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Le Conseil de Sécurité des Nations Unies et la Cour Pénale Internationale: dépendance ou indépendance ?

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par Charles KAKULE KINOMBE
Université catholique de Bukavu - Licence en droit option droit public 2011
  

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Section III. L'INDEPENDANCE DE LA CPI FACE AUX ARTICLES 16 ET 15,6 DU STATUT DE ROME

L'intervention du Conseil de Sécurité, organe politique des Nations Unies, dans l'activité de la CPI, organe judiciaire créé par le Statut de Rome, peut conduire au risque de politisation de la procédure judiciaire.

Ainsi, le pouvoir de suspension de l'action de la CPI consacré par l'article 16 de son Statut, peut être sollicité par les Etats auprès du Conseil de sécurité, dans le but de politiser une procédure judiciaire déclenchée, cherchant à privilégier des solutions politiques faisant échapper les auteurs des crimes internationaux de leur responsabilité pénale.

D'où il s'avère impérieux de réfléchir, dans la présente section sur l'indépendance de la CPI au regard des articles 16 (§1) et 15,6 (§2) du Statut de Rome.

§1. L'indépendance de la CPI face à l'article 16 du Statut de Rome

Le problème qui se pose ici concerne l'étendue des pouvoirs reconnus au Conseil de Sécurité par le Statut de le CPI.

En effet, si toute violation de DIH peut être considérée comme menace contre la paix et la sécurité internationales par le Conseil de Sécurité, conformément au Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, et si la CPI ne pouvait, en réalité, intervenir qu'avec l'autorisation du Conseil de Sécurité, l'article 16 du Statut de Rome risquerait de faire passer la CPI en sous-organe du Conseil de Sécurité.

Ce risque a été cependant réduit à la conférence de Rome.

En effet, l'article 23,3 du Projet de la CDI 172(*) prévoyait que la procédure devant la CPI devrait cesser dès le moment où le Conseil de sécurité traite de la même affaire. N'importe quel membre Conseil de Sécurité pouvait dans ce cas bloquer l'activité de la CPI en plaçant l'affaire à l'ordre du jour, même si ce dernier ne règle pas l'affaire.

Si de nombreux Etats préconisaient la suppression pure et simple de cet article, Singapour fit une proposition de compromis 173(*) entre les défenseurs et les opposants de l'article 16.

La CPI a le droit d'agir même si le Conseil de sécurité s'occupe déjà de l'affaire mais ce dernier a à sa disposition une responsabilité de bloquer l'action de la CPI avec une résolution en ce sens, adoptée sur la base du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies.

L'article 16 reflète donc la recherche d'un équilibre entre les prérogatives du Conseil de sécurité en vertu de la Charte des Nations Unies d'une part et la volonté d'instaurer une CPI indépendante, capable de fonctionner sans être sous l'empire irrémédiable du Conseil de sécurité, un organe politique.

D'où Elodie DULAC affirme avec raison que « L'enjeu était ici de parvenir à reconnaitre dans le statut, la responsabilité principale du Conseil en matière de maintien de la paix et de la sécurité internationales, sans pour autant, autoriser une interférence excessive de celui-ci dans le fonctionnement de la Cour, et refreiner ainsi les ardeurs des membres permanents (à l'exception du Royaume Uni), qui se seraient fort accommodés d'une Cour bridée par le Conseil ».174(*)

Cet article est donc le résultat d'un compromis puisque le droit de regard du Conseil de sécurité n'est pas aussi automatique qu'il le parait.

En effet, le Conseil de Sécurité doit demander la suspension des enquêtes et poursuites à la CPI.

Cette demande suppose le vote d'une résolution à la majorité des membres du Conseil de sécurité et surtout qu'aucun membre permanent n'exerce pas son droit de véto. En l'absence d'une résolution adoptée sur base du Chapitre VII, la CPI continue ses investigations.

L'article 16 du Statut de Rome porte atteinte au principe fondamental de l'indépendance de la magistrature reconnue par les instruments protecteurs des droits de l'homme175(*).

