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L'infraction de corruption: étude comparative entre le droit français et le droit tunisien

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par Mohamed Zied El Air
Université des sciences sociales Toulouse 1 - DEA Sciences Criminelles 2003
  

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PARA2 : Les juridictions compétentes

Les juridictions du droit commun sont exclusivement compétentes en matière de corruption(A), toutefois des juridictions d'exception peuvent reconnaître des infractions de corruption dans des cas prévus par la loi(B).

A-Les juridictions du droit commun

En France comme en Tunisie, la compétence des juridictions du droit commun est fixée selon la gravité des faits poursuivis et leurs qualifications de crimes, délits ou de contraventions.

En Tunisie, l'article 27 CPPT  dispose : « La cour criminelle est seule compétente pour connaître des crimes » . L'article 122 CPPT,de son coté, précise que sont qualifiées de crimes, les infractions que les lois punissent de mort, ou d'emprisonnement pendant plus de cinq ans .

Le même article ajoute que sont qualifiés de délits ; Les infractions que les lois punissent de l'emprisonnement d'une durée supérieure à quinze jours et ne dépassant pas cinq années et une amende de soixante dinars(40 euros). Quant aux juridictions compétentes e matière de délits, l'article 124 CPPT ajoute que le tribunal de première instance et plus précisément la chambre correctionnelle connaît en premier ressort de tous les délits à l'exception de ceux qui sont de la compétence du juge cantonal à savoir ; les délits punis d'une peine d'emprisonnement n'excédant pas une année.

Sachant que pour l'infraction de corruption, en Tunisie, le législateur a prévu des peines privatives de liberté dont la durée varie selon les cas, ce qui entraîne la compétence des différents tribunaux.

En France, on retrouve la même distinction entre crimes, délits et contraventions. Cette ressemblance n`est pas le fait du hasard mais elle s'explique par la tendance du législateur tunisien à s'inspirer de la législation et de la politique pénale française.

Cette ressemblance n'est pas absolue, en effet, l'article131-1 CPF relatif aux crimes prévoit une durée minimale de dix ans de réclusion criminelle pour ce type d'infractions, contrairement au droit tunisien qui prévoit une durée minimale de cinq ans.

D'un autre coté, l'article 131-3 CPF et suivant relatifs aux délits prévoient une durée maximale de dix ans d'emprisonnement pour ce type d'infractions, contrairement au droit tunisien qui prévoit une durée maximale de cinq ans.

Il faut savoir que depuis la promulgation de la loi du 16 mars 1943,le caractère criminel a été enlevé à l'infraction de corruption en droit pénal français, en d'autres termes, il y a eu une correctionnalisation de celle-ci. On parle dés lors du délit de corruption, ce qui a pour effet la compétence exclusive du tribunal correctionnel. Mais cette loi et le nouveau code ont laissé une circonstance aggravante laissant un caractère criminel à la corruption ; C'est le cas de l'article 434-9 CPF relatif aux magistrats ou assimilés coupables de corruption passive au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles, la peine principale est la réclusion criminelle de quinze ans, ce qui entraîne la compétence de la cour d'assises.

Nous étudierions à ce niveau la compétence des différents tribunaux.

1-les tribunaux compétents pour juger l'infraction de corruption qualifiée de crime 

a- la cour criminelle 

En Tunisie, c'est la cour criminelle, située dans chaque tribunal de grande instance, qui est compétente pour juger les crimes ; infractions punies d'une peine privative de liberté ne pouvant être inférieure à cinq ans. Ainsi, la cour criminelle est compétente pour les cas des articles 83 CPT relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui, soit personnellement, soit par intermédiaire, pour lui-même ou pour autrui, agrée des offres ou promesses ou reçoit des dons ou présents pour accomplir un acte de sa fonction, même juste, mais non sujet à salaire, puis, l'article 84 CPT relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui a provoqué ces offres, promesses ou la remise de dons ou présents. Dans ces cas la peine d'emprisonnement est de dix ans dans le premier cas et vingt ans dans le second.

D'un autre coté, la cour criminelle est compétente aussi pour la corruption passive des magistrats prévue dans les articles 88 et 89 CPT qui prévoient une peine d'emprisonnement de dix ans(89 CPT) et de vingt ans(88 CPT).

Enfin, la Cour criminelle est compétente en cas de corruption active des fonctionnaires publics accompagnée de contrainte ou de tentative de contrainte par voies de fait ou menaces punie de dix ans d'emprisonnement, conformément à l'article 91 CPT.

Signalons que, après la réforme du 23 mai 1998, la cour criminelle est devenue compétente pour la majorité des infractions en matière de corruption. Cette compétence élargie s'explique par l'aggravation des peines suite à ladite réforme.

b- La cour d'assises 

En France, la loi du 16 mars 1943 a eu pour principal effet la correctionnalisation de la corruption. Toutefois, cette loi ainsi que le nouveau Code pénal ont laissé le caractère criminel à celle-ci dans l'hypothèse prévue dans l'article 434-9 CPF.

Cet article, dans son troisième alinéa dispose que lorsqu'un magistrat est coupable de corruption passive au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles, les peines principales encourues sont la réclusion criminelle de quinze ans. On remarque que l'infraction de corruption, dans ce cas, est qualifiée de crime relevant de la compétence de la cour d'assises conformément à l'article 231CPPF.

En faisant la comparaison entre les deux législations, on remarque que la cour d'assises n'est compétente que dans un seul cas de corruption, par contre la cour criminelle est compétente dans la majorité des cas. Ceci s'explique par la tendance du législateur tunisien à aggraver la répression de la corruption puisque les infractions sont qualifiées de crimes en Tunisie si elles sont punies d'une peine privative de liberté supérieure à cinq ans.

2-La Chambre correctionnelle et le tribunal correctionnel (délits) 

a-La Chambre correctionnelle 

En Tunisie, la chambre correctionnelle est compétente en matière de délits (article124CPPT). Ainsi, est du ressort de la dite chambre, la corruption active prévue dans l'article 91 CPT alinéa 1er qui dispose : « Est punie de cinq ans d'emprisonnement et de cinq mille dinars d'amende, toute personne qui aura corrompu ou tenté de corrompre par des dons ou promesses de dons, présents ou avantages de quelque nature que ce soit l'une des personnes visées à l'article 82 du présent code(fonctionnaire public ou assimilé)...» ce même article ajoute que les mêmes peines sont applicables à toute personne ayant servi d'intermédiaire entre le corrupteur et le corrompu. Ainsi, c'est la chambre correctionnelle qui est compétente dans ce cas.

Un autre délit qui est apparu avec la réforme du 23 Mai 1998 et qui est de la compétence de la chambre correctionnelle, il s'agit du délit d'octroyer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives et réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté de participation et l'égalité des chances dans les marchés passés prévu par l'article 87 bis CPT.

La peine prévue pour ce délit est de cinq ans d'emprisonnement alors qu'en France il est puni de deux ans conformément à l'article 432-14 CPF. A notre sens, les peines prévues dans les deux législations ne sont pas compatibles avec la gravité des faits reprochés.

Enfin, la chambre correctionnelle est aussi compétente pour le délit prévu dans l'article 85 CPT qui dispose :  «  Si le fonctionnaire public ou assimilé a accepté des dons ou présents en récompense de ce qu'il a fait ou de ce qu'il n'a pas fait, il est puni de l'emprisonnement pendant cinq ans et d'une amende de cinq mille dinars ».

Ce délit est constitué une fois le fonctionnaire a accepté des dons ou présents après l'accomplissement ou non de l'acte de la fonction, ce qui le distingue du cas prévu à l'article 83 CPT relatif à l'acceptation des dons avant l'accomplissement de l'acte.

L'article 85 CPT prévoit une peine de cinq ans d'emprisonnement suite à la loi du 23 mai 1998 au lieu d'un an d'emprisonnement avant la promulgation de la dite loi, ce qui affirme la politique répressive suivie en Tunisie en matière de corruption.

b-Le Tribunal correctionnel 

En France, c'est le tribunal correctionnel qui est compétent en matière de délits et ce dernier est compétent pour tous les délits de corruption depuis la correctionnalisation de cette infraction par la loi du 16 mars 1943, à l'exception de l'article 434-9 CPF, précédemment étudié, qui prévoit la réclusion criminelle de quinze ans ce qui implique la compétence de la cour d'assises.

On remarque qu'en France le tribunal correctionnel a une compétence exclusive en matière de corruption contrairement à la chambre correctionnelle en Tunisie qui n'a qu'une compétence limitée à des cas bien déterminés.

3-le Tribunal cantonal en Tunisie (délits prévus par la loi) 

Nous avons précisé que le tribunal cantonal en Tunisie connaît en dernier ressort des contraventions et connaît en premier ressort des délits punis d'une peine d'emprisonnement n'excédant pas une année ou d'une peine d'amende n'excédant pas mille dinars(700 euros) par application de l'article 123 CPPT.

Par conséquent, ce tribunal est saisi en cas de tentative de corruption qui n'a eu aucun effet conformément à l'article 92 CPT nouveau qui prévoit une peine d'emprisonnement d'un an et une amende de mille dinars.

En pratique, les tribunaux n'appliquent pas les peines prévues d'une manière stricte en cas de tentative. Cette position de la jurisprudence tunisienne est regrettable parce que, à notre sens, la tentative de corruption représente les mêmes dangers que la corruption elle-même.

Si on procède à une comparaison avec l'ancienne rédaction de l'article 92 CPT, on constate que le tribunal cantonal était compétent dans deux cas ;d'un coté, pour la tentative de voies de fait ou de menaces et d'un autre coté pour la tentative de corruption qui n'ont eu aucun effet. Avec la réforme précédemment cité le législateur a supprimé la tentative de voies de fait ou de menaces de la compétence du tribunal cantonal.

On remarque qu'en France, le tribunal de police, qui a presque le même rôle que le tribunal cantonal, n'est pas compétent en matière de corruption mais cette incompétence s'explique par l'impossibilité, pour celui-ci, de prononcer des peines privatives de libertés : peines indispensables pour l'infraction de corruption.

En conclusion, les juridictions de droit commun ont un rôle très important et une compétence exclusive en matière de corruption.

4- Les dérogations aux règles de compétence 

En France, les juridictions normalement compétentes peuvent se voir dessaisies suite à la création de juridictions spécialisées(a) et l'existence de règles permettant une dérogation à la compétence territoriale(b).

a-La création de juridictions spécialisées

Devant la montée de la délinquance d'affaires dites « en col blanc », une loi n°75-701 du 6 août 1975 a ajouté au livre VI du CPPF un titre XIII intitulé: "De la poursuite, de l'instruction et du jugement des infractions en matière économique et financière". Cette loi a institué des juridictions spécialisées pour les infractions en matière économique et financière. Désormais, dans chaque ressort de cour d'appel, un ou plusieurs tribunaux de grande instance comportant des magistrats spécialisés qui sont compétents pour l'instruction et le jugement de ces infractions et de celles leur étant connexes.

Ces infractions sont prévues par l'article 704 CPPF et on remarque que la liste de cet article ne vise que les délits.

L'article 704 CPPF a été modifié par la loi du 1er décembre 1994 qui a ajouté la corruption et le trafic d'influence, sous leurs deux formes active et passive, dans la longue liste des infractions qui peuvent être déférées aux tribunaux de grande instance spécialisés pour la poursuite, l'instruction et le jugement des infractions commises en matière économique et financière.

La loi de 1er décembre 1994179(*) a porté, en outre, deux autres modifications importantes. D'un coté, elle a instauré dans l'article 705 CPPF le procédé technique d'une « compétence territoriale concurrente » entre la juridiction correctionnelle de droit commun et la juridiction spécialisée. Cette expression a deux sens. Elle veut d'abord dire que les magistrats spécialisés ont une compétence supplémentaire, s'ajoutant à celle qu'ils ont déjà en application des règles en application des règles du droit commun. Elle veut dire, ensuite, que ces magistrats n'ont qu'une compétence facultative : il faut, en effet, que ces affaires soient d'une grande complexité pour qu'elles soient attribuées à ces magistrats180(*).

D'un autre coté, ladite loi a modifié les règles de saisine de ces juridictions. Auparavant, la loi du 6 août 1975 chargeait le président de la chambre d'accusation du pouvoir d'attribuer les affaires à la juridiction spécialisée, sur requête du procureur de la République ou du juge d'instruction. . Avec la réforme de 1994, qu'il s'agisse d'une procédure suivie sur information ou en enquête préliminaire, le procureur de la République peut saisir la juridiction spécialisée. C'est le procureur général près la cour d'appel où la juridiction spécialisée a son siège, qui prend la décision. S'il s'agit d'une procédure d'information, le juge d'instruction saisit son collègue compétent.

Il faut signaler, d'un autre coté, l'apport de la loi du 30 juin 2000 qui a élargie la liste des infractions relevant de la compétence des juridictions spécialisées prévue par l'article 704 CPPF. En effet, la loi ajoute les cas de corruption active et passive des seuls fonctionnaires communautaires ( articles 435-1 et 435-2 CPF)181(*). De plus ces deux infractions, depuis ladite loi, figurent dans la liste des infractions donnant aux tribunaux français une compétence universelle conformément à l'article 689-8 CPPF182(*).

D'après certains auteurs, ces juridictions spécialisées n'ont pas vraiment montré leur efficacité sur le plan pratique, faute de disposer en leur sein de suffisamment de magistrats véritablement spécialisés183(*). C'est pour cette raison que, la loi du 9 mars 2004184(*) a amélioré sensiblement le traitement des infractions économiques et financières en étendant la compétence des juridictions spécialisées ainsi que le statut des assistants spécialisés185(*).

Cette loi a modifié l'article 704 CPPF qui dispose, désormais : « la compétence territoriale d'un tribunal de grande instance peut être également étendue au ressort de plusieurs cours d'appel pour l'enquête, la poursuite, l'instruction et s'il s'agit de délits, le jugement de ces infractions, dans les affaires qui sont ou apparaîtraient d'une très grande complexité, en raison notamment du grand nombre d'auteurs, de complices ou de victimes où du ressort géographique sur lequel elles s'étendent ».

Ainsi, les juridictions spécialisées ont, suite à la réforme du 9 mars 2004, une compétence interrégionale puisqu'elle est étendue au ressort de plusieurs cours d'appel.

En Tunisie une telle spécialisation n'est pas prévue par le Code de procédure pénale, ce qui est, à notre sens, regrettable vu la complexité et la clandestinité des faits de corruption.

b-la dérogation à la compétence territoriale

Deux dérogations aux règles de compétence territoriale peuvent être mentionnées à ce niveau, la

Première est relative aux élus locaux la deuxième concerne les fonctionnaires étrangers qui ne relèvent pas du cadre de la communauté européenne.

S'agissant des élus locaux, une loi du 18 juillet 1974 a modifié l'article 681 CPPF, il s'agissait d'une dérogation aux règles de compétence territoriale permettant que les élus locaux soient automatiquement poursuivis ou jugés devant une juridiction se situant en dehors de leur circonscription. Cette règle avait pour but principal de garantir l'impartialité de la juridiction en évitant les risque de pressions sur les juridictions locales.

Cette loi a prévu une procédure complexe de nature à retarder les investigations. De plus la mauvaise rédaction du texte conduisait à des annulations de procédure qui ont choqué l'opinion publique. Ainsi le législateur a décidé de supprimer ce texte, par la loi du 4 janvier 1993, afin de préserver le respect de l'égalité de traitement des justiciables. Désormais, les élus relèvent de plein droit des juridictions territorialement compétentes, sauf s'ils demandent un dépaysement du dossier par la procédure de renvoi dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice prévue par l'article 665 CPPF. Le dépaysement ne peut être ordonné que sur requête du procureur général prés la Cour de cassation ou du procureur général prés la cour d'appel dans lequel se trouve la juridiction saisie186(*). Dans ce cas le renvoi est ordonné par la Chambre criminelle.

Afin d'éviter une telle requête de dessaisissement auprès de la Cour de cassation, la loi du 9 mars 2004 a ajouté un nouvel alinéa à l'article 43 CPPF qui dispose : « Lorsque le procureur de la République est saisi de faits mettant en cause, comme auteur ou comme victime, une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public qui est habituellement, de par ses fonctions ou sa mission, en relation avec les magistrats ou fonctionnaires de la juridiction, le procureur général peut...transmettre la procédure au procureur de la République du tribunal de grande instance le plus proche du ressort de la cour d'appel. Cette juridiction est alors territorialement compétente pour connaître l'affaire... ».

On remarque ainsi, que cette nouvelle procédure est plus rapide que la précédente puisqu'elle permet à une juridiction impartiale de connaître des affaires mettant en cause les personnes citées précédemment sans exiger une requête en dessaisissement auprès de la Cour de cassation187(*).

Quant aux agents publics et les magistrats étrangers ne relevant pas du cadre de l'Union européenne188(*). La loi du 30 juin 2000 a prévu dans un nouvel article 706-1 CPPF que pour la poursuite, l'instruction et le jugement de faits de corruption active concernant ces personnes, le procureur de la République, le juge d'instruction et le tribunal correctionnel de Paris exercent une compétence concurrente à celle qui résulte des règles normales de la compétence territoriale.

On remarque qu'il y a eu une concentration189(*), entre les mains du tribunal de grande instance de paris, des affaires de corruption internationale à l'imitation de ce qui a été prévu par l'article 706-17 CPPF pour les faits de terrorisme.

En Tunisie, on ne trouve pas une dérogation à la compétence territoriale ni en faveur des élus locaux ni en faveur de certains fonctionnaires. Ils relèvent de plein droit des juridictions territorialement compétentes, et ceci s'explique par le souci de respecter le principe d'égalité.

B-Les juridictions d'exception

Deux juridictions feront l'objet de la comparaison à ce niveau, il s'agit des juridictions compétentes pour connaître des infractions commises par des hommes politiques (1) et des juridictions militaires (2).

1-Les hommes politiques

Certaines personnalités politiques sont justiciables de juridiction d'exception. Il s'agit de la Haute Cour de justice pour le président de la République et la cour de justice de la République pour les Ministres en France (a) et de la Haute Cour pour les membres du gouvernement en Tunisie (b).

a-les juridictions d'exception compétentes en France 

S'agissant d'abord du président de la République, l'article 68 de la Constitution stipule : « Le président de la République n'est responsable des actes accomplis dans l'exercice de ses fonctions qu'en cas de haute trahison. Il ne peut être mis en accusation que par les deux assemblées statuant par un vote identique au scrutin public et à la majorité absolue des membres les composant. Il est jugé par la Haute Cour de justice ».

La doctrine a débattu sur l'interprétation de cet article à cause de son libellé qui n'est ni clair ni précis. Certains, considéraient que les deux phrases formaient un tout indivisible ; avançaient que le Président de la République n'était justiciable de la Haute Cour de justice qu'en cas de haute trahison, et était justiciable des juridictions de droit commun pour tous les actes détachables ou antérieurs à l'exercice des fonctions. D'autres considéraient que les deux phrases étaient dissociables, soutenaient que la seconde phrase consacrait un privilège de juridiction au profit du chef de l'Etat.

En application de la seconde interprétation, toutes les infractions, y compris les faits de corruption, commises par le chef de l'Etat seraient de la compétence de la Haute Cour de justice.

La mise en cause de l'actuel Président de la République, Jacques Chirac a donné de l'importance à ces interprétations. En effet, la question a été tranchée en deux temps. La première fois par le Conseil constitutionnel dans une décision du 22 janvier 1999190(*)portant sur la conformité à la Constitution de la convention de Rome du 18 juillet 1998 portant statut de la Cour pénale internationale. Dans cette décision le conseil reconnaît au président un privilège de juridiction en considérant qu' « au surplus, pendant la durée de ses fonctions sa responsabilité pénale ne peut être mise en cause que devant la Haute cour de justice ».

Cette interprétation du conseil constitutionnel a été modifiée par l`assemblée plénière191(*) de la Cour de cassation lorsqu'elle a eu à se prononcer sur la possibilité d'entendre le président de la République comme témoin. Elle décide que ce dernier ne peut être ni poursuivi, ni jugé pendant toute la durée de son mandat et elle ajoute que la prescription de l'action publique est suspendue pendant toute la durée du mandat. Il bénéficie, dés lors, d'une inviolabilité temporaire et non plus d'un privilège de juridiction.

On remarque ainsi que les faits de corruption ne peuvent pas être réprimés pendant la durée du mandat par la Haute Cour de justice et qu'ils sont de la compétence des juridictions de droit commun lorsque ce mandat arrive à terme.

Quant aux Ministres, depuis la loi constitutionnelle du 27 juillet 1993, les membres du gouvernement sont jugés par la Cour de justice de la République et non plus par la Haute cour de justice. La procédure suivie devant cette juridiction est relativement lourde et complexe.

En effet, la personne qui se prétend lésée doit impérativement porter plainte auprès de la commission des requêtes. Cette commission a le pouvoir de classer sans suite ou de transmettre le dossier au procureur général prés la Cour de cassation, en d'autres termes, elle a un pouvoir de filtrage. Une commission d'instruction est saisie pour instruire in rem et in personam puisque l'instruction dans ce cas ne concerne que le Ministre mis en cause et non ces complices ou ses coauteurs. Il faut enfin signaler qu'aucune constitution de partie civile n'est admise devant cette juridiction192(*).

Suite à cette réforme constitutionnelle l'article 68-1de la constitution prévoit que la cour est compétente pour les actes accomplis par des Ministres dans l'exercice des fonctions et qualifiés de crimes ou délits au moment où ils étaient commis.

Avant l'arrêt de la Cour de cassation du 26 juin 1995193(*) relatif à l'affaire Carignon, la jurisprudence ne faisait pas la distinction entre les actes accomplis dans l'exercice de la fonction et les actes accomplis à l'occasion de l'exercice des fonctions. Ce qui avait pour conséquences que les ministres soupçonnés étaient justiciables de cette juridiction d'exception.

Lors de l'arrêt Carignon, la Cour de cassation a précisé que « les actes commis par un ministre dans l'exercice de ses fonctions sont ceux qui ont un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat relevant de ces attributions, à l'exclusion des comportement concernant la vie privée ou les mandats électifs locaux ».

Désormais la Cour de cassation, dans des affaires mettant des Ministres en cause pour des faits de corruption194(*), considère que les actes accomplis dans l'exercice des fonctions ne comprennent pas les actes accomplis à l'occasion de l'exercice des fonctions mais ils recouvrent seulement ceux ayant un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat.

Par conséquent, les faits de corruption ne relèvent plus de la compétence de la Cour de justice de la République à moins qu'ils n'aient un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat.

S'agissant enfin des parlementaires, ils relèvent des juridictions de droit commun et non pas d'une juridiction d'exception. Toutefois, les poursuites ne pouvaient être engagées, auparavant, qu'avec l'autorisation de l'assemblée dont relevait le parlementaire pendant les sessions ou avec l'autorisation du bureau de cette assemblée hors session. Ce régime d'inviolabilité a été modifié par la loi constitutionnelle du 4 août 1995195(*). Désormais, sont seules soumises à autorisation du bureau de l'assemblée les mesures privatives ou restrictives de liberté hors le cas de flagrant délit ou de condamnation définitive.

b-La Haute Cour en Tunisie 

Il existe une seule juridiction d'exception relative aux hommes politiques en Tunisie. Il s'agit de la Haute Cour prévue par l'article 68 de la Constitution tunisienne qui dispose que celle-ci est compétente pour juger les membres du gouvernement en cas de haute trahison. La compétence de la Haute Cour a été déterminée par la loi du 1 avril 1970196(*) qui reprend dans son article premier les mêmes termes de la Constitution mais elle ajoute dans son article 2 une définition de la haute trahison. Il s'agit en effet d' « ... actes accomplis dans l'exercice des fonctions et qualifiés de crimes ou délits au moment où ils étaient commis et qui portent atteinte à la réputation de l'Etat ».

A notre sens cet article, dans sa version française, a été mal traduit puisqu'il laisse croire que les actes accomplis dans l'exercice des fonctions sont ceux ayant un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat alors que le texte arabe prévoit la compétence de la Haute Cour lorsque la personne, ayant la qualité de Ministre, commet des actes qualifiés de crimes ou délits.

Ainsi, la Haute Cour a une compétence exclusive pour juger les membres du gouvernement contrairement à la Cour de justice de la République en France qui n'a qu'une compétence concurrente à celle des tribunaux répressifs.

Par conséquent, cette juridiction d'exception tunisienne est compétente pour juger les faits de corruption, qu'ils aient un rapport direct avec la conduite des affaires de l'Etat ou non, du moment qu'ils sont commis par des Ministres.

Quant au président de la République, l'article 41 de la Constitution197(*) dispose que : « Le Président de la République bénéficie d'une immunité juridictionnelle durant l'exercice de ses fonctions. Il bénéficie aussi de cette immunité juridictionnelle après la fin de l'exercice de ses fonctions en ce qui concerne les actes qu'il a accomplis à l'occasion de l'exercice de ses fonctions ». Ainsi, aucune poursuite n'est possible contre le chef de l'Etat.

Quant aux parlementaires, ils relèvent des juridictions de droit commun et non pas d'une juridiction d'exception. Toutefois, ils bénéficient d'un régime d'inviolabilité puisque les poursuites ne peuvent être engagées qu'avec l'autorisation de l'assemblée dont relève le parlementaire pendant les sessions ou avec l'autorisation du bureau de cette assemblée hors session. On remarque à ce niveau que c'est le même régime d'inviolabilité qui existait en France avant la réforme constitutionnelle du 4 août 1995.

2-Le Tribunal militaire

S'agissant de la législation française. Une distinction, relative aux juridictions militaires compétentes, est faite entre le temps de paix et le temps de guerre.

En temps de paix, les infractions militaires et les infractions de droit commun commises par les militaires agissant dans le service sont en principe jugées par les juridictions de droit commun conformément à l'article 697-1 CPP tel que modifié par la loi du 21 juillet 1982. Cependant, il existe encore des juridictions militaires en temps de paix, par exemple les tribunaux aux armées qui opèrent à l'étranger et qui connaissent des infractions de toute nature, y compris la corruption, commises par les militaires ou les personnes à leur suite, ainsi que des infractions contre les forces armées françaises ou contre leurs établissements198(*).

En cas d'état de siège ou d'urgence déclaré, les infractions de toute nature, y compris la corruption, commises par les militaires et les infractions contre les forces armées sont de la compétence des tribunaux territoriaux des forces armées qui sont établies sur le territoire nationale199(*).

En temps de guerre, la compétence est celle des tribunaux territoriaux des forces armées qui connaissent des infractions commises par les militaires ainsi que des crimes ou délits contre les intérêts fondamentaux de la nation et des infractions qui leur sont connexes200(*).

En Tunisie, c'est le tribunal militaire qui est compétent pour connaître de certaines infractions commises par des militaires. L'organisation et la compétence de cette juridiction sont prévues par le décret du 10 janvier 1957201(*).

Aucun article de ce décret ne prévoit expressément les faits de corruption comme étant un infraction relevant de la compétence du Tribunal militaire. Cependant l'article 5 dudit décret dispose que ce tribunal est compétent pour connaître des infractions commises contre les intérêts de l'armée.

On peut imaginer qu'un militaire sollicite ou agrée des offres en vue d'accomplir des actes qui sont contraires aux intérêts de l'armée. Rien ne s'oppose, dans ce cas, à ce que le tribunal militaire soit compétent pour connaître des faits de corruption commis par un militaire.

SECTION 2 : LES PROBLEMES RELATIFS A LA MISE EN OEUVRE DE LA POURSUITE 

La clandestinité des faits de corruption, comme on l'a déjà évoqué, a pour principal effet ; La difficulté de prouver ces faits, par conséquent, l'infraction demeure impunie (para1). A cette difficulté de la preuve vient s'ajouter la prescription qui peut être à son tour un obstacle à la répression (para2).

PARA 1 : La clandestinité des faits de corruption et la difficulté de preuve 

L'appréhension des faits de corruption nécessite une spécialisation puisque l'infraction est dissimulée dans des données comptables apparemment régulières, quant aux auteurs sont cachés par des sociétés écrans. Il faut alors que les enquêteurs soient spécialisés et formés pour la recherche de tout ce qui est licite. Cette spécialisation si elle existe dans la législation française(A), elle fait défaut en droit tunisien(B).

A-La spécialisation dans la recherche des preuves en France

La spécialisation dans la découverte des faits de corruption ne se limite pas aux juridictions de jugement, en effet, elle existe dans toutes les phases de la procédure, c'est à dire, enquête, poursuite, instruction et jugement.

La spécialisation des organes de l'enquête ne concerne pas uniquement les faits de corruption mais toutes les infractions en matière économique et financière énumérées par l'article 704 CPPF. D'autre part, la spécialisation concerne les services de police et de gendarmerie:

La direction centrale de la police judiciaire, dont les agents peuvent effectuer des enquêtes sur l'ensemble du territoire, comporte deux divisions spécialisées. La division dite des infractions au droit des affaires, chargée de la répression des infractions aux lois sur les sociétés, de fraude fiscale et de la corruption. La deuxième est; l'office central pour la répression de la grande délinquance financière qui traite les infractions à caractère économique, commercial et financier liée à la criminalité organisée.

Quant aux juridictions spécialisées, la loi du 6 août 1975202(*) modifiée par la loi du 1 février 1994 précédemment citée, a institué dans chaque ressort de cour d'appel, un ou plusieurs tribunaux de grande instance comportant des magistrats spécialisés et compétents pour l'instruction et le jugement de ces infractions et de celles leur étant connexes. La saisine de ces juridictions peut intervenir dés les premiers éléments de l'enquête; Il apparaît ainsi un parquet spécialisé. Ainsi, les juridictions spécialisées peuvent voir leur compétence élargie pour englober toutes les phases de la procédure.

Ces juridictions spécialisées ont vu leur efficacité renforcée du fait de la création des assistants spécialisés203(*), dont le statut a été amélioré par la loi du 9 mars 2004 dite loi Perben 2, il s'agit de personnes ayant acquis, au cours de leur parcours professionnel, des compétences en matière économique et financière, à titre d'exemple des agents des impôts, des douanes etc. Ces assistants spécialisés suivent une formation obligatoire préalable à leur entrée en fonction. Ils peuvent dorénavant assister les juges d'instruction ou les officiers de police judiciaire agissant sur commission rogatoire dans tous les actes d'information, ainsi que les magistrats du Ministère public dans l'exercice de l'action publique.

En conclusion, les juridictions spécialisées ont une compétence supplémentaire, puisqu'elle vient s'ajouter à la compétence de la juridiction d'origine qui reste saisie et elle est facultative puisque la juridiction ne sera saisie que si l'affaire apparaît d'une grande complexité au magistrat originellement compétent.

