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Les voies d'exécution OHADA et le droit à  un procès équitable

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par Alain Brice FOTSO KOUAM
Université de Dschang/ Cameroun - DEA 2009
  

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§.2- LES LIMITES SUBJECTIVES : LES IMMUNITES D'EXECUTION

L'immunité d'exécution ou immunité de saisie est une faveur exceptionnelle de la loi en vertu de laquelle certains débiteurs ne peuvent faire l'objet d'une exécution forcée. Du fait de cette immunité, les biens de ces personnes deviennent, en quelque sorte, insaisissables. Pourtant immunité et insaisissabilité ne recouvrent pas strictement la même réalité, bien que relevant de la même inspiration, l'intérêt général356(*).

En effet, tandis que l'immunité est essentiellement orientée vers la personne du bénéficiaire, l'insaisissabilité, elle, a trait aux biens. L'une aurait ainsi un caractère personnel et l'autre un caractère réel. En outre, alors que l'insaisissabilité empêche seulement le créancier d'aller jusqu'au bout de son droit contre le débiteur en soustrayant certains biens seulement de la saisie, l'immunité d'exécution, tout en mettant hors d'atteinte l'ensemble du patrimoine du débiteur, interdit toute mesure de contrainte, conservatoire ou exécutoire à son encontre. C'est dire que l'immunité d'exécution est une mesure assez énergique tant elle ressemble à un bouclier357(*). On pourrait même dire qu'elle existe sans considération du principe le plus essentiel du droit, celui de l'effectivité réelle des décisions de justice358(*) désormais garantie fondamentale du procès équitable. 

Ces clarifications faites, l'immunité d'exécution résulte de l'article 30 de l'Acte uniforme aux termes duquel : « L'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution

Toutefois, les dettes certaines, liquides et exigibles des personnes morales de droit public ou des entreprises publiques, quelles qu'en soient la forme et la mission, donnent lieu à compensation avec les dettes également certaines, liquides et exigibles dont quiconque sera tenues envers elles, sous réserve de réciprocité.

Les dettes des personnes et entreprises visées à l'alinéa précédent ne peuvent être considérées comme certaines au sens des dispositions du présent article que si elles résultent d'une reconnaissance par elles de ces dettes ou d'un titre ayant un caractère exécutoire sur le territoire de l'Etat où se situent lesdites personnes ou entreprises ».

Cet article affirme ainsi le principe général de l'interdiction des voies d'exécution et des mesures conservatoires contre les personnes qui bénéficient de l'immunité d'exécution (A). Ce principe admet toutefois des exceptions (B).

A- LE PRINCIPE GENERAL DE L'IMMUNITE D'EXECUTION

Ce principe est énoncé par l'article 30 alinéa 1er de l'Acte uniforme en ces termes : « l'exécution forcée et les mesures conservatoires ne sont pas applicables aux personnes qui bénéficient d'une immunité d'exécution ».

Il en résulte que sont concernées toutes les voies d'exécution tant conservatoires qu'exécutoires, mobilières ou immobilière de la part des créanciers contre les personnes qui bénéficient de cette prérogative. La question controversée qui se pose alors est celle de savoir qui en sont les bénéficiaires ce, dans la mesure où cet alinéa n'en fournit aucune liste.

Pour avoir une réponse, il faut se référer à l'alinéa 2 du même article. En effet, le législateur OHADA y reconnaît le principe de l'immunité d'exécution des personnes morales de droit public et des entreprises publiques. Le réflexe de tout bon juriste consistera alors, face à une telle énumération, à se demander si elle est exhaustive ou tout simplement indicative. Car à la vérité, les immunités d'exécution existent aussi bien en droit interne (1) qu'en droit international (2).

1. L'immunité d'exécution en droit interne

En posant sans autre précision comme il l'a fait le principe selon lequel il ne peut y avoir d'exécution forcée ni des mesures conservatoires contre les personnes qui bénéficient de l'immunité d'exécution, il n'était pas possible pour le législateur africain d'énumérer dans le détail ces personnes. Mais à titre indicatif, ont été expressément visées à l'article 30 alinéa 2 les personnes morales de droit public et les entreprises publiques quelles qu'en soient la forme et la mission.

Pour ce qui est des personnes morales de droit public, il est unanimement établi en droit interne tant en doctrine qu'en jurisprudence et ce, depuis bien avant l'entrée en vigueur de la loi uniforme359(*) que ces personnes sont l'Etat et ses démembrements que constituent les collectivités territoriales et les établissements publics, sans qu'il y ait lieu de distinguer s'agissant de ces derniers entre établissements publics administratifs (EPA) et établissements publics industriels et commerciaux (EPIC)360(*).

En ce qui concerne les entreprises publiques, nous ne pouvons que nous étonner avec une doctrine particulièrement autorisée de l'extension par le législateur OHADA du principe de l'immunité d'exécution aux sociétés d'Etat361(*), qui il faut le dire sont de véritables commerçants. Définies comme des entreprises publiques constituées sous la forme de personne morale commerçante de droit privé, elles sont constituées au Cameroun d'après l'article 31 de la loi n°99/016 du 22 décembre 1999 portant statut général des établissements publics et des entreprises du secteur public et parapublic par les sociétés à capital public362(*) et les sociétés d'économie mixte363(*).

Les justifications de la reconnaissance d'un tel privilège à ces personnes publiques sont nombreuses. Ainsi, les immunités d'exécution auraient pour fondement la présomption de solvabilité de ces personnes. Mais en ces périodes de crise, lui est substitué un autre argument, les règles de la comptabilité publique, lesquelles ne permettraient pas le paiement par voie de saisie. Autrement, elles se rattachent à l'idée de puissance publique et d'autorité. L'Etat détient le monopole de la contrainte et ne peut dès lors utiliser ses forces de l'ordre pour se contraindre lui-même car comme l'écrit un auteur, il serait aberrant et contre nature que l'Etat qui a le monopole de la force publique use de celle-ci contre lui-même ou en use à l'égard des autres personnes publiques364(*). Enfin, une autre raison est tirée du principe de la continuité du service public et de la prépondérance de l'intérêt général. Il est objecté que si une activité a été érigée en service public, c'est qu'elle présente un caractère particulièrement impérieux pour la vie locale ou nationale. Aussi faut-il que le fonctionnement du service soit régulier afin que les administrés puissent en permanence avoir accès aux diverses prestations.

L'intérêt général permet également de justifier l'immunité d'exécution en droit international.

* 356 Sur l'ensemble de la question, SOH (M.), Insaisissabilités et immunités d'exécution dans la législation ou le passe-droit de ne pas payer ses dettes, Juridis Périodique n° 51, 2002, p. 90.

* 357 SOH (M), op. cit., p. 90.

* 358 Ibid. p. 93

* 359 Sur l'état du droit préexistant à l'OHADA, V. KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit., n° 409 et s., pp.341 et s.

* 360 En ce sens KENFACK DOUAJNI (G), L'exécution forcée contre les personnes morales de droit public dans l'espace OHADA, RCA n°18, 2002, p.2, www.ohada.com/ohadata D-08-48.

* 361 POUGOUE (P.-G), Les sociétés d'Etat à l'épreuve du droit OHADA, Juridis Périodique n°65, 2006, p. 101.

* 362 Les sociétés à capital public sont des personnes morales de droit privé dotées de l'autonomie financière et d'un capital-actions intégralement détenu par l'Etat, une ou plusieurs collectivités décentralisées ou une ou plusieurs autres sociétés à capital public, en vue de l'exécution dans l'intérêt général d'activités présentant un caractère industriel, commercial ou financier.

* 363Les sociétés d'économie mixte sont des personnes morales de droit privé dotées de l'autonomie financière et d'un capital-actions détenu partiellement d'une part, par l'Etat, les collectivités territoriales décentralisées ou les sociétés à capital public et d'autre part, par les personnes physiques ou morales de droit privé.

* 364 KUATE TAMEGHE (S.S), op. cit., n°395, p.334.

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