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Le Conseil de Sécurité des Nations Unies et la Cour Pénale Internationale: dépendance ou indépendance ?

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par Charles KAKULE KINOMBE
Université catholique de Bukavu - Licence en droit option droit public 2011
  

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§2. Conditions et caractéristiques de la saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité

A. Conditions

Pour renvoyer une situation au Procureur, le Conseil de Sécurité doit agir en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies46(*), c'est-à-dire en cas de menace contre la paix, la rupture de la paix et d'acte d'agression47(*). Ainsi, la situation doit comporter une menace à la paix et à la sécurité.48(*)

En outre, cette situation doit renfermer un ou plusieurs crimes visés à l'article 5 du Statut de Rome, en l'occurrence, le crime de génocide, les crimes contre l'humanité, les crimes de guerre et le crime d'agression.

B. Caractéristiques de la saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité.

Aucun article du Statut de Rome ne précise la forme de la saisine de la CPI par le Conseil de sécurité (I). Lorsque la CPI est saisie par le Conseil de Sécurité, elle est dispensée des conditions posées par l'article 12 du Statut de Rome (II).

La mise en oeuvre de la faculté de saisine de la Cour par le Conseil de Sécurité est incertaine (III). Néanmoins, cette faculté confère à la Cour des compétences assez étendues (IV).

I. La forme de la saisine

Contrairement aux articles 1449(*) et 1550(*) du Statut de Rome qui fixent respectivement les modalités de la saisine de la CPI par un Etat partie et par le Procureur, aucun article du Statut ne précise les modalités de la saisine de la Cour par le Conseil de Sécurité des Nations Unies.

L'article 13, b du Statut se limite à dire que la CPI peut exercer sa compétence à l'égard des crimes visés à l'article 5 si une situation est déférée au Procureur par le Conseil de Sécurité agissant en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Cette formulation ambigüe de l'article 13, b montre que la saisine par le Conseil de Sécurité a été un sujet moins problématique, délaissé lors des débats au profit des questions litigieuses.

Une piste peut être trouvée dans l'article 16 du Statut de Rome51(*)consacrant la faculté du Conseil de Sécurité de suspendre les poursuites et enquêtes menées par la Cour qui spécifie que la demande de suspension doit être faite dans une résolution adoptée en vertu du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Une résolution est-elle, en vertu du Chapitre VII, donc nécessaire pour la saisine de la CPI ou peut-on envisager une saisine par une recommandation?

Sur la question de savoir si une résolution est nécessaire, nous ne pouvons que répondre par l'affirmation parce qu'un certain nombre d'indices incitent à retenir cette interprétation de l'expression « agissant en vertu du chapitre VII ».

Le premier indice réside dans le fait que le pouvoir de saisine de la CPI a été, durant les travaux préparatoires, refusé à l'Assemblée Générale des Nations Unies au motif que les décisions de cet organe ont un caractère non contraignant.52(*)

A contrario, la saisine de la CPI par le Conseil de Sécurité a été prévue parce que justement, elle revêt un caractère obligatoire à l'égard de tous les Etats membres des Nations Unies. C'est pour cela que nous disons qu'il s'agit d'une décision contraignante telle que visée à l'article 25 de la Charte des Nations Unies qui dispose : « les membres de l'organisation conviennent d'accepter et d'appliquer les décisions du Conseil de Sécurité conformément à la présente charte ».

Le deuxième argument peut être trouvé dans la logique même du Statut, en particulier dans l'intérêt de la saisine par le Conseil de Sécurité qui, comme nous le verrons, permet de surmonter les obstacles statutaires au fonctionnement de la CPI (notamment en ce qui concerne l'application du principe de complémentarité et la coopération des Etats) ; ce qui n'est possible que si l'article 25 de la Charte des Nations Unies portant les caractères obligatoire et exécutoire des décisions du Conseil de Sécurité entrent en jeu.

L'esprit même du Statut nous incite à penser qu'une décision du Conseil de Sécurité est donc nécessaire.

II. La non applicabilité du régime de consentement préalable à l'exercice par la CPI de sa compétence

La saisine de la CPI par le Conseil de sécurité permet de dispenser la Cour des conditions posées par l'article 12 du Statut de Rome portant régime de consentement préalable des Etats à la compétence de la CPI.

En effet, l'article 12 du Statut de Rome dispose :

« 1. Un Etat qui devient partie au Statut reconnaît par la même la compétence de la Cour à l'égard des crimes visés à l'article 5.

2. Dans les cas visés à l'article 13, §a ou c, la Cour peut exercer sa compétence si l'un des Etats suivants ou les deux sont parties au présent Statut ou ont reconnu la compétence de la Cour conformément au §3 :

a) l'Etat sur le territoire duquel le comportement en cause s'est produit ou, si le crime a été commis abord d'un navire ou d'un aéronef, l'Etat du pavillon ou l'Etat d'immatriculation ;

b) l'Etat dont la personne accusée du crime est un national.

3. Si la reconnaissance de la compétence de la Cour par un Etat qui n'est pas partie au présent Statut est nécessaire aux fins du §2, cet Etat peut, par déclaration déposée auprès du greffier, consentir à ce que la Cour exerce sa compétence à l'égard du crime dont il s'agit. L'Etat ayant reconnu la compétence de la Cour coopère avec celle-ci sans retard et sans exception conformément au chapitre IX ».

Le régime de consentement préalable est applicable en cas de saisine par un Etat partie ou le Procureur agissant proprio motu53(*). En effet, le paragraphe 2 de l'article 12 subordonne la compétence de la cour, si elle est saisie dans les cas visés à l'article 13, alinéa a ou c ; c'est-à-dire si elle est saisie par un Etat ou par le procureur, à ce que, soit l'Etat sur le territoire duquel le crime s'est commis, soit l'Etat dont la personne accusée du crime est ressortissant ou les deux soient parties au Statut de Rome54(*) ou ont reconnu la compétence de la Cour conformément au paragraphe 3 de l'article 12 qui prévoit l'acceptation ad hoc de la compétence de la Cour par un Etat qui n'est pas partie au Statut de Rome55(*)

Il est de bon sens de considérer que l'article 12, 2 est de nature à entraver l'indépendance et surtout le caractère effectif de la Cour. En effet, l'Etat du territoire sur lequel le crime est commis sera, dans le cas d'un conflit interne, celui dont les ressortissants seront susceptibles d'être accusés. On sait que ces dernières années, ce sont les conflits internes qui ont été à l'origine des crimes contre l'humanité et de génocide (Cambodge, Rwanda, Ex. Yougoslavie, Irak, etc.).

En outre, cette disposition sera un frein à l'effectivité de la Cour, car si ces deux Etats qui n'en feront qu'un, dans bien des cas ne sont pas parties au Statut ou n'ont reconnu sa compétence par la déclaration au cas par cas prévue au paragraphe 3 de l'article 12, la Cour n'aura aucune espèce de faculté pour juger des crimes qui y seront commis, sauf à être saisie par le Conseil de Sécurité. En vertu de l'article 13, b du Statut de Rome, le Conseil de Sécurité pourra saisir la Cour sans aucune espèce de condition autre que celle d'agir sur le fondement du Chapitre VII de la Charte des Nations Unies. Cependant, cette saisine pourra être paralysée par l'exercice du droit de veto dont disposent les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité, comme la Russie et la Chine ne manqueraient de le faire si la Cour devrait être saisie de crimes commis sur leur territoire. Le pouvoir ainsi reconnu au Conseil de sécurité pose la question de l'égalité entre les Etats, autrement dit, les Etats membres permanents du Conseil de Sécurité qui n'auraient pas ratifié le Statut de Rome se retrouveraient dans la situation confortable de mettre en cause les autres Etats, sans courir le risque de se voir eux-mêmes mettre en question55(*). Pour remédier à cette situation, nous pensons qu'il serait agréable de supprimer le droit de veto reconnu aux 5 membres permanents du Conseil de Sécurité (France, la Russie, la Chine, le Royaume Uni et les Etats Unis).

III. La saisine de la Cour par le conseil de sécurité est incertaine

Incertaine, la procédure de saisine par le Conseil de Sécurité l'est ;

- En premier lieu, en ce que, s'agissant d'une question de fond, toute résolution du Conseil de sécurité suppose un vote que peut venir entraver le recours, par l'un de cinq membres permanents, à son droit de veto. Si tel ou tel de ces Etats entend « protéger » un pays où se dérouleraient des crimes relevant de la compétence de la Cour, la saisine de celle-ci s'avérerait vite impossible.56(*)

- En second lieu, la nécessité pour le Conseil de Sécurité de se placer dans le cadre du Chapitre VII suppose qu'au préalable le Conseil ait constaté « une menace contre la paix, une ne rupture de la paix ou un acte d'agression ». Or cette constatation ne va pas de soi, dans les hypothèses de commission de crimes relevant de la compétence de la Cour, si celles-ci interviennent dans le cas de conflits armés non internationaux ou dans le cadre d'une répression, purement interne, conduite par le gouvernement d'un Etat contre un groupe ou des membres d'un groupe ethnique ou religieux.57(*)

Certes, le Conseil de Sécurité a souvent considéré que des conflits, apparemment internes, pouvaient constituer une menace contre la paix, comme il en a été le cas au Rwanda, en Haïti, Angola, Somalie, Afghanistan, RDC,....Toutefois, il reste que, hors ces cas extrêmes, bien des situations internes peuvent demeurer hors du champ de compétence que le Conseil de Sécurité peut s'assigner. La situation en Algérie, le comportement dictatorial de tel ou tel dirigeant recourant à une répression brutale et systématique de ses opposants, par la torture ou les disparitions, ne font pas ou n'ont pas fait l'objet d'actions spécifiques du Conseil de Sécurité dans le cadre du chapitre VIII.

De telles situations ne seraient donc susceptibles d'entraîner la saisine de la Cour par le Conseil de Sécurité. On peut également rappeler, à cet égard que l'implication de l'ONU au Cambodge a bien davantage résulté, dans un premier temps, de la volonté de la communauté internationale de sanctionner l'invasion Vietnamienne du territoire Cambodgien, condamnée par elle comme acte d'agression, que de mettre un terme au crime de génocide perpétré par les dirigeants Khmers rouges que, pourtant, l'agression vietnamienne contribua à faire cesser58(*)

* 46 N.MBAFUMOYA TCHOMBA, La Compétence de la Cour pénale internationale à l'égard d'Omar El-Bechir : les problèmes de l'immunité et de la compétence ratione personae, Mémoire UCB, Fac. de Droit, 2008-2009, Inédit, p. 53.

* 47 C.BASSIOUNI, Introduction, Op.cit., p.22

* 48 Cf. Article 13, b du Statut de Rome

* 49 Article 14 du statut de Rome dispose : « 1. Tout Etat partie peut déférer au procureur une situation dans laquelle un ou plusieurs des crimes relevant de la compétence de la Cour paraissent avoir été commis, et prier le procureur d'enquête sur cette situation en vue de déterminer si une ou plusieurs personnes particulières doivent être accusées de ces crimes.

2. L'Etat qui procède au renvoi indique autant que possible les circonstances de l'affaire et produit les pièces à l'appui dont il dispose.

* 50 Article 15 du Statut de Rome : 1. Le Procureur peut ouvrir une enquête de sa propre initiative au vu de renseignements concernant des crimes relevant de la compétence de la Cour. 2. Le Procureur vérifie le sérieux des renseignements reçus. A cette fin, il peut rechercher des renseignements supplémentaires auprès d'Etats, d'organisations intergouvernementales et non gouvernementales, ou d'autres sources dignes de foi qu'il juge appropriées et recueillir des dépositions écrites ou orales au siège de la Cour.

3. S'il conclut qu'il y a de bonnes raisons d'ouvrir une enquête, le procureur présente à la chambre préliminaire une demande d'autorisation en ce sens, accompagnée des éléments justificatifs recueillis. Les victimes peuvent adresser des représentations à la chambre préliminaire, conformément au règlement de procédure et de preuve.

4. Si elle estime, après examen de la demande et des éléments justificatifs qui l'accompagnent, que l'ouverture d'une enquête se justifie et que l'affaire semble relever de la compétence de la Cour, la chambre préliminaire donne son autorisation, sans préjudice des décisions que la Cour prendra ultérieurement en matière de compétence et de recevabilité.

5. Une réponse négative de la chambre préliminaire n'empêche pas le procureur de présenter par la suite une nouvelle demande en se fondant sur des faits ou des éléments de preuve nouveaux ayant trait à la même situation. 6. Si, après l'examen préliminaire visé aux §1 et 2, le procureur conclut que les renseignements qui lui ont été soumis ne justifient pas l'ouverture d'une enquête, il en avise ceux qui les lui ont fournis. Il ne lui est pas pour autant interdit d'examiner, à la lumière de faits ou d'éléments de preuve nouveaux, les autres renseignements qui pourraient lui être communiqués au sujet de la même affaire.

* 51 Article 16 du Statut de Rome est ainsi conçu : « Aucune enquête ni aucune poursuite ne peut être engagée ni menée en vertu du présent Statut pendant les douze mois qui suivent la date à laquelle le Conseil de sécurité a fait une demande en ce sens à la Cour dans une résolution adoptée en vertu du chapitre VII de la Charte des Nations Unies, la demande peut être renouvelée par le Conseil dans les mêmes conditions.

* 52 Article 14 de la Charte des Nations Unies : « Sous réserve des dispositions de l'article 12, l'Assemblée générale peut recommander les mesures propres à assurer l'ajustement pacifique de toute situation, quelle qu'en soit l'origine, qui lui semble de nature à nuire au bien général ou à compromettre les relations amicales entre nations, y compris les situations résultant d'une infraction aux dispositions de la présente Charte où sont énoncés les buts et les principes des Nations Unies ».

* 53 E.DULAC, Op.cit., p. 25.

* 54 W.BOURDON, La Cour pénale internationale, le Statut de Rome, Ed. du Seuil, Paris, 2000, p. 79.

* 55 E. DULAC, Op.cit., p. 25.

* 55 I.COKOLA, NTADUMBA, La Cour pénale internationale, est-ce la fin de l'impunité en RDC ?, Mémoire, UCB, Fac. de Droit, 2007-2008, p. 78.

* 56 A.BAHATI CIBAMBO, l'UA et la CPI : Aux sources des craintes des Etats africains, Mémoire, UCB, Fac. de Droit, 2009-2010, pp. 93-94.

* 57 http://www.senat.fr/rap/98-313-mono.html consulté le 24 Avril 2012.

* 58 Idem

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams