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Apéritif et sociabilité. Etude de la consommation ritualisée et traditionnelle de l'alcool

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par Anaà¯s Gayot
Université d'Aix-en-Provence - Master 1 d'anthropologie sociale et culturelle 2007
  

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b- L'impact de l'influence publicitaire

En 1900, explique Gilbert Garrier, le vin français se vend mal. Pour relancer le marché de l'alcool, on n'hésite pas à faire appel aux sciences médicales. Certes des plantes aux "qualités médicales incontestées" composent ces breuvages : des vins (Quinquina, Byrrh, Guignolet etc.) préconisés pour leurs vertus, sont dits "tonifiants", "toniques" et "régénérateurs". Entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle, les formules : "Appétit, force et plaisir, chaque jour buvez du Byrrh", "Au quina, au fer et à la viande", "Dubo, Dubon, Dubonnet" sont des slogans qui affluent53(*). Les apéritifs sont recommandés pour tous. On offre une image positive de la femme élégante, distinguée et "mondaine", buvant un verre. Ce sont alors des slogans, cette fois-ci, à connotation sexuelle qui fleurissent. On peut voir des affiches où un médecin et une demi-mondaine vante un apéritif, "l'absinthe parisienne", en proposant aux passants : " Bois donc, tu verras après"54(*). Ces campagnes, relançant le commerce de l'alcool, font l'apanage des distillateurs. Soulignons que "cette vogue des apéritifs" coïncide avec les campagnes massives anti-alcooliques55(*). Le concept d'anti-alcoolisme apparaît par ailleurs durant cette même période de la seconde moitié du XIXe siècle. L'alcoolisme, dont Véronique Nahoum-Grappe évoque, est considéré comme "maladie du corps et tare sociale"56(*). Si l'ivresse est condamnée par les textes religieux et moraux, elle ne l'est pas médicalement car "le geste de, l'invitation à, « boire un coup » est anodin moralement et bénéfique physiquement, puisqu'il s'agit le plus souvent de boire du vin ou de l'eau-de-vie, boissons qu'un médecin peut prescrire"57(*).

c- La valeur gustative des boissons

Aujourd'hui, boire un "verre" n'est plus connoté par sa représentation médicale, bien qu'elle en soit toujours imprégnée. La saveur des breuvages est plutôt mis en avant. Ainsi, Jean-Pierre Albert, dans un article intitulé « La nouvelle culture du vin »58(*), ou encore les « manières de boire » de Thierry Rosso59(*), exposent cette tendance de la "dégustation". Les goûts et les odeurs remplacent l'atout médical des boissons. Les "clubs d'oenologie" ou encore les "« bars à vin »", se multiplient. On souhaite devenir des amateurs et connaisseurs de vin. Éduquer son palais, boire intelligemment, distinguer le bien-boire du mal-boire par sa connaissance gustative est une attitude promue. Une affiche publicitaire, récemment, explore cet aspect gustatif. Deux grands verres de bière de marque Leff, et des assiettes garnies d'"amuse-gueules" suggèrent d'apprécier la qualité de leur boisson, enrichi par le slogan : "Autant de saveurs que d'apéritifs".

On réalise à quel point les prescriptions et influences médicales ou scientifiques, ainsi que les promoteurs des ventes d'alcool ont joué (et joue toujours) un rôle primordial dans le mouvement des comportements sociaux et dans les représentations collectives. Les arguments du XIXe siècle, prônant les effets sur la santé et sur la libido, ne pouvaient que porter ses fruits sur les manières de concevoir et d'approcher les boissons enivrantes. C'est justement parce qu'elles sont enivrantes et la cause de désordre public, social et moral, que les boissons alcoolisées suscitent toujours de l'ambivalence de la part, notamment, des instances religieuses. Cependant, diabolisé ou vénéré, l'alcool va au delà des questions religieuses, économiques ou sanitaires. Il est, en effet, ancré dans les pratiques populaires. Les arguments se succèdent et évoluent dans le temps, pour répondre aux besoins du consommateur.

Prendre un apéritif aujourd'hui ne suscite pas l'improbation de la société, bien au contraire. Comment a-t-il réussi à supplanter la vague anti-alcoolique du XIXe siècle ? Comment sommes-nous passés du médical à la saveur ?

* 53 _ GARRIER, Gilbert. 1998. Ibid., p. 276.

* 54 _ NOURRISSON, Didier. 1990. « Le discours par l'image : l'iconographie anti-alcoolique ». In G. Caro (dir.) : De l'alcoolisme au Bien Boire, tome 1. Paris : L'Harmattan, p. 115.

* 55 _ GARRIER, Gilbert. 1998. Op. Cit., p. 276.

* 56 _ NAHOUM-GRAPPE, Véronique. 1990. « Les "santés" du crocodile en larmes, ou quelques hypothèses sur l'histoire du buveur ». In G. Caro (dir.) : De l'alcoolisme au Bien Boire, tome 1. Paris : L'Harmattan, p. 106.Nous explorerons cet aspect dans la 4ème partie, "le tabou de l'alcoolisme".

* 57 _ NAHOUM-GRAPPE, Véronique. 1989 b. « "Boire un coup..."», Terrain, n°13, (Boire).

* 58 _ ALBERT, Jean-Pierre. 1989. « La nouvelle culture du vin », Terrain, n°13, (Boire).

* 59 _ ROSSO, Thierry. 2006. « Manière de boire - L'apprentissage de la dégustation dans les "bars à vin" », Socio-Anthropologie, n°15, (Boire).

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