dans certaines hypothèses, une dérogation au moins implicite au plan comptable général (II). Aussi, le principe d'autonomie du droit fiscal permettrait d'écarter une écriture comptable régulière et fondée, pour l'application d'un texte fiscal qui renvoie aux normes comptables (III).

I. Le fondement des éléments comptables composant la valeur ajoutée sur les
dispositions du plan comptable général de 1957

Les rubriques énumérées par l'article 1647 B sexies du CGI, en vue de calculer la valeur ajoutée, s'interprètent à la lumière de la définition comptable (A). Toutefois, avec l'adoption du nouveau plan comptable général en 1982, sensiblement différent de celui de 1957. La question qui fut soulevée consistait à savoir si la référence aux règles comptables par

59 Ibid.

60 G. GOULARD, « Qu'est-ce qu'une subvention d'exploitation entrant dans le calcul de la valeur ajoutée, pour l'application du plafonnement de la taxe professionnelle (art. 1647 B sexies) ? », BDCF 3/03, n° 37, p. 36-39.

l'article 1647 B sexies du CGI devait ou non tenir compte de cette modification. Le juge de l'impôt semble avoir opté pour une référence glissante aux normes comptables. En effet, afin de déterminer si une charge ou un produit doit être rattaché à l'énumération de l'article 1647 B sexies du CGI, il faut se reporter au plan comptable général dans leur rédaction en vigueur lors de l'année d'imposition concernée (B).

A. L'interprétation du contenu de chaque rubrique de l'article 1647 B sexies du CGI, à la lumière de la définition comptable : le maintien d'une définition purement fiscale de la valeur ajoutée

Afin de déterminer le contenu des différents éléments intégrés à la notion de valeur ajoutée, au titre de l'article 1647 B sexies du CGI, le juge fiscal s'est interrogé sur le fait de savoir s'il fallait ou non se référer au plan comptable général de 1957 (ci-après : « PCG 1957 ») en vigueur lorsque cet article a été adopté en 1980. Les termes de l'article 1647 B sexies du CGI, de même que les travaux préparatoires, semblent trancher en faveur d'une réponse positive61. En effet, le II de l'article 1647 B sexies du CGI énumère les postes à prendre en compte pour procéder au calcul de la valeur ajoutée. Certains de ces postes ont été directement repris des postes du PCG 1957 applicable au moment de l'adoption de la loi du 10 janvier 1980. Ainsi, le législateur, en adoptant cette loi, a exprimé sa volonté non équivoque de fixer la définition de la valeur ajoutée sur les règles comptables.

Le Conseil d'Etat a pris acte de la volonté du législateur, d'abord implicitement, dans son arrêt Gagnevin du 27 juin 199062. Il a ainsi estimé que les frais financiers n'étaient pas déductibles de la valeur ajoutée, dès lors qu'ils n'entraient pas dans la catégorie des « frais divers de gestion » au sens du PCG 1957. Par la suite, il a explicitement rappelé, dans son arrêt Clavé du 26 juillet 199163, que les éléments énumérés par l'article 1647 B sexies correspondent aux catégories de charges ou produits, définis par le PCG 1957. Après avoir relevé que les éléments énumérés par l'article 1647 B sexies du CGI correspondaient aux catégories de charges, identiquement désignées, qui étaient définies par le PCG de 1957, le Conseil d'Etat en a déduit qu'il y a lieu de se référer aux définitions du plan. Ainsi, le juge

61 Y. BENARD, « Taxe professionnelle : controverse autour de la valeur ajoutée », RJF 11/06, p. 962-969.

62 CE 27 juin 1990 n° 72948 et 74164, Gagnevin, RJF 8-9/90 n° 1047.

63 CE 26 juillet 1991 n° 81975 et 95802, Clavé, RJF 10/91 n° 1251.

fiscal a conclu que les dépenses d'approvisionnement en fioul et linge étaient déductibles dès lors qu'elles relevaient de poste « achats de l'entreprise » du PCG 1957 alors que les dépenses d'eau, de gaz et d'électricité ne l'étaient pas dès lors qu'elles relevaient du poste « travaux, fournitures et services extérieurs » de ce même plan comptable.

Toutefois, la définition de la valeur ajoutée posée par le législateur reste une définition propre au droit fiscal. L'énumération du II de l'article 1647 B sexies du CGI ne coïncide pas exactement avec l'ensemble des postes comptables à prendre en compte pour le calcul de la valeur ajoutée au sens comptable. En effet, cette énumération peut exclure des éléments que le droit comptable inclurait, ou l'inverse (CE 26 juin 1987 n° 52046, SA Scopk et n° 52047 SA Socanord)64.

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"En amour, en art, en politique, il faut nous arranger pour que notre légèreté pèse lourd dans la balance."   Sacha Guitry