B-L'absence de la spécialisation dans la recherche des preuves en Tunisie

En Tunisie, si on analyse les articles relatifs à la corruption, on remarque que le législateur n'a pas précisé un moyen de preuve bien déterminé à appliquer en cas de faits de corruption. Ainsi ce sont les règles générales prévues dans les articles 150 CPPT et suivant qui sont applicables.

La preuve des faits de corruption est l'un des problèmes majeurs qu'un juge peut rencontrer, ceci s'explique par la clandestinité de ces faits et la prudence des auteurs d'une telle infraction. La difficulté de prouver la corruption a pour regrettable conséquence de faire obstacle à la répression surtout si la sollicitation porte sur un objet qui n'a qu'un intérêt moral.

Ainsi, la facilité de preuve des faits de corruption dépend de la nature des intérêts reçus par l'auteur de l'infraction et de la nature de la corruption, en d'autres termes, passive ou active.

Si l'avantage prévu dans le pacte de corruption est une promesse ou une recommandation, il serait difficile de prouver cette infraction. Les juges, de leur coté, pour dépasser une telle difficulté se réfère aux présomptions de fait recueillies par les magistrats instructeurs, à titres d'exemple, les dépenses d'un fonctionnaire public qui ne correspondent pas à ses ressources, toutefois ils sont tenus de motiver leurs décisions. Il faut préciser que la motivation de la décision est obligatoire et cette obligation est due à une jurisprudence constante.

D'un autre coté, la tâche du juge, dans la recherche de la vérité, est facilitée par le rôle du juge d'instruction, sachant qu'en Tunisie l'instruction est obligatoire en matière de crimes et facultative en matière de délits, d'où l'instruction est obligatoire pour les cas de corruption passive prévus par les articles 83 et 84 CPT et dans le cas de corruption active prévu par l'article 94 CPT, mais elle reste facultative dans les autres cas puisqu'ils sont qualifiés de délits.

A son tour, le juge d'instruction voit son rôle facilité par l'information menée par l'administration à laquelle appartient le fonctionnaire public, en effet, l'administration ouvre une information administrative à l'encontre de ce dernier afin d'accumuler les preuves relatives à la corruption.

A la clôture de cette information administrative, le supérieur hiérarchique de l'administration décide, soit le classement sans suite, soit la prononciation d'une peine administrative.

L'information administrative permet au juge d'instruction d'être éclairé sur les faits, toutefois, en cas de prononciation d'une peine disciplinaire par le supérieur hiérarchique de l'administration, cette décision ne lie pas le juge d'instruction quant à la suite qu'il va donner à l'information judiciaire qu'il a ouvert.

Lors de l'instruction judiciaire le juge d'instruction procède à tous les actes nécessaires pour la manifestation de la vérité tels que l'audition des témoins, des perquisitions, des expertises, toutefois, l'instruction reste facultative dans les cas où l'infraction de corruption est qualifiée de délit conformément à l'article 47 CPPT qui dispose :  « l'instruction préparatoire est obligatoire en matière de crime ; sauf dispositions spéciales, elle est facultative en matière de délit et de contravention. » et rien dans le code n'exige une instruction obligatoire au cas où la corruption constitue un délit . On remarque que l'article 47 CPPT reprend les mêmes termes de l'article 79 CPPF concernant les cas dans lesquels l'instruction préparatoire est obligatoire.

Il est regrettable, à notre sens, que l'instruction ne soit pas obligatoire dans tous les cas de corruption vu la gravité de cette infraction qui porte atteinte à la transparence de la fonction publique. D'autre part, il serait préférable que le législateur tunisien s'inspire de son homologue français et crée des juridictions d'enquête, d'instruction et de jugement spécialisées.

PARA 2 :La prescription de l'action publique

L'écoulement du temps entraîne la prescription de l'action publique de sorte que l'auteur échappe à la répression et ne peut être poursuivi. Le mécanisme de prescription existe en France et en Tunisie et se justifie par l'idée qu'au bout d'un certain temps, mieux vaut oublier l'infraction que raviver le souvenir. De plus, l'écoulement du temps entraîne la perte des preuves et multiplie le risque d'erreur judiciaire.

Malgré les justifications de la prescription, une hostilité croissante envers celle-ci émane des juges ainsi que des législateurs et qui se fonde sur le refus d'impunité de l'auteur de l'infraction. Cette hostilité est plus importante lorsqu'il s'agit d'infractions d'affaires qui se caractérisent par la clandestinité qui rend leur découverte dans un délai de trois ans inacceptable204(*).

Ainsi la prescription apparaît comme un obstacle à la poursuite, toutefois la jurisprudence française, contrairement à la jurisprudence tunisienne, a essayé de trouver un moyen pour surmonter cet obstacle en retardant le point de départ du délai de prescription(B).

A noter, que si le délai de prescription est fixé à trois ans depuis la correctionnalisation de la corruption suite à la loi de 1943 en France, ce délai est variable en Tunisie selon que l'infraction est qualifiée de crime ou de délit (A).

A-Les délais de prescription 

Selon, l'article 8 CPPF « En matière de délit, la prescription de l'action publique est de trois années révolues » et l'article 7 CPPF ajoute que le point de départ de celle-ci est le jour de la commission de l'infraction.

Ainsi, le délit de corruption se prescrit par trois années révolues à compter du jour de sa commission.

En Tunisie, l'infraction de corruption est qualifiée dans certains cas de crime et dans d'autres cas de délit, ceci a pour principal effet de varier le délai de prescription de l'action publique selon la qualification de la dite infraction. L'article 5 CPPT dispose  « Sauf dispositions spéciales de la loi, l'action publique qui résulte d'un crime se prescrit par dix années révolues, celle qui résulte d'un délit par trois années révolues.. et ce à compter du jour où l'infraction a été commise... ».

Ainsi, est qualifié de délit de corruption, dont le délai de prescription est de trois années révolues ; la corruption active prévue dans l'article 91 CPT alinéa 1er qui dispose : « Est punie de cinq ans d'emprisonnement et de cinq mille dinars d'amende, toute personne qui aura corrompu ou tenté de corrompre par des dons ou promesses de dons, ou présents ou avantages de quelque nature que ce soit l'une des personnes visées à l'article 82 du présent code(fonctionnaire public).. ». Ensuite, le délit d'octroyer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives et réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté de participation et l'égalité des chances dans les marchés passés, prévu par l'article 87 bis CPT, et enfin, le délit prévu dans l'article 85 CPT relatif au fonctionnaire qui accepte des dons ou présents après l'accomplissement ou non de l'acte de la fonction.

D'autre part, le délai de prescription est porté à dix années révolues dans le cas où l'infraction de corruption est qualifiée de crime, à titre d'exemple ; les cas des articles 83 CPT relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui, soit personnellement, soit par intermédiaire, pour lui-même ou pour autrui, agrée des offres ou promesses ou reçoit des dons ou présents pour faire un acte de sa fonction, même juste, mais non sujet à salaire, puis, l'article 84 CPT relatif au fonctionnaire public ou assimilé qui a provoqué ces offres ou promesses ou la remise de dons ou présents.

Ensuite, la corruption passive des magistrats prévue dans les articles 88 et 89 CP et enfin, le cas de corruption active des fonctionnaires publics accompagné de contrainte ou de tentative de contrainte par voies de fait ou menaces, conformément à l'article 91 CPT.

On a déjà vu que le délit de corruption en France comme en Tunisie se prescrit par trois années, ce délai s'est avéré en pratique comme obstacle à la répression d'où des solutions ont été trouvées par la jurisprudence française.

B-le retardement du point de départ du délai de prescription par la jurisprudence 

La Cour de cassation française, malgré l'absence de textes, soucieuse de retarder le plus possible le point de départ du délai de prescription, a élaboré et développé une jurisprudence ne faisant pas courir le délai de prescription de certaines infractions instantanées du jour de leur consommation. Deux formes d'infractions instantanées sont concernées par cette jurisprudence celles qui s'exécutent sous forme de remises successives de fonds ou d'actes réitérés, et celles qui sont occultes ou s'accompagnent de manoeuvres de dissimulation qui les rendent difficile à découvrir205(*).

S'agissant d'abord des infractions s'accompagnant de manoeuvres de dissimulation, l'exemple type est celui de l'abus de biens sociaux. En effet à raison de la nature occulte de ce délit, un délai de prescription de trois ans à compter du jour de sa consommation n'aurait pas permis, dans la plupart des cas, d'exercer des poursuites contre son auteur qui aurait ainsi bénéficié d'une impunité inacceptable. C'est pourquoi la Cour de cassation s'est efforcée de retarder le point de départ de la prescription. Cette jurisprudence a connu une évolution qui s'est déroulée en trois phases.

Dans un premier temps la Cour de cassation a retardé le point de départ de la prescription triennale au jour où le délit est apparu et a pu être constaté, c'est à dire au jour de la découverte206(*).

Dans un deuxième temps la Cour de cassation a précisé que le point de départ de la prescription triennale doit être fixé au jour où le délit est apparu et a pu être constaté dans des conditions permettant l'exercice de l'action publique, en d'autres termes, par les seules personnes habilitées à mettre cette action en mouvement : les victimes et le ministère public207(*).

Enfin la chambre criminelle s'est fondée sur les dispositions du Code de commerce pour décider que le délai de prescription de l'action publique du chef d'abus de biens sociaux ne commence à courir, sauf dissimulation, qu'à compter de la présentation des comptes annuels par lesquels les dépenses litigieuses sont mises indûment à la charge de la société208(*).

S'agissant ensuite des infractions instantanées qui s'exécutent sous forme de remises successives de fonds ou d'actes réitérés, on peut citer l'escroquerie, le trafic d'influence, le délit de prise illégale d'intérêt et le délit de corruption209(*). Concernant ce dernier délit, il est admis, depuis la réforme de 1943, qu'il est pleinement consommé, dès que le fonctionnaire a sollicité des dons, des présents ou des promesses ou dès que le corrupteur a formulé des propositions illicites.

Or c'est ce point de départ retardé du délai de prescription qui a posé un problème. La difficulté apparaît spécialement dans le cas d'un pacte délictueux remontant à plus de trois années, mais dont l'exécution échelonnée se poursuit actuellement : l'activité présente du corrupteur et du corrompu n'échappe-t-elle pas à l'action publique, au prétexte que l'accord initial est maintenant hors d'atteinte de la loi pénale210(*) ?

Pour empêcher l'accomplissement éventuel de la prescription, la Cour de cassation a décidé que si le délit de corruption est une infraction instantanée, consommée dès la conclusion du pacte de corruption entre le corrupteur et le corrompu, il se renouvelle à chaque acte d'exécution dudit pacte. Cette solution a été reprise par plusieurs arrêtes qui utilisent la même formule, à savoir :« Des délits successifs se sont renouvelés aussi longtemps qu'a existé le concert frauduleux »211(*).

D'après le professeur Vitu Cette solution ne contredit nullement l'affirmation, toujours exacte, que la corruption de personnes chargées d'une fonction publique est une infraction instantanée. Il ajoute que le législateur « attache équivalemment la qualification de corruption consommée à la sollicitation d'une rémunération, à l'acceptation d'offres ou de promesses, et à la réception de dons ou de présents : ces divers moments, qui peuvent être séparés dans le temps par des intervalles plus ou moins longs, caractérisent tous identiquement l'accomplissement de la corruption; à chaque manifestation de la volonté coupable, le délit se manifeste à nouveau complètement212(*) ».

A notre sens, deux remarques doivent être faites à ce niveau. La première est relative au législateur tunisien qui ne retarde pas le point de départ des infractions instantanées. Cette solution respecte certes la règle de l'interprétation stricte de la loi mais elle a pour inconvénient d'empêcher la répression des faits de corruption.

La deuxième est destinée aux deux législateurs, il est temps, en effet, que les délais de prescription soient allongés afin d'éviter qu'ils soient un obstacle à la répression. Nous proposons que ce délai soit porté à cinq ans en matière de délit et à quinze ans en matière de crime.

CHAPITRE II : LA COMPARAISON DES PEINES 

La majorité des droits positifs classifient les peines en peines principales et peines complémentaires, c'est le cas du droit tunisien et le droit français. A ces deux peines viennent s'ajouter d'autres peines, à titre d'exemple ; les peines accessoires, qui ne figurent plus dans le nouveau code pénal français, ensuite les peines alternatives et parfois et dans certaines législations des peines disciplinaires. Ainsi, la comparaison portera sur les peines principales (section 1) et les autres peines (section 2) à savoir ; complémentaires, accessoires et disciplinaires.

SECTION I : LES PEINES PRINCIPALES 

Aujourd'hui comme hier, en France, les peines principales sont essentiellement la privation de liberté et l'amende. A ces deux peines principales s'ajoute, en Tunisie, la peine de mort, qui a été abolie en droit français, et le travail d'intérêt général. En matière de corruption, en France comme en Tunisie, les peines principales appliquées sont ; les peines privatives de liberté (para 1) et l'amende (para2).

PARA I : Les peines privatives de liberté

Si, en France, l'infraction de corruption est qualifiée de délit depuis sa correctionnalisation en 1943, cette qualification n'est pas, tout le temps, retenue en Tunisie puisque l'infraction peut être qualifiée de crime ou de délit selon les peines prévues et qui peuvent être criminelles ou délictuelles. Ainsi, seront étudiée les peines correctionnelles (A) et les réclusions criminelles (B).

A-Les peines correctionnelles

En Tunisie, la chambre correctionnelle est compétente en matière de délits (article124CPPT). Ainsi, est du ressort de la dite chambre toutes les infractions de corruption qui sont punies d'une peine privative de liberté ne dépassant pas cinq ans d'emprisonnement. A titre d'exemple ; la corruption active prévue dans l'article 91 CPT alinéa 1er qui dispose : « est punie de cinq ans d'emprisonnement ....., toute personne qui aura corrompue ou tenté de corrompre par des dons ou promesses de dons, ou présents ou avantages de quelque nature que ce soit l'une des personnes visées à l'article 82 du présent code(fonctionnaire public).. » et cet article ajoute que les mêmes peines sont applicables à toute personne ayant servi d'intermédiaire entre le corrupteur et le corrompu.

Une peine correctionnelle de cinq ans d'emprisonnement est prévue pour le délit d'octroyer à autrui un avantage injustifié par un acte contraire aux dispositions législatives et réglementaires ayant pour objet de garantir la liberté de participation et l'égalité des chances dans les marchés passés prévu par l'article 87 bis CPT.

A notre sens, la peine prévue pour ce délit n'est pas compatible avec la gravité des faits reprochés.

Enfin, le délit prévu dans l'article 85 CPT qui dispose : « . Si le fonctionnaire public ou assimilé a accepté des dons, promesses, présents ou avantages de quelque nature que ce soit en récompense d'actes qu'il a accomplis...est puni de cinq ans de cinq ans d'emprisonnement... ».

Ce délit est constitué une fois le fonctionnaire a accepté des dons ou présents après l'accomplissement ou non de l'acte de la fonction, ce qui le distingue du cas prévu à l'article 83 CPT relatif à l'acceptation des dons avant l'accomplissement de l'acte.

L'article 85 CPT prévoit une peine de cinq ans d'emprisonnement depuis la loi du 23 mai 1998 au lieu d'un an avant la promulgation de la dite loi, ce qui affirme la politique répressive suivie en Tunisie en matière de corruption.

En France, depuis la correctionnalisation de la corruption par la loi du 16 mars 1943, le législateur prévoit dans tous les cas de corruption une peine d'emprisonnement de dix ans, à l'exception de l'article 434-9 CPF qui prévoit la réclusion criminelle de quinze ans.

B-Les réclusions criminelles

La loi du 16 mars 1943 avait enlevé à la corruption de fonctionnaires le caractère de crime qu'elle possédait. Cependant cette loi avait laissé le caractère criminel à deux hypothèses de corruption. Il s'agit dans le premier cas de la corruption ayant pour objet un fait criminel comportant une peine plus forte que l'emprisonnement, par exemple la corruption tendant à la commission d'un faux en écritures publiques. Le deuxième cas est celui de la corruption passive commise par des juges ou des jurés à l'occasion de justice rendue en matière criminelle. Ce sont les hypothèses qui étaient prévues dans les articles 180,182 ACP. Mais en pratique, ce texte n'a pas reçu d'application.

L'article 434-9 NCP n'a laissé subsister, qu'une seule de ces causes d'aggravation des peines. En effet, lorsqu'un magistrat est coupable de corruption passive au bénéfice ou au détriment d'une personne faisant l'objet de poursuites criminelles ; la peine principale encourue est la réclusion criminelle de quinze ans. Deux différences séparent cette circonstance aggravante de celle à laquelle elle a succédé : d'une part le juré n'est plus mentionné ; d'autre part, sont visés non seulement les juges siégeant à la cour d'assises, mais aussi tous ceux qui, à un moment ou à un autre, sont mêlés à la poursuite ou à l'instruction d'une affaire criminelle : membres du parquet, juge d'instruction, juge des libertés et de la détention, membres de la chambre d'accusation213(*).

Cette sévérité s'explique par la gravité des faits reprochés aux magistrats, et les conséquences désastreuses, que peut entraîner un tel pacte entre les parties, sur la liberté des individus et le maintien de l'ordre public.

Il faut souligner la notable simplification du système actuel, qui ne fait plus varier, contrairement au droit antérieur214(*), la répression selon que l'accomplissement ou l'abstention porte sur un acte facilité par la fonction ou un acte de la fonction.

En Tunisie, il n'y a pas eu une correctionnalisation de l'infraction de corruption, au contraire, le législateur tunisien a aggravé la durée des peines privatives de liberté avec la réforme du 23 mai 1998. Il faut signaler d'abord, qu'en Tunisie, la distinction entre réclusions criminelles et emprisonnement n'existe pas puisque toutes les peines privatives de liberté, en matière criminelle ou délictuelle sont appelées ; des peines d'emprisonnement.

Sachant qu'en droit tunisien les infractions punies d'une peine d'emprisonnement supérieure à cinq ans sont qualifiées de crimes, on remarque que le caractère criminel de la dite infraction est plus fréquent dans la législation tunisienne par rapport au droit français qui limite ce caractère au seul cas de corruption passive des magistrats. Il convient, donc, d'étudier les cas où la corruption est punie d'une peine d'emprisonnement criminelle.

Il faut signaler que même si les crimes sont punis, en Tunisie, d'une peine d'emprisonnement ne pouvant être inférieure à cinq ans, le législateur tunisien a prévu deux paliers qui sont loin du minimum prévu (5 ans).

Le palier supérieur, soit vingt ans d'emprisonnement, concerne le fonctionnaire public ou assimilé qui a provoqué la corruption prévue par l'article 84 CPT et la corruption passive de magistrat prévue par l'article 88 CPT qui dispose : « est puni de vingt ans d'emprisonnement, le juge, qui à l'occasion d'une infraction susceptible d'entraîner pour son auteur l'emprisonnement à vie ou la peine de mort, soit en faveur, soit au préjudice de l'inculpé » .

On remarque que dans les deux législations il y a une aggravation des peines privatives de liberté lorsque l'auteur de l'infraction a la qualité de magistrat. De plus, en Tunisie, contrairement à la législation française, on parle toujours de « l'inculpé » au lieu du «  mis en examen » malgré l'atteinte grave à la présomption d'innocence.

Le deuxième palier, est de dix ans d'emprisonnement, concerne la corruption passive de fonctionnaire public ou assimilé prévue par l'article 83 CPT alors que la peine prévue pour ce crime, avant la réforme de mai 1998, était de cinq ans d'emprisonnement. Est puni de dix ans d'emprisonnement la corruption active de fonctionnaire public ou assimilé accompagnée de contrainte par voies de fait ou menaces exercées sur eux personnellement ou sur l'un des membres de leur famille conformément au dernier paragraphe de l'article 91 CPT.

On remarque que, pour ce second palier, même si l'infraction est qualifiée de crime en Tunisie, la durée des peines privatives de liberté est la même qu'en droit positif français qui qualifie l'infraction de délit. Ainsi, il y a une divergence, entre les deux droits, quant à la qualification de l'infraction et une convergence quant à la durée des peines privatives de liberté.

PARA II : L'amende 

Les législateurs utilisent l'amende comme une peine qui vient s'ajouter à la peine privative de liberté à titre de peine principale. Ils décident, soit d'imposer au juge de les prononcer l'une et l'autre, soit lui donner le choix entre les deux. Toutefois, il existe deux techniques relatives à l'application de l'amende ; la première est la technique des amendes proportionnelles (A) et la seconde est celle des amendes fixes (B). ainsi, la comparaison relative à l'amende portera sur la technique utilisée par les législateurs en matière de corruption.

A- les amendes proportionnelles

En France, dans l'ancien système, pour la corruption de fonctionnaire, l'amende pouvait être double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées. Cette technique de l'amende proportionnelle a été abandonnée par le nouveau code pénal qui prévoit des amendes fixes.

En Tunisie, le législateur, par la réforme du 23 mai 1998, a augmenté le taux des amendes, en plus il a insisté sur l'obligation qu'elles soient appliquées par les juges lors de la prononciation de la peine privative de liberté.

Ainsi, l'amende minimum est de mille dinars (700euros), au lieu de mille francs au sein des anciennes dispositions. Et de vingt mille dinars, pour le taux maximal.

A noter, qu'en Tunisie, malgré la réforme, le législateur utilise la technique des amendes proportionnelles et la technique des amendes fixes, contrairement au législateur français qui s'est limité à la dernière seulement.

La technique des amendes proportionnelles est utilisée à deux reprises dans le cadre de la corruption, d'abord on la trouve pour la corruption passive de fonctionnaire public ou assimilé ( article 83 CPT) et dans le cas où la corruption passive est due à la provocation du fonctionnaire public ou de l'assimilé (84 CPT).

A ce niveau se pose le problème de la nature des choses agréées ou sollicitées, si elles ont une valeur non matérielle à titre d'exemple ; un rapport sexuel, il serait impossible d'appliquer la technique des amendes proportionnelles. On peut penser à l'article 82 CPT qui dispose : « Sans qu'elle puisse être inférieure à dix milles dinars ( sept milles euros) ». Ainsi, dans ce cas c'est le minimum prévue par la loi qui sera applicable.

Concernant l'application des amendes, le juge est tenu de les appliquer depuis la loi du 23 mai 1998, alors qu'il avait le choix quant à leur application auparavant ce qui prouve la politique répressive suivie par le législateur tunisien en matière de corruption.

B-Les amendes fixes 

Le nouveau code pénal 1994 a remplacé la technique des amendes proportionnelles par des amendes fixes215(*). Désormais, il y a quatre nouveaux paliers ; Le palier supérieur est de (225000 euros ) qui correspond à la réclusion criminelle de quinze ans pour la corruption passive des magistrats prévue à l'article 434-9 CPF. Vient ensuite le palier de (150 000 euros) et il accompagne systématiquement la peine de dix ans d'emprisonnement. Puis, le palier de ( 75 000 euros) est jumelé avec la peine de cinq ans d'emprisonnement et enfin, le palier inférieur de (30 000 euros) qui va de pair avec la peine de deux ans d'emprisonnement.

Pour certains auteurs, la technique des amendes fixes adoptée par le législateur est regrettable et ils demandent l'application de l'ancienne technique des amendes proportionnelles216(*).

En Tunisie, le législateur fait appel aux deux techniques, il utilise d'une part les amendes proportionnelles et d'autre part les amendes fixes. Il existe, comme c'est le cas en France, quatre paliers. Le premier palier est de dix milles dinars qui correspond à la corruption active de fonctionnaire public en vue d'accomplir un acte lié à sa fonction mais non sujet à contrepartie accompagnée de contrainte par voies de fait ou de menaces.

Le deuxième palier est de cinq milles dinars qui correspond à la corruption active de fonctionnaire public ou assimilé prévue par l'article 85 CPT, ainsi que la corruption active de fonctionnaire public en vue d'accomplir un acte lié à sa fonction, même juste, mais non sujet à contrepartie, ou de faciliter l'accomplissement d'un acte lié à sa fonction, ou de s'abstenir d'accomplir un acte qu'il est de son devoir de faire. L'amende est appliquée, dans ce cas, pour la tentative et elle est prononcée à l'encontre de l'intermédiaire.

Le troisième palier est de deux milles dinars et il est prévu pour la tentative de voies de fait ou menaces qui n'a eu aucun effet. Le dernier palier est de mille dinars d'amende et il correspond à la tentative de corruption qui n'a eu aucun effet.

On remarque qu'en droit tunisien, contrairement au droit français, la tentative est punissable, de plus aucune peine d'amende n'est prévue pour la corruption active ou passive des magistrats, ces derniers ne risquent que l'emprisonnement comme peine principale, ce qui est regrettable, à notre sens, vu la gravité des faits qui leur sont reprochés.

SECTION II : LES AUTRES PEINES 

Sous l'empire du code de 1810, on parlait des peines principales, complémentaires et accessoires. Les peines accessoires s'ajoutent automatiquement à la peine principale et elles n'ont pas à être prononcées expressément par le juge. Après la promulgation du nouveau code pénal il convient de parler des peines principales, alternatives et complémentaires217(*).

En principe, les peines accessoires ou automatiques ont disparu avec le nouveau code pénal et ce par application de l'article 132-17 qui dispose :  « aucune peine ne peut être appliquée si la juridiction ne l'a pas expressément prononcée ».

En Tunisie, la distinction est faite entre peines principales et peines complémentaires. A noter, que le législateur tunisien s'il utilise le terme « complémentaire » dans le texte arabe, il le traduit dans le texte français de «  peines accessoires ». Cette faute de traduction doit être, à notre sens, modifiée vu la différence qui existe entre les peines complémentaires et les peines accessoires en droit comparé, à titre d'exemple, le droit français.

Les peines complémentaires, en Tunisie, sont prévues dans l'article 5 CPT et certaines d'entre elles sont reprises dans les dispositions relatives à la corruption dans les articles 83 CPT et suivant. Il s'agit de la confiscation et l'interdiction d'exercer les fonctions publiques.

En France, des peines complémentaires viennent s'ajouter aux peines principales. Ces peines sont indiquées par l'article 432-17 CPF.

A noter que malgré la disparition des peines accessoires celles-ci subsistent en matière de corruption dans deux cas. Ainsi, seront étudiées ; les peines complémentaires( para 1) et les peines accessoires(para2).

PARA I : Les peines complémentaires 

L'article 432-17 CPF prévoit les peines complémentaires applicables en matière de corruption, on commence par l'interdiction des droits civils, civiques et de famille, puis on a l'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale, ensuite la confiscation et enfin l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée. Cette dernière peine est prévue en droit tunisien comme peine complémentaire, en effet, l'article 5 CPT parle de `'la publication, par extraits, de certains jugements''.

En Tunisie, les peines complémentaires sont prévues dans l'article 5 CPT et deux d'entre elles sont reprises dans le cadre de la corruption ; la confiscation et l'interdiction d'exercer une fonction publique.

Ainsi, la comparaison portera sur l'interdiction d'exercer une fonction publique(A) et la confiscation(B).

A-L'interdiction d'exercer une fonction publique

L'interdiction d'exercer une fonction publique ou d'exercer l'activité professionnelle ou sociale dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de laquelle l'infraction a été commise, prévue par l'article 432-17 CPF peut être définitive ou pour une durée de cinq ans. Elle existe pour la corruption passive et active des fonctionnaires nationaux mais limitée à cinq ans, elle est prévue pour la corruption passive et active des fonctionnaires européens et pour la corruption d'agents publics étrangers mais limitée à cinq ans et enfin pour la corruption active ou passive aux fins d'obtenir de faux certificats. En revanche, cette interdiction disparaît dans le cas de la corruption active ou passive de magistrat (art 434-44 CPF) et pour la corruption de salarié (art l 152-6 C Travail).

Selon certains auteurs ;'' il est vraiment insensé de laisser officier un juge corrompu,...il peut paraître regrettable de ne pouvoir leur interdire l'exercice d'une activité professionnelle 218(*)''.

En Tunisie, l'interdiction d'exercer des activités professionnelles est prévue dans l'article 83 CPT, relatif à la corruption passive de fonctionnaire, qui ajoute l'interdiction de gérer les services publics et de les représenter. Cette interdiction ne s'applique qu'aux personnes ayant la qualité de fonctionnaire public ou assimilé, d'où le corrupteur et l'intermédiaire échappent à la répression, ce qui est, à notre sens, regrettable puisque l'auteur de la corruption active ou l'intermédiaire peuvent avoir la qualité de fonctionnaire public mais ils ne se voient pas appliquer cette peine complémentaire.

On remarque que si cette peine fait seulement défaut pour la corruption active et passive de magistrat et la corruption de salarié en France, elle fait défaut, de prime abord, dans tous les cas de corruption en Tunisie excepté la corruption passive de fonctionnaire public. Cet oubli a été évité par le législateur tunisien.

En effet, l'article 115 CPT dispose que « dans tous les cas prévus dans le présent chapitre, le tribunal pourra faire application des peines accessoires, ou l'une d'entre elles, édictées par l'article 5 CPT ». Sachant que le chapitre mentionné ci-dessus est relatif aux infractions commises par les fonctionnaires publics ou assimilés dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de la fonction, dont fait partie la corruption. Quant à l'article 5 CPT il énumère les peines complémentaires parmi lesquelles on trouve l'interdiction d'exercer une fonction publique.

On remarque que cet article s'applique pour tous les cas de corruption et l'interdiction d'exercer une fonction publique n'est plus limitée au seul cas de corruption passive de fonctionnaire prévue par l'article 83 CPT.

En conclusion, l'interdiction d'exercer une fonction publique si elle est limitée à des délits de corruption bien déterminés en France, elle peut être appliquée par les juridictions tunisiennes pour tous les cas de corruption.

B-La confiscation 

D'après l'article 94 CPT `' dans tous les cas de corruption, les choses données ou reçues sont confisquées au profit de l'Etat''.

Cet article parle des `'choses données ou reçues `', c'est à dire un bénéfice ayant une valeur matérielle. Cette interprétation n'est pas admise par toute la doctrine, certains auteurs pensent que la confiscation doit porter sur toutes les choses données ou reçues quelle que soit leur nature219(*).

On remarque que la confiscation est une peine obligatoire qui doit être prononcée à chaque fois que la culpabilité des auteurs est établie et qu'elle doit être faite au profit de l'Etat.

En cas de perte ou de cession des choses reçues c'est la valeur de celles-ci qui sera confisquée conformément à l'article 29 CPT220(*), mais on voit mal comment sera déterminée la valeur d'un bénéfice moral tel qu'un rapport sexuel ?

En France, l'article 432-17 CPF prévoit ; La confiscation, au profit du Trésor, des sommes ou des objets irrégulièrement reçus par l'auteur de l'infraction, à l'exception des objets susceptibles de restitution.

La confiscation a posé un certain nombre de problèmes auxquels la jurisprudence, sous l'empire de l'ancien Code pénal, a apporté des solutions qui gardent leur valeur pour l'application des textes actuels.

D'abord, la confiscation ne peut être prononcée que si la culpabilité du corrupteur ou celle du corrompu est retenue, cependant à cause de l'indépendance des infractions de corruption passive et de corruption active, il suffit de la culpabilité d'un seul pour justifier la mesure. Ainsi si le corrupteur échappait aux poursuites ou était acquitté, la confiscation devrait cependant être prononcée et le corrupteur serait sans droit pour réclamer les choses livrées221(*).

Ensuite, la confiscation ne peut porter que sur les choses livrées ou leur valeur ; elle ne peut donc être ordonnée si les choses ont été seulement promises222(*).

Enfin, c'est la chose elle-même que l'on doit confisquer, mais si cette chose ne se retrouve plus en nature on en confisque l'équivalent en valeur223(*).

Deux remarques doivent être faites à ce niveau, la première est relative à toutes les peines complémentaires, par contre la deuxième elle est exclusivement réservée à la confiscation..

Toutes les peines complémentaires précitées sont des peines facultatives laissées par conséquent à l'entière discrétion de la juridiction puisque l'article 432-17 CPF dispose que « Dans tous les prévus par le présent chapitre, peuvent être prononcées, à titre complémentaires les peines suivantes... ».

A notre sens, il est regrettable, du moins pour la confiscation, qu'elles soient facultatives pour le juge. Il serait préférable que le législateur français impose aux juges répressifs d'ordonner la confiscation dans tous les cas de corruption tel qu'il est le cas dans la législation tunisienne.

On remarque, en second lieu, que la peine complémentaire de confiscation est prévue dans tous les cas de corruption à l'exception de la corruption de salarié, or dans toute forme de corruption il est utile d'enlever au corrompu ou au corrupteur le bénéfice de son marché illicite.

Il serait préférable, donc, de généraliser cette peine complémentaire à toutes les infractions de corruption tel qu'il est le cas dans le Code pénal tunisien.

PARA II : Les peines accessoires ; subsistent-elles encore ?

On a déjà vu que les peines accessoires sont abrogées par le nouveau code pénal. Cependant, deux peines accessoires subsistent malgré leur condamnation en 1994(A).Ces peines applicables d'une manière automatique n'existent pas dans la législation tunisienne, mais elles sont remplacées par des peines disciplinaires qui sont prononcées par l'administration à laquelle appartient le fonctionnaire public(B)

A-Les peines accessoires 

La décision du conseil constitutionnel du 15 mars 1999224(*) a estimé contraire au principe de nécessité les peines automatiques, dites aussi peines accessoires. Toutefois, il y a deux peines qui ne sont pas touchées par cette fameuse décision.

La première de ces peines est l'interdiction d'exercer une profession commerciale ou industrielle attachée à une peine criminelle par exemple la corruption criminelle des magistrats prévue dans l'article 434-9 alinéa 3 CPF. Attachée, d'autre part, à une condamnation d'au moins trois mois fermes d'emprisonnement pour de nombreux délits correctionnels ce qui inclut les délits de corruption à l'exception de ceux d'agents publics communautaires ou étrangers. Cette interdiction est d'une durée minimale de cinq ans.

La deuxième peine accessoire résulte de l'article L.7 du code électoral dû à la loi du 20 janvier 1995225(*). Ce texte prive du droit d'être inscrit sur la liste électorale pendant un délai de cinq ans à compter de la date à laquelle la condamnation est devenue définitive. Mais cette peine n'est pas applicable en cas de corruption active ou passive de magistrat. On trouve une peine complémentaire en droit tunisien, applicable en matière de corruption, prévue par l'article 5 CPT qui se rapproche de cette peine accessoire; il s'agit de l'interdiction d'exercer le droit de vote.

On remarque que plusieurs peines complémentaires ou accessoires ne sont pas applicables lorsqu'il s'agit de la corruption de magistrats, ce qui représente, à notre sens, une lacune du droit positif français.

B-Les peines disciplinaires

D'après l'article 51 de la loi relative à la fonction publique de 1983 les peines disciplinaires sont prononcées par le dirigeant de l'administration à laquelle appartient le fonctionnaire public. Il existe deux types de peines ; d'abord les peines disciplinaires de premier degré, il s'agit de l'avertissement et le blâme. Ensuite, les peines disciplinaires de second degré, il s'agit de la rétrogradation, la mutation obligatoire, le renvoi temporaire pour une durée maximale de trois mois avec suspension du versement du salaire et le renvoi définitif.

A noter que depuis une réforme de 1997226(*) le dirigeant de l'administration peut déléguer le pouvoir de prononcer des sanctions disciplinaires à certains substituts.

De plus, l'administration doit s'abstenir de prononcer une peine disciplinaire si au même moment une action publique est engagée devant les juridictions de droit commun et ce jusqu'à ce qu'un jugement définitif soit prononcé par celles-ci. En cas de décision de condamnation prononcée par le juge du droit commun, celle-ci est imposée à l'administration qui doit en tenir compte lors de la prononciation d'une peine disciplinaire. D'un autre coté, en cas de décision d'acquittement prononcée par les juridictions du droit commun, l'administration n'est pas obligée d'en tenir en compte lors de la prononciation d'une peine disciplinaire. Cette solution est le fruit de la jurisprudence du tribunal administratif qui est unanime sur ce point227(*).

PARA III : L'inapplication de la peine : une particularité en Tunisie 

L'article 93 CPT dispose : «Est absous le corrupteur ou l'intermédiaire qui, avant toute poursuite, révèle volontairement le fait de corruption et, en même temps, en rapporte la preuve ». Le législateur a gardé le contenu de cet article sans le modifier même après la réforme du 23 mai 1998 et on remarque qu'il ne concerne que le corrupteur et l'intermédiaire.

Cet article constitue une exception à la politique répressive adoptée par le législateur tunisien, en effet, vu la difficulté de découvrir les faits de corruption et de les réprimer, le législateur a exonéré le corrupteur ou l'intermédiaire des peines s'ils permettent la découverte et la preuve de ces faits.

Le législateur a limité l'inapplication des peines dans le cas de dénonciation d'où il faut étudier ses conditions(A) et ses effets(B).

A-Les conditions de la dénonciation

Par la dénonciation, le législateur veut dire, l'information des autorités compétentes de la commission de l'infraction et de ses auteurs. A noter que la simple narration des faits n'a aucune valeur puisque l'article 93 CPT exige explicitement que le dénonciateur   « en rapporte la preuve ». Ainsi, ce dernier est tenu d'informer les autorités de tous les détails, relatifs à l'infraction, qui permettent de la prouver et de préciser le rôle de chacun des auteurs228(*).

Signalons que la dénonciation se limite à la corruption passive, même si le texte français dispose « le fait de corruption » sans préciser s'il s'agit de la corruption passive ou active, puisque le texte arabe, de son coté, évoque explicitement la corruption passive, et par application des dispositions du code de procédure civile et commerciale c'est le texte arabe qui a la primauté sur le texte français qui n'a qu'une valeur indicative. Ainsi, l'auteur d'une tentative de corruption active, qui n'a pas eu d'effet, n'est pas exempt de peine s'il dénonce les faits parce que le but de cette disposition est la découverte du fonctionnaire public corrompue afin de protéger la fonction publique.

D'un autre coté, il faut que la dénonciation soit faite avant la découverte de l'infraction par les autorités compétentes et l'arrestation des auteurs et l'ouverture d'une information contre eux conformément à la version française de l'article 93 CPTqui dispose « avant toute poursuite ». A noter, que la version arabe exige, de son coté, que la dénonciation soit faite avant tout jugement. On remarque ainsi que La version française est plus conforme à la notion de dénonciation qui, par la logique, doit être faite avant la phase de jugement et la découverte de l'infraction. D'où la nécessité de modifier la version arabe de cet article et de la rendre conforme à la version française.

En droit comparé, certains législations ont prévu la dénonciation comme moyen d'exemption de peines, à titre d'exemple le droit égyptien. Ainsi l'article 108 du Code pénal égyptien dispose : « Est absous le corrupteur ou l'intermédiaire qui, avant tout jugement, révèle volontairement le fait de corruption ou l'avoue ». On remarque que cet article prévoit la dénonciation et l'aveu qui peuvent être faits à tout moment et même après la poursuite. A notre sens, cette disposition permet l'impunité du corrupteur ou de l'intermédiaire puisqu'ils peuvent échapper à la répression, si les faits de corruption sont découverts par les autorités compétentes, en les avouant229(*).

B-Les effets de la dénonciation 

D'après l'article 93 CPT : «Est absous le corrupteur ou l'intermédiaire ». Ainsi l'exemption de la peine ne concerne que le corrupteur et l'intermédiaire, par contre elle ne concerne pas le corrompu. L'inapplication de la peine doit être obligatoirement prononcer d'office par le juge dans sa décision, et le corrupteur ou l'intermédiaire peut l'évoquer à n'importe quelle phase de la procédure.

D'un autre coté le corrupteur ou l'intermédiaire est absous à condition que le fonctionnaire corrompu ait accepté les dons ou promesses qui lui sont offerts. Ainsi, en cas de refus d'acceptation des dons, la dénonciation n'a aucun effet. En plus, seul le dénonciateur, le corrupteur ou l'intermédiaire, bénéficiera de l'inapplication de la peine et elle ne sera pas accordée aux deux. A notre sens, il paraît inadmissible que le corrupteur soit absous, si c'est lui qui dénonce les faits de corruption, et l'intermédiaire, qui a un rôle moins important que le premier, soit puni.

Enfin, on a vu que le corrompu n'est pas absous, et que l'exemption de la peine ne concerne que le corrupteur et l'intermédiaire. C'est pour cette raison que certains juristes tunisiens ont proposé au législateur d'exonérer le corrompu de la peine une fois qu'il a rompu le pacte et a rendu les dons qu'il a acceptés de son plein grée avant d'accomplir ce qui lui a été demandé et surtout avant toute poursuite.

Signalons enfin que le législateur français ne prévoit pas ce procédé en matière de corruption, ce qui est à notre sens regrettable. Nous pensons qu'il aurait pu, et même dû, le faire suite à la loi du 9 mars 2004 qui a institué un grand nombre d'exemptions et de réduction de peine concernant certaines infractions en cas de dénonciation. Le texte de principe est l'article 132-78 CPT qui prévoit une indulgence à deux niveaux. D'une part, en cas de tentative d'un crime ou d'un délit, le participant est exempt de peine si en ayant averti l'autorité administrative ou judiciaire, il a permis d'éviter la réalisation de l'infraction et, le cas échéant, d'identifier les auteurs et complices. D'une autre part, le cas d'infraction consommée, la durée de la peine privative de liberté encourue par le participant est réduite à moitié si, ayant averti les autorités compétentes, il a permis de faire cesser l'infraction, d'éviter que l'infraction ne produise un dommage ou d'identifier les autres auteurs ou complices.

Cette technique concerne plusieurs infractions.230(*) Toutefois, le délit de corruption n'en fait pas partie ce qui est fort regrettable puisqu'une telle technique permettrait d'atteindre des faits de corruption dissimulés ou clandestins.

CONCLUSION

En conclusion ; on remarque que les deux législations font de la corruption un complexe de deux infractions distinctes : la corruption passive et active, la première imputable à la personne corrompue, la seconde au corrupteur. Toutefois, si ces deux infractions sont punies des mêmes peines en droit pénal français, il en est autrement en droit pénal tunisien qui puni plus sévèrement la corruption passive puisqu'elle est considérée plus grave que la corruption active. De plus, il y a eu une correctionnalisation de l'infraction de corruption en France depuis la loi de 1943, alors qu'en Tunisie, suite à la réforme de 1998, la majorité des infractions de corruption sont désormais qualifiées de crimes.

D'un autre coté, si la corruption passive se consomme, dans les deux législations, par la simple sollicitation ou l'agrément des dons, les solutions ne sont pas identiques en ce qui concerne la corruption active. En effet, cette dernière est réputée consommée en France par la simple proposition d'offres ou par le fait de céder aux sollicitations du corrompu, alors qu'en Tunisie pour que l'infraction soit consommée il faut l'exécution du marché illicite entre le corrupteur et le corrompu à défaut on ne peut parler que de tentative de corruption active.

On peut remarquer aussi que le législateur français devance son homologue tunisien par le fait d'incriminer la corruption des salariés et des fonctionnaires étrangers, par la création de juridictions spécialisées compétentes en matière économique et financière et par l'utilisation de procédés destinés à prévenir les dévoiements possibles et la conclusion d'opérations suspectes tels que le service central de prévention de la corruption, chargé de centraliser les renseignements nécessaires à la détection et à la prévention des faits de corruption.

La jurisprudence française devance, elle aussi, celle des tribunaux répressifs tunisiens, il suffit de rappeler sa position en ce qui concerne le point de départ du délai de prescription, en matière de corruption, qui a été retardé au jour de l'exécution du pacte illicite.

Il serait donc préférable que le législateur tunisien intervienne pour mettre à pied d'égalité la corruption passive et la corruption active et d'élargir ces incriminations afin d'englober de nouvelles catégories de personnes tels que les salariés. Quant au droit pénal de forme une juridiction spécialisée en matière économique et financière serait la bienvenue.

En France, il est regrettable que le législateur du 9 mars 2004 n'ait pas inséré le délit de corruption dans la liste des infractions de criminalité organisée, prévue par l'article 706-73 CPPF. Ces infractions obéissent à des règles procédurales fortement dérogatoires au droit commun permettant une meilleure répression. Il serait donc préférable qu'elle soit ajoutée à cette liste lors de la prochaine réforme.

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* 179 Alain Blanchot J-Cl Procédure Pénale art 704 à 706 CPPF ; les juridictions spécialisées en matière économique et financière.

* 180 J. Pradel procédure pénal Cujas 2002/2003 n°124.

* 181 Vitu A ; J-Cl Pén 435-1CPF et suivant n°37.

* 182 les infractions que répriment les articles 435-1 à 435-4 CPF sont fréquemment marquées par un ou plusieurs éléments d'extranéité. Or, les règles ordinaires du droit pénal international, où prédominent les principes de territorialité et de personnalité, seraient souvent insuffisantes pour les atteindre et les réprimer. Il fallait donc parer à la difficulté en faisant appel au principe de compétence universelle. Voir Vitu A ; J-Cl Pén 435-1CPF et s.

* 183J Pradel ibid.

* 184 article 21 de la loi 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité( JO 10 mars 2004 p4567).

* 185 Voir article 706 CPPF tel que modifié par la loi du 9 mars 2004.

* 186 Voir pour plus de précision. J Pradel manuel de procédure pénale éd 2002/2003 n°121

* 187 F. Le Gunehec. JCP éd gén , n° 14 du 31 mars 2004 p598.Voir notamment l'article 125 de la loi du 9 mars 2004.

* 188 Il s'agit des personnes visées par les articles 435-3 et 435-4 CPF.

* 189 Vitu A ; J-Cl Pén 435-1CPF et suivant n°39.

* 190 Conseil Constit, 22 jan 1999 Dalloz 1999 p 285.

* 191 Cass ass plé 10 oct 2001 dalloz 2002 p 237.

* 192 Règle générale relative à toutes les juridictions d'exception.

* 193 Cass crim 26 juin 1995, bull crim n° 235 , J.C.P 1995-IV-2380.

* 194 L'affaire Noir 6 fév 1997, bull n° 48 dalloz 1997 p 334 note J F Renucci. /Affaire Elf 16 fév 2000 dalloz 2001 p 660 note V Buck.

* 195 Loi constitutionnelle n° 95-680 du 4 août 1995.

* 196 La loi n°10-1970 du 1 avril 1970relative à la Haute Cour.

* 197 Cet article a été modifié par la loi constitutionnelle n°51-2002, du 1er juin 2002.

* 198 Voir article 59 et suivant du Code de la justice militaire.

* 199 Voir article 700 CPPF et article 68 C.J.M.

* 200 Voir article 701 CPP et article 68 CJM.

* 201 JORT du 11 janvier 1957 p 50 et s.

* 202 Cette loi a été modifiée à plusieurs reprises notamment par la loi du 30 juin 2000 et la loi du 9 mars 2004.

* 203 Les assistants spécialisés sont crées par la loi n°98-546 du 2 juillet 1998.suite à la réforme du 9 mars 2004 de nouvelles attributions leurs sont confiées Voir article 21 de la loi.

* 204 J-F Renucci ; infractions d'affaires et prescription de l'action publique. Dalloz 1997 Chron p 23.

* 205 Bernard Challe; J-Cl Art. 7 à 9/Fasc. unique: ACTION PUBLIQUE - Prescription n°29.

* 206 un arrêt du 7 décembre 1967,Bull. crim., n° 321 ; D. 1968, jurispr. p. 617.

* 207 un arrêt du 10 août 1981 (Bull. crim., n° 244 ; Rev. soc. 1983, p. 368, note Bouloc).

* 208 arrêt du 5 mai 1997, Bull. crim., n° 159 ; Rev. soc. 1997, p. 127, note Bouloc. - J. Larguier et P. Conte, Droit pénal des affaires : 10e éd., A. Colin, 2001, n° 379 s.

* 209 Pour plus de précision concernant ces infraction, voir Bernard Challe; J-Cl Art. 7 à 9/Fasc. unique: ACTION PUBLIQUE - Prescription n°30et s.

* 210 Vitu, J-Cl Pén art 432-11 du code pénal n°151.

* 211 Cass. crim., 6 févr. 1969 : Bull. crim., n° 67 ; Rev. sc. crim. 1969, p. 871, obs. A. Vitu. - 9 nov. 1995 : Bull. crim., n° 346. - 27 oct. 1997 : Bull. crim., n° 352 ; Dr. pén 1998, comm. 16, note M. Véron ; Petites affiches 1997, n° 134, p. 23, note Ducouloux-Favard. Cité par B Challes.

* 212 Vitu,J.-Cl. Pénal Code, Art. 432-11, Fasc. 10, n°, 154 et Art. 433-1 et 433-2, n° 48 et 49).

* 213 Vitu A, J-Cl Pén art 434-9 CPF n°18

* 214 Les peines portées étaient moins fortes quand la corruption tendait à l'accomplissement d'un acte facilité par la fonction. Vitu,J.-Cl. Pénal Code, Art. 432-11 n°118.

* 215 Dans l'ancien système, pour la corruption de fonctionnaire, l'amende pouvait être double de la valeur des promesses agréées ou des choses reçues ou demandées. Voir art 177 al 1er ACP.

* 216 W. Jeandidier, Du délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I, 166.

* 217 Pradel J, manuel de droit pénal général éd 2002/2003. n°571 et suivant.

* 218 W. Jeandidier, Du délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I, 166

* 219 Ahmed Fathi Srour ; manuel droit des peines, op cit p 146.

* 220 L'article 29 CPT dispose : «  si les objets dont il ordonne la confiscation n'ont pas été saisis et ne sont pas remis, le jugement en détermine la valeur pour l'application de la contrainte par corps »

* 221 Cass. crim., 10 août 1854 : Bull. crim., n° 254 ; DP 1854, 5, p. 200. cite par Vitu J-Cl Pén art432-11n°144.

* 222 Cette idée est soutenue par R. GARRAUD, Traité théorique et pratique du droit pénal français t. IV : Sirey, 3e éd., n° 1518 s.

* 223 pour plus de précisions. Voir A Vitu op cit n°146.

* 224 Cons const Décision du 15 mars 1999 ; JO 21 nov 1999, Dalloz 2000 somm p 116, obs Roujou de Boubée.

* 225 Cité par W. Jeandidier, Du délit de corruption et des défauts qui l'affectent JCP G 2002, I, 166.

* 226 Loi n° 83-1997 du 20 décembre 1997. JORT du 22 décembre 1997 p 15.

* 227 Arrêt du tribunal administratif n°621 du 27 oct 1981 ; bull du trib adm de 1981 p 283.

Arrêt du tribunal administratif n°202 du 27 décembre1978 ; bull adm de 1978 p 237.

* 228 Mohamed Elhessine Echebbi « l'exemption de peine en matière pénale » mémoire de fin d'étude DEA sciences criminelles, Faculté de droit et de sciences politiques de Tunis 1997/1998 p 93.

* 229 Cette idée n'est pas partagée par Jondi Abdel malek qui pense que le plus important, à ce niveau, est la répression du fonctionnaire corrompue et non celle du corrupteur ou de l'intermédiaire.

* 230 Pradel J, vers un « aggiornamento » des réponses de la procédure pénale à la criminalité, Apports de la loi N°2004-204 du 9 mars 2004 dite loi perben II. JCP, éd géné N°20 du 12 mai 2004 p 881et sui vant.

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"Il existe une chose plus puissante que toutes les armées du monde, c'est une idée dont l'heure est venue"   Victor Hugo