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PARTIE II
_____DISPOSITIF EXPERIMENTAL
I. OBJECTIFS DE L'ETUDE ET HYPOTHESE GENERALE. Au cours de cette recherche exploratoire, nous espérons mettre en évidence des effets significatifs de l'écoute de sons binauraux d'une différence de fréquence de 8 à 10 Hz induisant des ondes alpha. Nous nous attendons d'une part à des effets immédiats sur les fonctions cognitives, qui seront évaluées par différents tests neuropsychologiques couramment utilisés lors de bilans ainsi que par des tâches informatisées, plus écologiques, de remédiation cognitive ; nous nous attendons d'autre part à trouver des effets à plus long terme, dus à un entraînement de 15 à 20 minutes quatre à cinq fois par semaine, sur des aspects cliniques tels que l'humeur, l'anxiété et le traitement des émotions. Ces aspects seront mesurés par des échelles couramment utilisées en psychologie clinique. Notre objectif à moyen terme, selon les résultats de cette étude, sera l'application de cette technique à des populations cliniques, tant dans le domaine neuropsychologique (réhabilitation) que dans le domaine psychiatrique (troubles anxio-dépressifs, PTSD etc.) ou de médecine comportementale (addictions par exemple). II. SONS UTILISES ET RECUEIL DES DONNEES. 1. Aspects techniques des sons utilisés. Deux types de sons ont été créés, chacun dans deux versions différentes (l'une de 30 minutes, l'autre de 60 minutes), à l'aide du logiciel de génération de sons « Brain Waves Generator », édité par la société RegSoft ( http://www.bwgen.com/): - une version de sons neutres, c'est-à-dire sans différence de fréquence; - une version de son binauraux, dont la différence de fréquence de 10 Hz en début d'écoute à 8 Hz en fin d'écoute correspond aux fréquences les plus basses des ondes alpha. Les deux encadrés suivants montrent les caractéristiques techniques de ces différents sons à partir de copies d'écran du logiciel Brain Waves Generator.
SON 0BWa 30 Son neutre. Durée : 30 minutes. Volume : 100% (0 à 28 minutes) puis de 100 à 0% (28 à 30 minutes). Signal : type sinusoïdale. Fond sonore : non. Bruit : non. Fréquence voie 1 : 120Hz. Fréquence voie 2 : 70Hz. Fichier mp3 : 160 Kbps ; 44 KHz ; stéréo. SON 0BWa 60 Son neutre. Durée : 60 minutes. Volume : 100% (0 à 55 minutes) puis de 100 à 0% (55 à 60 minutes). Signal : type sinusoïdale. Fond sonore : non. Bruit : non. Fréquence voie 1 : 120Hz. Fréquence voie 2 : 70Hz. Fichier mp3 : 256 Kbps ; 44 KHz ; stéréo.
SON 1BWa 30 Son binaural. Durée : 30 minutes. Volume : 100% (0 à 28 minutes) puis de 100 à 0% (28 à 30 minutes). Signal : type sinusoïdale. Fond sonore : non. Bruit : non. Fréquence voie 1 : 120Hz. Fréquence voie 2 : 70Hz. Différence binaurale (sur les 2 voies) : 10 à 8 Hz (0 à 5 minutes) puis 8 Hz (5 à 30 minutes). Fichier mp3 : 160 Kbps ; 44 KHz ; stéréo. SON 1BWa 60 Son binaural. Durée : 60 minutes. Volume : 100% (0 à 55 minutes) puis de 100 à 0% (55 à 60 minutes). Signal : type sinusoïdale. Fond sonore : non. Bruit : non. Fréquence voie 1 : 120Hz. Fréquence voie 2 : 70Hz. Différence binaurale (sur les 2 voies) : 10 à 8 Hz (0 à 10 minutes) puis 8 Hz (10 à 60 minutes). Fichier mp3 : 224 & 256 Kbps ; 44 KHz ; stéréo. Pour cette étude exploratoire nous avons demandé à des sujets volontaires sains, hommes et femmes, de 25 à 45 ans, de se soumettre à une batterie de tests neuropsychologiques et de tâches informatisées tout en écoutant des sons binauraux induisant une fréquence alpha à l'aide d'un casque stéréo. Une partie des sujets s'est de plus entraînée en écoutant ces mêmes sons durant 10 semaines (durée moyenne d'un protocole TCC, afin de pouvoir éventuellement comparer les psychothérapies), à raison de 15 minutes quatre à cinq fois par semaine selon leurs disponibilités. Les sujets ont été appariés par sexe, âge et niveau culturel. Le protocole complet se présentait ainsi (voir document d'information et formulaire de consentement éclairé en annexe) : - Première séance (1 h 30) : entretien individuel; explications sur la recherche, signature du consentement éclairé et passation des échelles cliniques (HAD, STAI, échelle de relaxation de Crist, BVAQ et TMMS); écoute au casque de 15 minutes de sons binauraux immédiatement suivie d'une seconde cotation de l'échelle de relaxation de Crist. Six hommes et six femmes ont participé à cette première séance dont la moitié s'est ensuite entraînée pendant 10 semaines. - Deuxième séance (deux heures) : passation une première fois de tests neuropsychologiques (TMT, Stroop, D2, subtests de la MEM III : rappel d'histoire immédiat et différé, rappel de visages immédiat et différé, empans visuels et spatiaux à l'endroit et inversés) ; après une courte pause durant laquelle le casque était installé, passation une deuxième fois de ces mêmes tests avec des sons. Huit personnes, quatre hommes et quatre femmes, ont écouté les sons binauraux de fréquence alpha pendant la deuxième passation tandis que les huit autres personnes, quatre hommes et quatre femmes, ont écouté un son neutre durant la seconde passation, ceci afin de contrôler l'effet d'apprentissage des tests. - Troisième séance (1 h 30) : 10 sujets, cinq hommes et cinq femmes, ont effectué des tâches informatisées tirées d'un logiciel de remédiation neuropsychologique (HappyNeuron, société SBT) évaluant et stimulant l'attention, la vigilance, la mémoire de travail et la mémoire épisodique. La série de tâches a été effectuée deux fois consécutives, avec l'écoute de sons en même temps. Afin de contrôler l'effet d'apprentissage des tâches, cinq sujets ont effectué la première série en écoutant les sons binauraux et la deuxième série en écoutant les sons neutres tandis que les cinq autres ont écouté les sons neutres d'abord, les sons binauraux ensuite. - Quatrième séance (une heure) : neuf sujets, cinq hommes et quatre femmes, ont participé à la mise en place d'un dispositif de psychothérapie en face à face utilisant les sons binauraux ; durant cette séance, il leur a été demandé de raconter un événement de vie chargée émotionnellement tout en écoutant les sons au casque. Puis, nous inspirant du protocole EMDR, nous leur avons demandé tout ce qui leur venait à l'esprit au sujet de cet événement et les émotions qu'ils ressentaient au même moment. - Dernière séance (une heure) : 10 semaines plus tard les 12 sujets de la première séance, six hommes et six femmes, ont rempli de nouveau les questionnaires cliniques (HAD, STAI, échelle de relaxation de Crist, BVAQ et TMMS) ; six d'entre eux s'étaient entraînés à l'écoute de son binauraux de fréquence alpha durant ces 10 semaines. Au cours de cette séance, nous faisions le point sur leur ressenti quant à cette recherche et à cette méthode et répondions à leurs questions restées en suspens. Récapitulatif du protocole. Séance 1 : Consentement éclairé. Passation des échelles cliniques (HAD, STAI, échelle de relaxation de Crist, BVAQ et TMMS) Ecoute de sons binauraux 15 mn suivie d'une deuxième passation de l'échelle de Crist. Séance 2 : Passation des tests neuropsychologiques (TMT, Stroop, D2, subtests de la MEM III) Deuxième passation des tests neuropsychologiques avec écoute de sons, neutres ou binauraux. CD de sons binauraux de fréquence alpha donnés à 6 sujets pour un entrainement de dix semaines, 15 mn quatre à cinq fois par semaine. Séance 3 : Série de tâches de remédiation cognitive informatisée tirées des logiciels « HappyNeuron » avec écoute soit de sons binauraux soit de sons neutres. Deuxième essai de la même série de tâches informatisées avec les sons neutres ou binauraux qui n'ont pas été écoutés lors du premier essai. Séance 