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Les frontières entre l'entente et L'abus de position dominante

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par Zakaria Sbaï
Université de Rouen - Master 2 R Droit international et Europeen 2006
  

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Deuxième partie :

Les frontières entre l'entente et l'abus de position dominante

Par rapport Leurs effets anticoncurrentiels :

L'article 81 du Traité CE, dispose qu' « Sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun... », Tandis que l'article 81 du Traité CE stipule à l'alinéa 1 qu' « Est incompatible avec le marché commun et interdit, dans la mesure où le commerce entre États membres est susceptible d'en être affecté, le fait pour une ou plusieurs entreprises d'exploiter de façon abusive une position dominante sur le marché commun ou dans une partie substantielle de celui-ci... ».

L'interdiction des ententes et celle des pratiques abusives dans l'exploitation d'une position dominante ont toutes deux pour objectif de maintenir l'existence d'une concurrence effective dans le marché commun. Elles sont en outre complémentaires, puisqu'à la prohibition de l'article 81 CE relative à la coopération restrictive de concurrence entre entreprises, l'article 82 CE ajoute celle des pratiques unilatérales d'une ou plusieurs entreprises. Cette complémentarité est d'ailleurs renforcée d'une part par le fait que les deux dispositions peuvent être invoquées de concert, parallèlement, dés lors que la situation litigieuse remplit les conditions d'application propres à chacune d'elles. Elle l'est aussi d'autre part dans la mesure où la quasi concordance des exemples prohibés par les deux textes rend inconcevable l'exemption d'une entente lorsqu'elle est susceptible de donner à ses membres la possibilité d'abuser d'une position dominante, voir même seulement de la conquérir ou de la renforcer (27).

(27)-Rapport de la commission sur « l'application des article 81CE et 83CE par les juridictions nationales des Etats membres », p.92

L'ensemble de la problématique est traité dans cette partie en trois temps ; le premier expose le principe relatif d'interdiction des ententes, le second celle d'appréciation de la position dominante, et le troisième examine les rapports entre les articles 81CE et 82CE

I- Le principe relatif d'interdiction des ententes :

Sont incompatibles avec le marché commun et interdits tous accords entre entreprises, toutes décisions d'associations d'entreprises et toutes pratiques concertées, qui sont susceptibles d'affecter le commerce entre États membres et qui ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l'intérieur du marché commun, et notamment ceux qui consistent à:

a)

 

fixer de façon directe ou indirecte les prix d'achat ou de vente ou d'autres conditions de transaction;

b)

 

limiter ou contrôler la production, les débouchés, le développement technique ou les investissements;

c)

 

répartir les marchés ou les sources d'approvisionnement;

d)

 

appliquer, à l'égard de partenaires commerciaux, des conditions inégales à des prestations équivalentes en leur infligeant de ce fait un désavantage dans la concurrence;

e)

 

subordonner la conclusion de contrats à l'acceptation, par les partenaires, de prestations supplémentaires qui, par leur nature ou selon les usages commerciaux, n'ont pas de lien avec l'objet de ces contrats.

2.   Les accords ou décisions interdits en vertu du présent article sont nuls de plein droit.

3.   Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables:

-

 

à tout accord ou catégorie d'accords entre entreprises,

-

 

à toute décision ou catégorie de décisions d'associations d'entreprises,

et

-

 

à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertées

Qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans:

a)

 

imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs;

b)

 

donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.

Ce texte constitue à l'évidence, un ensemble fort complexe dont la mise en oeuvre s'est révélée délicate. Ainsi que la cour de la justice l'a constaté, « la rédaction de l'article 81 du Traité est caractérisé par la formulation d'une règle d'interdiction, et ses effets (A), tempérée par l'exercice d'un pouvoir de dérogation à cette règle (B) » (28).

A- Entraves concertées à la concurrence :

La concurrence, à laquelle se référent aussi bien l'article 3, point g, que l'article 81 du Traité CE implique que toute entreprises détermine et exécute sa propre stratégie de manière autonome. Il en résulte que toute concertation entre entreprises risque d'apparaître comme une anomalie, alors même que les concurrents ne peuvent jamais totalement s'ignorer. Ces exigences ont été clairement formulées par la cour de justice par un motif qui dépasse les limites de l'espèce, « S'il est loisible à tout producteur de modifier librement ses prix et de le tenir compte à cet effet du comportement actuel ou prévisible de ses concurrents, il est, en revanche, contraire aux règles de concurrence du Traité qu'un producteur coopère avec ses concurrent, de quelque manière que ce soit, pour déterminer une ligne d'action coordonnée relative à une hausse de prix, et pour en assurer la réussite par l'élimination préalable de toute incertitude quant au comportement réciproque relatif aux éléments essentiels de cette action, tels que taux, objet, date et lieu des hausses » (29). Il convient donc de déterminer, d'abord, quelles entraves à la concurrence sont interdites par l'article 81, paragraphe1 (1), puis les évaluées (2).

(28)-CJCE, 9 juill.1969, Portelange, Rec. CJCE, p.309

(29)-CJCE, 14 juill.1972, Matières colorantes, Rec. CJCE, p.851

1- Détermination de l'entrave :

Dans la mesure où les agissements anticoncurrentiels font encourir des sanctions à leurs auteurs, ceux-ci ne cherchent pas délibérément à les mettre en valeur. Aussi convient-il d'abord d'identifier les éventuelles restrictions contractuelles de concurrence (a), puis de déterminer leur localisation exacte (b).

a- Identification de l'entrave :

L'article 81, paragraphe1, du Traité vise uniquement les accords, décisions d'association d'entreprises ou pratiques concertées qui « ont pour objet ou pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser la concurrence ». En vue de unifier les interprétations dues à la diversité des versions linguistiques du Traité, la cour de justice adopte une interprétation unique depuis son arrêt du 17 juillet 1997, Ferrière Nord (30). Cette condition, énoncée par l'article précité, est de caractère alternatif. Il importe donc de considérer successivement les notions d'objet puis d'effet restrictif (á), puis de présenter les différents types d'entraves visées par ce texte (â).

á - objet et effet anticoncurrentiel :

L'objet d'un accord, au sens de l'article 81 du Traité, se détermine à partir des termes adoptés par les cocontractants et leur éventuelle interprétation ainsi que les conséquences vraisemblables de leur application. L'objet résulte souvent de la combinaison de plusieurs clauses d'un même contrat. Ainsi, « par sa nature même, une clause d'interdiction d'exportation constitue une restriction de concurrence qu'elle soit adoptée à l'initiative du fournisseur ou du client, l'objectif sur lequel sont tombés d'accord les contractants est d'isoler une partie du marché » (31).

(30)-CJCE, 17 juill.1995, Ferrière Nord, Rec. CJCE, p.4411

(31)-TPICE, 14 juill1994, Parker, II, p. 549

Concernant la fixation directe des prix ou des condition de vente, il s'agit de toutes les restrictions apportées à l'autonomie dont dispose l'entreprise pour fixer elle-même ses prix et ses conditions de vente. Tel est le cas d'un système de réunions périodiques et la collusion permanente des producteurs qui tend à réguler les tonnages vendus et à faire monter les prix (32). S'agissant de l'effet restrictif du comportement délictueux devra, cependant être évalué lorsqu'il s'agira d'apprécier la gravité de l'infraction en vue de fixer éventuellement le montant de la sanction encourue (33). En revanche, le fait que la clause ou l'accord restrictif par son objet n'ait pas été appliqué, ou ne l'ait pas été que partiellement, ne fait pas disparaître l'infraction de l'article 81 TCE (34), l'effet restrictif de concurrence d'une clause ou d'un accord se produit dans un contexte économique et juridique donné. La restriction peut résulter d'une simple clause ou de la conjonction de diverses clauses. L'échange des informations entre entreprises sur un marché dont l'offre présent un caractère atomisé ne constitue pas en principe une entrave interdite par l'article 81, alors que la même pratique commise dans un marché oligopolistique est vraisemblablement délictueuse (35).

â - Différents types d'ententes :

La distinction classique est établie entre les accords verticaux et les accords horizontaux. Son utilité est certaine car leurs effets sont bien différents, si les premiers sont souvent tenus pour plus dangereux que les seconds, tous sont susceptible de tomber dans le champ d'application de l'article 81, paragraphe1. De plus, les accords verticaux peuvent provoquer à la fois des entraves verticales et des entraves horizontales. Tel est le cas du système de distribution, établi par un producteur de balles de tennis qui instaure une protection territoriale absolue (36).

(32)-Comm. 27 juill.1994, JOCE, n° L239/4

(33)-CJCE, 39 janv. 1985, BNIC, Rec. CJCE, p.391

(34)-Comm. 30 Oct.1996, Compagnies de Ferries, JOCE, n° L26/24

(35)-TPICE, 27 Oct. 1994, Fiatagri, att. n° 132

(36)-Comm. 21 Déc. 1994, Tretorn, JOCE, n° 378/45

L'examen d'une coalition au titre de l'article 81, paragraphe1, exige que les diverses entraves à la concurrence soient rigoureusement distinguées les unes des autres, l'entente produit une restriction horizontale lorsqu'elle limite l'initiative économique entre ses membres qui sont situés au même stade du processus économique (37), tandis que l'entente verticale réduit des coalisé qui exercent leur activités à différents échelons du marché (38).

S'agissant les entraves internes et les entraves externes, la coopération produit une entrave interne qui se manifeste par une réduction de la compétition entre les ententes qui y participent , l'entente peut laisser subsister une concurrence potentielle entre ses membres qui ne peut être impunément restreinte (39).

b- Localisation de l'entrave :

Par une communication du 9 décembre 1997, la commission vient de présenter la synthèse de la jurisprudence et la pratique administrative relative à la définition du marché en cause

Il s'agit « d'identifier et de définir le périmètre à l'intérieur duquel s'exerce la concurrence entre entreprises » (40).le marché de référence résulte d'une segmentation de caractère économique, géographique et parfois juridique.

á - Délimitation économique du marché en cause :

Selon la communication, précitée, du 9 décembre 1997 le marché « comprend tous les produits et services que le consommateur considère comme interchangeable ou substituable en raison de leurs caractéristiques, de leur prix et de l'usage auquel ils sont destinés », la délimitation économique du marché s'effectue essentiellement en fonction de la substituabilité de la demande. Il s'agit de déterminer l'éventail des produits ou services considérés comme substituable par le consommateur.

(37)-Comm. 27 juill. 1994 : JOCE, n° L 239/23

(38)-Comm. 24juill. 1992, Givenchy, JOCE, n° L 236/11

(39)-Comm. 13 juill. 1983, Rochwell-Iveco, n° 13, JOCE, n° L 224

(40)-JOCE, 9 Déc. 1997, n° C- 372/5

Le degré de l'interchangeabilité ne présente qu'un caractère relatif : il peut en effet s'accroître ou diminuer au point de disparaître lorsque le prix des produits ou des services se modifie (41), La substituabilité de l'offre peut aussi constituer un critère de délimitation du marché de référence, « lorsque les fournisseurs réorienter leur production vers les produits en cause et les commercialiser à court terme sans encourir aucun coût ni risque supplémentaire » (42).

Pour les produits et services qui rentrent dans le champ d'application du Traité CE, les éventuelles exceptions au principe de la concurrence non faussée doivent être formulées explicitement. La cour de justice a ainsi précisé que « lorsque le Traité a entendu soustraire certaines activités à l'application des règles, de concurrence, il a prévu une dérogation expresse à cet effet » (43).

â - Délimitation géographique du marché en cause :

Cet marché, d'après la communication du 9 décembre 1997, « comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l'offre de biens ou de services en cause, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui peut être distingué des zones géographiques voisines parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable »

L'intérêt de la segmentation géographique porte essentiellement sur la répartition des parts de marché détenues par les membres de l'entente et par leurs concurrents ainsi que le niveau des prix.Le marché géographique de référence peut se limiter à un ou plusieurs marchés nationaux lorsque leur originalité respective exige de les considérer de façon distincte (44), le marché de référence peut également correspondre à l'ensemble du territoire communautaire. Exceptionnellement, la commission élude la délimitation précise du marché géographique (45).

(41)-CJCE, 21 juill. 1981, Hasselblad, Rec.CJCE, p. 883

(42)-Communi. 9 Déc. 1997. précitée

(43)-CJCE, 27 Janv. 1987, Assuranco.Incendio, Rec. CJCE, p. 405

(44)-Comm. 5 juin 1996, Fenex : JOCE, 20 juill. 1996, n° L 181/28

(45)-Comm. 18 déc. 1996, Iridium : JOCE, 18 janv. 1997, n° L 16/87

è - Délimitation juridique :

La législation nationale de chaque Etat membre peut constituer une contrainte plus ou moins importante sur certains marchés (46), sachant que la réglementation communautaire et son évolution actuelle et prévisible contribue à délimiter certains marchés. En revanche l'utilisation de certains contrats peut également modifier les conditions de concurrence sur un marché donné.

2- Evaluation de l'entrave :

L'évaluation de l'entrave apportée à la concurrence par la coopération litigieuse s'effectue en fonction de certain nombre de critères (a), qui doivent être examinés par référence au marché en cause (b).

a- Critères d'évaluation de l'entrave à la concurrence :

La cour de justice a ainsi présenté les critères à partir desquels s'apprécie la nocivité d'une coopération entre ententes « Pour apprécier (...) si un accord doit être considéré comme interdit en raison des altération du jeu de la concurrence qui en sont l'objet ou l'effet, il y a lieu d'examiner le jeu de la concurrence dans le cadre réel où il se produirait à défaut de l'accord litigieux. A cet effet, il y a lieu de prendre en considération notamment la nature et la quantité limitée ou non de produits faisant l'objet de l'accord, la position et l'importance des parties sur le marché des produits concernés, la caractère isolé de l'accord litigieux ou, au contraire, la place de celui-ci dans un ensemble d'accord » (47).

L'évaluation de la coopération s'effectue donc par référence au marché en cause, dont les caractéristiques serviront de critères objectifs d'appréciation.

(46)-CJCE, 29 Oct. 1980, Fedetab, JOCE, n° L209/78

(47)- CJCE, 11 Déc. 1981, L'Oréal, Rec. CJCE, n° 19

b- Caractéristiques essentielles sur marché de référence :

La forme du marché constitue le premier élément auquel se réfère la commission. Il n'est pas inutile, en effet, de déterminer si le marché se présente sous la forme d'un oligopole plus ou moins étroit (48), l'importance des investissements, le degré de l'intégration verticale, la diversification des implantations géographiques constituent d'autres indices.

Les parts du marché détenues par les membres de l'entente et par leurs concurrents sur le marché de référence seront également pris en considération. En revanche, le stade de l'évolution du marché constitue une autre caractéristique essentielle. Il est en effet important de déterminer s'il s'agit d'un marché nouveau dont l'entrée exige des investissements importants qui peuvent se justifier par des perspectives substantielles de développement ou sur un marché déjà constitué en cours d'expansion (49).

II- L'exception au principe d'interdiction de l'entente :

Après avoir déclaré nulle de plein droit, par le paragraphe2, la concertation entre ententes visées par le paragraphe1, l'article 81 ajoute dans son paragraphe 3 que :

 Toutefois, les dispositions du paragraphe 1 peuvent être déclarées inapplicables:

-

 

à tout accord ou catégorie d'accords entre entreprises,

-

 

à toute décision ou catégorie de décisions d'associations d'entreprises,

et

-

 

à toute pratique concertée ou catégorie de pratiques concertées

Qui contribuent à améliorer la production ou la distribution des produits ou à promouvoir le progrès technique ou économique, tout en réservant aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, et sans:

(48)-Comm. 18 Mai 1994, Exon c/ Shell : JOCE, n°51

(49)-Comm. 13 juill.1994, Carton : JOCE, n°31

a)

 

imposer aux entreprises intéressées des restrictions qui ne sont pas indispensables pour atteindre ces objectifs;

b)

 

donner à des entreprises la possibilité, pour une partie substantielle des produits en cause, d'éliminer la concurrence.

Pour que l'exemption individuelle d'une entente puisse être prononcée par la commission, deux conditions relatives à son efficacité doivent être réunies. La commission rappelle, en effet, qu'on ne saurait « parler d'une contribution au progrès économique au sens de l'article 81, paragraphe3, du Traité que dans le cas où exceptionnellement, la concurrence ne permet pas d'aboutir au résultat économique le plus favorable » (50), la coopération entre ententes doit produire un avantage suffisant (A), qui sera équitablement réparti (B).

A- Avantage suffisant :

L'entente ne peut être exemptée au titre de l'article81, paragraphe3, du Traité que si elle présente une utilité nette. Les inconvénients qu'elle provoque inévitablement doivent, au moins, être compensés par les avantages qu'elle doit procurer. Tant qu'un écart positif entre les inconvénients provoquer par l'entente et son éventuelle utilité économique n'a pas été établie, l'examen des autres conditions énoncées par l'article 81, paragraphe3, demeure inutile. Il convient donc d'établir, d'abord, que l'amélioration apportée par les membres de l'entente est inaccessible par le jeu de la concurrence tel qu'il se manifeste sur le marché de référence. L'entente examinée doit être susceptible de réaliser un tel avantage (1), et de compenser les inconvénients qu'elle produit (2)

1- Avantages accessibles par l'entente :

En vertu de l'article 81, paragraphe3, pour que l'entente soit exemptée, elle doit permettre d'obtenir des avantages substantiels qui contribuent à un meilleur fonctionnement du marché (a), ou à l'assainissement de celui-ci (b).

(50)-Comm. 15 Déc. 1975, Bayer c/ Gist-Brocades: JOCE, n° L 30/13

a- Meilleur fonctionnement du marché :

L'article 81, paragraphe3, exige de façon explicite que la coopération entre ententes contribue à l'amélioration de la production ou de la distribution des produits, à la promotion du progrès technique ou économique. Des effets, bénéfiques doivent être obtenus, qu'il s'agisse de produits ou de services.

S'agissant le marché des produits, l'entente peut d'abord aboutir à une amélioration de la production par différents moyens, tels qu'une localisation plus opportune de l'outil de production (51), ou une meilleur utilisation des capacités de production (52), ou un accroissement de la productivité par un allongement des séries (53).

Sur le marché des services, la coopération entre ententes peut également permettre d'accéder à des avantages non négligeables. Le meilleur fonctionnement du marché imputable à une entente est lié aux caractéristiques propres de celui-ci. Dans le service régulier des transports maritimes, le prix risque d'être une donnée particulièrement volatile. En conséquence, l'entente peut, sous certaines conditions, apporter une stabilité économique justifiée, si la stabilité des prix permet l'organisation de services «  réguliers, fiables, suffisants t efficaces » (54). Tel n'est pas le cas lorsque la stabilité des prix constitue en réalité une simple garantie protégeant tous les membres de l'entente, y compris les moins efficaces, l'accord peut également porter sur le gel des capacités excédentaires. Encore convient-il que cette entrave soit indispensable pour améliorer la qualité des services offerts aux changeurs et que la rationalisation recherchée conduise à une diminution globale des coûts.

b- Assainissement du marché :

La coopération entre ententes peut également être utilisée en vue de l'assainissement d'un marché en favorisant les restructurations et les diminutions de capacité.

(51)-Comm. 23 Mars 1990, Mooshead Whiterbread: JOCE, n° L376/1

(52)-Comm. 12 Févr. 1984, Carlsberg: JOCE, n°L207/26

(53)-Comm. 5 Déc. 1983, Vw-Man: JOCE, n° L376/11

(54)-Comm. 19 Oct. 1994, TAA: JOCE, n°L376/2

Selon la commission, « Dans une économie de marché, il revient en premier lieu aux entreprises d'apprécier individuellement à quel moment leurs surcapacités deviennent économiquement insupportables et de prendre les mesures nécessaires à leur réduction. Cependant à l'intérieur d'un secteur déterminé en situation de crise, les circonstances économiques ne garantissent pas nécessairement la réduction des capacités excédentaires les moins rentables » (55).

2- Avantages imputés à l'entente :

L'utilité effective de chaque entente doit être fondée sur des données prouvées (a), dont la portée exacte est évaluée par la commission (b).

a- Preuve de l'avantage imputé à l'entente :

Il incombe aux parties à l'ententes de prouver l'existence d'avantages substantiels qui sont « directement et strictement imputables à l'entente » (56). Les avantages invoqués par les coalisés pour justifier l'entente sont nécessairement contrebalancés par des inconvénients qui ont été déjà examinés au titre de l'article 81, paragraphe1, du Traité CE. La preuve de ceux-ci est à la charge de la commission. Ainsi dans la décision Van den Bergh, la commission a admis que « s'il est incontestable que la méthode de distribution actuellement utilisée par HB peut lui offrir certains avantages en termes d'efficacité, à elle ainsi qu'à ses détaillants, il faut souligner que les accords d'exclusivité portent aussi atteinte à l'efficience des autres fournisseurs de glace... » (57), la commission, quant à elle, n'est pas tenue de proposer

D'autres solutions ou d'indiquer ce qu'elle considérerait comme susceptible de justifier l'octroi d'une exemption (58).

(56)-TPICE, 27 Févr. 1992, Vichy, Rec. CJCE, II, p.415

(57)-Comm. 11 Mars 1998, Van Den Bergh Foods: JOCE, n° 15

(58)-TPICE, 21 Févr. 1995, SPO, aff. T-29/96

b- Evaluation de l'avantage imputé à l'entente :

La commission exerce son pouvoir d'appréciation sous le contrôle du tribunal de première instance et de la cour de justice. Selon une jurisprudence constante de la cour, l'octroi ou le refus d'une exemption individuelle au titre de l'article 81, paragraphe3, « comporte nécessairement des appréciations complexes en matière économique qui incombent, à titre exclusif, à la commission (59). Il s'agit, dans chaque espèce, de vérifier si les inconvénients produits par l'entente sont contrebalancés par les avantages qui lui sont imputables. L'ampleur de ces derniers sera d'autant plus considérable qu'ils contribueront à réaliser les objectifs déterminés par la commission, parmi lesquels figure la mise en oeuvre de la politique de concurrence. Ainsi, à propos d'une entente dans le secteur bancaire, la commission a admis que « la coopération répondra (...) à l'objectif de la commission de faire en sorte que les services offerts par le systèmes de paiement transfrontaliers soient améliorés » (60).

B- Avantage réparti :

L'article 81, paragraphe1, précise que l'exemption individuelle ne peut être accordée par la commission que si l'entente est effectivement utile, «  tout en réservant aux utilisateurs une part équitable du profit qui en résulte ». La cour de justice a immédiatement précisée, au sujet de l'efficacité de l'entente, « que cette amélioration ne saurait être identifiée a tous les avantages que les partenaires retirent de l'accord quant à leur activité de production ou de distribution » (61).

Il importe, en effet, de ne pas confondre «le souci des intérêts spécifiques des partenaires avec les améliorations objectives visées par le Traité ». La commission a pour mission « d'apprécier aussi objectivement que possible le projet qui lui est soumis, en faisant abstraction de toute appréciation de l'opportunité de ce projet, par référence à d'autres choix techniques possibles ou économiquement variables » (62).

(59)-CJCE, 28 Févr. 1991, Delimitis: Rec. CJCE, I, p.977

(60)-Comm. 24 juin 1996, BNP c/ Dresdner Bank, n°18: JOCE, n° L188/37

(61)-CJCE, 13 juill. 1966, Grunding: Rec. CJCE, n°10

(62)-TPICE, 15 juill. 1994, Matra Hachette SA : JOCE, n°15

III- L'appréciation de situation de domination :

L'infraction contenue à l'article 82 du Traité CE est révélatrice de la volonté de ses rédacteurs de tenir compte des rigidités qui tiennent à structure des marchés. Ce n'est en effet pas la seule la situation de domination qui est interdit. La constatation de l'existence d'une position dominante n'implique en soi aucun reproche à l'égard de l'entreprise concernée. La domination est en elle-même licite, au regard de l'article 82, même si elle ne laisse subsister qu'une concurrence affaiblie ou résiduelle (63).

L'article 82 sanctionne uniquement l'exploitation « abusive » de la position dominante, par rapport à l'interdiction des ententes, celle qui vise les positions dominantes suppose des appréciations plus « factuelle » et plus « économique ». La notion de « domination » sur un « marché », se prêtent à l'évidence à des discutions des lesquelles le raisonnement purement juridique passe quelquefois au second plan.

S'agissant, les rapports entre les articles 81 et 82 du Traité CE, on constate qu'il résulte de cette dualité, une dualité d'infraction. Une pratique d'entreprises qui a bénéficié d'une exemption individuelle ou catégorielle peut fort bien être poursuivie et condamnée sur le fondement de l'article 82 TCE. A l'inverse, et même si cet article vise des comportements unilatéraux, il peut arriver qu'une entreprise dominante induise aussi une entente restrictive, ou y participe.

En revanche, et contrairement à l'article 81 CE, l'article 82CE ne prévoit aucune exemption individuelle ou catégorielle. L'architecteur du texte est ici plus simple. Il est vrai que la notion même d' « abus » est antinomique à toute idée de contribution au progrès économique. Cela étant, le principe d'appréciation in concreto, que l'on trouve ici aussi, permet de considérer dans certains cas que ne sont pas abusifs des comportements qui répondraient à certains objectifs légitimes, alors qu'ils le sauraient dans un autre contexte (64). Il convient donc dans un premier temps de déterminer les critères de la position dominante (A), puis on procédera à une analyse de marché de référence (B).

(63)-Christian Gavalda, Gilbert Parleani, Droit des affaires de U.E, Litec, p.317

(64)- Christian Gavalda, Gilbert Parleani, Droit des affaires de U.E, Litec, p.318

A- Critères de la position dominante :

L'indépendance de comportement, caractéristique fondamentale de la position dominante ; procède d'une situation de force de l'entreprise, cette situation dérivant elle-même de la conjonction ou de la réunion de différents facteurs qui chacun pris isolément, ne sauraient pas nécessairement déterminants. C'est de leur combinaison que l'on peut inférer la position dominante de l'entreprise sur un certain marché. La position dominante suppose que l'entreprise concernée se trouve dans une situation de puissance économique, ce qui revient à dire qu'elle bénéficie d'un pouvoir de marché tel qu'il lui permet de faire obstacle au maintien d'une concurrence effective sur le marché en cause et de rester indifférent aux réactions des autres agents économiques.

En revanche, dans des situations dépourvues d'ambiguïté, la part de marché détenu par l'entreprise peut constituer un facteur prépondérant, très souvent retenu, seul, par les autorités de contrôle. Selon la cour de justice, « l'existence de parts de marché d'une grande ampleur est hautement significative » (aff. Hoffmann-La Roche préc.). Ainsi des parts très importantes, aboutissant à une situation de monopole sur un marché, constituent par elles-mêmes, en principe, la preuve de l'existence d'une position dominante.

Les autorités communautaires se satisferont alors de cette seule constatation pour conclure à l'existence d'une position dominante.

B- Délimitation du marché de référence :

La notion de marché n'est pas différente selon qu'on applique l'article 81 ou l'article 82 du TCE. La communication de la commission du 9 décembre 1997 sur la définition du marché e cause aux fins du droit communautaire de la concurrence expose de manière « transparente » la méthode suivie par la commission.

La délimitation du marché est bien entendu une question de fait. La charge de la preuve de l'existence et des limites du marché incombe à la commission lorsqu'elle effectue l'instruction d'un dossier.

Le critère principal est celui de la substituabilité de la demande. Il s'agit de chercher s'il y a des solutions de rechange raisonnable et perceptible par les utilisateurs, en général, une variation légère et durable des prix, afin de rechercher l'éventuel glissement de la demande. La substituabilité n'est donc pas la possibilité théorique pour les consommateurs ou utilisateurs finals de choisir un autre produit qui assurerait en définitive leur satisfaction objective. La substituabilité n'est pas non plus la possibilité non perçue de contourner l'entreprise dominante, et son produit. La substituabilité doit s'apprécier d'abord en considérant les caractéristiques objectives d'un produit ou d'un service, et en considérant ensuite les « besoins constants » exprimés par les utilisateurs : le produit, ou le service, peut-il se distinguer des autres et permettre la satisfaction de ces besoins constants pour lesquels il serait particulièrement apte, ou perçu comme tel ? Cela le rendrait alors peu substituable aux autres, ou peu interchangeable, et il constituerait un marché.

La substituabilité de l'offre n'est retenue pour délimiter le marché pertinent que dans la mesure où les offres concurrentes pourront satisfaire rapidement la demande observée, ou les besoins constants des consommateurs ou des utilisateurs. La substituabilité de l'offre suppose donc ici une situation de concurrence suffisamment directe et effective entre les produits du dominant, et ceux qui sont substituable. La substituabilité de l'offre demeure envisagée par rapport au comportement prévisible de la clientèle considérée.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein