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Tap-tap bwafouye face a l'urbanisation de port-au-prince (une approche ethnosociologique du transport collectif a port-au-prince)

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par Theuriet DIRENY
Université d'état d'Haiti - Licence en anthropo-sociologie 2000
  

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DEUXIEME PARTIE: CADRE THEORIQUE ET CONCEPTUEL

CHAPITRE II.- APPROCHE THEORIQUE

Port-au-Prince la capitale et la première ville de la République d'Haïti assiste, depuis des décennies, à l'augmentation effrénée de sa population. Une situation dont les villes du monde entier, développées et sous-développées, affrontent en dépit des problèmes qui en découlent. Si dans les villes des pays occidentaux cette augmentation fait l'objet d'une grande planification; dans les villes des pays du tiers-monde elle semble être livrée à elle même.

Aussi, assiste-on avec cette question d'augmentation de la population, à l'émergence de nouvelles zones résidentielles, et ceci d'année en année, dans la périphérie de Port-au-Prince. Son aire géographique, en conséquence s'agrandit avec pour corollaire l'allongement de la distance entre les zones résidentielles et le centre-ville considéré comme l'espace de concentration des différentes activités. Ce double phénomène: augmentation de la population et agrandissement de l'aire géographique de Port-au-Prince traduit en peu de mots l'urbanisation de la ville de Port-au-Prince. Une urbanisation qui, pour répéter le sociologue C. Souffrant, est en porte à faux. C'est-à-dire une urbanisation qui n'est reposée que sur l'insuffisance agraire du monde rural, l'instabilité socio-économique des villes de province d'un côté et, de l'autre côté, sollicitée par des causes qui engendrent la torsion de la vie sociale à Port-au-Prince. Cette expression est tout-à-fait significative quant à la non-planification ou l'informel dans laquelle évolue la ville de Port-au-Prince et son système de transport collectif.

Ville du tiers-monde, Port-au-Prince est incapable de satisfaire même les besoins primaires de sa population grandissante. Son réseau routier, le plus sollicité d'Haïti, compte tenu de l'importance des activités menées dans cet espace qui représente aussi bien la capitale politique du pays mais aussi la capitale économique et financière, accuse des carences marquées du point de vue de l'état des chaussées et du niveau de service. Les problèmes de circulation se posent de façon cruciale, car il n'existe pas d'itinéraire de contournement de la partie urbaine dense de la capitale. Cela se traduit par des embouteillages monstres dans les principales artères de la capitale même en dehors des heures de pointe. Cela est évident, car Port-au-Prince est devenu la ville où des bidonvilles pullulent et ne laissent pour tout espace de circulation que des rues de 3 à 4 mètres de larges. De véritables couloirs où des véhicules ne peuvent circuler que dans un sens mais, où souvent on voit le contraire.

Dans cette logique, quels sont les angles théoriques à partir desquels peut-on cerner la problématique du transport collectif dans la ville de Port-au-Prince?

S. Brouk, évoquant la question de l'urbanisation dans les villes du tiers-monde et suivant une approche ethno-démographique avance l'idée que Dans plusieurs pays en voie de développement, l'afflux de la population rurale vers les villes (particulièrement vers les grandes villes et, en premier lieu, vers les capitales) est supérieur à la demande en main d'oeuvre ce qui grossit l'armée des chômeurs complets et partiels.14(*)

Ce point de vue théorique rencontre en grande partie celui de J.M. Hoener qui dans une vision économique émit la théorie suivante: l'exode rural joue un rôle de tout premier ordre d'autant qu'il a contribué largement au peuplement des villes même si aujourd'hui, il ne participe plus que pour un tiers seulement à l'urbanisation du tiers monde.

(...) Souvent cette urbanisation se concentre essentiellement sur quelques villes, voire sur la capitale (...) qui compte plus de 50% de la population urbaine.

(...) La concentration de l'urbanisation et donc l'omniprésence de la ville primatiale, sont sans doute les causes majeures de l'absence d'un réseau urbain équilibré et d'une armature urbaine fonctionnelle. D'après la théorie de l'urbanisation définie par Zipf (1949), la deuxième ville est deux fois plus petite que la première, la troisième trois fois plus petite, etc. Or cette loi oublie l'importante exception de Jefferson, selon laquelle l'existence d'une très grande ville conduit à l'absence de villes de tailles intermédiaires à côté de la grande ville, et à la présence de villes de tailles beaucoup plus restreintes. La rareté des villes moyennes ou secondaires, qui répondent à une conception fonctionnelle et non pas quantitative est à la fois la conséquence d'une urbanisation en partie parasitaire et la cause du sous-développement économique.

Dans le domaine des transports, continue t-il à dire, le tiers-monde pauvre apparaît particulièrement mal loti en infrastructure (...) Quant aux routes et aux pistes, la situation est bien pire. Les ornières, les nids de poules... ou d'autruches, les longues déviations qui évitent les ponts effondrés ou les digues détruites, etc. mettent à rude épreuve les camions et les cars qui sont amortis beaucoup trop vite, d'où un surenchérissement des coûts de transport (...) De nombreuses études montrent en effet que le mauvais état des routes et des pistes en général est le prétexte à des prix de transport exorbitants, ce qui signifie une extorsion de la rente foncière quasi usuraire puisque l'essentiel des marchandises transportées reste agricole15(*).

F. Asher et J. Giard font une approche à la fois économique, urbanistique et politique de la problématique du transport collectif urbain liée à l'urbanisation. Leur approche complète les théories déjà évoquées qui s'intéressaient beaucoup plus aux aspects démographique et économique en négligeant, dans une certaine mesure, l'aspect spatial de l'urbanisation et la véritable implication des transports dans ce processus. Selon eux: « Le développement des transports est une exigence essentielle pour assurer et accélérer la circulation et la reproduction du capital.

Aborder le problème des transports urbains c'est évoquer une des manifestations les plus criantes de la crise de l'urbanisation qui, quand elle est accélérée, est grosse consommatrice d'espace.

En effet l'ensemble des problèmes urbains, les localisations de diverses activités et des logements impliquent des problèmes de déplacement. Plus s'accroissent les unités urbaines en dimension et en complexité, plus s'approfondit la ségrégation fonctionnelle de l'espace et plus les liaisons internes prennent de l'importance.

La crise des transports urbains est donc d'abord le produit de la crise urbaine dans son ensemble. Elle présente une acuité particulière dans la mesure où la majeure partie des déplacements dépend du choix de localisation privés alors que les transports exigent des procès très socialisés.

La solution à la crise généralisée des transports passe donc nécessairement par une politique d'urbanisme d'ensemble cohérent et par une importante politique de transport en commun ».16(*)

Cette interaction dégagée, à travers l'approche de F. Ascher et J. Giard, entre les politiques d'urbanisme et de transport, nous permet de comprendre que la ville pour se développer doit être l'objet d'une planification incluant le court, le moyen et le long terme à côté des paramètres infra structuraux et super structuraux. Il n'en reste pas moins vrai que si la révolution industrielle a imprimé sa marque à la ville, les moyens de transport ont, de leur côté, contribué grandement à dynamiser cette impression en la rendant plus manifeste. En conséquence la combinaison de ces deux phénomènes fait de la ville un espace de grande mobilité ou de déplacement massif de population. Une population qui, au fil des années, se renouvelle constamment. En d'autres termes, la dynamique de la ville ne peut se concevoir en dehors des moyens de transport collectif urbain qui, à l'instar de l'habitat, l'emploi, le commerce et les activités culturelles, en assurent aussi l'équilibre de la ville. Ainsi, penser l'urbanisation indépendamment des transports collectif c'est contribuer à la naissance de véritables monstres urbains où la concentration des activités peut transformer l'espace en question en un hyper centre d'activités. A ce niveau, nous nous référons à Y.H. Bonello qui, d'un point de vue théorique présente l'hyper centralité comme un mal entraînant la perte des grands équilibres de la ville. Selon sa théorie, le diagnostic de ce mal permet de dégager clairement les causes symptomatiques qui sont:

· « une gestion inadaptée à travers des institutions éloignées des réalités, ou trop sensibles aux pressions

· les mutations et les déséquilibres engendrent une crise du logement qui frappe les plus démunis

· le mal vivre des jeunes la destruction des milieux de vie urbains, du tissus social, des solidarités et des systèmes de régulation ».17(*)

A la lumière de ces théories comment comprendre la ville de Port-au-Prince (comparée à d'autres villes du monde), son urbanisation et ses moyens de transport collectif par analogie avec les différents types de tap-tap et particulièrement le « tap-tap bwafouye »? En termes de signification, que charrient les différents types de tap-tap et particulièrement le « tap-tap bwafouye » dans la ville de Port-au-Prince? Sont-ils tous une forme de réponse à l'organisation socio-économique ou de distribution spatiale de la ville de Port-au-Prince? Qu'adviendra t-il du système de transport collectif dans la ville de Port-au-Prince si l'urbanisation de Port-au-Prince reste non-planifiée?

* 14 S. Brouk, Processus ethno démographique, La population du monde au seuil du XXIe siècle, Editions Naouka, Moscou 1986, p.64

* 15 J. M Hoener, Le tiers-monde entre la survie et l'informel, L'Harmattan, Paris 1995, p.51-98

* 16 F. Asher et J. Giard, Demain la ville (urbanisme et politique), Editions Sociales, Paris 1975, p.25, 100

* 17 Y. -H Bonello, Op. Cit, pp. 33, 34.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault