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Le trafic des enfants au bénin: analyse des conditions socio-juridiques et du cadre administratif

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par El-Oumar ABOUBAKAR
Université de Parakou - Maà®trise es sciences juridiques 2009
  

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Chapitre 1er : Signification et causes profondes du trafic des enfants

Le trafic des enfants a pour effet non seulement, l'exploitation sexuelle des enfants mais également leur utilisation pour des travaux parfois ignobles.

Une définition plus ample et une identification plus approfondie de quelques causes profondes nous permettront de mieux appréhender ou mieux connaître le phénomène du trafic des enfants.

Section 1 : Significations et manifestations du trafic des enfants.

Il s'agira ici dans un premier temps de définir le concept «trafic des enfants«, puis dans un second temps de décrire les différentes manifestations du phénomène.

Paragraphe 1 : Signification du phénomène.

Pour mieux appréhender le phénomène du trafic des enfants, une appréciation se fera sur le plan juridique que sociologique.

A/ Approches juridiques du trafic des enfants.

Il est très difficile de définir le trafic d'enfants car il renvoie à des réalités très différentes selon les pays. Traite ou trafic d'enfants constituent deux termes très semblables.

En effet, depuis l'année 2000, le terme juridiquement consacré sur le plan international est celui de traite des enfants, et non celui de trafic. Le débat opposant l'usage en français du mot « traite » à celui de « trafic » pour définir et désigner le problème lié au placement d'enfants à des fins d'exploitation a donc été tranché, sur le plan du droit international, par l'élaboration en anglais de deux Protocoles additionnels à la Convention des Nations- Unies contre la criminalité transfrontalière4.

4 Convention de Palerme du 15 juin 2000 : l'un, appelé Protocole de Palerme, « visant à prévenir et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants » ; l'autre, portant « sur le trafic illicite de migrants par terre, air et mer ».

Lors de la traduction en français de ces deux protocoles, un groupe d'experts internationaux, essentiellement composés de juristes, a établi une double équivalence entre les termes « trafficking/traite » (terme utilisé dans la définition du Protocole de Palerme) et « smuggling/trafic » (défini comme le fait de faire passer une frontière à des migrants de façon illicite ou de les placer en suite dans une situation d'exploitation). En effet, qu'il n'y a eu aucun consensus sur le terme "trafic"5.

Les différentes définitions existantes sont souvent contestées et fortement débattues lors des rencontres et conférences sur la question de l'exploitation des enfants.

Plusieurs définitions existent au sein des Nations Unies, de l'Union Européenne, du Bureau International du Travail et d'autres organisations internationales.

En 1994, l'Assemblée Générale des Nations-Unies s'est approchée d'une définition globale du "trafic" comme étant "le mouvement illicite et clandestin de personnes à travers les frontières nationales et internationales, en grande partie venant des pays en développement et de quelques pays avec des économies de transition. Ainsi le but final, est de forcer femmes et jeunes filles dans des situations d'exploitation sexuelle ou économique accablantes au bénéfice des recruteurs, trafiquants, aussi bien que d'autres activités illégales liées au trafic, tels que le travail domestique forcé, les faux mariages, l'emploi clandestin et les fausses adoptions.".

Pourtant, d'après l'étude de l'OIT, la définition est incomplète. Elle n'inclut pas les jeunes garçons et les hommes qui sont également parfois victimes du trafic6.

En 1996, le Parlement Européen a défini le trafic des êtres humains comme: "l'action illégale d'une personne qui, directement ou indirectement, encourage un citoyen d'un pays tiers à entrer ou rester dans un autre pays en vue de l'exploiter en utilisant la duperie ou n'importe quelle autre forme de coercition, en abusant de la situation vulnérable ou du statut administratif de cette personne".

Une autre définition assez claire est celle proposée dans le rapport préliminaire préparé pour le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la Violence contre les Femmes.

5Terre Des Hommes : Les petites mains des carrières de pierre, Cotonou, 2005, p. 5.

6Terre Des Hommes : Les petites mains des carrières de pierre, Cotonou, 2005, p. 6.

Dans le rapport, le mot "trafic des femmes" signifie: "tous les actes qui sont liés au recrutement et/ou au transport d'une femme (ou d'une jeune fille) à l'intérieur ou hors des frontières nationales en vue du travail ou des services au moyen de violence, d'abus d'autorité ou de position dominante, de servitude pour dette, de déception ou d'autres formes de coercition".7

Quant au Bureau International du Travail (BIT), il définit la traite des enfants comme "le recrutement et le transport légal ou clandestin d'un enfant - consentant ou non - à travers une frontière, généralement mais pas toujours organisés par un intermédiaire: parents, membres de la famille, enseignants, proxénètes ou autorités locales. A destination, l'enfant est contraint par la force ou la tromperie à exécuter certaines tâches dans des conditions d'exploitation."

Dans une autre étude se concentrant sur le trafic des enfants en Afrique de l'Ouest et du Centre, le trafic désignerait "l'ensemble du processus et des conditions par lesquelles un enfant est retiré du champ de la protection et de l'autorité parentales, pour être considéré comme une valeur marchande à un moment quelconque de ce processus. Il est ainsi constitué de tout acte comportant le recrutement, le transport, le recel ou la vente de personnes, impliquant la tromperie, la contrainte ou la force, la servitude pour dette ou la fraude, entraînant un déplacement de l'enfant à l'intérieur ou à l'extérieur d'un pays".

Dans le Protocole additionnel à la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies, portant sur l'implication des enfants dans les conflits armés ainsi que la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, la vente d'enfants y est définie comme suit :

« La vente d'enfants s'apparente à tout acte ou toute transaction faisant intervenir le transfert d'un enfant de toute personne ou de tout groupe de personnes à une autre personne ou un autre groupe contre rémunération ou tout autre avantage».8

7 Rapport préliminaire des Nations- Unies sur la Violence contre les Femmes, UNICEF décembre 2005, p. 5.

8 Protocole additionnel à la Convention relative aux droits de l'enfant des Nations Unies, concernant l'implication des enfants dans les conflits armés ainsi que la vente d'enfants, la prostitution des enfants et la pornographie mettant en scène des enfants, Paris, 2003, p. 22.

Sont reconnus comme infractions le fait d'offrir, de remettre ou d'accepter un enfant, quel que soit le moyen utilisé, aux fins d'exploiter l'enfant à des fins sexuelles, de transférer les organes de l'enfant à titre onéreux ou de soumettre l'enfant au travail forcé».

Finalement, en prévision des travaux de clôture de la Commission des Nations Unies sur la Prévention du Crime et la Justice Criminelle, plusieurs organisations internationales ont proposé d'inclure certaines normes à ce protocole en particulier celui relatif au trafic des femmes et des enfants.

Ces organisations suivent de très près les travaux de la Commission : en effet, ce protocole constituerait le premier et le seul traité international contenant une définition du trafic des femmes et des enfants. Ces normes sont extraites d'instruments internationaux relatifs aux droits humains. Elles ont pour but de protéger et de promouvoir le respect des droits humains des personnes qui ont été victimes de trafic, incluant celles qui ont été assujetties à la servitude, au travail forcé et/ou à toute pratique comparable à l'esclavage. Ces organisations proposent également une définition du trafic, des personnes victimes de trafic et des trafiquants. Elles proposent que les Etats adoptent une législation conforme aux définitions suivantes :

Le trafic inclut tous les actes et tentatives en vue de commettre des actes impliquant le recrutement, le transport à l'intérieur ou au delà des frontières, l'achat, la vente, le transfert, l'accueil ou l'hébergement d'une personne

§ (a) entraînant l'utilisation de la déception, la coercition (incluant l'utilisation, la menace ou l'abus d'autorité) ou la servitude pour dette ;

§ (b) dans le but de placer ou retenir cette personne dans des conditions de servitude involontaire (domestique, sexuelle), de travail forcé, ou de situation de quasi esclavage, dans une communauté différente de celle dans laquelle vit cette personne. 9

Dans le contexte béninois, il peut signifier le placement d'un enfant à l'intérieur ou à l'extérieur du pays qui ne respecte pas toutes les conditions exigées en la matière par les lois en vigueur au Bénin.

9 Commission des Nations Unies sur la Prévention du Crime et la Justice Criminelle, Genève, 2004, p. 18.

En principe, « la traite des enfants est le fait d'aliéner ou tenter d'aliéner soit à titre onéreux, soit à titre gratuit la personne ou la liberté d'un mineur, tandis que le trafic des enfants désigne le commerce illicite et clandestin des mineurs, l'acte de commerce impliquant l'idée de répétition »10.

Puisqu'il s'agit ici du trafic des enfants, le terme « enfant » signifie ici « toute personne âgée de moins de dix-huit (18) ans»11. C'est un être en développement. Du fait de son jeune âge (moins de 18 ans), il est sous la responsabilité des adultes (à qui il doit respect et soumission) qui finissent par l'embrigader et l'assujettir. Son avis importe très peu dans les décisions qui, pourtant, le concernent.

En un mot le trafic d'enfants peut être compris comme étant « tout acte comportant le recrutement, le déplacement, le détournement, le transport, l'hébergement, le recel, la mise en gage ou la vente de mineurs et basé sur la tromperie, la contrainte ou la force, la servitude pour dette ou fraude entraînant un déplacement de l'enfant à l'intérieur ou à l'extérieur d'un pays»12.

De ce qui précède, force est de constater que le trafic international des enfants, surtout dans le Sud Bénin, n'est que le résultat d'un certain malaise économique et social. Cela nous amène à considérer les approches sociologiques du phénomène en matière du trafic des enfants.

B/ Approches sociologiques du trafic

On entend par trafic suivant une approche sociologique, les différentes conceptions ou perceptions qu'ont les véritables intéressés du phénomène du trafic des enfants et ses implications sociales.

Selon la tradition africaine, l'enfant est considéré comme une richesse. Il est considéré comme un don de Dieu et on en prend donc grand soin. Cela se traduit par l'attachement et la protection dont les parents entourent leurs enfants.

10 E. ADJOVI, Forces et faiblesses de la législation béninoise en matière de lutte contre le trafic et la traite de enfants, document dactylographié, page 1.

11Article 2 de la Loi N° 2006-4 du 05 avril portant conditions de déplacement des mineurs et répression de la traite d'enfant en République du Bénin.

12 Manuel d'information, d'éducation et de communication pour la lutte contre les migrations et le trafic des enfants 1ère édition, septembre, 2002, p. 11.

Pour ce faire, soucieux de leur éducation, les parents prennent parfois l'initiative de confier leurs enfants à d'autres parents (l'oncle ou la tante de l'enfant), ou, une personne plus nantie et moins empressée qu'eux, à même de leur assurer un avenir meilleur.

Cependant, la question est de savoir comment en est-on arrivé au trafic des enfants ?

En effet, on confiait à un tiers pour en assurer la garde ou la tutelle : c'est ce qu'on appelait le « placement d'enfant ». En réalité, il n'y avait rien de dégradant puisqu'il traduisait d'une certaine façon, la solidarité légendaire des familles en Afrique.

Mais aujourd'hui, avec le phénomène du trafic des enfants, ce placement traditionnel a laissé place à un système avide de main-d'oeuvre infantile qui s'apparente à une simple livraison de marchandises. Ainsi, la bonne tradition du placement de l'enfant s'est transformée en un trafic dont l'enfant est l'objet.

En réalité, le placement traditionnel normalise le départ des enfants dans le contexte du trafic. Concrètement, les trafiquants profitent de l'existence de cette tradition pour masquer leur pratique mercantile ou cupide.

Mais ce qui facilite avant tout ce phénomène semble être la pauvreté. Car l'enfant devient comme une charge pour ses parents qui, face aux difficultés quotidiennes de la vie, l'envoient très tôt sur le marché du travail afin qu'il devienne une source de revenus. A partir de là, on peut dire que, sociologiquement, le trafic d'enfant est une migration temporaire qui va générer une promotion économique et sociale pour l'enfant et sa famille.

Somme toute, on peut comprendre le trafic des enfants comme étant une transaction illégale, mettant en présence plusieurs acteurs à savoir : les entremetteurs locaux ou étrangers et les parents de l'enfant. Il repose sur des réseaux villageois ethniques, familiaux et professionnels. L'enfant apparaît comme une marchandise ou un article d'échange. Ce trafic est rendu possible grâce à la perméabilité des frontières, aux conditions de vie difficiles des régions pourvoyeuses d'enfants.

Comment se manifeste donc ce phénomène ?

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"Des chercheurs qui cherchent on en trouve, des chercheurs qui trouvent, on en cherche !"   Charles de Gaulle