4 : Protocole type EMDR : évocation d'un évènement de vie émotionnellement chargé et passation de la BIMS. Séance 5 : (Dix semaines plus tard). Entretien de clôture et deuxième passation des échelles cliniques pour tous les sujets, du groupe entraînement et du groupe contrôle. Ce travail étant avant tout exploratoire, nous ne pouvons pas émettre d'hypothèses opérationnelles telles qu'attendues dans une recherche scientifique. Nous nous attendons simplement à obtenir quelques effets significatifs, d'après les travaux recueillis dans la littérature d'une part, et d'après la pré-étude que nous avons réalisée l'an dernier sur deux sujets. Nous souhaitons par ailleurs explorer d'autres aspects des effets possibles de ces sons sur lesquels soit rien n'a été publié (l'effet sur le traitement des émotions), soit les publications sont contradictoires (l'action sur l'attention par exemple). 1. ASPECTS NEUROPSYCHOLOGIQUES a. Effets des sons binauraux de fréquence alpha sur l'attention Tests neuropsychologiques Les sujets ont passé deux fois chaque test. Sur les graphiques, les performances de la première passation sont en bleu, celles de la deuxième en rouge. Les sujets 1 à 8 ont effectué la deuxième passation en écoutant des sons binauraux tandis que les sujets 9 à 16 écoutaient des sons neutres.
Résultats au Trail Making Test : les sujets écoutant des sons binauraux sont significativement plus rapides à traiter l'information que les sujets écoutant les sons neutres (forme A) ; en ce qui concerne la flexibilité cognitive (« Shifting », forme B), les sons binauraux semblent améliorer les performances, sans que leurs résultats ne soient significatifs.
Résultats au Test de Stroop : les 2 groupes améliorent significativement leurs performances (score 4) tandis que les différences aux scores d'interférence ne sont pas significatives.
Résultats au test D2 : Les résultats des deux groupes sont significativement meilleurs d'une passation à l'autre, montrant l'effet d'apprentissage important de ce test. Cependant, les résultats des sujets écoutant des sons binauraux sont beaucoup plus significatifs que ceux de l'autre groupe. Tâches informatisées Chaque sujet a réalisé toutes les tâches informatisées deux fois, une fois en écoutant des sons neutres (en bleu sur les graphiques) et une fois en écoutant des sons binauraux (en rouge sur les graphiques). Les graphiques comparent donc les performances de chaque sujet aux mêmes tâches selon qu'il écoute ou non les sons binauraux.
Aux tâches informatisées d'alerte tonique et de résistance à l'interférence, les différences de performances sont significatives selon que le sujet exécute la tâche en écoutant un son neutre ou des sons binauraux.
Aux tâches informatisées utilisant l'attention sélective, les résultats ne sons pas significatifs. b. Effets des sons binauraux de fréquence alpha sur la mémoire immédiate. Tests neuropsychologiques.
Les sujets écoutant des sons neutres ont mieux réussi aux épreuves mesurant les empans, les résultats aux empans visuels étant significatifs.
La comparaison entre les deux groupes montre une meilleure performance des sujets écoutant des sons binauraux, mais non significative, dans l'épreuve du rappel immédiat d'histoire. Par contre, en ce qui concerne la mémoire immédiate visuelle, l'écoute de sons binauraux a significativement amélioré les performances à l'épreuve de rappel des visages. Tâche informatisée.
En ce qui concerne l'épreuve informatisée stimulant la mémoire immédiate, le résultat n'est pas significatif. c. Effets des sons binauraux de fréquence alpha sur la mémoire de travail Tests neuropsychologiques.
Les résultats pour l'épreuve d'empans chiffrés inverse sont significatifs, et meilleurs sans atteindre le seuil de significativité pour l'épreuve d'empans visuels inverses. Tâche informatisée.
Pour les épreuves informatisées, nous obtenons un résultat significatif à la tâche « Garçon s'il vous plait ! », et meilleure sans atteindre le seuil de significativité pour la tâche « dernier mot ». d. Effets des sons binauraux de fréquence alpha sur la mémorisation Tests neuropsychologiques.
Le résultat est très significatif pour l'une des deux épreuves de rappel différé, le rappel d'histoire ; il n'est pas significatif pour le rappel différé de visages. Tâches informatisées
Les résultats pour ces deux tâches ne sont pas significatifs. a. Effets des sons binauraux de fréquence alpha sur l'état subjectif de relaxation Effet immédiat
Les résultats ne sont pas significatifs.
Les résultats ne sont pas significatifs. b. Effets de l'entraînement à dix semaines
Les résultats ne sont pas significatifs.
Les résultats sont significatifs pour la sous échelle « évaluation comportementale » mais pas pour celle « tension cognitive ». Effets de l'entrainement de dix semaines sur l'humeur
L'humeur de tous les sujets s'est significativement améliorée au cours des dix semaines, la différence entre les deux groupes est cependant significative. Effets de l'entrainement de dix semaines sur l'anxiété
Les résultats sont significatifs, les scores des sujets entraînés sont significativement moins élevés à l'échelle HAD-Anxiété.
Les résultats sont significatifs tant pour l'anxiété Etat que pour l'anxiété Trait. Effets de l'entrainement de dix semaines sur les émotions
Les résultats sont significatifs pour le score global à la TMMS, il y a eu traitement des émotions par les sujets s'étant entraînés.
Les résultats sont significatifs pour le score global de la BVAQ.
Les résultats sont significatifs pour les sous échelles de la BVAQ « verbalisation des émotions » et « vie fantasmatique ».
Les résultats sont significatifs pour la sous échelle «clarté des émotions » et proches du seuil de significativité pour « l'identification des émotions » de la TMMS.
Les résultats sont significatifs pour la sous-échelle « attention prêtée aux émotions de la TMMS et ne le sont pas pour la sous-échelle « analyse des émotions » de la BVAQ.
Les résultats bien que marqués ne sont pas significatifs pour la sous-échelle « excitabilité émotionnelle » de la BVAQ ni pour la sous-échelle « régulation » de la TMMS. Nous ne présenterons en synthèse et ne discuterons dans ce travail que la partie « aspects neuropsychologiques » de cette étude, réservant la discussion sur les aspects cliniques, dont le protocole et les résultats ont été présentés dans les chapitres précédents, pour un travail de thèse. Outre le problème de doubler le volume de ce mémoire, il nous paraît en effet plus intéressant de réserver la discussion des effets des sons binauraux induisant des ondes alpha sur l'humeur, l'anxiété et le traitement des émotions pour le moment où l'on pourra comparer ces effets chez des sujets sains, qui nous serviront de groupe contrôle, et chez des sujets appartenant à une, ou plusieurs population (s) clinique (s). TABLEAU DE SYNTHESE DES RESULTATS
Concernant les tests neuropsychologiques, nous avons comparé tout d'abord chaque sujet à lui-même (performance au deuxième test - performance au premier test), afin de rechercher une amélioration significative des performances entre les deux tests. Puis nous avons comparé l'amélioration de la performance des sujets 1 à 8 ayant écouté des sons binauraux lors de la seconde passation (groupe 2), à l'amélioration de la performance des sujets 9 à 16 qui ont écouté un son neutre lors de la seconde passation (groupe 1). Concernant les tâches informatisées, nous avons comparé chaque sujet à lui-même; le groupe 2 correspond à la réalisation des tâches sous écoute des sons binauraux tandis que le groupe 1 correspond à la réalisation des tâches sous écoute de son neutre. 1. Interprétation des résultats Les comparaisons de moyennes (T.de Student) montrent plusieurs résultats significatifs. Ainsi, nous trouvons chez les sujets du groupe 2 (écoute de sons binauraux) : - Une augmentation significative de la vitesse de traitement de l'information. Les résultats au Trail Making Test -Forme A- montrent une amélioration significative des performances du groupe 2 (p = 0,03), amélioration qui ne peut être expliquée par l'effet d'apprentissage du test puisque le groupe 1 obtient une amélioration non significative de ses performances (p = 0,38) ; en outre, quand on compare les moyennes de l'amélioration des performances des deux groupes, nous pouvons remarquer que le groupe 1 a baissé sa performance (- 0,96) tandis que le groupe 2 l'a augmentée (+ 4,67) ; cette différence entre les deux groupes est significative à 93 % (p = 0,07). À la tâche informatisée « haute tension » qui requiert une bonne alerte tonique et un traitement rapide de l'information, le temps de réaction moyen du groupe 1 est de 721 ms tandis que celui du groupe 2 est de 615 ms ; la différence est significative p =0,03). À la tâche informatisée « ne vous laissez pas tenter », qui correspond à une version informatisée du test de Stroop, les sujets du groupe 1 mettent en moyenne 0,5 secondes à réagir par item en situation d'interférence, tandis que les sujets du groupe 2 mettent la moitié de ce temps, soit 0,24 secondes cette différence est significative à 97 % (p = 0,03). - Des effets perturbateurs possibles sur la flexibilité cognitive mais une augmentation de la résistance à l'interférence. En effet, les résultats au TMT-forme B montrent une augmentation des performances moyennes de 3,71 pour le groupe 1 est de 16,06 pour le groupe 2. La différence entre les deux groupes n'est pas significative (p = 0,23), mais l'amélioration des performances entre les deux épreuves, si elle est plus significative pour le groupe 2 (p = 0,12) que pour le groupe 1 (p = 0,37), n'atteint pas pour autant le seuil de significativité, alors que nous avons vu que les sujets 2 traitaient l'information et réalisaient la tâche beaucoup plus rapidement que les sujets 1. On aurait pu donc s'attendre à une performance aussi bonne pour la forme B. du TMT, à moins que les sons binauraux ne perturbent cette performance. Nous avons vu que pour une tâche informatisée de type Stroop, les sujets du groupe 2 traitaient l'information significativement plus rapidement que les sujets du groupe 1, et ce malgré l'interférence. Ce résultat est confirmé par les performances des sujets au score 4 du test de Stroop (épreuve d'interférence). Cependant, pour cette épreuve les deux groupes améliorent significativement leurs performances, le groupe 1 les améliore en moyenne de 8,6 couleurs dénommées (p = 0,004) tandis que le groupe 2 les améliore en moyenne de 5,25 couleurs dénommées (p = 0,007) ; On donc peut supposer un effet d'apprentissage important pour ce test. La différence entre les deux groupes n'est pas significative (p = 0,14) mais malgré tout importante. On peut se poser la question de l'effet perturbateur des sons binauraux de fréquences alpha sur cette tâche. En ce qui concerne, toujours dans le test de Stroop, le score d'interférence qui rappelons-le est la différence entre le nombre de rectangles de couleurs dénommées sur la carte C et le nombre de couleurs de mots dénommés sur la carte B (score 4), si l'interférence est amoindrie par les sons binauraux de fréquences alpha, alors nous attendons à ce que le score d'interférence soit moins important lors de la deuxième passation que lors de la première, et par conséquent à ce que la différence Temps 2 - Temps 1 soit négative. Il faudra là aussi tenir compte de l'effet d'apprentissage. En ce qui concerne la différence moyenne de ces scores d'interférence, elle est de - 0,66 pour le groupe 1 qui s'est donc amélioré mais pas de manière significative (p= 0,37) et de - 0,71 pour le groupe 2, ce qui montre que le groupe 2 semble résister l'interférence un peu mieux que ne l'expliquerait l'effet d'apprentissage, mais sans toutefois atteindre le seuil de significativité (p = 0,16) ; la différence entre les deux groupes n'est pas significative bien qu'importante (p = 0,19). - Des résultats à recontrôler concernant l'attention soutenue. L'évolution dans les deux groupes est significative tant au niveau du score de performance globale (groupe 1, p=0,0004 ; groupe 2, p = 0,0001), que du score de concentration (groupe 1, p = 0,002 ; groupe 2, p = 0,0006). Ces résultats montrent l'effet d'apprentissage très important de ce test ; il sera préférable d'en utiliser un autre par la suite. - Une action significative sur la mémoire immédiate, mais différente selon les tâches Dans les épreuves d'empan, les sujets du groupe 1 ont légèrement amélioré leurs performances à l'empan auditif, chiffré (p = 0,15 ; p = 0,43 pour le groupe 2) tandis que les sujets du groupe 2 ont beaucoup mieux amélioré leurs performances à l'empan visuel (p =0,04 ; p = 0, 67 pour le groupe 1). En ce qui concerne le rappel immédiat d'une histoire entendue, l'évolution des performances est meilleure chez les sujets du groupe 2 (p = 0, 13 ; p = 0,36 pour le groupe 1) avec une différence entre les deux groupes significative à 82 % (p = 0,18). Comme pour les empans, la mémoire visuelle semble davantage bénéficier de l'écoute des sons binauraux de fréquences alpha : les sujets du groupe 1 rappellent en moyenne 4,37 visages supplémentaires, ce qui est significatif (p = 0,03) tandis que les sujets du groupe 2 en rappellent près du double, soit 8,12 (p= 0,002). La différence entre eux les deux groupes est significative à 90 % (p= 0,1). Une amélioration significative des performances de la mémoire de travail.
Les subtests principaux de l'échelle d'évaluation de la mémoire de Wechsler (MEM III) permettant une évaluation de la mémoire de travail sont les empans inversés. Concernant les empans visuels inversés, les sujets du groupe 1 ont en moyenne amélioré leurs performances de 0,25, ce qui n'est pas significatif (p = 0, 32) tandis que les sujets du groupe 2 ont amélioré leurs performances en moyenne de 1, ce qui est significatif à 85 % (p= 0,15). La différence entre les deux groupes n'est cependant pas significative (p= 0,24). Concernant les empans auditifs inversés (chiffres) les résultats sont encore plus marqués et cette fois-ci significatifs. Les sujets du groupe 1 montrent une chute de performance (-0, 625) tandis que les sujets du groupe 2 voient leurs performances augmentées de 1,87 points en moyenne (p = 0,01). La différence entre les deux groupes est significative à 97 % (p = 0, 03). L'amélioration des performances de la mémoire de travail durant l'écoute de sons binauraux de fréquences alpha est confirmée par les résultats des sujets aux tâches informatisées. Ainsi, lors de l'exercice « dernier mot » (rappelons ici qu'il s'agit à la fois de se rappeler de plusieurs phrases ainsi que spécifiquement du dernier mot de chaque phrase ; le programme pose une question de compréhension sur chaque phrase et ensuite le sujet doit taper le dernier mot de chaque phrase, dans l'ordre d'apparition des phrases), les sujets réussissaient mieux cette tâche lorsqu'ils écoutaient des sons binauraux que des sons neutre (p = 0,16). Les résultats à l'exercice « garçon s'il vous plaît ! » (Il s'agit de replacer les plats commandés par quatre convives) sont encore plus significatifs : les sujets font moins d'erreurs d'attribution des plats et ce en un temps plus court (p = 0, 03). Une amélioration significative de la mémoire verbale épisodique. A l'épreuve du rappel d'histoire différé de la MEM III, le groupe 1 perd en moyenne 1,25 points (p = 0,12) tandis que le groupe 2 en gagne 4,87 (p = 0,0004). Rappelons ici le protocole de ce test : une histoire courte est lue au sujet qui la répète immédiatement après (score de mémoire immédiate et vérification de l'encodage). L'encodage est alors renforcé par une répétition de l'histoire en prévenant le sujet que cette histoire lue sera redemandée une demi-heure plus tard. Bien entendu, deux histoires différentes ont été présentées aux sujets d'une passation de la série de tests à l'autre (histoire A et histoire B de la MEM III). La différence d'évolution des performances entre les groupes 1 (sons neutres) et 2 (sons binauraux) est très significative (p = 0,001). Par contre, il n'y a aucune différence entre les deux groupes en ce qui concerne la mémoire visuelle épisodique évaluée par l'épreuve « reconnaissance des visages » de la MEM III. La moyenne des deux groupes est exactement la même, ils perdent en moyenne O, 25 points. Au niveau clinique, nous avons observé une action importante des sons binauraux de fréquences alpha sur l'humeur, l'anxiété et le traitement des émotions, tant par les résultats significatifs obtenus au score des échelles HAD, STAI, BVAQ et TMMS que par les conclusions des entretiens bilan que nous avons eues avec les sujets qui se sont entraînés. Nous expliciterons ces résultats et les discuterons dans le cadre d'une thèse. Ces divers résultats vont en grande partie dans le sens des études citées dans la première partie, tout en les complétant en ce qui concerne le traitement des émotions. Par ailleurs, l'effet des sons binauraux n'ont jamais à notre connaissance été testé au moyen des tests neuropsychologiques standardisés habituellement utilisés pour les bilans. Nous retrouvons bien des effets sur l'apprentissage et sur la mémorisation comme cela a déjà été démontré, ainsi qu'au niveau clinique sur l'humeur et l'anxiété. Par contre, nous trouvons par nos résultats que les sons binauraux dont la différence de fréquences appartient à la gamme des ondes alpha pourraient avoir une action sur certaines composantes de l'attention. Les études citées utilisaient l'entraînement avec des ondes plus rapides, bêta. Leurs auteurs postulaient que par exemple les personnes souffrant de déficit du trouble de l'attention avaient du mal à inhiber leurs ondes thêta et alpha et à produire des ondes bêta, d'où le trouble. D'après nos résultats préliminaires avec l'utilisation de sons induisant des ondes alpha, les fréquences de 8 à 10 Hz sembleraient avoir une action positive sur l'alerte tonique, la vitesse de traitement de l'information, la résistance à l'interférence et les performances de la mémoire de travail. Il semble donc intéressant de poursuivre nos investigations dans cette voie est de vérifier nos résultats auprès d'une population clinique. En ce qui concerne l'action des sons binauraux sur le traitement de l'émotion, nous n'avons trouvé à ce jour aucune étude publiée. De même que pour l'attention et la mémoire de travail, les résultats préliminaires auxquels nous avons abouti nous laissent entrevoir que de nombreuses interactions entre sons binauraux induisant des ondes alpha et traitements émotionnels. NOTES SUBJECTIVES DES SUJETS DURANT L'ENTRAÏNEMENT Durant l'entraînement des six sujets de notre recherche, nous avons été régulièrement en contact avec eux et avons noté leurs impressions semaine après semaine. Parmi les remarques recueillies, il est intéressant de constater que :
2. Dispositif d'entretien en face à face Comme nous l'avons décrit dans notre protocole, nous avons tenté d'inclure l'écoute de sons binauraux dont la différence de fréquences était de 8 à 10 Hz dans un dispositif d'entretien du type EMDR ». Les sujets ayant accepté de participer à cette partie de l'expérience ont reçu pour consigne de raconter, avec le casque sur les oreilles, un événement de vie émotionnellement chargé. Après l'évocation de cet événement, les sujets devaient associer à cet événement tout ce qui leur venait à l'esprit et tout ce qu'ils ressentaient. Selon notre engagement vis-à-vis des sujets (voir document d'information en annexe), nous ne pourrons évoquer ici ce qui a été dit. Ce qui ressort de cette expérience est que les sujets ont trouvé très facile de parler de l'événement qu'ils ont choisi, certains ayant pu comparer avec des thérapies qu'ils avaient suivies dans le passé. Nous avons noté une fluidité des associations d'idées et les sujets semblaient accéder plus facilement à une nouvelle vision de l'événement, à une nouvelle compréhension. Considérant qu'il n'y a eu à chaque fois qu'un seul entretien de ce type pour chaque sujet, il nous a semblé que l'évocation de l'événement et les associations liées à cet événement ont pu être facilitées, soit par les sons eux-mêmes, soit par le dispositif. En effet, nous avons rarement obtenu une telle richesse d'évocation lors des entretiens que nous menons en service de psychiatrie adulte. Il nous semble donc intéressant de développer nos recherches dans cette direction. 3. Limites de l'étude - validité des conclusions Nous n'avons pu tester dans cette étude, pour des raisons de temps, qu'une seule gamme de fréquences (fréquences alpha). Il faudrait par la suite envisager le même type d'études avec les autres gammes d'ondes cérébrales, afin de vérifier ce qui est spécifique à chaque fréquence d'ondes. Par ailleurs, même s'il a déjà été montré par d'autres études que les sons binauraux induisaient des changements dans les ondes cérébrales, il serait mieux de compléter nos études à venir par des enregistrements EEG. Les effets indésirables parfois ressentis par les sujets ainsi que les effets inverses observés par les mêmes sujets à des moments différents (endormissement ou excitation par exemple) donnent à penser qu'il est fondamental de prendre en compte la ligne de base des ondes cérébrales du sujet, et de choisir les sons binauraux à utiliser en fonction de cette ligne de base et selon les buts que l'on se fixe.
Enfin, nos résultats ont été obtenus sur des sujets sains et volontaires pour cette étude. Déjà, lors de cette étude, nous avons constaté à quel point la motivation était importante pour que les sujets acceptent un entraînement. Plusieurs de nos sujets initiaux ont abandonné l'expérience et, curieusement, ce sont ces mêmes sujets qui auraient été le plus susceptibles de bénéficier de ses effets. Cette question cruciale de la motivation se posera inévitablement lors de l'application à une population clinique. On sait que chez beaucoup de patients existe une résistance au changement et par ailleurs le dispositif tel que nous l'imaginons est basé sur un entraînement à la maison. Comment dans ces conditions s'assurer de la compliance des patients ? VII. PERSPECTIVES ET PROLONGEMENTS Suite à nos résultats préliminaires, nous pouvons envisager de nombreuses perspectives d'application à notre dispositif : En psychologie clinique, l'introduction de sons binauraux serait intéressante à évaluer dans les prises en charge des troubles anxieux, des troubles dépressifs, des traumatismes et de certains troubles de la personnalité. De nombreuses applications sont envisageables également en tant qu'adjuvants dans la prise en charge des comportements addictifs. Les effets physiologiques de l'écoute de ce type de sons (production de béta endorphines, de sérotonine et d'autres neurotransmetteurs et hormones) ouvrent de nombreuses voies de recherche d'applications en gérontologie, en cancérologie et dans tous les domaines de la médecine dans lesquelles le contrôle de la douleur est important à prendre en compte. Les aspects neuropsychologiques des effets des sons binauraux sont également des pistes de recherche sur les applications possibles lors de prise en charge de traumatisés crâniens et de rééducations spécifiques de fonctions cognitives. Bien évidemment, l'une des premières applications sera le trouble du déficit de l'attention avec hyperactivité puisqu'actuellement en France la seule prise en charge proposée est palliative par voie médicamenteuse, avec les conséquences à long terme possible, alors que les prises en charge par des sons binauraux ou par le neurofeedback induisent des changements qui tiennent dans le temps et qui ont été validés par l'imagerie cérébrale. Pour la suite de notre étude, dans le cadre d'une thèse, après avoir développé la discussion sur nos résultats concernant les effets cliniques ainsi que ceux concernant le traitement des émotions, nous envisageons de tenter de valider la prise en charge neuropsychologique d'une fonction cognitive par l'utilisation de sons binauraux, ainsi que la prise en charge d'un trouble rencontré en psychopathologie clinique. De cette manière, nous espérons montrer que ce dispositif a de multiples applications, dans différents domaines, et qu'il peut être un outil de choix pour les psychologues, outil qui peut s'adapter à toutes les orientations des cliniciens. |