Cette disposition parait contraire aux règles de droit au procès équitable, règles que la chambre d'appel du TPIY et le Comité des droits de l'homme ont qualifiées de règles impératives du droit international176(*).
Or, comme le Conseil de sécurité doit agir « conformément aux buts et principes des Nations Unies »177(*), lesquels comprennent le respect des « principes de la justice et du droit international »178(*), il en découlerait que l'article 16 ne pourrait justifier une intervention du Conseil de sécurité dans les enquêtes et poursuites du Procureur.

En sens inverse, on observera qu'aux termes des principes fondamentaux relatifs à l'indépendance de la magistrature, d'une part, « les magistrats règlent les affaires dont ils sont saisis impartialement, d'après les faits et conformément à la loi, sans restrictions et sans être l'objet d'influences, incitations, pressions, menaces ou interventions indues, directes ou indirectes, de la part, de qui que ce soit et pour quelque raison que ce soit », d'autre part, « La justice s'exerce à l'abri de toute intervention injustifiée ou ingérence [...] » 179(*)

A contrario, il serait donc permis de considérer que l'intervention du Conseil de Sécurité dans les enquêtes et poursuites du Procureur de la CPI ne serait ni « indue » ni « injustifiée », dès lors qu'elle est fondée sur le Chapitre VII de la Charte des Nations Unies, donc sur les exigences de maintien de la paix et de la sécurité internationales.

Il reste que, eu égard à son caractère exorbitant, ce pouvoir de blocage du Conseil de sécurité devrait être interprété restrictivement : Le Conseil de Sécurité doit justifier sa décision de suspendre une procédure en cours devant la CPI en montrant que cette suspension contribue réellement aux objectifs du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies180(*).

Afin de préserver l'indépendance, l'impartialité et l'effectivité de la CPI au regard du pouvoir de suspension de l'activité de la cour reconnu au Conseil de Sécurité, nous pensons que la CPI devrait contrôler la légalité du pouvoir exercé par le Conseil de sécurité et vérifier s'il existe vraiment une menace contre la paix et la sécurité internationales (A).

En plus, une délimitation temporelle de la période de suspension de l'activité de la CPI s'avère d'une grande envergure (B).

A. La reconnaissance à la CPI d'un pouvoir de contrôle de la légalité de la demande de sursis à enquêter ou à poursuivre

S'il est admis que le Conseil de Sécurité peut formuler une demande de sursis, il doit être entendu qu'il appartient à la CPI de donner suite à une telle requête, et non faire de la demande du Conseil de Sécurité une requête qui se transforme automatiquement en injonction ou en directive.

Ceci revient à dire qu'il y aurait lieu de reconnaitre à la CPI « la compétence de la compétence »181(*), càd la possibilité de contrôler la légalité de la demande formulée par le Conseil de sécurité182(*).

Dans ce cas, la CPI s'emploiera à vérifier si les conditions posées par l'article 16 sont réunies avant de surseoir à statuer.

Plutôt que de laisser la CPI subir la décision du Conseil de Sécurité, cette proposition a l'avantage de lui permettre d'avoir en dernier la parole dans l'application de la procédure de l'article 16 du Statut de Rome.

* 172 Article 23,3 du projet de la CDI : « Aucune poursuite ne peut être engagée en vertu du présent statut à raison d'une situation dont le conseil de sécurité traite en tant que menace contre la paix ou rupture de la paix ou acte d'agression aux termes du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, à moins que le conseil de sécurité n'en décide autrement »

* 173 J.F. DOBELLE, La convention de Rome portant statut de la CPI, AFDI, 1990, pp.356-369

* 174 E. DULAC, op.cit, p.72

* 175 Art. 10 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme, Art.14, §1 du Pacte International relatif aux Droits Civils et Politiques

* 176 E. DAVID, op.cit, p.945

* 177 Article 24 §2 de la Charte des Nations Unies

* 178 Article 1 §1er de la Charte précitée.

* 179 Principes adoptés par le 7e congrès des Nations Unies pour la prévention du crime et le traitement des délinquants, Milan, 26 août-6 septembre 1985, approuvés par l'Assemblée générale des Nations Unies, A/Rés. 40/146, 13 décembre 1985

* 180 L. CONDORELLI et S. VILLALPANDO, Op.cit, pp.646-647

* 181 Idem, pp. 640 et s.

* 182 L'article 19, §1er reconnaît à la Cour le pouvoir de s'assurer qu'elle est compétente pour connaître de toute affaire portée devant elle.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault