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La responsabilité de protéger au regard de la crise libyenne

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par Hippolyte LUABEYA Pacifique
Université de Kinshasa RDC - Licence 2010
  

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00. INTRODUCTION GENERALE

01. PROBLEMATIQUE

L'histoire renseigne que dans les relations internationales, l'idée d'aller dans un pays étranger pour y « aider » la population en détresse est ancienne. Au XIXe siècle, on parlait alors « d'intervention d'humanité ». C'est par ce terme que les Européens qualifiaient leurs actions pour aller, officiellement, sauver les chrétiens vivants en Turquie, mais officieusement, pour déstabiliser le Sultan de Turquie, Abdülhamid II. Au nom de cette « intervention d'humanité », des « atrocités » furent commises1.

Dans son ouvrage, De jure belli ac pacis, Grotius y faisait mention et Vattel affirmait que « toute puissance étrangère est en droit de soutenir un peuple opprimé qui lui demande son assistance ». C'est sur cette base que s'est développée au XIXè siècle la doctrine de l'intervention d'humanité, en vertu de laquelle un droit d'intervention unilatérale existe lorsqu'un gouvernement viole sur son territoire les droits de l'humanité par des excès de cruauté et d'injustice envers sa propre population2.

Mais dès son avènement en 1945, l'Organisation des Nations Unies s'est construite sur le principe sacro-saint de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats tel que mentionné à l'article 2, paragraphe 7 de sa charte constitutive et à la résolution 2625 (XXV) du 24 octobre 1970. Ce principe est affirmé traditionnellement par le droit international public général. Il constitue l'expression de la souveraineté étatique. Il est au centre de la théorie du domaine réservé de l'Etat3.

1ROUGIER Antoine, « La théorie de l'intervention d'humanité », in Revue générale de droit international public, t. XVII (1910), page 468 et suivantes.

2 GROTIUS Hugo cité par ROUGIER Antoine, « La théorie de l'intervention d'humanité », in Revue générale de droit international public, t. XVII (1910), p.468. Précisons que dans son ouvrage De iure belli ac pacis (1625), Hugo GROTIUS avait déjà abordé la possibilité d'intervenir dans le cas où un tyran commettrait des actes abominables.

3 BELANGER Michel, Droit international humanitaire, Mémentos, Paris, Gualino, 2002, p.85

2

L'ONU n'a jamais voulu consacrer un principe contraire à celui-ci. Par conséquent, ce principe sera au coeur du droit international et va guider les relations internationales jusqu'au stade actuel.

Ce postulat établit que l'Etat est seul maître sur son territoire. Dans ce sens, aucune intervention, quelle que soit sa nature, d'une tierce personne sur son territoire n'est admissible sans son consentement préalable. Le principe de non-ingérence touche, en effet, de près à la question du respect des droits de l'homme4.

C'est ainsi que les Etats ont cherché à apporter des limites à l'application de ce principe en recourant aux notions telles que l'intervention d'humanité, l'intervention humanitaire et le droit d'ingérence humanitaire.

Au demeurant, l'idée d'ingérence humanitaire est apparue durant la Guerre du Biafra (1967-1970), conflit ayant entraîné une épouvantable famine, largement couverte par les médias occidentaux mais totalement ignorée par les chefs d'États et de gouvernement au nom de la neutralité et, du sacro-saint principe de non-ingérence. Ce conflit a entraîné la mort de un à deux millions de personnes, selon les estimations5.

Les atrocités vécues dans cette guerre et les graves violations des droits de l'homme y perpétrées ont permis d'aboutir à des mécanismes pour y remédier. C'est ainsi que la doctrine a théorisé certains principes qui mettaient l'homme au centre de toutes les actions politiques des Etats et cette dernière est allée plus loin en créant même des Organisations Non Gouvernementales ayant pour but de porter secours aux populations en guerre en l'occurrence Médecins sans frontière.

4DOR Virgine, De l'ingérence humanitaire à l'intervention préventive. Vers une remise en cause des principes du droit international, Mémoire, Institut européen des hautes études internationales. Diplôme européen des hautes études internationales, 2002-2003, p.11

5GUISNEL Jean, « Derrière la guerre du Biafra, la France », in Histoire secrète de la Ve République (sous la direction de FALIGOT Roger et GUISNEL Jean), La Découverte, 2006, 2007, pp. 147-154.

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C'est partant de cette situation que l'on a abouti à la théorie d'ingérence humanitaire. Le concept a été théorisé à la fin des années 1980, notamment par le professeur de droit Mario BETTATI et l'homme politique Bernard KOUCHNER. Ces derniers ont alors parlé d'un droit d'ingérence humanitaire.

Ce concept encourageait et justifiait le recours à la force internationale prévu dans le cadre des Nations Unies pour protéger les populations menacées à l'intérieur de leurs propres frontières. Les Etats ont depuis lors tenté de justifier leurs interventions armées dans les affaires intérieures des autres Etats par des motifs nobles tels que la défense des droits de l'homme, la défense des minorités, celle de leurs ressortissants expatriés ou d'autres motifs d'humanité6.

Mais le constat malheureux qui a été fait est qu'il y avait une utilisation abusive de ladite théorie. Plusieurs abus d'intervention ont alors été enregistrés au point qu'on assista même aux interventions non coordonnées.

Ainsi, pour arriver à favoriser une meilleure compréhension de la difficulté de concilier l'intervention à des fins de protection humaine et la souveraineté7, il a été créé en septembre 2000 par le Gouvernement canadien, répondant à l'exhortation du Secrétaire Général de l'ONU, la Commission internationale de l'intervention et de la souveraineté des Etats (CIISE). Cette dernière, pour satisfaire au mandat qui lui a été attribué, va élaborer un rapport intitulé la « Responsabilité de protéger ».

Par ailleurs, il y a lieu de mentionner que ce rapport a été élaboré à la suite de certains travaux des Nations Unies tels que le rapport mondial sur le développement humain, le rapport Brahimi, etc. Le terme responsabilité de protéger deviendra depuis lors un principe parmi tant d'autres en droit international.

6 BOUCHET-SAULINER Françoise, Dictionnaire pratique du droit humanitaire, Paris, Edition La Découverte, 2006, p.310

7 CIISE, « La responsabilité de protéger », Ottawa, Centre de recherche pour le développement international, décembre 2001, p.2

8 CIISE, Op-cit, p.VIII

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La question s'était posée en ces termes : « lorsqu'il s'agit de protéger les personnes physiques par celui-là même qui en a la charge (l'Etat) et que ces personnes sont exposées à des graves violations de leurs droits, si l'Etat est défaillant, faut-il croiser les bras ? Tel est le problème de la responsabilité de protéger. Ce principe pose le problème d'intervention humanitaire.

En réponse à cet appel, l'ONU a admis que les Etats souverains ont la responsabilité de protéger leurs propres citoyens contre les catastrophes qu'il est possible de prévenir (meurtres à grande échelle, viols systématiques, famine). S'ils ne sont pas disposés à le faire ou n'en sont pas capables, cette responsabilité doit être assumée par l'ensemble de la communauté des Etats8.

Ce principe a connu son application dans la crise libyenne. Tout a commencé le 15 février 2011 lorsque les premières manifestations ont eu lieu en Libye. Ces manifestations ont connu une forte répression de la part du gouvernement du colonel Mu'ammar Kadhafi. Elles ont eu lieu à l'occasion du procès de prisonniers morts en détention. Leurs mères se sont rassemblées devant le tribunal. Dans la soirée, elles sont rejointes par les avocats protestant contre l'arrestation de leur collègue, Fathi Tirbil qui défendait les prisonniers morts lors du massacre d'Abou Salim.

Le 21 février 2011, Human Rights Watch publie un bilan provisoire faisant état de 233 morts, auxquels il ajoute deux jours plus tard 62 tués à Tripoli, ce qui porte le bilan à un minimum de 295 morts. Selon la Coalition internationale contre les criminels de guerre (ICAWC, International Coalition Against War Criminals), le bilan est au matin du 22 février 2011 de 519 morts, 3 980 blessés et au moins 1 500 disparus. Alors que le ministre italien des Affaires étrangères Franco Frattini estime que le bilan de plus de 1 000 civils tués est crédible, le régime de Kadhafi publie le soir du 23 février 2011 un bilan de 300 morts, dont 58 militaires, chiffre qui concorde avec le bilan de la Fédération internationale des droits de l'homme (FIDH) publié le matin, qui estimait le nombre de victimes entre 300 et 400.

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Selon la Ligue libyenne des droits de l'Homme, fondée par le propre fils de Kadhafi, Saif al islam, il y aurait eu depuis le soulèvement 6 000 morts, dont 3 000 dans la seule ville de Tripoli, 2 000 à Benghazi, et 1 000 dans d'autres villes.

Face à cette situation tragique de la population libyenne que le Conseil de Sécurité des Nations Unies va prendre deux résolutions (une première le 26 février 2011 : résolution 1970 et une seconde le 17 mars 2011 : résolution 1973) dans lesquelles il rappelle que les autorités libyennes ont la responsabilité de protéger le peuple libyen. La résolution 1973 est d'ailleurs allée plus loin jusqu'à autoriser une intervention militaire en Libye.

L'autorisation par le Conseil de Sécurité de l'usage de la force dans le contexte de la crise libyenne pose un certain nombre de question : qu'est-ce que la responsabilité de protéger ?; comment ce principe a-t-il vu le jour en droit international?; quel est son contenu exact ?; dans quelles conditions peut-il être invoqué contre un pouvoir établi ?; l'intervention de l'OTAN en Libye est-elle restée dans les limites de la responsabilité de protéger ?

C'est à ces questions que nous tenterons de répondre dans cette

étude.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand