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La condition juridique des étrangers en zone CEMAC. Contribution au diagnostic de l'intégration personnelle en Zone CEMAC

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par Eric- Adol GATSI TAZO
Université de Dschang Cameroun - Diplôme d'études approfondies  2009
  

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CONCLUSION

La condition des étrangers est donc à la fin une situation qui oscille entre les « consécrations théoriques et [les] hésitations politiques ».200 D'abord, les consécrations théoriques ou juridiques, à la différence de ce qui est remarqué sous d'autres cieux comme en Union Européenne, montrent une extrême prudence du législateur en ce qu'il ne consacre des libertés qu'en direction des personnes précises et limitativement énumérées. Bien plus, certaines consécrations des libertés reconnues aux ressortissants communautaires font l'objet de beaucoup de légèreté dans la formulation si bien qu'on pourrait conclure à une consécration dans le seul but de s'arrimer à la nouvelle donne mondiale sans réelle volonté de conférer aux ressortissants communautaires une situation confortable. Pour ce qui est des hésitations politiques, elles concernent les réticences étatiques et leur manque de volonté de suivre le mouvement initié par le législateur, et constituent de ce fait même le plus grand blocus remarqué en matière d'intégration personnelle. Ceci dit, on remarque que, par exemple, la libre circulation telle que voulue par le législateur communautaire n'est prévue qu'en la faveur des catégories précises de personnes : agents économiques, étudiants, chercheurs, enseignants et formateurs. Le Marché Unique communautaire en matière d'intégration personnelle est alors un marché restreint, du moins en l'état actuel du droit communautaire.

Pourtant, si le problème de l'intégration personnelle en CEMAC se trouve dans la prudence législative et la non volonté étatique quant à l'application des droits reconnus, il reste qu'il existe en la matière une absence de sensibilisation qui aurait pour but et conséquence de mettre au courant des droits consacrés et de tous leurs implications les citoyens bénéficiaires des libertés consacrées. En effet, on peut reprocher à la CEMAC d'initier un processus d'intégration trop politique qui laisse de côté les citoyens sans les intégrer d'une manière comme d'une autre dans le processus de prise de décisions, mais aussi en ne mettant pas en place des mécanismes nécessaires pour leur sensibilisation. Le fait est que beaucoup de ressortissants de la CEMAC ne se sentent pas concernés par le processus d'intégration personnelle initié dans la Communauté et ne sont même pas au courant des droits consacrés en leur faveur.

200 Pour reprendre les termes de GNIMPIEBA TONNANG (E) : Op. cit.

Ceci explique aussi l'extrême pauvreté, sinon la quasi inexistence du contentieux relatif à ces libertés. En effet, on remarque un rôle trop passif de la CJC en matière de libertés communautaires dû à l'ignorance des individus de leurs droits qui ne sauraient dès lors saisir le juge. Il faut aussi accuser le laxisme du juge communautaire qui, à travers son pouvoir d'auto saisine notamment en matière d'interprétation, devrait préciser les contours des droits et veiller ipso facto à leur application correcte. Par ailleurs, il est à déplorer la pauvreté tout aussi frappante du droit dérivé en ces matières, alors que celui-ci joue un rôle très important dans la protection des droits à travers une précision qui rend impossibles les dérives étatiques. Les textes primaires sont souvent formulés en des termes trop génériques qui nécessitent des précisions par des textes du droit dérivé, ainsi que la définition de certaines notions floues. En Union Européenne, par exemple, le droit dérivé est abondant et joue un rôle prépondérant dans la confection du droit communautaire dans l'ensemble et des règles relatives à l'intégration personnelle en particulier. En CEMAC par contre, les règlements qui sont prévus par les traités et conventions en application des libertés consacrées sont pour la plupart non encore pris, ce qui rend peu fluide le dispositif communautaire en la matière.

Par ailleurs, il importe de mentionner que l'intensité des flux migratoires entre les Etats de la zone CEMAC est conditionnée par certains facteurs comme l'ouverture ou non à la mer de certains pays, ou la présence ou non dans ceux-ci des matières premières procuratrices d'emplois. C'est pourquoi on assiste à des flux migratoires d'une densité en deux temps : une densité intense en direction des pays ouverts sur la mer et témoignant de nombreuses ressources naturelles comme le Cameroun, le Gabon, le Congo et depuis peu la Guinée Equatoriale ; et une autre légère en direction des pays enclavés et en retard de croissance économique par rapport aux autres que constituent le Tchad et la RCA. Il importe de relever aussi la proximité de certains pays comme le Nigeria avec le Cameroun et la RDC avec le Congo qui oriente la perméabilité des frontières en direction des espaces étatiques non communautaires en ce sens que le Cameroun et le Nigeria d'une part, et le Congo et la RDC d'autre part entretiennent des flux transfrontières plus intenses que ceux qui existent entre ces Etats et d'autres Etats de la Communauté.201

Enfin, il faut tout de même reconnaître que les flux transfrontières remarquables entre les pays de la CEMAC demeurent plus ou moins intenses en raison de la porosité des frontières due aux dynamismes marchands illégaux et aux proximités des peuples des

201 NDAME (J-P) : « Dynamismes marchands illégaux, perméabilité des frontières et intégration régionale en Afrique Centrale. L'UDEAC : Bilan critique de ses 35 années d'existence » in Dynamiques d'intégration en Afrique Centrale. Intégration Afrique, Tome 1 Novembre 2001, p.429.

différents pays. En effet, s'il est accordé que les frontières en Afrique Noire et particulièrement en Afrique Centrale ont parfois été instituées ex nihilo et recoupent parfois les peuples unis, la conséquence reste que ces peuples conservent le réflexe des échanges entre eux. C'est le cas des Haoussa au Nord du Cameroun et au Sud du Tchad, et des Fang qui sont partagés au Sud Cameroun, au Gabon et en Guinée Equatoriale et dont « les solidarités lignagères facilitent le passage des frontières »202. C'est dire qu'il existe des échanges interétatiques inévitables entre ces Etats et qui relèvent davantage de l'informel que de ce qui est prévu par les textes communautaires. C'est une situation pas forcément néfaste qui devrait inspirer le travail du législateur et le pousser à consacrer des droits qui opèrent un brassage effectif de toutes les populations de la Communauté sans en oublier les autres, et par ce fait même, marquer un pas décisif en direction de l'accomplissement de l'espace CEEAC dont la CEMAC constitue un élément catalyseur.

202 Ibid., p. 435.

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